LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir consenti à Mme X... un prêt immobilier, le 6 novembre 2001, et à Mme X... et M. Y... un prêt immobilier et un prêt-relais, le 13 août 2003, le Crédit foncier de France les a assignés en paiement de sommes demeurant dues au titre du prêt-relais ; que les emprunteurs, arguant d'une inexactitude du taux effectif global des différents prêts, ont demandé une substitution du taux légal au taux stipulé ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, ci-après annexé :
Attendu que Mme X... et M. Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande relative à l'irrégularité du taux effectif global du prêt-relais ;
Attendu qu'après avoir relevé que le prêt-relais se présentait sous forme d'une d'ouverture de crédit en compte courant, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que le taux effectif global avait été exactement calculé selon la méthode dite par équivalence, prévue par les articles R. 313-1 III et R. 313-2 du code de la consommation ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en ses première et troisième branches : Vu les articles 1907 du code civil et L. 313-1 du code de la consommation, ce dernier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 ;
Attendu que, pour rejeter la demande des emprunteurs relative aux prêts immobiliers, après avoir constaté que le taux effectif global ne prenait pas en compte le coût des sûretés réelles incluant des taxes diverses et les émoluments de notaire, l'arrêt retient que ces frais, évalués à 1 386 euros pour le prêt du 6 novembre 2001 et 1 299 euros pour le prêt du 13 août 2003, n'étaient pas connus et déterminables avec précision lors de la conclusion du contrat ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que la banque démontrait, comme elle en avait la charge, que le montant desdits frais ne pouvait être connu antérieurement à la conclusion définitive des contrats, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions rejetant les demandes fondées sur l'irrégularité du taux effectif global des prêts immobiliers des 6 novembre 2001 et 13 août 2003, l'arrêt rendu le 10 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne le Crédit foncier de France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Crédit foncier de France à payer à Me Rémy-Corlay la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils pour M. Y... et Mme X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, tenant le dernier décompte produit par la banque, condamné solidairement les époux Y... à verser au CREDIT FONCIER DE FRANCE la somme de 1.476,05 ¿, montant de sa créance arrêtée au 21 février 2013, avec les intérêts au taux conventionnel majoré de 7,05% à compter du 22 février 2013 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « (¿) 2) sur l'irrégularité du TEG de 5,35% relatif au prêt du 6 novembre 2001 : Aux termes de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier : "Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels. Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat. En outre, pour les prêts qui font l'objet d'un amortissement échelonné, le taux effectif global doit être calculé en tenant compte des modalités de l'amortissement de la créance. Un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions d'application du présent article" ; que Mme X... fait valoir que le taux de 5,35% n'inclut pas le coût des sûretés réelles qui cependant étaient déterminables à la date d'octroi du prêt, se fondant sur les conclusions de l'expert qui retient que le taux de 5,35 % est le résultat de l'application de la méthode dite proportionnelle sans prise en compte du coût des sûretés réelles ; qu'il ressort toutefois que l'article L. 313-4 du code monétaire et financier que les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ne sont pas comprises dans le TEG lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat ; qu'en l'espèce, l'acte précise que le coût prévisionnel total du prêt ne comprend pas le coût des sûretés réelles qui le conditionnent, évaluées à 1386 ¿ (émoluments du notaire, taxes diverses.....) ; que