LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 mars 2014), que Mme X... a interjeté appel du jugement rendu le 14 mai 2007 par un tribunal paritaire des baux ruraux qui, rejetant ses demandes, a constaté que le bail rural consenti à Bernard X... s'était poursuivi à son décès au profit de M. Gregory X... (M. X...) ; que le 5 novembre 2009, elle a délivré à ce dernier un congé reprise au profit de M. Y..., son fils ; que l'instance en contestation de ce congé engagée par M. X... a fait objet le 8 mars 2010 d'une décision de retrait du rôle ; qu'un arrêt du 28 juin 2011 ayant constaté le désistement de l'appel du jugement du 14 mai 2007 et son acceptation par M. X..., Mme X... a sollicité le 4 juin 2012 le rétablissement de l'instance en contestation du congé et soulevé sa péremption ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter l'incident de péremption d'instance et par suite d'annuler le congé du 5 novembre 2009 et de déclarer sans objet la demande tendant à l'expulsion de M. X..., alors, selon le moyen :
1°/ que le délai de péremption ne peut être interrompu par des diligences intervenues dans une instance différente de celle dont la péremption est demandée qu'à la condition que les deux instances soient unies par un lien de dépendance direct et nécessaire ; qu'il n'existe aucun rapport de dépendance directe et nécessaire entre l'instance portant sur la résiliation d'un bail rural du fait du décès du preneur et celle portant sur la contestation d'un congé pour reprise adressé au descendant du preneur, chacune pouvant à elle seule mettre fin au droit au bail indépendamment de l'autre ; qu'en décidant du contraire, pour en déduire que les actes accomplis dans l'instance en résiliation du bail avaient pour effet d'interrompre le délai de péremption de l'instance en contestation des congés, la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile ;
2°/ que pour interrompre le délai de péremption, la diligence du plaideur doit viser à continuer l'instance ; qu'il ressort de la procédure et en particulier de l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 28 juin 2011 « qu'à l'audience du 5 mars 2011, Mme Marie-Louise X... s'est désistée sans aucune réserve de son appel ; que M. Grégory X... et M. Jean-Claude X... ont déclaré accepter ce désistement et renoncer à leurs demandes formées aux termes de leurs écritures déposées le 8 juin 2008 fondées sur l'article 700 du code de procédure civile » ; qu'en affirmant que les déclarations des parties à l'audience du 5 mars 2011 étaient de nature à interrompre la péremption de l'instance en contestation du congé du 5 novembre 2009, quand ces déclarations consistant à prendre acte du désistement d'instance, ne pouvaient en elles-mêmes donner une impulsion à l'instance portant sur la validité du congé pour reprise, la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant d'abord souverainement relevé qu'il existait entre les instances en résiliation de bail et contestation de congé, pendantes devant la cour d'appel et devant le tribunal paritaire des baux ruraux, un lien de dépendance direct et nécessaire que Mme X... avait elle-même mis en évidence en précisant dans le congé du 5 novembre 2009 que celui-ci était donné sous réserve de la décision définitive de résiliation dans le cadre de la procédure pendante devant la cour d'appel et sans que le propriétaire renonce à sa demande de résiliation du bail, de sorte que si la cour, infirmant le jugement du 14 mai 2007 avait fait droit à sa demande de résiliation de bail, l'instance en contestation du congé aurait été privée d'objet, et ensuite exactement retenu qu'il résultait de l'arrêt du 28 juin 2011 que les déclarations orales des parties, de désistement de l'instance en résiliation de bail et d'acceptation de ce désistement, effectuées à l'audience du 5 mai 2011, constituaient des actes tendant à faire avancer le litige vers sa conclusion et à parvenir à l'achèvement de l'instance, la cour d'appel en a déduit à bon droit, sans violer les dispositions de l'article 386 du code de procédure civile, que ces diligences processuelles dans la première instance avaient interrompu le délai de péremption de la seconde instance en contestation du congé qui avait commencé à courir le 8 mars 2010, de sorte que celle ci n'était pas périmée lorsqu'à l'audience du 19 décembre 2012, M. X... avait demandé aux premiers juges de déclarer nul le congé ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille quinze et signé par Mme Robineau, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, et par Mme Genevey, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme X... et M. Y....