LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon les deux arrêts attaqués, que Mme X... a été engagée le 30 juin 1995 en qualité d'assistante maternelle pour accueil à titre permanent par l'association La Nouvelle étoile des enfants de France ; qu'à la suite du retrait de son agrément, la salariée a été licenciée le 13 juillet 2007 ; qu'estimant ne pas être remplie de ses droits et revendiquant l'application à la relation de travail de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 (FEHAP), la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 2 avril 2013, examinée d'office après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 23-2, alinéa 6, et 23-5, alinéa 1er de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le refus de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité ne peut faire l'objet que d'une contestation, laquelle doit être présentée devant la juridiction saisie de tout ou partie du litige, sous forme d'un écrit distinct et motivé posant de nouveau la question ;
Attendu que le pourvoi est dirigé contre l'arrêt du 2 avril 2013, par lequel la cour d'appel s'est bornée à dire n'y avoir lieu à transmettre à la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité ; qu'il n'est, en conséquence, pas recevable ;
Mais sur le moyen unique, en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 22 octobre 2013 :
Vu les articles 01.02.3.1 et 01.02.3.2 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 ;
Attendu que selon ces textes, la convention s'applique aux différentes catégories de salariés visés à l'annexe I ainsi qu'aux salariés dont les métiers ne sont pas prévus à l'annexe I et dont le classement s'effectue alors dans le cadre du contrat de travail par assimilation aux métiers répertoriés à ladite annexe ; qu'à défaut d'accords le prévoyant expressément, la convention collective ne s'applique pas aux médecins, pharmaciens, biologistes, aux dentistes, aux personnes de statut libéral honorées à l'acte et, s'agissant des dispositions spécifiques à la rémunération, aux personnes bénéficiaires de contrats aidés ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes fondées sur l'application à la relation de travail de cette convention collective, l'arrêt retient, d'abord, que la consultation de la liste des métiers figurant à l'annexe 1 de la convention collective révèle que celui d'assistant familial exercé par l'intéressée n'y figure pas, ensuite que l'assimilation de cet emploi à l'un des métiers visés à cette annexe 1 n'est pas possible puisque, d'une part, les emplois se rapprochant quelque peu de celui d'assistant familial sont des emplois très spécialisés exigeant la possession de diplômes spécifiques pour leur exercice et, d'autre part, le métier d'assistant familial ne se comprend que dans un cadre d'accueil d'un enfant à domicile qui s'avère être fondamentalement éloigné des dispositions habituelles de la convention collective applicable à un personnel salarié classique en matière notamment d'horaires de travail, de congés-payés, de frais de transport, enfin, que la convention collective prévoit expressément et en les énumérant les métiers auxquels elle s'applique en y ajoutant celui spécifique des assistants familiaux spécialisés dans les placements à visée thérapeutique mais ne contient aucune disposition relative aux assistants familiaux exerçant dans les placements classiques en provenance de l'Aide sociale à l'enfance, sous le contrôle de cet organisme, que ce faisant, les partenaires sociaux ont, de manière implicite, entendu exclure du champ d'application de la convention collective le métier exercé par l'intéressée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 01.02.3.2 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 n'exclut pas du champ d'application de celle-ci les assistants familiaux, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas contesté que la convention collective s'appliquait à l'employeur, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé contre l'arrêt prononcé le 2 avril 2013 par la cour d'appel de Paris ;
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne l'association La Nouvelle étoile des enfants de France aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu de faire application aux demandes de Mme Y..., en sa qualité d'assistante familiale au sein de l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France, des dispositions de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 et d'AVOIR débouté Mme Y... de ses demandes formées contre l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France aux fins de la voir condamner à lui verser les sommes de 9.041,17 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement, de 18.140 euros à titre d'indemnité pour repos hebdomadaire et de 572,40 euros à titre de complément d'indemnités kilométriques ;
