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10/09/2015 | FRANCE | N°14-24690

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 septembre 2015, 14-24690


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties, dans les conditions prévues à l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 815-2 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par contrat du 25 juin 1979, la commune de Colombes a concédé à Joseph Z..., MM. Jean-Paul et Bruno Z... et M. François Y... l'exploitation de marchés publics communaux, à partir du 1er octobre 1979 pour une durée de trente ans, à l'issue de laquelle soit le contrat était tacitement recon

duit, soit la commune remboursait aux intéressés une partie des redevances ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties, dans les conditions prévues à l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 815-2 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par contrat du 25 juin 1979, la commune de Colombes a concédé à Joseph Z..., MM. Jean-Paul et Bruno Z... et M. François Y... l'exploitation de marchés publics communaux, à partir du 1er octobre 1979 pour une durée de trente ans, à l'issue de laquelle soit le contrat était tacitement reconduit, soit la commune remboursait aux intéressés une partie des redevances versées ; qu'au terme de la durée fixée, la commune n'a pas reconduit le contrat en invoquant la nullité de la clause de reconduction tacite et des dispositions prévues en cas de résiliation ; que par acte du 18 février 2010, MM. Jean-Paul et Bruno Z... ont assigné la commune de Colombes en paiement de l'indemnité de résiliation contractuelle ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable leur action, après avoir relevé qu'à la suite du décès de Joseph Z... et de la cession par M. François Y... de ses parts, l'indivision exploitant la concession était composée de MM. Jean-Paul et Bruno Z... et Mme Françoise Z..., l'arrêt énonce qu'il ne résulte d'aucune pièce versée aux débats que celle-ci leur aurait cédé ses droits dans l'indivision ou qu'ils seraient seuls titulaires de l'intégralité des droits indivis et auraient de plein droit qualité pour agir au nom de l'indivision ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action en paiement d'une indemnité de résiliation, consécutive à la décision d'une commune de ne pas reconduire un contrat de concession, entre dans la catégorie des actes conservatoires que tout indivisaire peut accomplir seul, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la commune de Colombes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à MM. Jean-Paul et Bruno Z... la somme globale de 3 000 euros ; rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour MM. Jean-Paul et Bruno Z....
LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclaré irrecevable l'action intentée par Messieurs Jean-Paul et Bruno Z... à l'encontre de la commune de Colombes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« il convient de rappeler que le contrat conclu le 25 juin 1979 avec la ville de Colombes l'a été par Messieurs Joseph Z..., Jean-Paul Z..., Bruno Z... et François Y... et que l'assignation introductive d'instance 18 février 2010 n'a été délivrée que par Messieurs Jean-Paul Z... et Bruno Z... disant agir tant en leur nom personnel « qu'en leur qualité de représentant des consorts
Z...
et Y..., concessionnaires de droits communaux, exerçant le commerce sous l'enseigne Les Fils de Madame Y... » ; qu'il résulte d'un acte de notoriété établi par Maître André B..., notaire associé à Nogent sur Marne, que Joseph Z... est décédé le 12 janvier 1980 laissant ses six enfants comme héritiers : Françoise Z..., Odile
Z...
épouse A..., Hélène Z..., Catherine Z... ; qu'aux termes d'une attestation établie le 22 avril 1991, Maître B... atteste qu'aux termes d'un acte de partage reçu par lui le 13 février 1988, il a été attribué indivisément à deux des six enfants, à savoir Jean-Paul Z... et Françoise Z... « l'ensemble des droits indivis que possédait Joseph Z... dans la société de fait Les Fils de Madame Y...
... à Livry-Gargan, portant sur l'ensemble des droits indivis aux contrats de concession et les moyens nécessaires à leurs exploitations », les autres enfants n'ayant donc plus aucun droit dans cette société de fait ; que la même attestation de Maître B... du 22 avril 1991 précise que reste valable la procuration que Françoise Z... a donnée à Jean-Paul Z... pour gérer et administrer les droits indivis de Joseph Z... dans les concessions dont ils étaient titulaires suivant acte sous seing privé des 6 et 7 novembre 1980 et 27 février 1981 ; que par ailleurs, Bruno Z... est, quant à lui, l'un des héritiers de Bernard Z... ; qu'il résulte d'une procuration notariée, passée par devant Maître Jean C..., notaire associé à Meudon, en date des 14 mars et 9 avril 2001 que par suite du décès de Joseph et Bernard Z..., tous deux fils de Mme Veuve Y..., l'exploitation du fonds de concession de droits communaux connu sous le nom « Les Fils de Madame Y... », exploité principalement ... à Livry Gargan (93) est détenue dans l'indivision par Jean-Paul Z... pour 70 %, Madame Françoise Z... pour 15 % et par Monsieur Bruno Z... pour 15 % ; que François Y..., autre signataire du contrat avec la ville de Colombes, et son épouse ont, par acte sous-seing privé du 28 avril 1993, cédé à Monsieur Jean-Paul Z... leurs parts notamment dans les SARL Y... et Associés, SA Les Fils de Madame Y..., dans la société de fait « Les Fils de Madame Y... », confirmé par un acte authentique de cession à titre de licitation de droits indivis des 15 et 16 septembre 2004 ; qu'il en résulte qu'après cette cession, l'indivision ayant conclu le contrat du 25 juin 1979 avec la ville de Colombes comportait désormais trois indivisaires : Messieurs Jean-Paul Z... et Bruno Z... ainsi que Mme Françoise Z... ; qu'il convient de relever que Madame Françoise Z... n'a pas figuré au titre des indivisaires ayant engagé l'action le 18 février 2010 à l'encontre de la commune de Colombes ; qu'il ne résulte d'aucune pièce versée aux débats que Madame Françoise Z... a cédé ses droits dans l'indivision à Monsieur Jean-Paul Z... et/ ou à Monsieur Bruno Z..., ni que ces derniers sont seuls titulaires de l'intégralité des droits indivis et ont de plein droit qualité pour agir au nom de l'indivision, ainsi que le fait valoir la commune de Colombes ; que