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27/05/2015 | FRANCE | N°14-11688

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 mai 2015, 14-11688


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 9 décembre 2013), que M. Z..., engagé par la société Rep international le 28 janvier 1974 en qualité d'ouvrier spécialisé, et occupant en dernier lieu un poste de tourneur, a été licencié pour motif économique le 29 juin 2009 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié une indemnité pour non-respect des critères d'ordre des licenciements, alors, selon le moyen :
1°/ que la catégorie professionn

elle, qui sert de base à l'établissement de l'ordre des licenciements, concerne l'e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 9 décembre 2013), que M. Z..., engagé par la société Rep international le 28 janvier 1974 en qualité d'ouvrier spécialisé, et occupant en dernier lieu un poste de tourneur, a été licencié pour motif économique le 29 juin 2009 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié une indemnité pour non-respect des critères d'ordre des licenciements, alors, selon le moyen :
1°/ que la catégorie professionnelle, qui sert de base à l'établissement de l'ordre des licenciements, concerne l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'en conséquence, ne peuvent être regroupés au sein d'une même catégorie professionnelle des salariés qui exercent des fonctions requérant des qualifications particulières et d'autres salariés qui ne disposent pas de ces qualifications particulières, peu important que ces derniers puissent acquérir les qualifications nécessaires pour occuper l'emploi des premiers dans le cadre d'une formation complémentaire relevant de l'obligation d'adaptation de l'employeur ; qu'en l'espèce, il est constant que le pilotage, le réglage et la maintenance de centres d'usinage requièrent une formation professionnelle particulière, que ne nécessitent pas les opérations d'usinage sur des machines classiques ; qu'en retenant cependant que les salariés qui effectuent des opérations d'usinage sur des machines classiques et ceux qui pilotent des centres d'usinage à commande numérique appartiennent à la même catégorie professionnelle, dès lors que l'employeur ne démontre pas que le pilotage d'un centre d'usinage nécessite une formation de base spécifique ou une formation complémentaire excédant l'obligation d'adaptation, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 1233-5 du code du travail ;
2°/ qu'en relevant encore que le tableau d'application des critères d'ordre des licenciements fait apparaître que l'employeur a appliqué ces critères aux salariés travaillant « hors centre d'usinage » au même titre que leurs collègues des centres d'usinage et que la justification d'une telle démarche lui échappe dès lors que l'ensemble des postes hors centre d'usinage a été supprimé, la cour d'appel s'est fondée sur un motif impropre à caractériser l'existence d'une seule et même catégorie professionnelle, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 du code du travail ;
3°/ que l'employeur justifiait que le regroupement des salariés de l'activité usinage au sein d'une même catégorie professionnelle aurait été sans incidence pour M. Z..., dans la mesure où sa situation personnelle ne lui donnait pas suffisamment de points pour être classé parmi les trois salariés non-licenciables en dépit d'une excellente évaluation professionnelle ; qu'en refusant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si M. Z... aurait été épargné par la mesure de licenciement si les critères d'ordre des licenciements définis en concertation avec les représentants du personnel avaient été appliqués au sein d'une catégorie professionnelle regroupant tous les salariés de l'activité usinage, pour apprécier le préjudice résultant de la violation des règles relatives à l'ordre des licenciements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir souverainement constaté qu'au sein de l'activité d'usinage, les salariés exerçaient des fonctions similaires sur des machines de générations différentes, sans que l'employeur ne démontre que le pilotage de l'une ou l'autre de ces machines ait nécessité une formation de base spécifique ou une formation complémentaire excédant l'obligation d'adaptation, a pu en déduire que l'employeur en scindant ces fonctions en deux catégories professionnelles et en mettant en oeuvre les critères d'ordre des licenciements dans chacune d'elles, n'avait pas respecté ces critères ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Rep international aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Rep international à payer à M. Z... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Rep international.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société REP INTERNATIONAL n'a pas respecté les critères d'ordre des licenciements, et d'AVOIR condamné la société REP INTERNATIONAL à verser à Monsieur Z... la somme de 25. 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif au non-respect des critères d'ordre de licenciement ;
AUX MOTIFS QU'« il convient d'apprécier le respect des critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements par référence aux catégories d'emplois et aux fonctions réellement exercées ; que la notion de catégorie professionnelle, qui sert de base à l'établissement de l'ordre des licenciements, concerne l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'en l'espèce, la S. A. S. REP INTERNATIONAL a distingué deux catégories au sein de son activité d'usinage :. une catégorie « hors centre d'usinage » (fraisage, tournage, ajustage), dont les quatre postes ont été supprimés, et notamment celui de Gérard Z...,. une catégorie « centre d'usinages » comprenant cinq postes de travail, dont deux ont été supprimés ; que militent en faveur de la thèse de l'intimé, selon laquelle les neuf postes ci-dessus étaient initialement inclus dans une catégorie unique, plus encore que l'organigramme qui constitue la pièce 14 de Gérard Z..., le tableau d'application des critères d'ordre aux catégories « hors centre d'usinage » et « centres d'usinages » (pièce n° 69-5 de la société) ; qu'en effet, la suppression de l'ensemble des postes d'une catégorie rend vaine l'application des critères, ce que l'employeur a d'ailleurs rappelé à Gérard Z... dans une lettre du 23 juillet 2009 ; que