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15/09/2015 | FRANCE | N°14-19497

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 septembre 2015, 14-19497


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 février 2014), que M. X... est titulaire de la marque française semi-figurative VII, chiffre romain entouré d'un cercle (VII), déposée le 14 décembre 2004 à l'Institut national de la propriété industrielle sous le n° 04 3 330 867, publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle le 28 janvier 2005 pour désigner en classes 3, 5 et 14, notamment les parfums, lesquels sont commercialisés sous la dénomination « Parfum VII Bonhe

ur Triomphant » par la société Editions du chariot ; que reprochant à la soc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 février 2014), que M. X... est titulaire de la marque française semi-figurative VII, chiffre romain entouré d'un cercle (VII), déposée le 14 décembre 2004 à l'Institut national de la propriété industrielle sous le n° 04 3 330 867, publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle le 28 janvier 2005 pour désigner en classes 3, 5 et 14, notamment les parfums, lesquels sont commercialisés sous la dénomination « Parfum VII Bonheur Triomphant » par la société Editions du chariot ; que reprochant à la société Cartier de vendre un parfum dénommé « VII Heure : l'heure défendue », M. X... l'a assignée en contrefaçon et paiement de dommages-intérêts ; que la société Cartier a formé une demande reconventionnelle en déchéance des droits de ce dernier sur la marque ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le déclarer déchu de ses droits sur la marque, en ce qu'elle désigne les produits de la classe 3, à compter du 28 janvier 2010 et de déclarer irrecevable son action en contrefaçon alors, selon le moyen :
1°/ que des factures, dès lors qu'elles décrivent les produits vendus conformément à la marque enregistrée, établissent l'usage sérieux de ladite marque ; que l'arrêt attaqué a retenu que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 constituaient un simple référencement et non pas la preuve d'une exploitation sérieuse de la marque VII enregistrée par M. X... au prétexte qu'elles n'étaient pas accompagnées de bons de commandes, catalogues, échantillons ou photographies du produit, mode de conditionnement ou de commercialisation ; qu'en statuant ainsi, quand elle relevait que ces factures désignaient les produits vendus sous le libellé « Parfum VII Bonheur triomphant » et qu'elles étaient établies au nom de librairies situées en France, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ces constatations au regard de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle qu'elle a violé ;
2°/ que M. X... soulignait que le parfum VII était commercialisé depuis 2005 via le site internet de la société les Editions du chariot ; qu'en retenant que seules faisaient l'objet des débats les trois factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 par application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que, lorsqu'une partie produit plusieurs éléments de preuve d'un même fait, le juge doit les regrouper afin de rechercher s'ils ne se corroborent pas les uns les autres et ne constituent pas un faisceau d'indices faisant présumer ce que, considérés isolément, ils ne permettraient pas d'établir ; qu'ainsi la capture d'écran du site internet de la société les Editions du chariot, effectuée le 29 mars 2012, devait être rapprochée des factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 afin de vérifier si le site internet et les factures, une fois regroupés, ne se corroboraient pas mutuellement pour constituer un faisceau d'indices faisant présumer l'usage sérieux et continu de la marque enregistrée par M. X..., depuis l'année 2005 et au moins jusqu'en 2012, via le site internet et les points de vente que constituaient les librairies auxquelles les parfums de la marque étaient facturés ; qu'en examinant isolément la capture d'écran d'un côté, jugée non probante en raison de sa date, et les trois factures de l'autre, jugées constitutives d'un simple référencement, pour en déduire qu'il n'y avait pas d'usage sérieux de la marque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 du code civil et L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
