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06/05/2015 | FRANCE | N°13-87857

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 06 mai 2015, 13-87857


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Charles X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 13 novembre 2013, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 février 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Nocqu

et, conseiller rapporteur, Mme Ract-Madoux, conseiller de la chambre ;
Greff...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Charles X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 13 novembre 2013, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 février 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Nocquet, conseiller rapporteur, Mme Ract-Madoux, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller NOCQUET, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général GUEGUEN ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1741 et 1750 du code général des impôts, des articles L. 12, L. 47, L. 48, L. 50 et L. 227 du livre de procédure fiscale et des articles 459, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale et de la violation du principe de l'indépendance des procédures pénale et administrative ;
" en ce que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement en rejetant l'exception de nullité de la citation relative à l'impôt sur le revenu ;
" aux motifs que M. X..., cité pour avoir minoré la déclaration de ses revenus de l'année 2002, fait valoir par l'intermédiaire de son avocat, en concluant à la nullité de la citation, qu'aux termes des articles L. 12, L. 47 et L. 50 du Livre des procédures fiscales (LPF) ainsi que de la jurisprudence du Conseil d'Etat, le vérificateur a l'obligation d'engager un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir avant de lui adresser une notification de redressement qui marque, selon l'article L. 48 du code précité, l'achèvement de la procédure de vérification ; qu'en l'espèce, l'examen de la situation fiscale personnelle menée par l'administration des impôts a abouti à une proposition de redressement le 29 juillet 2005, retenant un revenu distribué, issu de la société Mermoz Aviation Ireland, de 1 125. 641 euros, sans que soit auparavant intervenu un débat contradictoire sur ce montant ; que les trois entretiens relatifs à sa situation fiscale personnelle, du 30 septembre 2003, du 13 janvier 2004 et du 28 juin 2005, ont concerné des documents comptables qu'il avait produits et n'ont pas porté sur des revenus provenant de la société irlandaise ; que le compte-rendu sommaire de la première réunion mentionnait seulement l'examen de ses comptes bancaires et de ceux de ses proches ; que le deuxième entretien, au terme duquel ses bulletins de salaires lui ont été restitués, a également porté sur l'examen de ses comptes bancaires, comme en atteste le courrier de l'administration fiscale du 11 décembre 2003 ; que rien n'établit que la dernière réunion, dite « réunion de synthèse », ait porté sur le revenu litigieux ; qu'en tout état de cause, la proposition de rectification du 29 juillet 2005 a mentionné que l'existence de ce revenu avait été établie dans le cadre de la procédure de vérification de la société Mermoz Aviation Ireland qui a donné lieu à un redressement notifié un jour auparavant, le 28 juillet 2005 ; que, par ailleurs, une pièce d'une importance capitale, le contrat sur le fondement duquel la somme de 1 125 641 euros avait été versée (intitulé « Management Services Agreement ») n'a été communiqué par l'administration que le 18 novembre 2005 ; que, cependant que l'exception de nullité de la citation doit être rejetée ; que le prévenu, avant la notification de redressement, a bénéficié de trois entretiens relatifs à sa situation fiscale personnelle ; que le principe du débat oral et contradictoire relatif à cette situation a été respecté ; que le troisième entretien, dont le contenu n'a pas été révélé, est d'autant plus susceptible d'avoir évoqué le revenu litigieux que sa date est très proche de la proposition de rectification ; que M. X..., par la suite, a pu avec son avocat discuter pendant plusieurs mois le redressement envisagé ; qu'il l'a, le 15 septembre 2005, contesté en soutenant qu'il n'avait jamais été associé ou dirigeant de la société Mermoz Aviation Ireland et qu'il n'avait pu appréhender la somme d'1 125 641 euros placée sous séquestre ; qu'il a sollicité et obtenu deux entretiens, le 7 décembre 2005 et le 4 avril 2006 ; qu'il a, le 9 décembre 2005, formulé de nouvelles observations ; que l'administration lui a répondu le 14 avril 2006 ; que le juge administratif, dont il a invoqué la jurisprudence, a par ailleurs rejeté sa demande en indiquant : « que, dès lors que l'imposition, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes réputées distribuées à M. X...par la société Holco et la société Mermoz Aviation Ireland Ltd ne procède que des seules conséquences des vérifications de comptabilité de ces sociétés, l'absence de débat oral et contradictoire allégué au cours de l'examen de la situation fiscale personnelle du requérant est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition » ; que le jugement déféré, qui a fait droit à l'exception de nullité, doit être réformé ;