la pièce 69-5 fait cependant apparaître que les charges de famille, l'ancienneté, l'éventuel handicap, l'âge et la valeur professionnelle de Messieurs A..., B..., C... et Z... ont été pondérés au même titre que ceux de leurs cinq collègues des centres d'usinage ; que la justification d'une telle démarche échappe à la Cour ; que selon l'article L 6321-1 du code du travail, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail ; qu'il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ; qu'au regard de l'obligation d'adaptation mise ainsi à la charge de la S. A. S. REP INTERNATIONAL, le fait que des opérations d'usinage soient effectuées par les une sur des machines à commandes informatisées et par les autres sur des machines classiques et insuffisant pour caractériser l'existence de deux catégories différentes de salariés pour l'application des critères d'ordre de licenciement ; que les 6 points accordés pour l'ancienneté aux neuf salariés concernés correspondent à une ancienneté supérieure à quinze ans ; que Messieurs X... et Y..., classés dans la catégorie « centres d'usinage », avaient plus de cinquante-cinq ans ; qu'il est par conséquent très douteux qu'ils aient été aptes dès leur engagement à travailler sur des machines à commandes numériques ; que l'employeur ne rapporte pas la preuve de ce que le pilotage d'un centre d'usinage nécessite une formation de base spécifique ou une formation complémentaire excédant l'obligation d'adaptation ; qu'en conséquence, en scindant en deux catégories distinctes neuf salariés qui exerçaient des fonctions similaires sur des machines de générations différentes, la S. A. S. REP INTERNATIONAL a méconnu les dispositions de l'article L 1233-5 du code du travail ; que l'employeur, qui n'a pas apprécié les qualités professionnelles par catégories, ne peut être admis à effectuer a posteriori un nouveau découpage des catégories professionnelles pour tenter de démontrer que le résultat final, spécialement le licenciement de Gérard Z..., aurait été identique ; que le jugement qui a dit que la S. A. S REP INTERNATIONAL n'avait pas respecté les critères d'ordre de licenciement doit donc être confirmé ; que l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements pour motif économique prévues à l'article L 1233-5 du code du travail n'est pas soumise aux sanctions énoncées à l'article L 1235-3 du code du travail ; qu'elle constitue pour le salarié une illégalité qui entraîne pour celui-ci un préjudice, pouvant aller jusqu'à la perte injustifiée de son emploi, lequel doit être intégralement réparé selon son étendue ; qu'il en résulte que le salarié n'est pas dispensé de rapporter la preuve de celle-ci ; que Gérard Z..., né le 5 juin 1951, était âgé de cinquante-huit ans à la date de son licenciement ; qu'il a été indemnisé par Pôle Emploi jusqu'au 1er juillet 2011, date à laquelle l'Assurance Retraite Rhône-Alpes lui a attribué une retraite personnelle ; que la S. A. S. REP INTERNATIONAL sera condamnée à payer à Gérard Z... la somme de 25 000 ¿ à titre de dommages-intérêts » ;
1. ALORS QUE la catégorie professionnelle, qui sert de base à l'établissement de l'ordre des licenciements, concerne l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'en conséquence, ne peuvent être regroupés au sein d'une même catégorie professionnelle des salariés qui exercent des fonctions requérant des qualifications particulières et d'autres salariés qui ne disposent pas de ces qualifications particulières, peu important que ces derniers puissent acquérir les qualifications nécessaires pour occuper l'emploi des premiers dans le cadre d'une formation complémentaire relevant de l'obligation d'adaptation de l'employeur ; qu'en l'espèce, il est constant que le pilotage, le réglage et la maintenance de centres d'usinage requièrent une formation professionnelle particulière, que ne nécessitent pas les opérations d'usinage sur des machines classiques ; qu'en retenant cependant que les salariés qui effectuent des opérations d'usinage sur des machines classiques et ceux qui pilotent des centres d'usinage à commande numérique appartiennent à la même catégorie professionnelle, dès lors que l'employeur ne démontre pas que le pilotage d'un centre d'usinage nécessite une formation de base spécifique ou une formation complémentaire excédant l'obligation d'adaptation, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 1233-5 du Code du travail ;
2. ALORS, D'AUTRE PART, QU'en relevant encore que le tableau d'application des critères d'ordre des licenciements fait apparaître que l'employeur a appliqué ces critères aux salariés travaillant « hors centre d'usinage » au même titre que leurs collègues des centres d'usinage et que la justification d'une telle démarche lui échappe dès lors que l'ensemble des postes hors centre d'usinage a été supprimé, la cour d'appel s'est fondée sur un motif impropre à caractériser l'existence d'une seule et même catégorie professionnelle, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 du Code du travail ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'employeur justifiait que le regroupement des salariés de l'activité usinage au sein d'une même catégorie professionnelle aurait été sans incidence pour Monsieur Z..., dans la mesure où sa situation personnelle ne lui donnait pas suffisamment de points pour être classé parmi les trois salariés non-licenciables en dépit d'une excellente évaluation professionnelle ; qu'en refusant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si Monsieur Z... aurait été épargné par la mesure de licenciement si les critères d'ordre des licenciements définis en concertation avec les représentants du personnel avaient été appliqués au sein d'une catégorie professionnelle regroupant tous les salariés de l'activité usinage, pour apprécier le préjudice résultant de la violation des règles relatives à l'ordre des licenciements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-11688
Date de la décision : 27/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Licenciement collectif - Ordre des licenciements - Catégories professionnelles concernées - Catégorie - Détermination - Salariés exerçant des fonctions similaires - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Licenciement collectif - Ordre des licenciements - Fixation - Critères - Mise en oeuvre - Cadre - Détermination - Portée

