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02/06/2015 | FRANCE | N°14-11904

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 juin 2015, 14-11904


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 novembre 2013), que le 15 mars 2008, la société GCEBAIL, aux droits de laquelle vient la société Natixis (le crédit-bailleur), a consenti à la société en participation Pomena, représentée par ses deux associés gérants, M. X... et Mme Y... (les crédits-preneurs), un contrat de crédit-bail portant sur un catamaran ; que le premier loyer a été versé au moyen d'un emprunt ; que dès les premiers mois, les crédits-preneurs ont rencon

tré des difficultés dans le règlement des loyers ; qu'assignés en paiement, il...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 novembre 2013), que le 15 mars 2008, la société GCEBAIL, aux droits de laquelle vient la société Natixis (le crédit-bailleur), a consenti à la société en participation Pomena, représentée par ses deux associés gérants, M. X... et Mme Y... (les crédits-preneurs), un contrat de crédit-bail portant sur un catamaran ; que le premier loyer a été versé au moyen d'un emprunt ; que dès les premiers mois, les crédits-preneurs ont rencontré des difficultés dans le règlement des loyers ; qu'assignés en paiement, ils ont recherché la responsabilité du crédit-bailleur ;
Attendu que les crédits-preneurs font grief à l'arrêt de les condamner à payer au crédit-bailleur une certaine somme et de rejeter leur demande de dommages-intérêts alors, selon le moyen :
1°/ que le crédit-bailleur est tenu, à l'égard d'un emprunteur non averti, d'un devoir de mise en garde destiné à attirer son attention sur les risques d'un endettement nés de l'octroi d'un crédit susceptible d'excéder ses facultés de remboursement ; qu'en affirmant que le crédit-bailleur n'était pas tenu de mettre en garde les crédits-preneurs contre les risques découlant d'un endettement excessif dès lors que respectivement maître d'oeuvre dans le bâtiment et sans profession, ils ne l'avaient pas informée de ce que le catamaran objet du crédit-bail était destiné à être loué par le biais de la société en participation créée à cet effet et à produire des revenus défiscalisés, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à établir que les crédits-preneurs avaient la qualité d'emprunteurs avertis, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ qu'en affirmant que les crédits-preneurs disposaient apparemment de revenus suffisants pour faire face au remboursement du crédit-bail et du prêt souscrit pour en acquitter le premier loyer, tout en constatant qu'au jour de la conclusion du crédit-bail, dont les charges mensuelles s'élevaient à la somme globale de 4 242,2 euros, ils ne disposaient que d'un revenu mensuel de 6 000 euros sans que la perspective de percevoir des revenus complémentaires tirés de l'exploitation du catamaran ait été portée à la connaissance du crédit-bailleur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations desquelles il s'évinçait que le crédit souscrit absorbait plus de 70 % des revenus du ménage, en violation de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que le crédit-bailleur avait expressément autorisé la sous-location du catamaran, ce dont il résulte que la perspective de tirer des revenus complémentaires tirés de son exploitation avait été portée à sa connaissance ; qu'ayant ensuite retenu, par une appréciation souveraine, que les crédits-preneurs disposaient ainsi de revenus suffisants pour faire face aux remboursements, ce dont il résulte que le crédit-bailleur n'était pas tenu d'une obligation de mise en garde à leur égard, fussent-ils non avertis, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation, d'AVOIR condamné M. X... et Mme Y..., son épouse, à payer à la société Natixis la somme de 200.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 janvier 2010 et d'AVOIR débouté les époux X... de leur demande tendant à ce que la société Natixis Lease soit condamnée à leur verser la somme de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les intimés, qui se disent emprunteurs non avertis, reprochent à la société CGE Bail d'avoir manqué à ses obligations en ne vérifiant pas leurs capacités financières et en leur accordant un crédit excessif eu égard à leur capacité financière manquant ainsi à son devoir de mise en garde alors qu'il s'agissait d'une opération fiscale et non d'une réelle opération commerciale ; que la société Natixis fait valoir qu'elle ignorait jusqu'à la présente procédure qu'il s'agissait d'une opération fiscale, qu'elle n'était ni conseiller en gestion de patrimoine ni même la banque habituelle des époux
X...
