LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Michel X...,
- Mme Iwona Y..., épouse X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 1er octobre 2013 qui les a condamnés, le premier, pour abus de biens sociaux, abus de confiance, blanchiment aggravé, fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, à quinze mois d'emprisonnement, 100 000 euros d'amende et une interdiction définitive de gérer, la seconde, pour recel et complicité de blanchiment aggravé, à un an d'emprisonnement, dont dix mois avec sursis, 10 000 euros d'amende et trois ans d'interdiction de gérer, a ordonné une mesure de confiscation et une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 mars 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Chaubon, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller CHAUBON, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SASSOUST ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires, commun aux demandeurs, et le mémoire en défense produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'un rapport de Z... faisant état de flux financiers importants et réguliers en provenance de plusieurs sociétés au bénéfice de M. X..., une information a été ouverte qui a révélé que celui-ci, éditeur, avait créé trois sociétés dont il était le gérant de fait, les sociétés Editions X..., MGA Presse et Liberty net, succursale française d'une société de droit américain ; qu'il a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir abusé des biens de la société Editions X... en encaissant des recettes sur ses comptes personnels et de la société MGA Presse en lui faisant supporter des frais personnels et en détournant des recettes à son profit ou à celui de la société Liberty net, pour abus de confiance au préjudice de cette dernière société en opérant des prélèvements dans sa trésorerie, du chef de blanchiment aggravé pour avoir, de manière habituelle, placé sur des comptes bancaires ouverts à la banque Fortis de Bruxelles des sommes destinées aux sociétés Editions X... et Liberty net, enfin, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité ; que son épouse, Mme X..., a été renvoyée devant le tribunal correctionnel des chefs de complicité de blanchiment aggravé et de recel de fonds provenant des abus de biens sociaux au préjudice de la société Editions X... ainsi que de l'abus de confiance au préjudice de la société Liberty net ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 3 et 1837 du code civil, 113-2, 121-3, 314-1, 324-1 du code pénal, L. 241-3 du code de commerce, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale et des principes généraux du droit international privé, défaut de motif, défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré M. X..., coupable des faits qui lui sont reprochés d'abus de confiance, d'abus des biens ou du crédit d'une société par un gérant à des fins personnelles et de blanchiment aggravé ;
" aux motifs propres que « sur les abus de biens sociaux commis à rencontre des sociétés Editions X... et MGA Presse : M. X... a reconnu avoir été le gérant de fait des sociétés Editions X..., MGA Presse et Liberty Net ; que l'information a établi que pour des raisons fiscales, M. X... avait ponctionné la trésorerie des sociétés Editions X... et MGA Presse, pour placer les sommes qui devaient revenir à ces sociétés sur ses comptes personnels et ceux de ses proches (Iwona Y... et les membres de sa famille), ses comptes personnels et le compte Fortis ouvert en Belgique au nom de la société Liberty Net ; que M. X..., qui ne conteste pas la matérialité des faits incriminés sous la qualification d'abus de biens sociaux, fait toutefois plaider sa relaxe en soutenant que les sociétés Editions X... et MGA Presse étaient fictives, puisqu'en réalité, il s'était toujours comporté comme un éditeur en nom personnel, disposant des recettes provenant des clients qu'il encaissait sur ses propres comptes, et payant ses fournisseurs ainsi que son unique collaborateur, M. Grégory X..., par le débit de ces derniers ; qu'il fait valoir qu'aucun des associés n'a libéré ses apports ; qu'il considère, dès lors, qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir commis des abus de biens sociaux à l'égard de sociétés fictives, dépourvues d'affectio societatis et uniquement constituées en vue d'éluder l'application des dispositions fiscales ; mais que l'inapplication des dispositions relatives aux abus de biens sociaux ne saurait être invoquée du fait d'un fonctionnement de ces sociétés, au demeurant régulièrement immatriculées, étranger aux règles légales, et en particulier d'une absence d'affectio societatis résultant d'un défaut de souscription au capital social et de vocation des associés aux bénéfices et