Une cour d'appel, ayant constaté qu'au sein de l'activité d'usinage de l'entreprise, les salariés exerçaient des fonctions similaires sur des machines de générations différentes, sans que l'employeur ne démontre que le pilotage de l'une ou l'autre de ces machines ait nécessité une formation de base spécifique ou une formation complémentaire excédant l'obligation d'adaptation, a pu en déduire que l'employeur en scindant ces fonctions en deux catégories professionnelles et en mettant en oeuvre les critères d'ordre des licenciements dans chacune d'elles, n'avait pas respecté ces critères


Références :

article L. 1233-5 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 09 décembre 2013

Sur l'appréciation de la catégorie professionnelle servant de base à l'établissement de l'ordre des licenciements, à rapprocher :Soc., 30 juin 1993, pourvoi n° 91-43426, Bull. 1993, V, n° 188 (1) (rejet)

arrêt cité ;

Soc., 13 février 1997, pourvoi n° 95-16648, Bull. 1997, V, n° 63 (1) (rejet) ;Soc., 3 mars 1998, pourvoi n° 95-41610, Bull. 1998, V, n° 113 (cassation partielle) ;Soc., 16 mars 2005, pourvoi n° 02-45753, Bull. 2005, V, n° 93 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 mai. 2015, pourvoi n°14-11688, Bull. civ. 2015 n°5,V, n°103
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015 n°5,V, n°103

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : M. Finielz (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Depelley
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.11688
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