4°/ que le caractère sérieux de l'usage de la marque s'apprécie in concreto et peut être établi même en présence de ventes en quantités minimes de produits de la marque ; qu'en se bornant à affirmer que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 constituaient un simple référencement, sans répondre au motif des premiers juges, que M. X... s'était approprié, pris de ce qu'il fallait tenir compte du caractère artisanal de l'exploitation des parfums sous la marque enregistrée par l'exposant de sorte que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 établissaient l'exploitation réelle, sérieuse et continue de ladite marque depuis 2005, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que le titulaire d'une marque qui ne l'exploite pas pendant cinq ans après la publication de son enregistrement n'encourt aucune déchéance s'il en fait un usage sérieux plus de trois mois avant la demande de déchéance ; qu'à supposer même que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 n'eussent pas établi l'exploitation sérieuse de la marque VII de 2005 à 2010, en n'examinant que ces trois factures et non pas celle du 14 septembre 2010 non plus que la capture d'écran du site internet de la société les Editions du chariot quand ces deux derniers éléments, une fois regroupés, étaient susceptibles d'établir l'usage sérieux de la marque plus de trois mois avant la demande de déchéance de la société Cartier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
6°/ qu'en retenant, d'une part, que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 étaient seules en discussion et n'établissaient pas l'exploitation de la marque enregistrée par M. X... mais un simple référencement, et d'autre part, que ladite marque était exploitée sous une forme modifiée que constituaient l'élision du cercle et l'adjonction des mots « bonheur triomphant », la cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
7°/ que des modifications mineures de la marque enregistrée ne lui font pas perdre son caractère distinctif et n'empêchent pas qu'elle soit sérieusement exploitée ; que l'arrêt attaqué a constaté que la marque enregistrée par M. X... était constitué du chiffre romain VII entouré d'un cercle ; qu'en écartant son usage sérieux au prétexte qu'elle était exploitée sous une forme modifiée qui éludait le cercle et ajoutait les mots « bonheur triomphant », sans relever que la taille, la forme, l'aspect d'ensemble des chiffres romains VII qui distinguaient la marque enregistrée auraient fait l'objet de modifications majeures, seules susceptibles d'ôter à la marque son caractère distinctif et de s'opposer à son usage sérieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
8°/ que l'arrêt attaqué a jugé irrecevable l'action en contrefaçon de M. X... contre la société Cartier au motif qu'il était déchu de ses droits sur la marque VII ; que la cassation du chef de la déchéance de ses droits sur la marque emportera, par voie de conséquence, celle du chef déclarant irrecevable son action en contrefaçon, en application de l'article 625 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en appel, ces prétentions ainsi que les moyens sur lesquels elles sont fondées sont formulées dans les conclusions et que la partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; qu'ayant relevé que M. X..., qui avait demandé de déclarer la société Cartier mal fondée en son appel incident, s'était abstenu de débattre des moyens d'appel de cette dernière, se bornant à se référer à ceux soutenus en première instance et au dispositif du jugement, la cour d'appel, qui a exactement retenu que le débat se limitait devant elle aux trois factures soumises aux premiers juges, n'a pas méconnu les termes du litige ;
Attendu, en deuxième lieu, que le titulaire d'une marque enregistrée doit rapporter la preuve de son usage sérieux à titre de marque pendant une période ininterrompue de cinq ans ; que l'arrêt constate que les trois factures produites, émises en 2005, 2007 et 2008, qui ont pour destinataires deux librairies, totalisent la vente de cent huit produits référencés sous la désignation « Parfum VII Bonheur Triomphant » ; qu'il relève encore que ces factures ne sont pas accompagnées de bons de commande, catalogues, échantillons du produit qui pourrait en être griffé ou même de sa photographie et ne se présentent ainsi que comme un simple référencement, aucun document ne venant attester d'une exploitation de la dénomination « Parfum VII Bonheur Triomphant » dans la relation avec la clientèle ; qu'il relève enfin que la marque (VII) soit un chiffre romain cerclé, seule marque sur laquelle M. X... peut revendiquer la titularité de droits, fait l'objet d'une exploitation sous une forme modifiée qui en altère le caractère distinctif dès lors que l'adjonction au chiffre romain VII des mots « Parfum » et « Bonheur Triomphant », et l'élision du cercle, qui caractérise la marque semi-figurative telle que déposée, sont de nature à affecter la perception que l'éventuel public concerné pourrait en avoir; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui ne s'est pas contredite, a pu déduire que la preuve de l'usage sérieux de la marque (VII) entre le 28 janvier 2005 et le 28 janvier 2010 n'était pas rapportée ;