aux pertes, dès lors que comme en l'espèce, aucune action en nullité desdites sociétés n'a été engagée ; qu'il s'ensuit que c'est à juste titre que le tribunal correctionnel de Périgueux a retenu M. X... dans les liens de la prévention s'agissant des abus de biens sociaux commis à l'encontre des sociétés Editions X... et MGA Presse, que sur l'abus de confiance commis au préjudice de la société Liberty, le système utilisé pour les sociétés de droit français Editions X... et MGA a également servi à détourner des sommes revenant à la société de droit américain, la société Liberty Net ; que l'information a établi que M. X... avait perçu le montant des recettes adressés par mandats cash à la société Liberty Net, pour un montant de près de 800 000 euros, après que M. B..., représentant de la société en France, soit allé les présenter pour encaissement ; que M. X... a reconnu qu'il avait perçu ces sommes et qu'il les avait utilisées à des fins personnelles pour les besoins du ménage ou la gestion des immeubles ; que les investigations menées ont aussi permis d'établir que des sommes importantes avaient été distraites du compte Fortis de la société Liberty Net pour profiter à M. X..., ses proches et ses connaissances ; que dans ses dernières déclarations, M. X... minimise l'étendue de son rôle dans les détournements ; que toutefois, son activité de gérant de fait est établie par les déclarations de M. B... et de la secrétaire Mme C..., par les courriers saisis et par les investigations bancaires qui ont révélé que M. X... prenait les décisions et percevait les recettes de la société Liberty Net ; que la qualité de gérant de fait du prévenu étant constante et les détournements caractérisés, c'est à bon droit que les premiers juges l'ont déclaré coupable d'abus de confiance au préjudice de la société Liberty Net ; que (sur) le blanchiment aggravé, les investigations ont permis d'établir que l'apparente régularité des comptes des trois sociétés (Editions X..., MGA et Liberty) dissimulait un important détournement de recettes vers des comptes bancaires situés en Belgique, notamment le compte Fortis ouvert au nom de la société Liberty Net LLC ; que le chiffre d'affaires global non déclaré des trois sociétés a été évalué à 5 827 202 euros pour la période 2001-2004 ; qu'il a été également constaté que de nombreux mouvements financiers avaient eu lieu sur les comptes bancaires en Belgique, en débit et en crédit, entre les comptes à vue et les comptes à terme de M. X... et de la société Liberty Net ; qu'en conséquence, le délit de blanchiment aggravé est bien constitué à l'encontre de M. X... » ;
" et aux motifs adoptés que « ce n'est qu'en 2012 que M. X... imagine d'invoquer la nullité pour cause de fictivité de sociétés créées en 1994, 1996 et 2002, et il ne l'a jamais soutenue devant la juridiction commerciale ; que ce débat est d'un intérêt secondaire puisque même si une société fictive est nulle et non existante, cette nullité est inopposable au tiers de bonne foi comme l'administration fiscale notifiant un redressement et que la nullité, lorsqu'elle est poursuivie, n'entraîne disparition de la société que pour l'avenir ; que les infractions commises à l'abri de sociétés (fictives ou non) demeurent et M. X... est malvenu à se plaindre maintenant de ses propres turpitudes pour tenter de se soustraire à sa responsabilité pénale ; que M. X..., bien que particulièrement avisé en la matière du fait de ses activités et déboires passés, commettait donc encore des délits de fraude fiscale en se soustrayant à l'établissement et au paiement total ou partiel des impôts pour ses revenus et ceux de la société X..., ou encore ceux de la société Liberty Net qui exerçait son activité essentiellement en France ; qu'il convient de rappeler que le montage juridique mis en place avait pour objet d'éviter un nouveau redressement fiscal et que l'élément intentionnel apparaît donc suffisamment établi » ;
" 1°) alors que tout jugement ou arrêt doit constater l'existence de tous les éléments constitutifs de l'infraction dont le prévenu est déclaré coupable ; qu'en jugeant M. X... coupable d'abus de biens sociaux à l'encontre des sociétés Editions X... et MGA Presse, d'abus de confiance à l'encontre de la société Liberty Net et de blanchiment aggravé, sans rechercher si la conviction dans laquelle M. X... se trouvait de gérer son patrimoine propre au travers de sociétés fictives n'excluait pas l'élément intentionnel constitutif des délits d'abus de biens sociaux, d'abus de confiance et de blanchiment aggravé, la cour d'appel a méconnu les texte et les principes susvisés ;