devant la cour, Messieurs Jean-Paul Z... et Bruno Z... concluent que Françoise Z... aurait consenti à Jean-Paul Z... les pouvoirs les plus larges pour agir en son nom dans le cadre de l'indivision « et notamment exercer toutes actions en justice » ; que si la procuration notariée donnée le 14 mars 2001 et le 9 avril 2001 par Monsieur Bruno Z... et par Madame Françoise Z... à Monsieur Jean-Paul Z... comporte des « pouvoirs judiciaires » en page 6, c'est « à défaut de paiement et en cas de difficultés quelconques » dans le cadre d'une procuration donnée à l'effet de gérer et administrer tant activement que passivement l'indivision, pour les baux, les assurances, les impositions, les opérations commerciales, les contrats de travail, le cautionnement, les emprunts, les acquisitions, échanges et ventes, les comptes, les partages, perception de sommes et acquit de dettes, ensemble d'actes se rattachant à l'exploitation normale des biens indivis au sens de l'article 815-3 du code civil ; qu'il ne résulte pas cette procuration versée aux débats par les appelants qu'ils avaient seuls qualité à agir au nom de l'indivision s'agissant de la présente action en paiement d'une indemnité de résiliation à la suite de la rupture du traité de concession du 25 juin 1979 en raison de l'illégalité, opposée par la commune, de la tacite reconduction de cette convention, étant relevé sur ce point qu'en dépit de cette procuration qu'il a lui-même donnée, Monsieur Bruno Z... a intenté l'action en paiement aux côtés de Monsieur Jean-Paul Z... à l'encontre de la commune de Colombes, au titre de la convention du 25 juin 1979 ; qu'il y a lieu de déclarer irrecevable l'action intentée le 18 février 2010 par Messieurs Jean-Paul et Bruno Z... à l'encontre de la ville de Colombes, en l'absence de Madame Françoise Z..., autre indivisaire restant titulaire du contrat d'origine et qui était en conséquence partie au traité de concession du 25 juin 1979 » ;
ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés, QUE « il est donc possible, contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, que le contrat en cause ait été cédé par les consorts
Z...
/ Y... à la SARL Les Fils de Y..., et que cette cession ait été tacitement acceptée par la commune de Colombes, si bien que les personnes physiques n'auraient plus qualité pour agir en justice relativement à ce contrat ; qu'en ne produisant aucun élément à l'appui de leurs affirmations, les demandeurs ne permettent pas au tribunal de vérifier que, contrairement aux apparences, la SARL Les Fils de Y... ne serait pas devenue partie contractante ; que l'incertitude qui a été soulevée par le tribunal n'est donc pas levée à cet égard » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ; que, par l'effet d'un mandat de représentation en justice, le mandant est représenté en justice par le mandataire ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable l'action intentée par Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z..., qu'il ne résulte pas de la procuration donnée le 14 mars 2001 et le 9 avril 2001 par Monsieur Bruno Z... et par Madame Françoise Z... à Monsieur Jean-Paul Z... qu'ils avaient seuls qualité à agir au nom de l'indivision, quand par l'effet de cette procuration Madame Françoise Z... était représentée par Monsieur Jean-Paul Z..., la cour d'appel a violé l'article 1984 du code civil ;
2°/ ALORS, d'autre part et subsidiairement, QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que la procuration donnée par Madame Françoise Z... comporte des « pouvoirs judiciaires » ; qu'en retenant cependant, pour déclarer irrecevable l'action intentée par Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z..., qu'il ne résulte pas de la procuration donnée le 14 mars 2001 et le 9 avril 2001 par Monsieur Bruno Z... et par Madame Françoise Z... à Monsieur Jean-Paul Z... qu'ils avaient seuls qualité à agir au nom de l'indivision, la cour d'appel, qui a refusé de donner effet à cette procuration, a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ ALORS, encore, QUE le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis peuvent effectuer les actes d'administration relatifs aux biens indivis ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt qu'il résulte d'une procuration notariée en date des 14 mars et 9 avril 2001 que par suite du décès de Joseph et Bernard Z..., tous deux fils de Madame veuve Y..., l'exploitation du fonds de concession de droits communaux est détenue dans l'indivision par Jean-Paul Z... pour 70 %, Madame Françoise Z... pour 15 % et par Monsieur Bruno Z... pour 15 % et que l'indivision ayant conclu le contrat du 25 juin 1979 avec la villes de Colombes comportait désormais trois indivisaires, Messieurs Jean-Paul Z... et Bruno Z..., ainsi que Madame Françoise Z... ; qu'il en ressort encore que Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z... avaient intenté une action en paiement d'une indemnité à la suite de la rupture du traité de concession ; qu'une telle action était un acte d'administration ; qu'en retenant cependant, pour déclarer irrecevable l'action intentée par Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z..., qu'il ne résulte pas de la procuration donnée le 14 mars 2001 et le 9 avril 2001 par Monsieur Bruno Z... et par Madame Françoise Z... à Monsieur Jean-Paul Z... qu'ils avaient seuls qualité à agir au nom de l'indivision, la cour d'appel a violé l'article 815-3, 1° du code civil ;
4°/ ALORS, aussi, subsidiairement QU'un indivisaire est recevable à agir seul en défense de ses droits indivis, à concurrence de ces mêmes droits ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que l'indivision ayant conclu le contrat du 25 juin 1979 avec la villes de Colombes comportait désormais trois indivisaires, Messieurs Jean-Paul Z... et Bruno Z..., ainsi que Madame Françoise Z... ; qu'il en ressort encore que Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z... avaient intenté une action en paiement d'une indemnité à la suite de la rupture du traité de concession ; qu'il s'évinçait de ces constatations qu'à tout le moins Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z... étaient recevables, à concurrence de leurs droits dans l'indivision, à agir en défense de leurs droits et donc à exercer une action indemnitaire à l'encontre de la commune de Colombes ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 815-3 du code civil ;