et qu'elle n'avait aucune obligation d'information ou de conseil quant à l'opportunité économique de l'opération ; que les organismes de crédit sont tenus à une obligation de mise en garde des crédits preneurs lorsque ceux-ci ne sont pas des emprunteurs avertis ; que la qualité d'emprunteur averti est indépendante de la qualité de professionnel ou de profane et il convient d'apprécier in concreto cette qualité ; que M. X... est maître d'oeuvre dans le bâtiment et Mme Y..., son épouse, n'a pas d'activité professionnelle ; qu'ils disposaient d'un revenu imposable en 2007 de près de 6.000 euros par mois, étant précisé qu'ils n'étaient pas encore mariés ; que le loyer mensuel du crédit bail s'élevait à 3.012,96 euros mais ils avaient emprunté, pour cette même opération, à la Caisse d'Epargne une somme de euros avec une échéance mensuelle de 1.229,24 euros, somme qu'ils ont remboursée ; qu'ils ne donnent aucune indication sur les revenus engendrés par la location du bateau qui diminuaient d'autant les échéances du crédit bail ; que le catamaran était destiné à être loué et à procurer des revenus défiscalisés ; que le vendeur, la société Pasquier Voile, qui n'est pas dans la cause, avait promis un chiffre d'affaires de 70.000 euros TTC soit 30.000 euros net pour le propriétaire en assurant qu'il n'y aurait aucun souci de remplissage ; que la sous-location du bateau avait été autorisée expressément par la société GCE Bail ; que la Cour constate que les intimés ne démontrent pas soit qu'une interdépendance entre les contrats existait, notamment à raison des liens commerciaux entre la société Pasquier Voile et la société CGE Bail de nature à conférer la nature de produit financier à l'opération, soit qu'ils avaient spécifiquement attiré l'attention de la société GCE bail sur le but réel de l'opération, la seule autorisation de sous-location du bateau donnée par le bailleur étant à cet égard insuffisante ; que rien n'indique non plus qu'elle était en mesure d'apprécier les risques de l'opération si elle l'avait connue et elle n'avait pas d'obligation à cet égard ; que tout opération de défiscalisation comporte par essence des risques financiers et qu'il appartient à celui qui espère en profiter d'apprécier ses risques ; que les époux X... ne pouvaient ignorer que l'opération comportait de tels risques malgré les affirmations de la société Pasquier mais ils disposaient apparemment de revenus suffisants pour faire face aux remboursements et ce d'autant plus que les revenus engendrés par la location du bateau seraient venus s'ajouter à leurs revenus antérieurs ; que les époux X... étaient des emprunteurs avertis et en conséquence la société GCE Bail n'était pas tenue à une obligation de mise en garde à leur égard ;
AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE le chiffre de 72 % ne prend pas en compte les locations générées par l'exploitation du bateau, alors que les époux X... qui ne communiquent aucune information sur ces locations, reconnaissent néanmoins dans un courrier du 26 juin 2008 que 4 semaines étaient déjà réservées pour l'été ; qu'en matière de crédit-bail, le locataire, en l'occurrence la société Pomena, peut choisir à son gré le mode de financement approprié pour les matériels nécessaires à son exploitation, en l'espèce le bateau destiné à la location et, en tant que commerçant, est en mesure d'apprécier les risques d'endettement nés de l'octroi des financements souscrits eu égard à sa capacité financière ; que de plus, la société Pomena ne justifie pas que la société GCE Bail aurait eu sur cette situation financière des informations qu'elle-même aurait ignorées et qu'elle a agit en cliente avertie ; qu'ainsi la société CGE Bail n'était pas tenue d'une obligation de mise en garde ;
1°) ALORS QUE le crédit bailleur est tenu, à l'égard d'un emprunteur non averti, d'un devoir de mise en garde destiné à attirer son attention sur les risques d'un endettement nés de l'octroi d'un crédit susceptible d'excéder ses facultés de remboursement ; qu'en affirmant que la société GCE Bail n'était pas tenue de mettre en garde M. X... et Mme Y..., contre les risques découlant d'un endettement excessif dès lors que respectivement maître d'oeuvre dans le bâtiment et sans profession, ils ne l'avaient pas informée de ce que le catamaran objet du crédit-bail était destiné à être loué par le biais de la société en participation créée à cet effet et à produire des revenus défiscalisés, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à établir que les époux X... avaient la qualité d'emprunteurs avertis, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, en affirmant que les époux X... disposaient apparemment de revenus suffisants pour faire face au remboursement du crédit-bail et du prêt souscrit pour en acquitter le premier loyer, tout en constatant qu'au jour de la conclusion du crédit-bail, dont les charges mensuelles s'élevaient à la somme globale de 4.242,2 euros, ils ne disposaient que d'un revenu mensuel de 6.000 euros sans que la perspective de percevoir des revenus complémentaires tirés de l'exploitation du catamaran ait été portée à la connaissance du crédit-bailleur, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations desquelles il s'évinçait que le crédit souscrit absorbait plus de 70 % des revenus du ménage, en violation de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-11904
Date de la décision : 02/06/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 jui. 2015, pourvoi n°14-11904


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.11904
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