" 2°) alors qu'il incombe au juge pénal saisi d'une contestation de l'existence d'une société de droit étranger en raison de sa fictivité, lorsque de cette existence dépend la matérialité des infractions poursuivies, de rechercher la loi compétente, selon la règle de conflit, puis de déterminer son contenu et de l'appliquer ; que M. X... alléguait l'inexistence de la société de droit américain Liberty Net, celle-ci, dépourvue dès l'origine d'affectio societatis, étant fictive, de telle sorte que M. X... ne pouvait être jugé coupable d'abus de confiance à l'égard d'une société inexistante, quand bien même sa nullité n'aurait pas été prononcée avant les faits litigieux ; qu'en jugeant que M. X... aurait commis un abus de confiance à l'égard de la société de droit américain Liberty Net au motif qu'en droit français une société fictive est nulle et non inexistante et que la nullité d'une société est dépourvue de rétroactivité, sans rechercher la loi applicable aux conséquences de la fictivité de cette société étrangère, la cour d'appel a méconnu les textes et principes susvisés " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériel qu'intentionnel, les délits, notamment, d'abus de biens sociaux, d'abus de confiance et de blanchiment aggravé dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche comme nouveau et mélangé de fait, ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 321-1 et 324-1 du code pénal, préliminaire, 591, 593 et 609 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré Mme X..., coupable des faits qui lui sont reprochés pour les faits de recel et de complicité de blanchiment aggravé ;
" aux motifs propres que « Mme X..., est poursuivie pour recel d'abus de biens sociaux, recel d'abus de confiance et complicité de blanchiment aggravé ; qu'elle a déclaré vivre en France depuis 1990 et avoir épousé M. Michel X... en 1994 ; que le 17 décembre 2004, Mme X... a été mise en examen des chefs de recel d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Editions X..., de recel d'abus de confiance au préjudice de la société Liberty Net et de complicité de blanchiment aggravé ; que Mme X... était la gérante des trois société civiles immobilières, ce qu'elle a reconnu ; qu'elle a déclaré savoir que son mari utilisait l'argent des sociétés à des fins personnelles, son salaire perçu auprès de la société MGA Presse étant modeste et alors qu'il faisait l'objet d'une saisie sur ses rémunérations ; qu'elle a contesté être informée de mouvements de fonds anormaux impliquant les comptes bancaires de sa famille ; qu'elle a admis avoir accès au compte Fortis de la société Liberty Net au moyen d'une procuration dont elle affirme en revanche n'avoir jamais fait usage ; que Mme X... fait plaider sa relaxe aux motifs qu'il n'est pas démontré qu'elle ait bénéficié en connaissance de cause des fonds prélevés dans la société Editions X... ou détournés au préjudice de la société Liberty Net, et qu'elle ait participé à l'opération de blanchiment dont son mari a été reconnu coupable ; que si Mme X... soutient n'avoir eu aucune responsabilité dans les activités commerciales de son mari, elle était toutefois parfaitement informée de ce qu'il avait fait l'objet de redressements fiscaux, et elle connaissait par ailleurs le montant de son salaire à la société MGA, d'un montant de 2 500 00 euros ; que, par ailleurs, les écoutes téléphoniques ont révélé qu'elle avait été informée des sommes rapportées par son mari à la suite d'un voyage à Paris en octobre 2004 (« on ramène pas loin de 40-50 000 00 euros quand même ») et qu'elle craignait d'être sous écoutes puisqu'elle a demandé à M. X... de ne pas prononcer le nom (qui s'avérait être celui de M. D..., gérant en exercice de la société MGA) lors d'une conversation téléphonique ; qu'elle était co-titulaire du compte Fortis Liberty Net et disposait d'une procuration sur les comptes à vue et à terme de M. X... ouverts à la banque Fortis, comptes auxquels elle avait donc un libre accès ; qu'entendu par le juge d'instruction dans le cadre d'une confrontation avec M. X... notamment, M. B..., gérant de la société Liberty Net, a déclaré à propos de l'activité de cette société « offshore » : « II s'agissait en fait d'un vaste système de blanchiment d'argent ; que les sociétés étaient créées et dirigées par le cabinet Biraben, M. X... était le principal bénéficiaire de ce blanchiment ainsi que son épouse » ; que sachant que son mari n'avait pour toutes ressources légales que son salaire de gérant de la société MGA sur lequel l'administration fiscale prélevait des sommes de 1 300 00 euros à 1 500 euros par mois, Mme X... femme d'affaires avisée gérante de trois sociétés civiles immobilières et titulaire d'un diplôme d'économie, ne pouvait ignorer l'origine délictueuse des sommes importantes dont M. X... disposait et dont il la faisait bénéficier en sa qualité d'épouse ; qu'en considération de cet ensemble d'éléments, la cour d'appel a acquis l'intime conviction que Mme X... s'est bien rendue coupable de l'ensemble des infractions qui lui sont reprochées ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point » ;
