La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2015 | FRANCE | N°13-28353

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 juin 2015, 13-28353


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'en 2008 la société Sabec a acquis auprès du groupe Accor un hôtel Ibis situé à Champs-sur-Marne, hôtel dirigé depuis 1991 par M. X..., par ailleurs représentant syndical au comité d'entreprise ; que la demande d'autorisation de transfert de M. X..., d'abord refusée par l'inspecteur du travail, a été autorisée par décision du ministre du travail le 31 décembre 2008 ; que la société Sabec a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de licencier M. X... po

ur motif économique ; que cette autorisation a été refusée par l'inspecteur ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'en 2008 la société Sabec a acquis auprès du groupe Accor un hôtel Ibis situé à Champs-sur-Marne, hôtel dirigé depuis 1991 par M. X..., par ailleurs représentant syndical au comité d'entreprise ; que la demande d'autorisation de transfert de M. X..., d'abord refusée par l'inspecteur du travail, a été autorisée par décision du ministre du travail le 31 décembre 2008 ; que la société Sabec a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de licencier M. X... pour motif économique ; que cette autorisation a été refusée par l'inspecteur du travail le 19 juin 2009 au motif que la demande était liée au mandat et aux responsabilités de représentant du personnel du salarié ; que le 28 août 2009, le salarié, dont la période de protection s'achevait le 30 juin 2009, a été licencié pour motif économique ; que ce licenciement a été annulé par la cour d'appel, statuant en référé, le 26 novembre 2009, en raison de l'identité des motifs avec ceux ayant donné lieu à décision de refus de l'administration et de son caractère discriminatoire ; que le 31 mars 2010, la société Sabec a notifié à M. X... un nouveau licenciement pour motif économique ; que, par arrêt du 20 février 2013, la cour d'appel a dit le licenciement nul, a ordonné la réintégration du salarié, a condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts, a dit que le salarié avait droit aux salaires à compter de son éviction jusqu'à sa réintégration et renvoyé les parties à établir leurs comptes; que, par arrêt du 30 octobre 2013, la cour d'appel a fixé à la somme de 121 323 euros l'indemnité d'éviction ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Sabec fait grief à l'arrêt du 30 octobre 2013 de statuer ainsi, alors, selon le moyen, que le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit à l'indemnisation du préjudice subi entre la date du licenciement et celle de sa réintégration, dans la limite du montant des salaires perdus ; que selon les constatations de l'arrêt « il ressort de l'attestation ASSEDIC et du bulletin de paie de juillet 2010 versés aux débats que les salaires de M. X... lui ont été régulièrement versés jusqu'au 30 juin 2010 » ; que les douze derniers mois de l'activité rémunérée de M. X... -période de référence pour le calcul de son salaire moyen- correspondent ainsi à la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010 ; qu'en retenant au contraire, pour fixer son montant à la somme de 5 889,41 euros, que le salaire moyen de M. X... devait être calculé sur la base du salaire perçu au cours de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé les articles L. 1221-1 et L. 1235-11 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la société Sabec avait refusé, à compter du 1er janvier 2009, date à laquelle le contrat de travail du salarié lui avait été transféré, de lui laisser occuper son poste de travail, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu le salaire antérieur au transfert pour le calcul de l'indemnité correspondant aux salaires dus à compter de l'éviction du salarié jusqu'à sa réintégration ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 484 et 488, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande de l'employeur de déduire des sommes allouées au salarié la provision de 20 000 euros accordée en référé par l'arrêt du 26 novembre 2009, l'arrêt du 30 octobre 2013 retient que la condamnation prononcée le 20 février 2013 vise à réparer des faits de harcèlement moral dont la réparation n'avait fait l'objet d'aucune demande dans le cadre de l'arrêt de référé du 26 novembre 2009, cette décision, qui avait certes accordé au salarié une provision de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, le comportement de la société Sabec lui ayant nécessairement causé un préjudice, ayant répondu à la demande du salarié en paiement