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16/04/2015 | FRANCE | N°14-13947

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 avril 2015, 14-13947


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que le conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes a assigné M. X... en paiement de cotisations ordinales ; que le Syndicat des dentistes solidaires et indépendants est intervenu volontairement à l'instance ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l

e jugement attaqué, après avoir relevé que M. X... était inscrit à tit...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que le conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes a assigné M. X... en paiement de cotisations ordinales ; que le Syndicat des dentistes solidaires et indépendants est intervenu volontairement à l'instance ;
Attendu que, pour rejeter la demande, le jugement attaqué, après avoir relevé que M. X... était inscrit à titre personnel au tableau de l'ordre des chirurgiens-dentistes et s'était, à ce titre, acquitté des cotisations ordinales, énonce qu'en exigeant de lui une deuxième cotisation, en sa qualité d'associé gérant unique de la société d'exercice libéral qu'il a créée, le conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes l'a soumis à une disposition propre aux sociétés civiles professionnelles ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'appréciation de la validité de la décision par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, exerçant en cela une prérogative de puissance publique, fixe le montant de la cotisation due obligatoirement par toute personne inscrite au tableau relève, à titre principal ou préjudiciel, de la compétence des juridictions administratives, la juridiction de proximité a excédé ses pouvoirs et méconnu le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable l'intervention volontaire du Syndicat des dentistes solidaires et indépendants, le jugement rendu le 16 décembre 2013, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris 6ème ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Paris 7e ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer au conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens dentistes.
Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir débouté le Conseil départemental de Paris de l'Ordre des chirurgiens-dentistes de sa demande en paiement des cotisations dues par Monsieur Philippe X... ;
AUX MOTIFS que l'article L 4122-2 du Code de la Santé Publique dispose dans ses quatre premiers alinéas : " Le conseil national fixe le montant de la cotisation versée à chaque ordre par toute personne inscrite au tableau, qu'elle soit physique ou morale ; II détermine également les quotités de cette cotisation qui seront attribuées à chaque conseil départemental, à chaque conseil régional ou interrégional et au conseil national, en précisant la part consacrée au fonctionnement des chambres disciplinaires placées auprès de ces instances. Les cotisations sont obligatoires. Toutefois, la cotisation n'est pas due par le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme réserviste sanitaire, dès lors qu'il n'exerce la profession qu'à ce titre. La cotisation doit être réglée au cours du premier trimestre de l'année civile en cours ". La loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 offre aux professions libérales médicales la possibilité d'exercer sous la forme d'une société commerciale, la Société d'Exercice Libéral (SEL). Le décret d'application sur les SEL, permettant aux chirurgiens-dentistes d'exercer sous cette forme est intervenu en 1992 et a été codifié dans le Code de la Santé Publique (articles R 4113-1 et suivants). Ce décret précise notamment Ia possibilité d'exercer en SEL Unipersonnelle (praticien unique associé) ; A la stricte lecture des textes applicables, il résulte que l'exercice professionnel des chirurgiens-dentistes à titre individuel est réglementé par des dispositions figurant dans le Code de la Santé Publique. L'exercice en société des professions médicales, à savoir médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, est encadré par les dispositions de l'article R 4113-3 du Code de la santé publique qui prévoit qu'un médecin ou une sage-femme associé au sein d'une société d'exercice libéral ne peut cumuler cette forme d'exercice avec un exercice individuel. Cette limitation expresse n'est pas précisée à l'encontre des chirurgiens-dentistes. Dès lors, un chirurgien-dentiste exerçant à titre individuel peut devenir associé d'une société d'exercice libéral et inversement. Aucune disposition du. Code de la santé publique ne vient limiter le droit pour un chirurgien-dentiste d'exercer à la fois à titre libéral et dans le cadre d'une société d'exercice libéral. C'est, en ce sens que s'est prononcée, la réponse ministérielle Bacquet publiée le 16 juillet 2013 ; Monsieur Philippe X..., chirurgien-dentiste, a été inscrit dans un premier temps au Conseil de L'Ordre National, à titre individuel, le 9 novembre 1983, puis a exercé en qualité d'associé gérant, sous forme de SELARL Unipersonnelle, via la SELARL X... immatriculée le 18 avril 2006, avec un siège social sis ... 75006 Paris, société qui a été inscrite au tableau de l'Ordre des chirurgiens-dentistes depuis le 3 avril 2006, comme l'exigent les dispositions législatives et réglementaires. Monsieur Philippe X... toujours inscrit à titre personnel à l'Ordre des chirurgiens-dentistes, a continué à s'acquitter des cotisations ordinales à ce titre jusqu'à sa radiation en date du 1er décembre 2011. Le Conseil Départemental de Paris de l'Ordre National des chirurgiens-dentistes qui a exigé de Monsieur Philippe X... une deuxième cotisation ordinale en qualité d'associé gérant unique de la SELARLU X..., a ainsi soumis l'associé d'une société d'exercice libéral à une disposition propre aux sociétés civiles professionnelles. Sa demande doit donc être rejetée à ce titre ;