Attendu, en troisième lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni de ses conclusions que M. X... ait soutenu devant la cour d'appel que la facture du 14 septembre 2010 et la capture d'écran du site internet du 29 mars 2012 étaient susceptibles d'établir l'usage sérieux de la marque plus de trois mois avant la demande de déchéance de la société Cartier ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et droit ;
Et attendu, enfin, que le rejet du moyen pris en ses sept premières branches rend sans objet la huitième, qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa cinquième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la société Cartier la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR constaté l'absence de titularité des droits de propriété de Monsieur Guy X... sur la marque « VII » figurant sur le formulaire, sans date ni numéro d'enregistrement, de demande d'enregistrement de l'INPI de Paris ainsi que sur la marque semi-figurative « (VII) » déposée à l'INPI de Chartres le 03 novembre 1970, enregistrée sous le numéro 826 898 pour désigner en classe 3 les produits de parfumerie, d'AVOIR prononcé la déchéance des droits de Monsieur Guy X... sur la marque « (VII) » n° 04 3 330 867 enregistrée le 14 décembre 2004 à de Paris, publiée au BOPI le 28 janvier 2005, en ce qu'elle désigne en classe 3 produits suivants : préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons ; parfums, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour cheveux ; dentifrices ; dépilatoires ; produits de démaquillage ; rouge à lèvres ; masques de beauté ; produits de rasage ; produits pour la conservation du cuir (cirages) ; crèmes pour le cuir, ceci à compter du 28 janvier 2010, d'AVOIR dit que la présente décision serait transmise à Monsieur le Directeur de l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Marques, et d'AVOIR déclaré Monsieur Guy X... irrecevable en son action en contrefaçon de la marque n° 04 3 330 867 dirigée à l'encontre de la société par actions simplifiée Cartier en raison de l'utilisation de la dénomination "L'heure Défendue : VII" sous laquelle cette dernière commercialise un parfum ;
AUX MOTIFS QUE : « sur la déchéance des droits de Monsieur X... sur les signes qu'il revendique, sur les termes du litige, il convient d'abord de se prononcer sur la validité des marques opposées par Monsieur X... dans le cadre de son action en contrefaçon à laquelle la société Cartier a répliqué en arguant de la déchéance des droits de son titulaire ; qu'à juste titre et eu égard aux pièces versées aux débats par l'appelant, puisqu'il s'est abstenu de répondre au moyen de la société Cartier qui forme appel incident sur ce point, cette dernière met en exergue une confusion dans la présentation de la marque revendiquée ; que les pièces versées aux débats par Monsieur X... révèlent, en effet : - qu'une marque "VII" dont il est précisé qu'elle est en couleur figure sur un document intitulé "demande d'enregistrement d'une marque (loi du 31 décembre 1964)" à l'INPI de Paris pour les "produits de parfumerie" en classe 3, étant relevé que la pièce n°1 produite ne laisse apparaître ni date ni numéro d'enregistrement, - qu'une marque semi-figurative "(VII)" le chiffre romain étant entouré d'un cercle, contrairement au signe figuré en pièce n° 1 , sans mention de couleur, a été déposée à l'INPI de Chartres le 3 novembre 1970, enregistrée sous le numéro 826 898 pour désigner en classe 3 les produits de parfumerie ; que le document produit semble rattaché à la pièce n° 1 dans le bordereau de communication de pièces de l'appelant bien que la pièce en question ne comporte aucun numéro inscrit dans le cachet de l'avocat qui y est apposé, - qu'une marque semi-figurative "(VII)" même chiffre romain cerclé que précédemment n° 04 3 330 867 a été enregistrée le 14 décembre 2004 à l'INPI de Paris pour désigner des produits et services en classes 3, 5 et 14 ; qu'elle a été publiée au BOPI le 28 janvier 2005 (pièce n° 2 de l'appelant) ; qu'il en ressort que le premier de ces documents portant sur le chiffre romain VII non cerclé n'a pu faire naître aucun droit de marque au profit de Monsieur X..., qu'il est par conséquent, irrecevable à se prévaloir des droits qui y seraient attachés et à agir à l'encontre de la société Cartier sur son fondement, de sorte