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28/05/2015 | FRANCE | N°14-17710

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 mai 2015, 14-17710


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 461-1, alinéa 2 ,du code de la sécurité sociale, et le tableau n° 40 D, qui y est annexé ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie du Cher (la caisse) a refusé, par décision du 7 août 2012, de prendre en charge l'affection déclarée par M. X... au titre du tableau n° 40 D des maladies professionnelles, alors qu'il était salarié de la société Carrefour en qualité de poissonnier ; que l

'intéressé a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que p...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 461-1, alinéa 2 ,du code de la sécurité sociale, et le tableau n° 40 D, qui y est annexé ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie du Cher (la caisse) a refusé, par décision du 7 août 2012, de prendre en charge l'affection déclarée par M. X... au titre du tableau n° 40 D des maladies professionnelles, alors qu'il était salarié de la société Carrefour en qualité de poissonnier ; que l'intéressé a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour accueillir ce recours, l'arrêt, après avoir rappelé que les examens bactériologiques n'ont pas mis en évidence l'étiologie mais qu'il ressort du courrier d'un docteur en dermatologie et vénéréologie que les mycobactéries sont très difficiles à mettre en évidence, énonce que même si l'étiologie n'est pas confirmée, la maladie professionnelle constituée par l'infection granulomateuse ulcéreuse due à une mycobactérie atypique est établie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions du tableau n° 40 D relatives à la désignation des maladies dues aux bacilles tuberculeux et à certaines mycobactéries atypiques subordonnent la prise en charge à titre professionnel de l'infection cutanée granulomateuse à la confirmation de son étiologie par des examens bactériologiques, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute M. X... de son recours ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait par la cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par M. Prétot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché et pronocé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie du Cher
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Monsieur Laurent X... justifie d'une exposition au risque du tableau N° 40 D des maladies professionnelles, infirmé la décision prise le 7 août 2012 de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher et reconnu à Monsieur Laurent X... l'existence d'une maladie professionnelle ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en vertu des dispositions de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale "....est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau des maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées dans ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles...Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ..." ; que M. X... a effectué le 4 janvier 2012 une déclaration de maladie professionnelle pour affections cutanées dues à Mycobatérium marinum et fortuitum; qu'il a produit un certificat médical initial du docteur Y... faisant état : "Début il y a 3 mois. Poignet gauche placard granulomateux et pustuleux -divers Traitt-Corticoïdes-Fucidine-Pyostacine sans effet. Est venu consulté en dermatologie 31-05-11. Histo+ différents prélèvements non contributifs.Contexte traumatismes cutanés (bras) et porte d'entrée infectieusemycobactérie atypique non écartée-bilan en cours" ;qu'il n'est pas contesté que les lésions présentées par M. X... sont occasionnées par les frottements répétés des dents de scies présentes sur les sachets aluminium des emballages de poisson lorsqu'il passe la main gauche à l'intérieur des sachets pour en agrandir l'ouverture et en vérifier l'étanchéité et la résistance avant d'y insérer le poisson ; que le tableau 40 des maladies professionnelles vise les maladies dues aux bacilles tuberculeux et certaines mycobactéries atypiques : mycobacterium avium/intracellulare, mycobacterium kansasii, mycobacterium xenopi, mycobacterium marinum et mycobacterium fortuitum ; qu'il désigne au paragraphe D : d'une part les affections cutanées dues à mycobactérium marinum et fortuitum et d'autre part l'infection cutanée granulomateuse ulcéreuse prolongée dont l'étiologie doit être confirmée par des examens bactériologiques ; qu'en l'espèce le certificat médical n'évoque pas le mycobactérium marinum et fortuitum ; que dès lors s'agissant d'une infection cutanée granulomateuse ulcéreuse, l'étiologie doit être confirmée par des examens bactériologiques; qu'en l'espèce ces examens bactériologiques ont conclu à la ¿présence d'un champignon qui n'a pu être identifié, tous les repiquages étant restés stériles' et que s'il ¿n'a pas été vu de bacille acido-alcoolorésistant .... en revanche il a été observé un contaminant' ; qu'ainsi les examens bactériologiques n'ont pas mis en évidence l'étiologie; que cependant il ressort du courrier de madame Y... docteur en dermatologie et vénéréologie en date du 2 août 2011 que ¿les microbactéries sont très difficiles à mettre en évidence'; que dès lors il convient de considérer que même si l'étiologie n'est pas confirmée, la maladie professionnelle constituée par infection cutanée granulomateuse ulcéreuse due à une mycobactérie atypique est établie ; que le tableau précité des maladies professionnelles cite limitativement les ¿travaux en milieu aquatique mettant en contact avec des eaux contaminées.Travaux d'entretien des piscines et aquarium'; que les travaux de poissonnier, notamment de manipulation de poissons, effectués par M. X..., ainsi que l'ont retenu les premiers juges sont assimilables au travaux en milieu aquatique en contact avec des eaux contaminées ; que ce point est confirmé par les documents produits par le salarié et émanant conjointement du ministère de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche, du ministère du travail, du ministère de la santé et du ministère de l'écologie, lequel indique parmi les activités professionnelles à risque des affections cutanées à mycobatérium marinum notamment ¿les poissonniers écailleurs et personnels travaillant à la transformation du poisson'; qu'il suffit enfin pour s'en convaincre de constater que son infection cutanée a disparu avec son changement de poste sur un autre rayon; qu'en présence d'une maladie désignée au tableau et de travaux conformes à ceux énoncés dans ledit tableau, il n'y a pas lieu de saisir un CRRMP ; Attendu en conséquence que la décision déférée en ce qu'elle reconnu à M. Laurent X... l'existence d'une maladie professionnelle mérite confirmation. »