ces dernières charges ne pouvaient, en effet, être connues avec précision lors de la conclusion du prêt de sorte que c'est à bon droit que la banque ne les a pas incorporés dans le TEG, tout en informant l'emprunteuse de ce que ces frais, non inclus dans le TEG, s'établissaient à une somme approximative de 1386 ¿ ; que le TEG ainsi calculé sur des éléments connus ou précisément déterminables comme l'exige les textes correspond bien à celui assortissant le contrat ; qu'en outre, Mme X... n'a pas été trompée par la présentation qui lui a été faite des conditions et charges relatives au prêt dont il lui a été donné une estimation hors TEG de sorte que le moyen tiré de la nullité de la stipulation d'intérêts sera pour ces raisons rejeté ; 3) sur l'irrégularité du TEG de 4,13% relatif au prêt relais du 13 août 2003 : que les époux Y... font grief au TEG d'être erroné pour être basé sur une méthode inadéquate, dite par équivalent, et pour ne pas inclure les frais d'assurance décès invalidité ; que le taux de 4,13% correspond, en effet à dire d'expert, à un taux obtenu selon la méthode par équivalent et sans prise en compte de l'assurance décès invalidité, celle-ci étant laissée au choix de l'emprunteur ; que l'article R. 313-1 III et l'article R. 313-2 du code monétaire et financier retient l'application de la méthode dite par équivalence aux ouverture de crédit en compte courant tel que se présente le prêt relais dont il est question ; qu'il n'y a donc pas lieu d'annuler la stipulation conventionnelle d'intérêt dès lors que le TEG mentionné dans l'acte a été calculé conformément aux prescriptions de ces articles ; que l'inclusion des primes d'assurance dans le calcul du TEG est imposée dès lors que la souscription de l'assurance conditionne son octroi, celle-ci devenant ainsi partie intégrante du prêt et participant à son coût global ; que la circonstance selon laquelle la banque n'a pas exigé la souscription préalable d'une assurance décès invalidité lors de la conclusion du contrat de prêt fait que c'est à bon droit qu'elle ne l'a pas retenu dans le calcul du TEG ; que le moyen tiré de la nullité de la stipulation d'intérêt sera rejeté ; 4) sur l'irrégularité du TEG de 4,05% du prêt long terme du 13 août 2003 : que le taux retenu résulte de l'application de la méthode proportionnelle sans inclusion du coût des sûretés réelles ni du coût de l'assurance décès invalidité ; que les époux Y... le contestent sur ces deux derniers points ; que les développements sur le caractère facultatif de l'assurance souscrite pour le prêt long terme du 6 novembre 2001 sont transposables au prêt long terme du 13 août 2003 ; que le coût de cette assurance facultative dont la souscription ne conditionne pas l'octroi du prêt n'a pas à être incluse dans te calcul du TEG ; que s'agissant des frais de sûreté réelle (émoluments du notaire, taxes diverses¿.), ceux-ci n'étaient pas précisément déterminables au moment de la conclusion du contrat et la banque les a exclus du TEG qui n'en rend pas compte, délivrant cette information aux époux Y... ; que dans ces conditions et faute de pouvoir en faire un chiffrage exact ab initio, la banque a pu ne pas en tenir compte dans le calcul du TEG, précisant cependant dans son offre que ces frais pouvaient être estimés à la somme de 1299 ¿ ; que me moyen de nullité sera rejeté »
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « (¿) le calcul du taux effectif global effectué par les demandeurs est erroné puisqu'ils rajoutent au taux de 4,05% la cotisation d'assurance de chacun des acquéreurs, et arrivent à un montant plus élevé que celui noté dans l'offre de prêt acceptée par les défendeurs, en oubliant que Madame Cordélia X... est assurée à 60% et Monsieur Gérard Y... à 40%, et que le taux effectif global inclut le taux nominal et les frais accompagnant le crédit, c'est-à-dire les frais de dossier, rémunérations diverses et coût de l'assurance et les frais liés à la mise en place du contrat ; que les demandeurs étant défaillants à justifier et démontrer une erreur commise par LE CREDIT FONCIER DE FRANCE seront déboutés de leur demande d'annulation, ce taux étant explicité dans le, contrat de prêt ; qu'en conséquence ils seront déboutés de leur demande, concernant les 3 prêts souscrits soit ensemble, soit par Madame X... seule, de substitution d'un intérêt au taux légal, d'une demande de production d'un nouveau décompte par le CREDIT FONCIER DE FRANCE et d'une compensation avec les sommes déjà versées »