que la demande de déchéance des droits de Monsieur X... en ce qu'elle porterait sur ce chiffre romain VII non cerclé est dépourvue d'objet ; qu'il en résulte, par ailleurs et s'agissant du dépôt de la marque semi-figurative "VII" cerclée objet du dépôt n° 826 898 à la date du 03 novembre 1970, qu'il doit être fait application de l'article 9 de la loi n° 64-1360 du 31 décembre 1964 applicable selon lequel "Le dépôt de la marque produit ses effets pendant dix années. La propriété de la marque peut être conservée indéfiniment par dépôts successifs soumis au paiement d'une taxe" ainsi que de l'article 8 du décret n° 65-621 du 27 juillet 1965 portant application de cette loi aux termes duquel : "Les dépôts successifs en renouvellement, prévus à l'article 9 de la loi susvisée du 31 décembre 1964, sont soumis aux formalités d'un premier dépôt. Le dépôt en renouvellement doit être effectué avant l'expiration du délai précédent ; il produit ses effets pendant dix années à compter du jour où il est opéré" ; que Monsieur X... ne justifiant pas du renouvellement de cette marque dans le délai prescrit par ces textes, force est de considérer qu'il ne peut davantage se prévaloir des effets produits par l'enregistrement auquel il a procédé et qui ne lui assurait une protection que jusqu'au 03 novembre 1980 ; qu'il doit être considéré, ici aussi, comme irrecevable à agir en contrefaçon de la marque n° 826 898 de sorte qu'est dépourvue d'objet la demande reconventionnelle en déchéance des droits de Monsieur X... en ce qu'elle porte sur cette marque ; qu'il en résulte, enfin, que l'action en contrefaçon initiée par Monsieur X... ne peut être appréciée que sur le fondement de la marque semi-figurative "(VII)" même chiffre romain cerclé que précédemment n° 043 330 867, enregistrée le 14 décembre 2004 à l'INPI de Paris pour désigner des produits et services en classes 3, 5 et 14 et publiée au BOPI le 28 janvier 2005; qu'il y a lieu, par ailleurs, de relever que bien que la société Cartier poursuive la déchéance des droits de l'appelant sur cette marque en ce qu'elle désigne les divers produits précités alors que l'action en contrefaçon à son encontre ne concerne que l'usage de la dénomination "VII" en ce qu'elle porte sur les parfums, pas plus qu'en première instance Monsieur X... (qui n'entend d'ailleurs rapporter la preuve de l'usage sérieux du signe qui lui est contesté qu'en ce que cet usage porte sur des parfums) ne conteste l'intérêt de la société Cartier à agir en déchéance de ses droits de marque sur les autres produits que le parfum visés à l'enregistrement ; que sur l'usage sérieux de la marque semi-figurative n° 04 3 330 867, au soutien de son appel incident la société Cartier, qui fonde sa demande sur les dispositions de l'article L 714-5 du code de la propriété intellectuelle, approuve le tribunal en ce qu'il a déterminé la période de cinq ans à prendre en considération à compter de la date de publication au BOPI (soit le 25 janvier 2005) et en ce qu'il a, par ailleurs, écarté la facture du 14 septembre 2010 et l'extrait du site internet www.edition-du.chariot.fr/parfums.htm daté du 29 mars 2012 produits, ceci en raison de leurs dates, outre les factures des 14 octobre 2008 et 16 octobre 2009, ceci en raison de la simple preuve d'une commercialisation à l'étranger ; qu'elle lui reproche, cependant, d'avoir rejeté sa demande en la seule considération de trois factures datées des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008, alors que n'était établie, sur une période de cinq années, que la commercialisation de 108 flacons parfums sur lesquels la marque serait prétendument reproduite ; qu'elle fait valoir que ces trois factures ne peuvent justifier d'un usage sérieux de la marque "VII" cerclée, qu'elles n'établissent pas que les produits visés en classe 3 étaient revêtus de ladite marque et, subsidiairement, que ces seules preuves d'exploitation justifient tout au plus d'une commercialisation symbolique et, par conséquent, d'un usage qui ne peut être considéré comme sérieux ; qu'en réplique, Monsieur X... demande, certes, à la cour de "déclarer la société Cartier mal fondée en son appel incident" dans le dispositif de ses conclusions ; qu'il s'abstient, toutefois, de débattre des moyens d'appel de celle-ci, se contentant d'évoquer ses moyens de première instance et le dispositif du jugement en concluant que "c'est de cette décision dont il a été fait appel devant votre juridiction" (pages 4 et 5 / 8 de ses dernières conclusions) sans plus de développements ; que, ceci exposé et s'agissant de la défense de Monsieur X..., en application de l'article 954 du code