d'une somme de 208 000 euros de dommages-intérêts pour nullité du licenciement du 28 août 2009 à raison de son appartenance syndicale ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors que, la cour d'appel ayant statué au fond par l'arrêt du 30 octobre 2013 sur la demande d'indemnité d'éviction du fait du licenciement nul, la provision accordée en référé à ce titre devait être déduite des sommes allouées au salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Sabec de déduire du montant des sommes allouées à M. Gilles X... la provision de 20 000 euros accordée par l'arrêt rendu en référé par la même cour le 26 novembre 2009, l'arrêt rendu le 30 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Sabec
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, complétant le dispositif de l'arrêt du 20 février 2013, dit que les sommes dues par la société SABEC à Monsieur X... s'élèvent à 121.323,06 € au titre des salaires et congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « sur la contestation de la société SABEC portant sur le montant des salaires et congés payés dus à M. X... au titre de la période du 1er avril 2010 au 17 mars 2013, ainsi que sur celui des déductions pouvant être opérées, qu'il ressort de l'arrêt que l'employeur a été condamné au paiement « du montant total des salaires et congés payés afférents dont il a été privé depuis le 1er avril 2010, déduction faite des revenus tirés par le salarié d'une autre activité ou d'un revenu de remplacement » ; Que M. X..., qui invoque un salaire de référence fondé sur la moyenne des salaires qu'il avait perçus avant son transfert au sein de la société SABEC, fait valoir que l'arrêt du 20 février 2013 prévoit expressément la déduction des seuls revenus qu'il aurait tirés d'une autre activité ou d'un revenu de remplacement en sorte qu'il serait vain pour son employeur de déduire l'indemnité de licenciement qu'il a perçue pour un montant de 25.182 €, ainsi que l'indemnité compensatrice de son préavis ayant couru du 1er avril au 1er août 2010, faute pour l'arrêt d'en avoir disposé ; Que c'est à juste titre que le requérant fait valoir que le salaire de référence doit être calculé sur la base du salaire moyen des trois ou douze derniers mois d'activité et que celle-ci a cessé le 1er janvier 2009, date à laquelle le contrat de travail de M. X... a été transféré à la société SABEC qui a refusé de lui fournir son travail ; qu'il y a donc lieu de retenir le salaire de référence de l'année 2008, soit le montant non contesté comme tel de 5.889,41 € ; Considérant, en revanche, que si l'arrêt prévoit expressément la déduction des seuls revenus que M. X... aurait tirés d'une autre activité ou d'un revenu de remplacement, il dispose d'abord que cette déduction devra s'opérer sur « le montant total des salaires et congés payés afférents dont il a été privé » ; Et considérant qu'il ressort de l'attestation ASSEDIC et du bulletin de paie de juillet 2010 versés aux débats que les salaires de M. X... lui ont été régulièrement versés jusqu'au 30 juin 2010 ; que le salarié, qui ne conteste pas avoir été réintégré le 18 mars 2013, a dès lors été privé de ses salaires et congés payés du 1er juillet 2010 au 17 mars 2013, soit durant 32 mois et 17 jours ; Que le montant total des salaires dont M. X... a été privé s'élève donc à 5.889,41 € x 32 mois =88.461,12 € ; - 5.889,41/31 x 17 jours = 229,67 €, soit une somme de 191 690,79 €, outre celle de 19.169 € au titre des congés payés afférents, soit un total de 210 859,79 €, dont il y a lieu de déduire la somme de 64.354,73 € perçus au titre des revenus de remplacement ; Qu'en ayant, par ailleurs, décidé que les licenciements de M. X... étaient nuls, la juridiction a nécessairement remis en cause les versements effectués en vertu de ces licenciements ; que le salarié ne peut dès lors prétendre au paiement de l'indemnité de licenciement d'un montant de 25.182 € ; Qu'il y aura également lieu de soustraire la somme nette de 34.822,58 €, montant du chèque CARPA du 5 avril 2013 » ;
ALORS QUE le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit à l'indemnisation du préjudice subi entre la date du licenciement et celle de sa réintégration, dans la limite du montant des salaires perdus ; que selon les constatations de l'arrêt « il ressort de l'attestation ASSEDIC et du bulletin de paie de juillet 2010 versés aux débats que les salaires de M. X... lui ont été régulièrement versés jusqu'au 30 juin 2010 » ; que les douze derniers mois de l'activité rémunérée de Monsieur X... - période de référence pour le calcul de son salaire moyen - correspondent ainsi à la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010 ; qu'en retenant au contraire, pour fixer son montant à la somme de 5.889,41 €, que le salaire moyen de Monsieur X... devait être calculé sur la base du salaire perçu au cours de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé les articles L.1221-1 et L. 1235-11 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, complétant le dispositif de l'arrêt du 20 février 2013, dit que les sommes dues par la société SABEC à Monsieur X... s'élèvent à 50.000 € au titre des dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination ;
