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16/09/2015 | FRANCE | N°14-19575

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 septembre 2015, 14-19575


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 février 2014), que Mme X... ayant réalisé des travaux de construction d'un garage et d'une piscine dans une propriété située dans un lotissement, a, à la demande de Mmes Y...et A..., propriétaires de lots mitoyens, se plaignant de la non-conformité des travaux au cahier des charges, été condamnée par un jugement du 21 décembre 2009, devenu irrévocable, à démolir sous astreinte une partie du mur de soutènement séparant sa propriété de cell

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 février 2014), que Mme X... ayant réalisé des travaux de construction d'un garage et d'une piscine dans une propriété située dans un lotissement, a, à la demande de Mmes Y...et A..., propriétaires de lots mitoyens, se plaignant de la non-conformité des travaux au cahier des charges, été condamnée par un jugement du 21 décembre 2009, devenu irrévocable, à démolir sous astreinte une partie du mur de soutènement séparant sa propriété de celle de Mme Y... et à reculer sous astreinte toute surélévation du sol de sa propriété, par rapport à celles de Mmes Y...et A...; que Mme A..., estimant que Mme X... n'avait pas réalisé les travaux ordonnés par le tribunal, a assigné celle-ci devant le juge de l'exécution en liquidation des deux astreintes ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant souverainement retenu, sans violer l'autorité de la chose jugée, que l'astreinte assortissant l'injonction faite de démolir la partie du mur de soutènement dépassant le muret surmonté d'un grillage séparant la propriété de Mme X... de celle de Mme Y... n'a été prononcée qu'au bénéfice de celle-ci, la cour d'appel en a exactement déduit que Mme A...ne pouvait en demander la liquidation ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel de Mme X..., ci-après annexé :

Attendu que le moyen unique du pourvoi principal étant rejeté, le moyen unique du pourvoi incident éventuel est devenu sans objet ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme A...aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme A...à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de Mme A...;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme A..., demanderesse au pourvoi principal

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris du 17 janvier 2012 en ce qu'il avait liquidé à la somme de 300 ¿ l'astreinte assortissant la première injonction de faire adressée à Mme X... par le jugement rendu le 21 décembre 2009 par le tribunal de grande instance de Toulon quant à la démolition de la partie du mur de soutènement et, statuant à nouveau, d'avoir refusé de faire droit à la liquidation de l'astreinte relativement à cette injonction ;

AUX MOTIFS QUE, homologuant le rapport d'expertise dressé par M. Z...le 10 septembre 2003, le tribunal de grande instance de Toulon a, par jugement du 21 décembre 2009, condamné Mme X... : 1°) « à démolir la partie du mur de soutènement dépassant le muret surmonté d'un grillage qui séparait sa propriété de celle de Mme Y... dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la décision, sous astreinte passé ce délai de 250 ¿ par mois de retard » ; 2°) « à reculer toute surélévation du sol naturel de sa propriété par rapport à celles de Mmes Y...et A...résultant des travaux entrepris depuis 1994 à la distance de 19 décimètres dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la décision, sous astreinte passé ce délai de 250 ¿ par mois de retard » ; qu'eu égard à la signification du jugement portant obligation de faire par acte d'huissier de justice du 4 février 2010, délivré à son égard en vertu des articles 656 et suivants du code de procédure civile, Mme X... était tenue de s'exécuter au plus tard le 4 août 2010, date d'expiration du délai de six mois imparti pour ce faire ; qu'en l'espèce, la question de l'exécution des injonctions, dont la charge de la preuve pèse sur Mme X..., concerne seulement la seconde injonction de faire instituée au profit de Mme A...du chef de la surélévation du sol naturel de la propriété de Mme X..., puisque la première obligation imposant à celle-ci de « démolir la partie du mur de soutènement dépassant le muret surmonté d'un grillage qui séparait sa propriété de celle de Mme Y... », se rapporte uniquement à cette dernière, non partie dans le cadre du présent litige ; qu'en effet, le titre exécutoire du 21 décembre 2009 a explicitement circonscrit, à l'examen conjugué des motifs et dispositif, la portée de cette première injonction au fonds Y..., significative de son exclusion au profit de Mme A..., déboutée en conséquence de sa demande de liquidation de l'astreinte assortissant ladite injonction à hauteur de la somme sollicitée de 6. 500 ¿ ; que la décision dont appel du 17 janvier 2012, rendue par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Toulon en exécution du jugement du 21 décembre 2009, qui a liquidé l'astreinte assortissant la première injonction à la somme de 300 ¿ à la charge de Mme X... au profit de Mme A..., aux motifs que les « travaux au niveau de la limite séparative Y... n'ont pas été réalisés dans les délais fixés par le tribunal dans la mesure où subsiste une partie de l'ouvrage maçonné en surélévation du mur à l'extrémité de la ligne séparative Y... », est ainsi infirmée de ce chef ; que, de plus, le titre exécutoire n'a procédé au rappel des dispositions de l'article 678 du code civil, s'appliquant « aussi bien aux terrasses, plates-formes, et autres exhaussements de terrain d'où l'on peut exercer une servitude de vue sur le fonds voisin » quant au point précis de la surélévation du fonds de Mme X..., qu'à l'occasion de la seconde injonction relative, contrairement à la première injonction, communément à Mesdames Y...et A...;