" 1°) alors que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, qui est une garantie essentielle aux droits de la défense dont le juge pénal doit assurer le respect, implique que le vérificateur engage, avant d'envoyer une notification de redressement qui marque l'achèvement de l'examen, un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; que l'arrêt attaqué constate que le caractère contradictoire de la procédure résulte à la fois du « troisième entretien » avant la proposition de rectification du 29 juillet 2005, « dont le contenu n'a pas été révélé », d'autre part de ce que « par la suite » M. X...a pu obtenir deux entretiens le 7 décembre 2005 et le 4 avril 2006, et formuler des observations le 9 décembre 2005 auxquelles l'administration a répondu, et enfin de ce que, selon le juge administratif, l'absence de débat oral et contradictoire est sans influence sur la régularité de la procédure, l'imposition supplémentaire résultant des seules vérifications de comptabilité des sociétés Holco et Mermoz Aviation Ireland Ltd ; que ces motifs inconciliables ¿ débat contradictoire antérieur ou postérieur à la notification de redressement, absence de débat contradictoire dans le cadre de l'examen de la situation fiscale personnelle ¿ ne permettent pas de saisir le fondement retenu par l'arrêt attaqué quant à l'existence et au déroulement de la procédure contradictoire ; qu'il est, en conséquence, privé de toute base légale ;
" 2°) alors qu'un motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en relevant, pour juger que le principe du caractère contradictoire de l'examen de la situation fiscale personnelle a été respecté, que « le troisième entretien, dont le contenu n'a pas été révélé, est d'autant plus susceptible d'avoir évoqué le revenu litigieux que sa date est très proche de la proposition de rectification » la cour d'appel a statué par des motifs hypothétiques et a ainsi privé de motivation sa décision ;
" 3°) alors que le caractère contradictoire de l'examen de la situation fiscale personnelle doit être assuré avant le terme de cette opération de contrôle, matérialisé par l'envoi de la notification de redressement ; qu'en relevant que, « M. X..., par la suite », soit après la proposition du 29 juillet 2005, « a pu avec son avocat discuter pendant plusieurs mois le redressement envisagé ; qu'il l'a, le 15 septembre 2005, contesté en soutenant qu'il n'avait jamais été associé ou dirigeant de la société Mermoz Aviation Ireland et qu'il n'avait pu appréhender la somme de 1 125 641 euros placée sous séquestre ; qu'il a sollicité et obtenu deux entretiens, le 7 décembre 2005 et le 4 avril 2006 ; qu'il a, le 9 décembre 2005, formulé de nouvelles observations ; que l'administration lui a répondu le 14 avril 2006 », la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et n'a ainsi pas légalement justifié sa décision ;
" 4°) et alors que le principe de l'indépendance des procédures relatives à l'établissement et au paiement de l'impôt et des poursuites du chef de fraude fiscale commande que le juge répressif vérifie par lui-même les éléments constitutifs de l'infraction ; qu'en se bornant à se référer, pour écarter l'exception de nullité de la citation, à l'appréciation de l'arrêt du 30 mai 2013 de la cour administrative d'appel de Douai selon laquelle « dès lors que l'imposition, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes réputées distribuées à M. X...par la société Holco et la société Mermoz Aviation Ireland Ltd ne procède que des seules conséquences de la vérification de comptabilité de ces sociétés, l'absence de débat oral et contradictoire alléguée au cours de l'examen de la situation fiscale personnelle du requérant est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition », sans apprécier par elle-même la source des renseignements utilisés par l'administration pour fonder les redressements entrepris et sans en déduire d'elle-même le respect ou non du caractère contradictoire de l'examen de la situation fiscale personnelle, la cour d'appel a violé le principe d'indépendance des procédures administrative et fiscale " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de la citation du prévenu, prise de l'absence de débat contradictoire au cours de l'examen de sa situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, d'où il résulte qu'avant la proposition de redressement, le contribuable a bénéficié d'un débat oral et contradictoire au sens de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 109, 111, 1741 et 1750 du code général des impôts, de l'article L. 227 du livre de procédure fiscale et des articles 459, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. X...coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement de l'impôt sur le revenu, pour avoir souscrit au titre de l'année 2002 une déclaration de revenus minorée ;