AUX MOTIFS QUE « M. Gilles X..., réintégré le 18 mars 2013 en exécution de l'arrêt susvisé, avait demandé dès le 28 février 2013 à la société SABEC le règlement immédiat des seules condamnations indemnitaires majorées des intérêts au taux légal et du droit de plaidoirie, précisant qu'un décompte des rappels de salaires serait adressé ultérieurement à son employeur ; qu'à défaut d'exécution volontaire des condamnations indemnitaires, M. X... a fait pratiquer une saisie-attribution suivant acte du 20 mars 2013 pour un montant total de 52.692,03 € comprenant la condamnation au paiement de 50.000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral et de 2.000 € de frais de procédure, augmentée de 3,38 € au titre des intérêts légaux, outre les frais, mais à l'exclusion des dommages et intérêts pour procédure abusive omis par l'huissier ; Que la société SABEC entend voir juger la nécessaire imputation de la provision sur dommages et intérêts de 20.000 € obtenue par le salarié du fait du comportement de l'employeur retenu par l'arrêt de référé du 26 avril 2009 rectifié le 15 avril 2010 ayant jugé nulle licenciement du 28 août 2009 ; Mais considérant qu'il résulte de l'arrêt critiqué ayant statué sur les conclusions de M. Gilles X... du chef de discrimination syndicale et harcèlement moral comme du chef de l'éviction du salarié à compter de janvier 2009, que la société SABEC a été condamnée à payer au salarié la somme de 50.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié résultant du comportement de l'employeur qui caractérise également des faits de harcèlement moral, qu'il s'agisse de la répétition des procédures, du refus de fourniture de travail durant des mois, du refus de réintégration du 1er janvier 2009 à la date de son licenciement le 30 mars 2010, outre celles de 5.000 € pour procédure abusive et dilatoire et de 2.000 € au titre des frais de procédure ; Qu'ainsi, la condamnation prononcée le 20 février 2013 vise à réparer des faits de harcèlement moral dont la réparation n'avait fait l'objet d'aucune demande dans le cadre de l'arrêt de référé du 26 novembre 2009, cette décision, qui avait certes accordé à M. X... une provision de 20.000 € à titre de dommages et intérêts, le comportement de la société SABEC lui ayant nécessairement causé un préjudice, ayant répondu à la demande du salarié en paiement d'une somme de 208.000 € de dommages et intérêts pour nullité du licenciement du 28 août 2009 à raison de son appartenance syndicale ; Qu'au reste, par l'arrêt contesté, la société SABEC a été déboutée de sa demande expresse « en remboursement de la provision de 20 000 € versée en exécution de l'arrêt du 26 novembre 2009 » ; Que la société SABEC est donc bien redevable au titre des créances indemnitaires de la somme totale de 57.000 € dont il convient de déduire le montant de la saisie attribution en sorte que reste due à M. X... la somme de 5 000 € outre les intérêts légaux » ;
ALORS QUE par un arrêt du 26 novembre 2009 la cour d'appel de PARIS, statuant en sa formation de référé, a condamné la société SABEC à verser à Monsieur X... la somme de 20.000 € à titre de provision à valoir sur dommages-intérêts au regard du comportement de la société SABEC « lui ayant nécessairement causé un préjudice » ; que cette condamnation prononcée à titre provisionnel - par nature provisoire - n'avait plus lieu d'être une fois le litige tranché au fond ; qu'en retenant néanmoins que le salarié pouvait prétendre au paiement de la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts sans qu'il ne soit déduit de ce montant la provision de 20.000 € qu'il avait déjà perçue, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-7 du code du travail, 484 et 488 du code de procédure civile et 1147 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28353
Date de la décision : 16/06/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 jui. 2015, pourvoi n°13-28353


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28353
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award