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10/09/2015 | FRANCE | N°14-22023

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 septembre 2015, 14-22023


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005, ensemble les articles L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que le juge judiciaire, saisi de l'action directe d'un tiers payeur, n'est pas autorisé à se prononcer sur la responsabilité de l'assuré et le montant de la créance d'indemnisation lorsque cette responsabilité relève de la compétenc

e de la juridiction administrative, ce qui est le cas, aux termes du deu...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005, ensemble les articles L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que le juge judiciaire, saisi de l'action directe d'un tiers payeur, n'est pas autorisé à se prononcer sur la responsabilité de l'assuré et le montant de la créance d'indemnisation lorsque cette responsabilité relève de la compétence de la juridiction administrative, ce qui est le cas, aux termes du deuxième, de celle de l'Etablissement français du sang pour les actions introduites après l'entrée en vigueur de cette ordonnance ; que, toutefois, lorsque sont établis à la fois l'existence de la responsabilité de l'assuré à l'égard de la victime et le montant de la créance d'indemnisation de celle-ci contre l'assuré, le juge judiciaire peut connaître de l'action directe contre l'assureur de l'auteur du dommage exercée par un tiers payeur ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par un premier jugement, un tribunal administratif a déclaré l'Etablissement français du sang (l'ESF) responsable de l'aggravation des conséquences dommageables de la contamination de M. X... par le virus de l'hépatite C et l'a condamné à verser à celui-ci une somme en réparation de son préjudice moral, puis, par un second jugement du 16 décembre 2008, rendu après expertise, l'a condamné à lui verser une somme de 7 800 euros en réparation des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence endurés avant la consolidation de son état de santé, incluant les souffrances psychologiques subies ainsi qu'au titre des souffrances subies, et a rejeté la demande de la caisse primaire d'assurance maladie (la caisse) de remboursement de ses débours, faute que soit établie l'imputabilité de ceux-ci au traitement de la contamination ; que la caisse a alors assigné devant un tribunal de grande instance la Société hospitalière d'assurances mutuelles (la SHAM), assureur de l'ESF, en remboursement de ses débours ;
Attendu que pour faire droit à cette demande, l'arrêt retient que la caisse justifie de l'imputabilité de ses débours au traitement de l'hépatite C dont M. X... est atteint ;
Qu'en statuant ainsi sans avoir constaté que le juge compétent avait statué sur le montant des frais médicaux, objet de la demande de la caisse, sur lesquels les parties étaient en désaccord, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, la condamne à payer à la Société hospitalière d'assurances mutuelles la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quinze, signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM)
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué,
D'AVOIR condamné la SHAM à payer à la CPAM du Rhône, au titre des prestations servies à Monsieur Jean-Louis X..., 20 789,81 euros et, au titre de l'indemnité forfaitaire, 1 015 euros,
AUX MOTIFS QU'« il résulte du rapport d'expertise du 13 mars 2008 du Pr Y..., expert judiciaire désigné par le tribunal administratif de Lyon, pièce régulièrement produite et soumise au débat contradictoire des parties, les éléments suivants : les transaminases du patient se sont élevées fin 2004, un traitement antiviral associant Tahor, Neurogen, Interféron, Pegyle, Rebetol et Ribavime a alors été institué le 20/12/2004, le traitement par Interféron a été poursuivi pendant douze mois et le traitement avec Ribaverine pendant 18 mois, soit jusqu'à juillet 2006, le sujet a eu un traitement en ambulatoire, sans hospitalisation, le traitement a été la cause d'une asthénie importante et d'effets secondaires avec en particulier des vertiges, une leucopénie, des troubles dermatologiques, ces derniers ont justifié une prise en charge par le Dr Z..., dermatologue à l'hôpital Saint Joseph qui lui a donné un traitement avec Atarax et Diprolène pendant plusieurs mois, le patient pendant la phase où il a été traité en raison d'une asthénie très importante, a développé un état dépressif qui a justifié un traitement de quelques mois seulement avec un antidépresseur et une Benzodiazépine. La Benzodiazépine était un hypnotique d'action courte puisqu'il s'agissait d'lmovane, le patient a continué à être suivi avec un bilan biologique régulier, jusqu'en 2008, le patient a indiqué à l'expert s'être vu prescrire les produits suivants : Viraféron, Rebetol, Neurogen, lrnovane, Séroprame, Doliprane, Atarax, Diprolen crème ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône produit : 1/ un relevé faisant état des débours suivants : biologie du 15 décembre 2004 au 22 juin 2007 : 2 357,37 €, frais pharmaceutiques du 22 décembre 2014 au 8 juillet 2006 : 18 432,44 €, 2/ un document établi par son médecin conseil le Dr A... qui précise que les frais pharmaceutiques sont relatifs au traitement anti viral du 22 décembre 2004 au 31 juillet 2006 : interféron, ribavirine, neurogen, vivaféron, rebetol et que les frais de biologie sont relatifs à 4 examens systématiques biologiques par an ; qu'en conséquence, la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône justifie de l'imputabilité de ses débours au traitement de l'hépatite C et il convient de faire droit à sa demande principale et à sa demande au titre de l'indemnité forfaitaire » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE la décision judiciaire qui constate la responsabilité de l'assuré constitue pour l'assureur, dans ses rapports avec la victime, la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue, du risque couvert ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que le juge administratif a déclaré l'EFS responsable de l'aggravation des conséquences dommageables de la contamination par le virus de l'hépatite C subie par la victime et l'a condamné à ce titre ; qu'en conséquence, la SHAM, assureur de l'EFS, n'est tenue d'indemniser le tiers-payeur, subrogé dans les droits de la victime, qu'à hauteur des sommes auxquelles a été condamné son assuré ; qu'en condamnant cependant la SHAM à hauteur des débours exposés par la CPAM, sans s'en tenir aux causes des condamnations prononcées par le juge administratif à l'encontre de l'EFS, la cour d'appel a violé l'article L. 113-5 du code des assurances ;
2°/ ALORS, d'autre part et en toute hypothèse, QU'il résulte des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 que, sous réserve des actions introduites devant la juridiction judiciaire antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance, la juridiction administrative est désormais compétente pour condamner l'Etablissement français du sang à réparer les conséquences dommageables de l'administration avant l'année 1994 des médicaments dérivés du sang ; qu'il appartient donc à la seule juridiction administrative de se prononcer sur l'étendue de la responsabilité de l'EFS ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que le juge administratif a déclaré l'EFS responsable de l'aggravation des conséquences dommageables de la contamination par le virus de l'hépatite C subie par la victime ; qu'en condamnant cependant la SHAM à hauteur des débours exposés par la CPAM, la cour d'appel, qui s'est prononcée sur l'étendue de la responsabilité de l'EFS et donc a excédé ses pouvoirs, a violé la loi des 16-24 août 1790, article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005, ensemble les articles L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-22023
Date de la décision : 10/09/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Litige relatif à la responsabilité de l'Etablissement français du sang