ALORS, D'UNE PART, QUE tout coloti peut obtenir la mise en conformité d'une construction enfreignant un cahier des charges, sans avoir à prouver l'existence d'un préjudice personnel, les clauses du cahier des charges d'un lotissement engageant les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues ; qu'en estimant que Mme A...n'était pas recevable à solliciter la liquidation de l'astreinte au titre de la démolition d'une partie du muret imposée à Mme X... par le jugement du tribunal de grande instance de Toulon du 21 décembre 2009, au motif que l'obligation faite à Mme X..., « imposant à celle-ci de " démolir la partie du mur de soutènement dépassant le muret surmonté d'un grillage qui séparait sa propriété de celle de Mme Y... ", se rapporte uniquement à cette dernière, non partie dans le cadre du présent litige » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 5), cependant que la condamnation à démolir prononcée par le jugement du 21 décembre 2009 était fondée sur une violation par Mme X... d'une clause du cahier des charges (cf. jugement du 21 décembre 2009, p. 5, alinéa 1er), de sorte que Mme A..., colotie, partie à ce jugement, était recevable par principe à agir en vue d'obtenir la mise en conformité au cahier des charges du lotissement des constructions de Mme X..., et était donc recevable à solliciter la liquidation de l'astreinte, indépendamment de tout préjudice personnel, la cour d'appel a méconnu la chose jugée par le tribunal de grande instance de Toulon dans son jugement du 21 décembre 2009 et a violé l'article 1351 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en estimant que Mme A..., bien que colotie, n'était pas recevable à agir en vue de la liquidation de l'astreinte prononcée au titre de la démolition d'un ouvrage édifié en méconnaissance d'une clause du cahier des charges du lotissement, la cour d'appel a méconnu la nature juridique d'un tel document et violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;

ET ALORS, ENFIN, QU'en toute hypothèse, le juge de l'exécution, chargé de la liquidation de l'astreinte, n'a pas compétence pour remettre en cause sur le fond la décision assortissant d'une astreinte la condamnation prononcée au profit d'une partie au litige ; qu'en estimant que Mme A...n'était pas en mesure de solliciter la liquidation de l'astreinte au titre de la démolition d'une partie du muret imposée à Mme X... par le tribunal de grande instance de Toulon dans sa décision du 21 décembre 2009, au motif que le muret litigieux n'étant pas mitoyen avec le fonds de Mme A..., cependant que le jugement fixant l'astreinte litigieuse avait été rendu également au profit de Mme A...et que le juge de l'exécution n'avait pas compétence pour remettre en cause cette décision, la cour d'appel a méconnu la chose jugée et a violé l'article 1351 du code civil et l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire.
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour Mme X..., demanderesse au pourvoi incident éventuel

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir liquidé l'astreinte assortissant la seconde injonction, adressée à Madame X... par le jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULOUN du 21 décembre 209, de reculer toute surélévation du sol naturel de sa propriété par rapport à celle de Madame A...résultant des travaux entrepris depuis 1994 à la distance de 19 décimètres ;