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté l'incident de péremption d'instance et par suite annulé le congé du 5 novembre 2009 portant sur 10ha 65a de la parcelle sise terroir de Lamotte-Warfusee (Somme), lieudit « ... », cadastrée section ZW n° 4 d'une contenance totale de 21ha 30a 07ca et déclaré sans objet les demandes de Mme Marie-Louise X... et de M. François Y... tendant à l'expulsion de M. Grégory X... et à l'organisation d'une mesure d'expertise ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article 386 du Code de procédure civile l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; qu'en l'espèce l'affaire opposant M. Grégory X... à Mme Marie-Louise X... en contestation du congé délivré le 5 novembre 2009 a fait l'objet le 8 mars 2010 d'un retrait du rôle et aucune diligence n'a été accomplie par les parties dans le cadre de cette instance avant le 4 juin 2012, soit postérieurement à l'expiration du délai biennal de l'article 386 précité, date à laquelle Mme Marie-Louise X... a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle en demandant au tribunal paritaire de dire l'instance périmée ; que pour se soustraire à la sanction énoncée à l'article 386 du Code de procédure civile M. Grégory X... invoque le caractère interruptif de péremption d'actes intervenus dans une instance l'opposant devant la présente Chambre à Mme Marie-Louise X... sur l'appel interjeté par cette dernière d'un jugement rendu le 14 mai 2007 par le Tribunal paritaire des baux ruraux d'Amiens l'ayant déboutée de sa demande de résiliation du bail du 31 mars 1977 en ce qu'il porte sur la parcelle sise terroir de Lamotte-Warfusee, lieudit « Au-dessus de la Masuré », cadastrée section ZW n° 4 et faisant l'objet du congé du 5 novembre 2009 contestée dans le cadre de l'instance ayant donné lieu à la décision de retrait du rôle du 8 mars 2010 ; qu'il existait entre les instances pendantes, d'une part, devant la Cour d'appel et, d'autre part, devant le Tribunal paritaire un lien de dépendance direct et nécessaire que Mme Marie-Louise Langignon elle-même avait mis en évidence en précisant au congé litigieux du 5 novembre 2009 que celui-ci était donné « sous réserve de décision définitive de résiliation dans le cadre de la procédure pendante devant la Cour d'appel » « sans que le propriétaire renonce à sa demande de résiliation du bail » dès lors que si la Cour, infirmant le jugement du 14 mai 2007 eut fait droit à, la demande de résiliation de bail l'instance en contestation du congé aurait été privée d'objet ; qu'il résulte de l'arrêt rendu le 28 juin 2011 par cette Chambre de la Cour produit aux débats (instance RG n° 10/ 4427) qu'à l'audience du 5 mai 2011, d'une part, Mme Marie-Louise X... s'est désistée sans aucune réserve de son appel du jugement rendu le 14 mai 2007 par le Tribunal paritaire des baux ruraux d'Amiens et, d'autre part, M. Grégory X... a déclaré accepter ce désistement et renoncer à sa demande antérieurement formée tendant au bénéfice des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que l'appel des dispositions du tribunal paritaire étant, selon l'article 892 du Code de procédure civile, instruite et jugé suivant la procédure dans représentation obligatoire et celle-ci étant orale en application de l'article 946 du même code ces déclarations des parties constituent des actes tendant à faire avancer le litige vers sa conclusion et à parvenir à l'achèvement de l'instance ; qu'ils ont interrompu le délai de la péremption de l'instance en contestation du congé du 5 novembre 2009 ayant commencé à courir le 8 mars 2010 de sorte que celle-ci n'était pas périmée, lorsqu'à l'audience du 10 décembre 2012 M. Grégory X... a demandé aux premiers juges de déclarer le congé litigieux nul et de nul effet ;
1) ALORS QUE le délai de péremption ne peut être interrompu par des diligences intervenues dans une instance différente de celle dont la péremption est demandée qu'à la condition que les deux instances soient unies par un lien de dépendance direct et nécessaire ; qu'il n'existe aucun rapport de dépendance directe et nécessaire entre l'instance portant sur la résiliation d'un bail rural du fait du décès du preneur et celle portant sur la contestation d'un congé pour reprise adressé au descendant du preneur, chacune pouvant à elle seule mettre fin au droit au bail indépendamment de l'autre ; qu'en décidant du contraire, pour en déduire que les actes accomplis dans l'instance en résiliation du bail avaient pour effet d'interrompre le délai de péremption de l'instance en contestation des congés, la Cour d'appel a violé l'article 386 du Code de procédure civile ;
2) ALORS QUE pour interrompre le délai de péremption, la diligence du plaideur doit viser à continuer l'instance ; qu'il ressort de la procédure et en particulier de l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 28 juin 2011 « qu'à l'audience du 5 mars 2011, Mme Marie-Louise X... s'est désistée sans aucune réserve de son appel ; que M. Grégory X... et M. Jean-Claude X... ont déclaré accepter ce désistement et renoncer à leurs demandes formées aux termes de leurs écritures déposées le 8 juin 2008 fondées sur l'article 700 du code de procédure civile » ; qu'en affirmant que les déclarations des parties à l'audience du 5 mars 2011 étaient de nature à interrompre la péremption de l'instance en contestation du congé du 5 novembre 2009, quand ces déclarations consistant à prendre acte du désistement d'instance, ne pouvaient en elles-mêmes donner une impulsion à l'instance portant sur la validité du congé pour reprise, la Cour d'appel a violé l'article 386 du Code de procédure civile.