1°/ ALORS QUE la décision par laquelle le Conseil national de l'Ordre des chirurgiens-dentistes, exerçant en cela une prérogative de puissance publique, fixe le montant de la cotisation devant être obligatoirement versée par ses membres, est un acte administratif dont l'appréciation de la validité relève, a titre principal ou préjudiciel, de la compétence des juridictions administratives, seule l'action en recouvrement de cette cotisation ressortissant à la compétence des juridictions judiciaires, si bien qu'en rejetant la demande en paiement de cotisations formée par le Conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes pour des motifs étrangers aux conditions de leur recouvrement, le juge de proximité a excédé ses pouvoirs et méconnu le principe de la séparation des pouvoirs ;
2°/ ALORS QUE le Conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes rappelait que, par un arrêt du 7 décembre 2011, le Conseil d'Etat avait rejeté le recours de Monsieur Philippe X... à l'encontre de la décision implicite par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes avait rejeté son recours gracieux contre ses délibérations fixant le montant des cotisations dues par les personnes inscrites au tableau de l'ordre pour les années 2009 et 2010, si bien qu'en accueillant la contestation de Monsieur X... fondée sur le moyen même qui avait été précédemment rejeté par le Conseil d'Etat, le juge de proximité a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et violé la loi des 16 et 24 août 1790 ;
3°/ ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que pour rejeter la demande dont il était saisi le juge de proximité retient qu'en exigeant de Monsieur Philippe X... une deuxième cotisation ordinale en qualité d'associé gérant unique de la SELARLU X..., le Conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes a soumis l'associé d'une société d'exercice libéral aux dispositions propres aux sociétés civiles professionnelles ; qu'en se déterminant ainsi par un motif inintelligible, le juge de proximité n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°/ ALORS QUE la demande de condamnation au paiement de cotisations demeurées impayées était dirigée contre Monsieur Philippe X... personnellement, si bien qu'en retenant que le Conseil départemental de Paris de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes exigeait une cotisation ordinale en qualité d'associé gérant unique d'une SELARL, le juge de proximité a méconnu les termes du litige, violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-13947
Date de la décision : 16/04/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Nécessité d'apprécier la légalité, la régularité ou la validité d'un acte - Domaine d'application - Fixation par le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes du montant de la cotisation due par toute personne inscrite au tableau

SEPARATION DES POUVOIRS - Ordres professionnels - Ordre des chirurgiens-dentistes - Fixation du montant de la cotisation due par toute personne inscrite au tableau - Compétence - Détermination

L'appréciation de la validité de la décision par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, exerçant en cela une prérogative de puissance publique, fixe le montant de la cotisation due obligatoirement par toute personne inscrite au tableau relève, à titre principal ou préjudiciel, de la compétence des juridictions administratives


Références :

loi des 16-24 août 1790

principe de séparation des autorités administratives et judiciaires

Décision attaquée : Juridiction de proximité de Paris 6ème, 16 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 avr. 2015, pourvoi n°14-13947, Bull. civ. 2015, I, n° 103
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, I, n° 103

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Drouet
Rapporteur ?: Mme Canas
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 04/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.13947
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