AUX MOTIFS QU'il doit être rappelé que Michèle Y... exerçait, au sein de l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France, la fonction désormais dénommée « assistante familiale à domicile » ; qu'il résulte en effet de l'article L. 421-2 du code de l'action sociale et des familles que « l'assistant familial est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon permanente des mineurs et des jeunes majeurs de moins de vingt et un ans à son domicile. Son activité s'insère dans un dispositif de protection de l'enfance, un dispositif médico-social ou un service d'accueil familial thérapeutique. Il exerce sa profession comme salarié de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre ainsi que par celles du chapitre III du présent livre, après avoir été agréé à cet effet. L'assistant familial constitue, avec l'ensemble des personnes résidant à son domicile, une famille d'accueil » ; qu'il résulte de l'article précité que Michèle Y..., assistante familiale, exerçait sa fonction en tant que salariée de l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France, avec l'agrément du Conseil général compétent, et son emploi devait être considéré comme constitutif d'une famille d'accueil ; qu'un décret 2006-627 du 29 mai 2006 est venu préciser, en son article 2, que les assistants familiaux devaient se conformer aux dispositions de la loi du 27 juin 2005 (article L. 412-2 du code de l'action sociale et des familles) au plus tard à compter du 1er septembre 2006 ; que ce statut, au regard de son licenciement prononcé le 13 juillet 2007, s'appliquait d'ores et déjà à Michèle Y... ; que le placement des enfants et jeunes majeurs protégés confiés à l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France, dans le cadre de son secteur dédié de Varennes Jarcy procède d'une décision du juge des enfants ; que ce placement a un caractère indirect, l'Aide sociale à l'enfance (ASE) étant l'autorité de tutelle ; qu'il se déduit de ce qui précède que les assistants familiaux salariés de l'association doivent bien être agréés par l'autorité administrative territoriale, qu'ils sont rémunérés suivant un arrêté pris par le président du Conseil général compétent et non en application de la grille de salaire mentionnée à l'annexe 1 de la convention collective de 1951 (pièce 4 : arrêté fixant le montant de la rémunération du 3 avril 2000 pour les « assistants maternels » - ancienne dénomination des assistants familiaux dont Michèle Y... fait partie) ; qu'il est constant que cet emploi est exercé au domicile du salarié, les assistants familiaux accueillant les enfants de manière permanente, y compris pendant les congés annuels et autres congés conventionnels (cf. la question prioritaire de constitutionnalité présentée sur ce point et refusée par la cour) ; que pour solliciter l'application de la convention collective du 31 octobre 1951 à son emploi, Michèle Y... soutient que celle-ci ne comporte pas de clause l'excluant expressément ; que ce moyen de la salariée, visant implicitement à requérir l'intervention du juge pour pallier cette absence de précision quant à l'application aux assistants familiaux de la convention collective considérée, doit être mis en relation avec la clause 01.02.3 de cette même convention qui énonce qu'elle « s'applique aux différentes catégories de salariés visés dans son annexe 1, quel que soit leur contrat de travail » ; que la consultation de la liste des métiers figurant à cette annexe 1 montre que celui d'assistant familial n'y figure pas ; que, toujours en sa clause 01.02.3, la convention collective du 31 octobre 1951, précise, à ce stade, qu'elle « s'applique également aux salariés dont les métiers ne sont pas prévus à l'annexe 1 et dont le classement s'effectue alors dans le cadre du contrat de travail par assimilation aux métiers répertoriés à ladite annexe » ; que la cour constate que la liste des métiers figurant dans cette annexe est présentée par « filières » ; que la filière qui correspondrait au plus près de l'activité de Michèle Y... est celle qui concerne le secteur « éducatif et social » ; que l'assistant familial ne trouve cependant pas, en cette stricte qualité, sa place dans cette filière qui comprend des éducateurs et des assistants sociaux, fonctions supposant l'obtention de diplômes, ce qui n'est pas le cas pour l'assistant familial ; que de même, le métier de « jardinière d'enfants spécialisée », qui pourrait apparaître comme étant assez proche du type d'activité liée à l'accueil à domicile, correspond, en réalité à une qualification d'éducateur spécialisé dans la petite enfance (alors qu'en toute hypothèse l'assistant familial n'accueille pas que des jeunes enfants) ; qu'il est déduit que l'analyse qui précède que l'assimilation à un ou des métiers visés à l'annexe 1 n'est pas possible du simple fait que ceux qui se rapprocheraient de celui d'assistant familial, les emplois se rapprochant quelque peu étant tous des emplois très spécialisés qui exigent la possession de diplômes spécifiques pour leur exercice d'une part et que, d'autre part, la particularité de cet emploi qui fait d'un assistant familial une « structure » puisque son activité suppose la création induite d'une famille d'accueil ; que ce métier ne se comprend que dans ce cadre familial et d'accueil à domicile qui s'avère être fondamentalement éloigné des dispositions habituelles de la convention collective applicable à un personnel salarié classique en matière notamment d'horaires de travail, de congés payés, de