de procédure civile, "la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs" ; qu'il s'en déduit que seules font l'objet de débats les trois factures émises par la société Editions du chariot ("Maison d'Editions fondée en 1927" selon ses documents commerciaux) retenues par le tribunal ; que ces trois factures produites en pièce 8 ont pour destinataires deux librairies, l'une située dans le sixième arrondissement de Paris (en 2005), la seconde à Charenton-le-Pont (94) en 2007 et 2008 ; qu'elles totalisent la vente de 108 produits au prix unitaire HT de 12,95 ¿ puis de 14,70 ¿, lesquels produits sont référencés sous la désignation suivante : "Parfum VII Bonheur Triomphant" ; qu'elles ne sont pas accompagnées, cependant, de bons de commande, catalogues, échantillons du produit qui pourrait en être griffé ou même de sa photographie, pas plus que de son conditionnement ou de son mode de commercialisation et ne se présentent, par conséquent, que comme un simple référencement ; qu'il est constant que pour échapper à la déchéance de ses droits sur sa marque, son titulaire doit rapporter la preuve qu'elle est utilisée à titre de marque, c'est à dire dans la vie des affaires et afin d'identifier ou promouvoir les produits concernés aux yeux du public pertinent et que s'il n'est pas nécessaire que la marque soit apposée sur le produit ou son conditionnement, il faut cependant qu'elle soit exploitée conformément à sa fonction dans la relation avec la clientèle et accompagne sa mise à disposition du public sans équivoque sur sa fonction ; qu'en l'espèce, comme le fait observer la société Cartier, aucun document ne vient attester d'une telle exploitation de la dénomination "Parfum VII Bonheur Triomphant" dans la relation avec la clientèle ; qu'en outre, il convient de considérer que la marque "(VII)" (chiffre romain cerclé), seule marque sur laquelle Monsieur X... peut revendiquer la titularité de droits, fait l'objet d'une exploitation sous une forme modifiée qui en altère le caractère distinctif dès lors que l'adjonction au chiffre romain VII des mots "Parfum" puis "Bonheur Triomphant" et l'élision du cercle qui caractérise la marque semi-figurative telle que déposée sont de nature à affecter la perception que l'éventuel public concerné pourrait en avoir ; qu'il s'évince de ce qui précède que Monsieur X... ne démontre pas avoir fait un usage réel et sérieux de la marque, au sens des dispositions précitées, et qu'il doit être déchu de ses droits sur la marque semi-figurative n° 043 330 867 avec toutes conséquences s'y rattachant, ainsi que requis ; que le jugement qui en a autrement décidé sera, par conséquent, infirmé de ce chef ; que sur l'action en contrefaçon, la déchéance des droits de Monsieur X... sur la marque française semi-figurative "(VII)" n° 04 3 330 867 seule susceptible d'être par lui revendiquée rend irrecevable son action en contrefaçon dirigée à l'encontre de la société Cartier du fait de la commercialisation du parfum sous la dénomination "L'heure défendue VII" qui s'inscrit dans une gamme de fragrances dont les intitulés sont composés d'un chiffre romain et d'un nom de parfum commençant par les termes "l'heure" ; que le jugement qui s'est prononcé sur le fond du litige doit être infirmé » ;
ALORS 1°) QUE : des factures, dès lors qu'elles décrivent les produits vendus conformément à la marque enregistrée, établissent l'usage sérieux de ladite marque ; que l'arrêt attaqué a retenu que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 constituaient un simple référencement et non pas la preuve d'une exploitation sérieuse de la marque VII enregistrée par Monsieur X..., au prétexte qu'elles n'étaient pas accompagnées de bons de commandes, catalogues, échantillons ou photographies du produit, mode de conditionnement ou de commercialisation ; qu'en statuant ainsi, quand elle relevait que ces factures désignaient les produits vendus sous le libellé « Parfum VII Bonheur triomphant » et qu'elles étaient établies au nom de librairies situées en France, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ces constatations au regard de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, qu'elle a violé ;