ASSURANCE RESPONSABILITE - Action directe du tiers payeur contre l'assureur de l'auteur du dommage - Compétence - Compétence judiciaire - Etendue - Détermination - Litige relatif à la responsabilité de l'Etablissement français du sang SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Conditions - Action directe du tiers payeur contre l'assureur de l'auteur du dommage - Litige relatif à la responsabilité de l'Etablissement français du sang

Il résulte de la loi des 16-24 août 1790 et de l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005, ensemble les articles L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances que le juge judiciaire, saisi de l'action directe d'un tiers payeur, n'est pas autorisé à se prononcer sur la responsabilité de l'assuré et le montant de la créance d'indemnisation lorsque cette responsabilité relève de la compétence de la juridiction administrative, ce qui est le cas de celle de l'Etablissement français du sang pour les actions introduites après l'entrée en vigueur de cette ordonnance. Toutefois, lorsque sont établis à la fois l'existence de la responsabilité de l'assuré à l'égard de la victime et le montant de la créance d'indemnisation de celle-ci contre l'assuré, le juge judiciaire peut connaître de l'action directe contre l'assureur de l'auteur du dommage exercée par un tiers payeur. Par conséquent, excède ses pouvoirs et viole ces textes la cour d'appel qui alloue à la caisse primaire d'assurance maladie une somme en remboursement de ses débours, sans avoir constaté que le juge administratif, qui était compétent, avait statué sur le montant des frais médicaux


Références :

loi des 16-24 août 1790

article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005

articles L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 20 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 sep. 2015, pourvoi n°14-22023, Bull. civ. 2016, n° 835, 2e Civ., n° 167
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 835, 2e Civ., n° 167

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Savatier
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.22023
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