LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Grenoble,
contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de ladite cour d'appel, en date du 27 mai 2014, qui a prononcé sur une requête en aménagement de peine ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 mai 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Straehli, conseiller rapporteur, M. Finidori, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller STRAEHLI et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 723-15, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Vu l'article 723-15 du code de procédure pénale, ensemble les articles 723-15-2 et 735 du même code ;
Attendu que, d'une part, il résulte de l'article 723-15 susvisé que la demande d'aménagement d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à deux ans, ou un an en cas de récidive, est irrecevable lorsque, cette condamnation ayant pour effet la révocation de plein droit d'un sursis simple antérieurement accordé, la durée totale des peines d'emprisonnement prononcées ou restant à subir excède, de ce fait, le seuil prévu par ce texte ;
Attendu que, d'autre part, lorsque la personne concernée a présenté, en application de l'article 735 du code de procédure pénale, une requête en dispense de révocation du sursis assortissant l'une des peines susvisées, la juridiction doit surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été prononcé sur cette demande, le délai de quatre mois prévu par l'article 723-15-2, alinéa 2, du même code étant suspendu ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par jugement du 7 septembre 2011, Mme Zohra X... a été condamnée, notamment du chef de violences aggravées, à une peine d'un mois d'emprisonnement avec sursis ; que, par un second jugement, en date du 11 décembre 2013, devenu définitif à l'égard de l'intéressée, le tribunal correctionnel l'a condamnée, pour vol aggravé, en récidive, à une peine de deux ans d'emprisonnement dont un an sans sursis, cette condamnation entraînant de plein droit la révocation du sursis antérieurement prononcé ;
Attendu que, le 9 janvier 2014, Mme X... a présenté une requête en aménagement de peine et que le service pénitentiaire d'insertion et de probation, saisi, le même jour, par le juge de l'application des peines, a déposé son rapport le 13 mars 2014 ;
Que, le 17 mars 2014, le juge de l'application des peines a procédé à un débat contradictoire, en application de l'article 723-15 du code de procédure pénale, au cours duquel le ministère public a fait valoir que la requête était irrecevable, le cumul entre la peine sans sursis prononcée et celle révoquée excédant le maximum d'un an prévu par le texte précité lorsque l'état de récidive est constaté ; que, par jugement, en date du 1er avril 2014, le juge de l'application des peines a écarté l'exception d'irrecevabilité présentée par le ministère public en retenant, notamment, que Mme X... n'avait pu présenter une requête en dispense de révocation du sursis, le jugement du 11 décembre 2013 faisant l'objet d'une procédure en rectification d'erreur matérielle ; qu'il a ordonné le placement de Mme X... sous surveillance électronique ;
Que le procureur de la République a interjeté appel de ce jugement ; que, par courrier du 20 mai 2014, le procureur général a informé la chambre de l'application des peines de ce qu'il avait été statué sur la rectification d'erreur matérielle du jugement du 11 décembre 2013 et que la requête présentée, le 29 avril 2014, par l'avocat de Mme X... aux fins de dispense de révocation de la peine d'emprisonnement avec sursis était en attente d'audiencement ;
Attendu que, pour confirmer la décision entreprise, l'arrêt retient que, à la date à laquelle le juge de l'application des peines devait statuer, celui-ci ne pouvait prendre en considération que la peine exécutoire dont les pièces lui avaient été adressées par le ministère public, soit celle prononcée par le jugement du 11 décembre 2013, la peine d'un mois d'emprisonnement résultant du jugement du 7 septembre 2011 n'étant, quant à elle, pas susceptible d'être portée à l'écrou en l'absence de communication de la décision de rectification de l'erreur matérielle affectant la décision de condamnation qui emportait révocation ; que les juges ajoutent que la situation est inchangée au moment où ils doivent eux-mêmes statuer ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il lui appartenait de surseoir à statuer sur la recevabilité de la requête en aménagement de peine dans l'attente de la réponse apportée à la demande formulée par Mme X... de dispense de révocation du sursis assortissant l'une des peines à prendre en compte, la chambre de l'application des peines a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Grenoble, en date du 27 mai 2014, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Lyon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-trois juin deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.