ALORS 2°) QUE : Monsieur X... soulignait que le parfum VII était commercialisé depuis 2005 via le site internet de la société LES EDITIONS DU CHARIOT (conclusions, p. 5) ; qu'en retenant que seules faisaient l'objet des débats les trois factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 par application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS 3°) QUE : lorsqu'une partie produit plusieurs éléments de preuve d'un même fait le juge doit les regrouper afin de rechercher s'ils ne se corroborent pas les uns les autres et ne constituent pas un faisceau d'indices faisant présumer ce que, considérés isolément, ils ne permettraient pas d'établir ; qu'ainsi la capture d'écran du site internet de la société LES EDITIONS DU CHARIOT, effectuée le 29 mars 2012, devait être rapprochée des factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 afin de vérifier si le site internet et les factures, une fois regroupés, ne se corroboraient pas mutuellement pour constituer un faisceau d'indices faisant présumer l'usage sérieux et continu de la marque enregistrée par Monsieur X..., depuis l'année 2005 et au moins jusqu'en 2012, via le site internet et via les points de vente que constituaient les librairies auxquelles les parfums de la marque étaient facturés ; qu'en examinant isolément la capture d'écran d'un côté, jugée non probante en raison de sa date, et les trois factures de l'autre, jugées constitutives d'un simple référencement, pour en déduire qu'il n'y avait pas d'usage sérieux de la marque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 du code civil et L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
ALORS 4°) QUE : la caractère sérieux de l'usage de la marque s'apprécie in concreto et peut être établi même en présence de ventes en quantités minimes de produits de la marque ; qu'en se bornant à affirmer que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 constituaient un simple référencement, sans, ce faisant, répondre au motif des premiers juges, que Monsieur X... s'était approprié, pris de ce qu'il fallait tenir compte du caractère artisanal de l'exploitation des parfums sous la marque enregistrée par l'exposant de sorte que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 établissaient l'exploitation réelle, sérieuse et continue de ladite marque depuis 2005, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 5°) QUE : le titulaire d'une marque qui ne l'exploite pas pendant cinq ans après la publication de son enregistrement n'encourt aucune déchéance s'il en fait un usage sérieux plus de trois mois avant la demande de déchéance ; qu'à supposer même que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 n'eussent pas établi l'exploitation sérieuse de la marque VII de 2005 à 2010, en n'examinant que ces trois factures et non pas celle du 14 septembre 2010 non plus que la capture d'écran du site internet de la société LES EDITIONS DU CHARIOT quand ces deux derniers éléments, une fois regroupés, étaient susceptibles d'établir l'usage sérieux de la marque plus de trois mois avant la demande de déchéance de la société CARTIER, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
ALORS 6°) QUE : en retenant, d'une part, que les factures des 5 juillet 2005, 27 novembre 2007 et 24 octobre 2008 étaient seules en discussion et n'établissaient pas l'exploitation de la marque enregistrée par Monsieur X... mais un simple référencement, et d'autre part, que ladite marque était exploitée sous une forme modifiée que constituaient l'élision du cercle et l'adjonction des mots « bonheur triomphant », la cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 7°) QUE : des modifications mineures de la marque enregistrée ne lui font pas perdre son caractère distinctif et n'empêchent pas qu'elle soit sérieusement exploitée ; que l'arrêt attaqué a constaté que la marque enregistrée par Monsieur X... était constitué du chiffre romain VII entouré d'un cercle ; qu'en écartant son usage sérieux au prétexte qu'elle était exploitée sous une forme modifiée qui éludait le cercle et ajoutait les mots « bonheur triomphant », sans relever que la taille, la forme, l'aspect d'ensemble des chiffres romains VII qui distinguaient la marque enregistrée auraient fait l'objet de modifications majeures, seules susceptibles d'ôter à la marque son caractère distinctif et de s'opposer à son usage sérieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;
ALORS 8°) QUE : l'arrêt attaqué a jugé irrecevable l'action en contrefaçon de Monsieur X... contre la société CARTIER au motif qu'il était déchu de ses droits sur la marque VII ; que la cassation du chef de la déchéance des droits de l'exposant sur la marque emportera, par voie de conséquence, celle du chef déclarant irrecevable son action en contrefaçon, en application de l'article 625 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-19497
Date de la décision : 15/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 sep. 2015, pourvoi n°14-19497


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.19497
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