AUX MOTIFS QU'à l'appui de son affirmation d'une exécution de tous les travaux concernant la limite A...au plus tard le 30 juillet 2010, la débitrice de l'injonction se prévaut d'un procès-verbal de constat dressé les 28 et 30 juillet 2010, qui établirait que sa propriété serait actuellement au niveau du sol naturel, contrairement aux actes déposés par l'appelante ; que l'examen des clichés inclus dans cet acte ne reflète pas une telle affirmation en l'état d'une prise de vue trop éloignée pour apprécier les configurations respectives des propriétés ; que pour autant lors de sa visite des lieux l'expert Z..., selon rapport du 10 septembre 2003, a décrit la villa X...comme :- étant « implantée dans la moitié nord de la parcelle », le reste du terrain ayant été « aménagé en jardin d'agrément complanté d'arbres et d'arbustes d'ornement le long des limites parcellaires » (page 7),- les « transformations qui ont été réalisées sur la propriété de Mme X... consistent en une plate-forme, en surélévation par rapport au niveau du terrain naturel, d'une superficie d'environ 363 m2 » (page 8),- présentant une construction de la terrasse-jardin ou plate-forme surélevée ayant eu pour conséquence de mettre son terrain en surplomb de 0, 90 à 1, 50 m par rapport à celui de Mme A..., et le mur écran de l'ouvrage étant situé à 1, 40 m de la limite parcellaire soit à une distance inférieure de 0, 50 m de celle prescrite par le code civil qui exige un recul minimum de dix-neuf décimètres, 1, 90 m (page 19), et expliqué que la réalisation « de l'ensemble de ces ouvrages a été rendue possible grâce à une modification du sol par surélévation du profil du terrain » caractérisée par la présence « de deux palmiers de belle taille disposés à l'intérieur de l'espace gazonné » (page 9) ; que de telles transformations sur le terrain X... dont l'édification d'une plate-forme étant « en contravention avec les clauses du cahier des charges du lotissement relatives aux clôtures mitoyennes et aux plantations d'arbres de haute futaie », ont conduit l'expert à établir le constat « qu'il y a bien création de vues sur les fonds voisins dans le sens de l'article 678 du code civil, telles que proscrites par le jugement du 21 décembre 2009 portant condamnation à les exclure au moyen de l'injonction en résultant » (page 42) ; que par ailleurs, conformément à ces données objectives, il ressort des procès-verbaux de constat dressés par la SCP B...-C...-D..., huissiers de justice associés à Cuers, les 23 septembre 2010 et 17 janvier 2011 à la requête de Mme A..., l'existence sur le terrain X... « d'une jardinière bâtie d'une hauteur d'environ un mètre dix-un mètre vingt qui prend naissance à l'extrémité pratiquement à l'angle de la maison X...sur une largeur d'environ un mètre et sur une longueur de cinq à six mètres approximativement », à l'intérieur de laquelle « des palmiers ont été plantés de différentes espèces » laissant apparaître une « surélévation de plusieurs centimètres par rapport au niveau du terrain A...» ; que dès lors, eu égard à ces éléments, il incombait à Mme X..., débitrice de l'obligation de faire consistant à « reculer toute surélévation du sol naturel de sa propriété par rapport à celle de Mme A...résultant des travaux entrepris depuis 1994 à la distance de 19 décimètres », d'y procéder s'agissant de sa jardinière manifestement comprise dans ces prescriptions judiciaires, le jugement précité du 21 décembre 2009 relevant de surcroît « contrairement à ce que soutient Mme X... que le permis de construire du 29 novembre 1994 n'a pas été respecté puisque le permis rectificatif du 29 juillet 1997 avait justement pour objet de régulariser les travaux réalisés en méconnaissance d'un précédent permis » ; que l'astreinte assortissant la seconde injonction est en conséquence liquidée faute d'exécution satisfaisante par Mme X..., n'invoquant aucune difficulté ou cause étrangère au sens de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, et ce à hauteur de la somme de 6 500 ¿ que la cour estime raisonnablement évaluée en fonction des circonstances de l'espèce et de la nature du litige, et ce pour la période ayant couru du 5 août 2010 au mois d'octobre 2012 compris (arrêt attaqué pp. 6-7) ;

ALORS, d'une part, QUE seule l'inexécution des injonctions assorties de l'astreinte peut donner lieu à sa liquidation ; que la cour d'appel, invitée à rechercher si les travaux réalisés par Madame X... en exécution de la prescription du jugement du 21 décembre 2009 relative au recul de toute surélévation du sol naturel de sa propriété, résultant des travaux entrepris depuis 1994, par rapport à la propriété de Madame A..., satisfaisaient à l'injonction qui lui avait été adressée, ne pouvait procéder à la liquidation de l'astreinte sans résoudre la question de savoir si ces travaux n'avaient pas abouti à une remise de la propriété de Madame X..., au-delà de la distance de 1 décimètres, au niveau du sol naturel de sa propriété par rapport à celle de Madame A...; que faute de l'avoir fait, la cour d'appel, qui s'est fondée de façon inopérante sur les constatations du rapport d'expertise à partir desquelles le tribunal de grande instance avait considéré que les travaux critiqués entraînaient la création de vues prohibées sur le fonds voisin, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 131-3 et L. 131-4 du Code des procédures civiles d'exécution ;

ALORS, d'autre part, QUE seule l'inexécution des injonctions assortissant l'astreinte peut donner lieu à sa liquidation ; que le juge de l'exécution qui liquide une astreinte ne peut remettre en cause la chose précédemment jugée par le juge dont la décision a été assortie d'une astreinte ; qu'en se bornant à énoncer, pour procéder à la liquidation de l'astreinte, que la jardinière bâtie sur la propriété de Madame X... était manifestement comprise dans les prescriptions du jugement du 21 décembre 2009 concernant le recul de toute surélévation du sol naturel de sa propriété par rapport à celle de Madame A...résultant des travaux entrepris depuis 1994 à la distance de 19 décimètres sans rechercher, comme elle y était invitée, si les dimensions de la jardinière au vu des procès-verbaux de constat produits aux débats n'excluaient pas cet ouvrage de ceux visés par les dispositions de l'article 678 du Code civil au respect desquelles tendaient les prescriptions du jugement du 21 décembre 2009 assorti de l'astreinte, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 131-3, L. 131-4 du Code des procédures civiles d'exécution et L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-19575
Date de la décision : 16/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 sep. 2015, pourvoi n°14-19575


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Balat, Me Bertrand

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.19575
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