" et aux motifs adoptés que « Mme X..., d'origine étrangère, mais implantée de longue date en France était parfaitement informée et bien placée pour connaître le fonctionnement des sociétés, assurant même la gérance de droit des trois société civiles immobilières ; qu'elle ignorait probablement le détail et l'ampleur des détournements, mais en profitait au quotidien ainsi que l'ensemble de sa famille, si nécessaire par le biais des procurations, notamment sur le compte Fortis ; que sa présence régulière dans les locaux de l'entreprise et les écoutes téléphoniques significatives (D194) complètent cette évidence, caractérisant le recel des abus de biens sociaux et de confiance et sa complicité dans les opérations de blanchiment » ;
" 1°) alors que la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné M. X... pour abus de biens sociaux, abus de confiance et blanchiment aggravé entraînera sa cassation par voie de conséquence en ce qu'il a condamné Mme X... pour avoir recelé et blanchi le produit des infractions que celui-ci aurait commises ;
2°) alors que constitue un blanchiment le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ; que le fait de bénéficier, même en connaissance de cause, de partie du produit d'un délit commis par un tiers afin de faire face à ses dépenses quotidiennes ne constitue pas le délit de blanchiment ; qu'en jugeant que la présence de Mme X... dans les locaux de l'entreprise (jugement, page 16 in fine), le fait qu'elle « ignorait probablement le détail et l'ampleur des détournements, mais en profitait au quotidien ainsi que l'ensemble de sa famille » (jugement, page 16, pénultième §), la preuve apportée par les écoutes téléphoniques qu'elle connaissait l'existence de transferts illicites (arrêt, page 13 § 6) et le libre accès aux comptes de M. X... à la banque Fortis (ibid. § 7) permettaient d'établir le délit de blanchiment aggravé, sans caractériser aucun concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit, la cour d'appel a méconnu les textes et le principe susvisés " ;
Attendu que pour déclarer Mme X... coupable de recel et de complicité de blanchiment aggravé, l'arrêt énonce notamment que, gérant elle-même trois sociétés civiles immobilières et étant co-titulaire du compte bancaire ouvert au nom de la société Liberty net, elle était régulièrement présente dans l'entreprise et, très informée des activités de son mari, elle disposait d'une procuration sur les comptes à vue et à terme de M. X... ouverts à la banque Fortis, auxquels elle avait un libre accès ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur les troisième et le quatrième moyens de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-24 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à une peine d'emprisonnement de quinze mois ;
" aux motifs propres que « le tribunal a fait une juste appréciation des peines prononcées à l'encontre tant de M. X... que de Mme X..., qu'il s'agisse de la peine principale ou des peines complémentaires ou de confiscation ; qu'il sera donc confirmé en toutes ses dispositions pénales » ;
" et aux motifs adoptés que, « la personnalité, le passé pénal et l'implication de chacun justifie de prononcer des peines à l'encontre de M. X... à hauteur de quinze mois d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende » ;
" alors qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 dudit code ; qu'en condamnant M. X... à une peine de quinze mois d'emprisonnement sans sursis au seul motif adopté que « la personnalité, le passé pénal et l'implication de chacun justifie de prononcer des peines à l'encontre de M. X... à hauteur de quinze mois d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende » (jugement, page 18 § 3), sans indiquer les raisons pour lesquelles toute autre sanction était manifestement inadéquate, la cour d'appel a méconnu les textes et principes cités " ;
Et sur le quatrième moyen subsidiaire de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-24 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Mme Y... à une peine d'un an d'emprisonnement dont dix mois avec sursis ;
" aux motifs propres que le tribunal a fait une juste appréciation des peines prononcées à l'encontre tant de M. X... que de Mme Y..., qu'il s'agisse de la peine principale ou des peines complémentaires ou de confiscation ; qu'il sera donc confirmé en toutes ses dispositions pénales ;