frais de transport, sans omettre l'agrément nécessaire de l'autorité administrative puis son contrôle exercé à travers l'aide sociale à l'enfance (ASE) ; que Michèle Y... fait valoir que la convention collective du 31 octobre 1951, en son annexe X, fait néanmoins référence aux « assistants familiaux » et prévoit son application à ceux-ci ; que la cour constate que cette mention est exclusivement applicable à une forme spécialisée de cette activité dans le cadre de placements à visée thérapeutique, ce qui n'est pas le cadre du métier exercé par Michèle Y... puisque ces placements ont lieu au sein d'un service sédentaire de type hospitalier « de jour » avec l'encadrement d'une équipe composée généralement d'un éducateur spécialisé, d'un psychiatre et d'un psychologue, l'assistant familial étant « famille d'accueil » mais seulement pour le reste du temps, son activité n'étant pas, dès lors, soumise aux mêmes nécessités de permanence lesquelles devant être considérées comme faisant obstacle à l'application de la convention collective, par assimilation, à celles de Michèle Y... ; qu'au vu de ce qui précède, c'est à tort que le premier juge a considéré qu'en l'absence d'exclusion expresse de l'activité exercée par Michèle Y... dans le domaine d'application de la convention collective du 31 octobre 1951, soit assistante familiale dans le cadre du placement familial, sous l'égide de l'ASE, au Centre de Varennes dépendant de l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France, il y aurait lieu d'appliquer cette même convention collective à l'activité de Michèle Y... par le voie de l'assimilation ; qu'en effet, il vient d'être démontré que cette convention collective a prévu expressément et nommément les métiers auxquels elle s'appliquait en y ajoutant celui spécifique des assistants familiaux spécialisés dans les placements à visée thérapeutique mais n'a disposé d'aucune mesure pour les assistants familiaux exerçant dans les placements classiques en provenance de l'ASE, sous le contrôle de cet organisme ; que ce faisant, les signataires ont, de manière implicite, entendu exclure le métier exercé ici par Michèle Y... ; qu'il est observé, à titre documentaire, qu'il en a été de même pour une situation comparable d'intervenantes à caractère social exerçant à domicile, telles les « assistantes maternelles », pour lesquelles a été mise en place une convention collective du « particulier employeur » seule capable de prendre en compte les particularités de ce métier qui s'accomplit de manière continue à domicile, tant sur la conclusion que sur l'exécution des contrats de travail ainsi conclus ; qu'il résulte de l'analyse qui précède qu'il y a lieu de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré applicable à Michèle Y... la convention collective du 31 octobre 1951 et lui a alloué, de ce fait, un complément d'indemnité de licenciement et de remboursement de frais sur indemnités kilométriques ; que pour ce qui est de la question de l'octroi de deux jours de repos hebdomadaire, le premier juge a décidé à bon droit mais curieusement au regard du raisonnement suivi pour accepter l'assimilation du métier spécifique de la salariée à ceux régis par la convention collective du 31 octobre 1951 de rejeter cette demande ; qu'en effet, il convenait surtout de tenir compte, comme il vient d'être décidé, du caractère propre à la structure dans laquelle s'exerce la fonction d'assistante familiale, à savoir le cadre de la famille d'accueil qui exige une permanence du rôle éducatif qui lui est conféré par la loi ; que d'ailleurs, sur une question prioritaire de constitutionnalité soumise à cette juridiction dans une précédente phase de la procédure, il a été décidé par arrêt du 2 avril 2013 de refuser la transmission à la Cour de cassation de la question relative au repos hebdomadaire appliqué au métier d'assistant familial tel qu'exercé par Michèle Y... ; qu'il y a donc lieu de débouter Michèle Y... de l'ensemble de ses demandes ;
ALORS QUE lorsqu'une entreprise exerce des activités multiples, la convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale de l'entreprise, peu important la nature des autres activités secondaires et les fonctions réelles des salariés ; que pour écarter l'application de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 et débouter en conséquence Mme Y... de ses demandes de paiement de complément d'indemnité de licenciement, d'indemnités de repos hebdomadaire et d'indemnités kilométriques, la cour d'appel s'est fondée sur son activité professionnelle exercée au sein de l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France ; qu'en se fondant ainsi sur des considérations inopérantes liées aux fonctions exercées par Mme Y..., sans rechercher et constater l'activité principale de l'association La Nouvelle Etoile des Enfants de France, seule de nature à justifier, le cas échéant, l'exclusion de l'application de ladite convention collective, et ce d'autant plus qu'elle entendait infirmer le jugement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 421-1, L. 421-2 et L. 423-33 du code de l'action sociale et des familles et des dispositions de ladite convention collective.