5°/ ALORS, de cinquième part, QUE le juge ne saurait statuer par des motifs hypothétiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, à supposer qu'elle ait adopté les motifs des premiers juges, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ ALORS, enfin, QUE, dans leurs écritures d'appel, Monsieur Jean-Paul Z... et Monsieur Bruno Z... ont soutenu que le Conseil d'Etat refuse de conférer une quelconque portée à un agrément tacite en matière de marchés et, à fortiori, en matière de délégations pour lesquelles l'intuitu personae est encore plus fort et que s'agissant d'un contrat public conclu intuitu personae son transfert aurait dû donner lieu à une autorisation expresse ; qu'en statuant comme elle l'a fait, à supposer qu'elle ait adopté les motifs des premiers juges, sans répondre à ces chefs de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-24690
Date de la décision : 10/09/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

INDIVISION - Indivisaire - Indivisaire agissant seul - Gestion des biens indivis - Acte conservatoire - Action en paiement d'une indemnité de résiliation consécutive à la décision d'une commune de ne pas reconduire un contrat de concession

INDIVISION - Action en justice - Action intentée par un seul indivisaire - Action conservatoire - Action en paiement d'une indemnité de résiliation consécutive à la décision d'une commune de ne pas reconduire un contrat de concession

L'action en paiement d'une indemnité de résiliation, consécutive à la décision d'une commune de ne pas reconduire un contrat de concession, entre dans la catégorie des actes conservatoires que tout indivisaire peut accomplir seul conformément à l'article 815-2 du code civil


Références :

article 815-2 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 12 juin 2014

Sur les actions en justice entrant dans la catégorie des actes conservatoires pouvant être accomplis par un indivisaire seul, à rapprocher :1re Civ., 4 juillet 2012, pourvoi n° 10-21967, Bull. 2012, I, n° 153 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 sep. 2015, pourvoi n°14-24690, Bull. civ. 2016, n° 835, 1re Civ., n° 136
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 835, 1re Civ., n° 136

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Ingall-Montagnier (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Duval-Arnould
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.24690
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