" et aux motifs adoptés que, Mme Y..., épouse X..., sera condamnée à la peine d'un an d'emprisonnement dont dix mois avec sursis et 10 000 euros d'amende ;
" alors qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 dudit code ; qu'en condamnant Mme Y... à une peine d'un an d'emprisonnement dont dix mois seulement avec sursis au seul motif adopté que Mme Y..., épouse X..., sera condamnée à la peine d'un an d'emprisonnement dont dix mois avec sursis et 10 000 euros d'amende » (jugement, p. 19 § 2), sans indiquer les raisons pour lesquelles toute autre sanction était manifestement inadéquate, la cour d'appel a méconnu les textes et principes cités " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 132-24 du code pénal, dans sa rédaction alors en vigueur ;
Attendu qu'il résulte de ce texte, qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 ;
Attendu que, pour condamner M. X... à la peine de quinze mois d'emprisonnement et Mme X... à la peine d'un an d'emprisonnement, dont dix mois avec sursis, l'arrêt se borne à énoncer que la personnalité, le passé pénal et l'implication de chacun justifient le prononcé de telles sanctions ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le caractère inadéquat de toute autre sanction et sur les mesures d'aménagement des peines d'emprisonnement prononcées, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le cinquième moyen de cassation subsidiaire, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 112-1 et 324-7 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, du principe de non-rétroactivité de la loi pénale, défaut de motifs et défaut de base légale ;
" en ce que la cour d'appel a fait interdiction définitive à M. X... d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale ;
" aux motifs propres que « le tribunal a fait une juste appréciation des peines prononcées à l'encontre tant de M. X... que de Mme X..., qu'il s'agisse de la peine principale ou des peines complémentaires ou de confiscation ; qu'il sera donc confirmé en toutes ses dispositions pénales » ;
" et aux motifs adoptés que « la personnalité, le passé pénal et l'implication de chacun justifie de prononcer des peines à l'encontre de M. X... à hauteur de quinze mois d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende ; qu'il lui sera fait interdiction de manière définitive d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale » ;
" alors que, seule peut être prononcée la peine légalement applicable à la date à laquelle les faits constitutifs d'une infraction ont été commis ; qu'en condamnant M. X..., pour des faits commis entre 2002 et 2004, à la peine complémentaire instaurée par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 d'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale, la cour d'appel a méconnu les textes et principes susvisés " ;
Et sur le sixième moyen de cassation subsidiaire, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 112-1 et 324-7 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, le principe de non-rétroactivité de la loi pénale, défaut de motifs et défaut de base légale ;
" en ce que la cour d'appel a fait interdiction pour trois ans à Mme X... d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale ;
" aux motifs propres que « le tribunal a fait une juste appréciation des peines prononcées à l'encontre tant de M. X... que de Mme X..., qu'il s'agisse de la peine principale ou des peines complémentaires ou de confiscation ; qu'il sera donc confirmé en toutes ses dispositions pénales » ;
" et aux motifs adoptés que « Mme X..., d'origine étrangère, mais implantée de longue date en France était parfaitement informée et bien placée pour connaître le fonctionnement des sociétés, assurant même la gérance de droit des trois sociétés civiles immobilières ; qu'elle ignorait probablement le détail et l'ampleur des détournements, mais en profitait au quotidien ainsi que l'ensemble de sa famille, si nécessaire par le biais des procurations, notamment sur le compte Fortis ; que sa présence régulière dans les locaux de l'entreprise et les écoutes téléphoniques significatives (D194) complètent cette évidence, caractérisant le recel des abus de biens sociaux et de confiance et sa complicité dans les opérations de blanchiment » ;
" alors que, seule peut être prononcée la peine légalement applicable à la date à laquelle les faits constitutifs d'une infraction ont été commis ; qu'en condamnant Mme X..., pour des faits commis entre 2002 et 2004, à la peine complémentaire instaurée par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 d'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale, la cour d'appel a méconnu les textes et principes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 112-1, 324-7 et 406 du code pénal ;