" aux motifs que M. X..., en application de l'article 170 du code général des Impôts (CGI), doit comme tout contribuable produire chaque année la déclaration d'ensemble de ses revenus personnels, mentionnant l'intégralité des bénéfices ou des revenus dont il a disposé au cours de l'année d'imposition ; que, conformément à l'avis rendu le 5 avril 2007 par la commission des infractions fiscales qu'il avait saisie le 19 septembre 2006, le directeur des services fiscaux de l'Oise a déposé plainte à son encontre le 9 mai 2007 pour avoir souscrit une déclaration de revenus minorée au titre de l'année 2002 en dissimulant un revenu de 1 125 641 euros provenant de la société Mermoz Aviation Ireland Ltd, dont le siège social était en Irlande mais qui disposait d'un établissement stable en France ; que l'administration, qui a évalué les droits éludés à 670 657 euros, fait valoir que le 19 décembre 2002, la société Mermoz Aviation Ireland, par l'intermédiaire d'un compte ouvert au nom de la société Cooperatie Mermoz UA, a versé la somme de 1 125 641 euros sur un compte ouvert à Guernesey, au nom de la société anglo-normande Slat Services Ltd ; que ce versement ne constituait pas une charge pour la société Mermoz Aviation Ireland dans la mesure où la réalité des prestations de la société anglo-normande n'était pas établie ; que la société Slat Services avait été créée le 28 octobre 2002, soit très peu de temps avant le versement litigieux et qu'elle était détenue intégralement par un trust dénommé The Slat Trust, dont M. X...était le constituant et le bénéficiaire ; que la somme litigieuse de 1 125 641 euros avait par la suite été placée sous séquestre sur le compte Carpa du barreau de Paris dans le cadre d'une procédure judiciaire diligentée contre le prévenu ; que M. X...soutient, par l'intermédiaire de son avocat, que la somme versée à la société Slat Services correspondait au paiement de prestations effectives ; qu'aux termes du contrat « Management Services Agreement » conclu avec la société Mermoz Aviation Ireland, la société anglo-normande devait gérer les sept avions propriétés de la société Irlandaise, assurer leur maintenance et percevoir les loyers provenant de leurs locations ; que, par ailleurs, la société Holco, qu'il détenait et dirigeait, cédait le 23 janvier 2003 à M. Y..., aux entités qu'il dirigeait, tous les titres, soit la totalité du capital, qu'elle détenait dans la société Cooperatie Mermoz UA, qui détenait elle-même à 100 % la société Mermoz Aviation Ireland ; qu'il ne disposait donc plus de la somme litigieuse et qu'il a dès lors fallu l'intervention du nouveau dirigeant, M. Y..., pour permettre, à la demande du juge d'instruction, qu'elle soit libérée et placée sous séquestre sur le compte Carpa du barreau de Paris ; que cependant, l'infraction reprochée est suffisamment caractérisée ; que les prestations de services de la société Slat Services, qui était de création très récente, le 28 octobre 2002, n'ont pas été établies ; que le contrat signé avec la société Mermoz Aviation Ireland a été conclu après le versement de la somme litigieuse, le 23 janvier 2003 ; que M. X..., lorsque la somme a été versée, était l'unique dirigeant et titulaire à 100 % du capital de la société irlandaise, via les sociétés Holco et Cooperatie Mermoz ; qu'il détenait également à 100 %, par l'intermédiaire d'un trust, The Slat Trust, dont il était le seul constituant et bénéficiaire, la société Slat Services ; qu'il était le seul dirigeant et bénéficiaire économique de cette dernière société lorsque la somme a été versée sur son compte bancaire, le 19 décembre 2002 ; que les fonds ont par la suite été séquestrés à sa demande et dans son seul intérêt, dans le cadre de la procédure judiciaire instruite contre lui ; que sa culpabilité doit être retenue ;
" 1°) alors que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en se bornant à relever que M. X...détenait la société Slat Services à 100 %, par l'intermédiaire d'un trust, The Slat Trust dont il était le seul constituant et bénéficiaire, et qu'il était le seul dirigeant et bénéficiaire économique de la société Slat Services lorsque la somme en litige a été versée sur le compte bancaire de cette société le 19 décembre 2002, sans constater, ainsi qu'il l'invitait pourtant à le faire, que M. X...a appréhendé effectivement les sommes versées sur ce compte de la société Slat Services, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;
" 2°) et alors que le juge répressif doit caractériser les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ; qu'en se bornant à juger que la somme de 1 125 641euros a été versée par la société Mermoz Aviation Ireland, dont M. X...était à la fois l'unique dirigeant et le titulaire à 100 % de son capital social via les sociétés Holco et Cooperatie Mermoz, à la société Slat Services, qu'il détenait également à 100 % par l'intermédiaire d'un trust The Slat Trust, sans constater que cette somme versée à la société Slat Services a été distribuée à son actionnaire The Slat Trust et donc à M. X..., seul constituant et bénéficiaire de ce trust, la cour d'appel a privé de base légale sa décision au regard des articles 109, 111 et 1741 du code général des impôts " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié sa décision sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six mai deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-87857
Date de la décision : 06/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 06 mai. 2015, pourvoi n°13-87857


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.87857
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