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il ressort des pièces du dossier que Monsieur Laurent X... a travaillé en qualité d'employé au rayon poissonnerie de l'Hypermarché CARREFOUR de Bourges du 5 mai 1990 jusqu'au 25 mai 2011. qu'il a présenté des affections cutanées, constatées par divers certificats médicaux, qu'il impute à ses travaux de poissonnier où il subi de petites lésions cutanées par le frottement de son poignet gauche sur les dents de scie qui lui servent à la coupe du papier Alpamer souillé par les poissons qu'il doit préparer ; que l'enquête administrative a révélé l'exactitude des faits relatés par Monsieur Laurent X... ; que cependant l'agent enquêteur a considéré que les conditions limitatives des travaux désigné au tableau n° 40 des maladies professionnelles n'étaient pas remplies dans la mesure où Monsieur Laurent X... n'effectuait pas de travaux en milieu aquatique le mettant en contact avec des eaux contaminées, ni des travaux d'entretien de piscines et aquarium ; que le médecin conseil a estimé que les conditions médicales réglementaires n'étaient pas remplies pour non confirmation par examens bactériologiques ; que Monsieur Laurent X... a fait l'objet de prélèvements pour analyses bactériologiques, lesquelles n'ont pas permis d'isoler de mycobactéries, lesquelles sont, selon le Docteur Josiane Y... -médecin dermatologue qui a donné des soins à Monsieur Laurent X... -, très difficiles à mettre en évidence ; que cependant, eu égard au tableau que présentait Monsieur Laurent X..., décrit par le Docteur Josiane Y..., et les fortes suspicions émises par ce spécialiste d'une contamination due par le contact avec les poissons, ajouté au fait que depuis son départ du rayon poissonnerie son affection cutanée a disparu, il y a lieu de retenir une origine professionnelle aux lésions dont il a souffert ;que l'activité de Monsieur Laurent X..., l'amenant à manipuler constamment des poissons tout en se blessant superficiellement au niveau du poignet, équivaut à travailler en milieu aquatique en contact avec des eaux contaminées ; qu'en conséquence, il convient de faire droit à la demande de Monsieur Laurent X... et de lui reconnaître l'existence d'une maladie professionnelle. »
ALORS D'UNE PART QUE seules bénéficient de la présomption d'imputabilité au travail les pathologies visées par les tableaux des maladies professionnelles dont l'existence est constatée ou vérifiée par la réalisation des examens visés aux tableaux ; que le tableau n°40 D des maladies professionnelles exige notamment que l'étiologie de l'affection cutanée présentée par l'assuré soit « confirmée par des examens bactériologiques »; qu'en l'espèce, après avoir constaté que « les examens bactériologiques n'ont pas mis en évidence l'étiologie » de la maladie présentée par Monsieur X..., les juges du fond n'ont pu infirmer la décision de la CPAM du CHER de ne pas prendre en charge cette affection au titre dudit tableau sans violer ensemble l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale et le Tableau n°4O D des maladies professionnelles ;
ALORS D'AUTRE PART QUE seuls peuvent revendiquer le bénéfice de la présomption d'imputabilité au travail de pathologies visées par un tableau des maladies professionnelles les assurés qui ont effectué des travaux entrant dans la liste limitative de ceux visés auxdits travaux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le tableau 40D renvoyait à une liste limitative des travaux comprenant exclusivement « Travaux en milieu aquatique mettant en contact avec des eaux contaminées. Travaux d'entretien des piscines et aquanum.» ; qu'en décidant néanmoins qu'il y avait lieu d'assimiler à ces travaux «les travaux de poissonnier, notamment de manipulation de poissons, effectués par M. X... » pour décider que cet assuré justifie d'une exposition au risque du tableau N°40 D des maladies professionnelles la cour d'appel a derechef violé ensemble l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale et le Tableau n° 4O D des maladies professionnelles


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-17710
Date de la décision : 28/05/2015
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Maladies professionnelles - Origine professionnelle - Présomption - Conditions - Maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles - Maladie contractée dans les conditions mentionnées au tableau - Tableau n° 40 (Maladies dues aux bacilles tuberculeux et à certaines mycobactéries atypiques) - Infection cutanée granulomateuse ulcéreuse prolongée - Confirmation de l'étiologie par des examens bactériologiques - Nécessité (non)

Dès lors que les dispositions d'un tableau de maladies professionnelles subordonnent la prise en charge d'une maladie à la confirmation de son étiologie par des examens bactériologiques, le caractère professionnel d'une telle maladie ne peut pas être reconnu en l'absence de tels éléments. Viole l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale et le tableau des maladies professionnelles n° 40 D, la cour d'appel qui reconnaît le caractère professionnel d'une infection cutanée granulomateuse ulcéreuse dont un salarié poissonnier était victime, alors que les examens bactériologiques n'avaient pas mis en évidence l'étiologie de cette infection


Références :

articles L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale

tableau n° 40 D annexé au décret du 31 décembre 1946

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 21 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 mai. 2015, pourvoi n°14-17710, Bull. civ. 2015 n°5,II, n°131
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015 n°5,II, n°131

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. de Monteynard
Rapporteur ?: Mme Belfort
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.17710
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