Attendu que seules peuvent être prononcées les peines légalement applicables à la date à laquelle les faits ont été commis ; qu'une loi édictant une peine complémentaire nouvelle ne peut s'appliquer à des faits antérieurs à son entrée en vigueur ;
Attendu qu'après avoir déclaré M. et Mme X... coupables des infractions précitées, commises jusqu'au 17 décembre 2004, l'arrêt les condamne, respectivement, à une interdiction définitive de gérer et à trois ans d'interdiction de gérer ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la peine d'interdiction de gérer n'est prévue par l'article 324-7 du code pénal que depuis l'entrée en vigueur, le 6 août 2008, de la loi du 4 août 2008, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue ;
Et sur le septième moyen de cassation, pris de la violation articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1382 du code civil, préliminaire, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a reçu la constitution de partie civile de la société Hirou, agissant en qualité de liquidateur de la société Liberty Net LLC contre M. et Mme X... et M. B... et en ce qu'il a condamné solidairement ceux-ci au paiement du passif de la société Liberty Net LLC ;
" aux motifs propres que « le tribunal a reçu la constitution de partie civile de la société Hirou, agissant en qualité de liquidateur de la société Liberty Net LLC contre les époux X... et M. B..., condamné solidairement ces derniers au paiement du passif de la société Liberty Net, rejeté sa demande d'attribution des fonds bloqués sur les comptes BNP Fortis, reçu la constitution de partie civile de l'administration des Impôts contre MM. X... et B..., et déclaré ceux-ci solidairement tenus avec la société Liberty Net au paiement des impôts fraudés et des pénalités afférentes ; qu'il convient de confirmer intégralement ces dispositions qui ne font pas l'objet de contestation en cause d'appel » ;
" et aux motifs adoptés que « la société Hirou, agissant en qualité de liquidateur de la société Liberty Net s'est constituée partie civile à l'encontre des quatre mis en examen ; que compte tenu de ce qui précède, elle n'est recevable que contre les époux X... et B... pour demander leur condamnation solidaire au règlement du passif » ;
" 1°) alors qu'en condamnant M. X..., solidairement avec Mme X... et avec M. B..., à supporter l'intégralité du passif de la société Liberty Net, sans préciser le fondement de cette condamnation ni le lien de causalité entre les fautes commises et le préjudice réparé, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que Mme X..., (page 10 de ses écritures d'appel), alléguait que la constitution de partie civile de la société Hirou « est irrecevable car elle suppose qu'au préalable soit démontré que Mme X... avait la qualité de dirigeant de droit ou de fait de cette société » et que M. X..., (page 7 de ses écritures d'appel), alléguait que la société Hirou ne peut « être déclarée recevable à l'égard de M. X... que dans la limite du passif déclaré déduction faite des sommes figurant sur les comptes de la société Liberty Net frappés d'opposition » ; qu'en jugeant que les dispositions civiles du jugement entrepris « ne font pas l'objet de contestation en cause d'appel » (arrêt, page 14), pour confirmer celles-ci, la cour d'appel a statué par des motifs en contradiction avec les chefs péremptoires des conclusions des parties, auxquels elle a de ce fait également omis de répondre, méconnaissant ainsi les textes et principes susvisés " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour condamner les époux X..., solidairement avec un autre prévenu, à supporter l'intégralité du passif de la société Liberty net représentée par son liquidateur, la société Hirou, constituée partie civile, l'arrêt se borne à énoncer que ces dispositions " ne font pas l'objet de contestation en cause d'appel " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans s'expliquer sur le fondement juridique de cette condamnation et sans répondre aux conclusions de M. X... relatives aux sommes figurant sur les comptes de la société Liberty net, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est également encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 1er octobre 2013, en ses seules dispositions relatives aux peines d'emprisonnement, aux peines complémentaires d'interdiction de gérer et aux condamnations civiles des demandeurs au profit de la société Hirou, représentant la société Liberty net, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, conformément à la loi et, le cas échéant, à l'article 132-19 du code pénal, dans sa rédaction applicable à partir du 1er octobre 2014 ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt mai deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.