ALORS QUE 1°) l'établissement financier doit inclure dans le calcul du taux effectif global applicable au prêt le coût des sûretés réelles et les frais de notaire déterminables au moment de la conclusion de l'acte ; que des tels coûts et frais, dont la prise en charge par l'emprunteur conditionne l'octroi du prêt, sont nécessairement déterminables au moment de la régularisation de l'acte de prêt ; qu'en l'espèce le prêt à long terme du 6 novembre 2001 souscrit par Madame X... pour l'acquisition du bien sis à Six-Fours Les Plages mentionnait un TEG de 5,35% et précisait que « le coût prévisionnel total du prêt ne comprend pas le coût des sûretés réelles qui le conditionnent, évalués à 1386 ¿ (émoluments du notaire, taxes diverses¿) » (v. arrêt d'appel, p. 6, alinéa 3) ; que tout au contraire ces coûts, afférents à des garanties réelles et à des frais venant conditionner l'octroi du prêt, devaient être inclus dans le calcul du TEG en ce qu'ils présentaient un caractère nécessairement déterminable au moment de la conclusion de l'acte de prêt ; que l'expert judiciaire avait conclu sur ce point (v. extrait cit. p. 11 des conclusions d'appel) « (¿) Au regard de la mission qui m'a été confiée, ce TEG présenté dans l'offre de prêt à hauteur de 5,35% est erroné puisqu'il ne prend pas en compte le coût des sûretés réelles. En prenant en compte le coût des sûretés réelles, le TEG du prêt long terme 7453256 T ressort à 5,50% selon la méthode proportionnelle » ; qu'en considérant que le CREDIT FONCIER DE FRANCE avait stipulé un TEG régulier dans le contrat de prêt à long terme du 6 novembre 2001, la Cour d'appel a violé l'article L. 313-1 du Code de la consommation ;
ALORS QUE 2°) la méthode de calcul du TEG applicable aux prêts immobiliers, tel un prêt-relais, est celle de la méthode de calcul dite « proportionnelle » ; qu'en statuant en sens contraire en considérant que, pour le prêt-relais du 13 août 2013, la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE avait valablement fait application de la méthode de calcul dite « par équivalence » dont relèvent les ouvertures de crédit en compte courant, la Cour d'appel a violé les articles L. 311-3 et R. 313-1 du Code de la consommation ;
ALORS QUE 3°) l'établissement financier doit inclure dans le calcul du taux effectif global applicable au prêt le coût des sûretés réelles et les frais de notaire déterminables au moment de la conclusion de l'acte ; que des tels coûts et frais, dont la prise en charge par l'emprunteur conditionne l'octroi du prêt, sont nécessairement déterminables au moment de la régularisation de l'acte de prêt ; qu'en l'espèce le prêt à long terme du 13 août 2003 souscrit par Madame X... et Monsieur Y... pour l'acquisition du bien sis à LA SEYNE SUR MER mentionnait un TEG de 4,05% qui excluait les coûts des sûretés réelles qui le conditionnaient, coûts seulement estimés à hauteur de la somme de 1.299 ¿ (v. arrêt d'appel, p. 6, deux derniers alinéa) ; que tout au contraire ces coûts, afférents à des garanties réelles et à des frais venant conditionner l'octroi du prêt, devaient être inclus dans le calcul du TEG en ce qu'ils présentaient un caractère nécessairement déterminable au moment de la conclusion de l'acte de prêt ; que l'expert judiciaire avait conclu sur ce point (v. extrait cit. p. 18 des conclusions d'appel) « (¿) Au regard de la mission qui m'a été confiée, ce TEG présenté dans l'offre de prêt à hauteur de 4,05% est erroné puisqu'il ne prend pas en compte (¿) le coût des sûretés réelles (¿) » ; qu'en considérant que le CREDIT FONCIER DE FRANCE avait stipulé un TEG régulier dans le contrat de prêt à long terme du 13 août 2003, la Cour d'appel a violé l'article L. 313-1 du Code de la consommation.