LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 27 janvier 2014), que Mme X..., notaire (le notaire), a été chargée du règlement de la succession de Jean-Paul Y..., décédé le 24 mai 2007, laissant pour lui succéder ses deux enfants, M. A...
Y...et B...
Z..., mineur ; que le notaire, qui avait été déchargé de sa mission par les héritiers, a sollicité de M. A...
Y...et de Mme Marie-Paule Z..., administratrice légale de son fils mineur B...
Z..., le paiement d'une certaine somme au titre de ses honoraires ; qu'en l'absence d'accord de ses clients, le notaire a saisi le magistrat taxateur d'un tribunal d'instance ; que Mme Z..., ès qualités, et M. Y...ont formé un recours contre l'ordonnance rendue ;
Attendu que Mme Z..., ès qualités, et M. Y...font grief à l'ordonnance de fixer la rémunération du notaire à la somme de 5 980 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que même dans le cas où la demande de taxation concerne des honoraires libres fixés sur le fondement de l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978, il appartient à la partie demanderesse de faire vérifier les droits contestés par le secrétariat de la juridiction avant toute saisine du magistrat taxateur ; que la cour d'appel, qui a jugé l'inverse, a violé les articles 704, 719 et 721 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ;
2°/ qu'aux termes de l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978, si le notaire peut facturer des honoraires libres pour tous les actes qui ne relèvent pas du tarif, il doit, d'une part, informer le client au préalable et par écrit du caractère onéreux de la prestation de services et du montant estimé ou du mode de calcul de la rémunération à prévoir et, d'autre part, recevoir l'accord de celui-ci ; que la cour d'appel, qui a taxé les honoraires de Mme X...sans avoir vérifié si ces deux conditions avaient été respectées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ;
Mais attendu que l'arrêt retient à bon droit que la demande de taxation de Mme X...ne portant pas sur des émoluments tarifés, mais sur des honoraires libres, ceux-ci n'exigeaient pas de vérification préalable par le greffe et pouvaient, à défaut d'accord entre les parties, être fixés par le juge conformément à l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ;
Et attendu que l'exigence d'un avertissement préalable et chiffré n'est pas une condition de la rémunération du notaire et que le défaut d'avertissement ne fait pas obstacle, en l'absence d'un commun accord entre l'officier public et son client, à la fixation de cette rémunération par le juge taxateur, qui n'a pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité du notaire au titre d'un éventuel manquement à son obligation d'information préalable sur les conditions de sa rémunération ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Z..., ès qualités, et M. A...
Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Z..., ès qualités, et de M. A...
Y..., les condamne à payer à Mme X...la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme Z..., ès qualités, et M. A...
Y...
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR fixé la rémunération de Me Christine X..., notaire, à la somme de 5. 980 € ;
AUX MOTIFS QUE : « Attendu que le litige se rapporte à la succession de Jean-Paul Y..., décédé le 24 mai 2007, ayant pour héritiers ses deux fils, M. A...
Y..., d'une part, né de son union avec Mme Marie-Paule Z...dissoute par jugement de divorce du 8 janvier 1991, et B...
Z..., d'autre part, issu de sa relation avec Mme Marie-Paule Z...postérieurement à ce divorce ; Attendu que la demande de taxation de Mme X...ne portant pas sur des émoluments tarifés, mais sur des honoraires libres, ceux-ci n'exigeaient pas de vérification préalable par le greffe et pouvaient, à défaut d'accord entre les parties, être fixé par le juge conformément à l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ; Attendu que, préalablement à la demande de taxe, les consorts Y...-Z...ont été avertis du montant des honoraires réclamés par le notaire, ce dernier ayant retenu la somme de 5 900 €, correspondant aux provisions reçues, sur le compte créditeur de la succession et cette rétention ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 25 février 2013, rendue à la demande des appelants, ayant condamné Mme X...à transmettre au nouveau notaire l'ensemble des fonds de l'indivision à l'exception de la somme de 5 980 € TTC qui fait l'objet du présent litige ; Attendu que les consorts Y...-Z...ne peuvent prétendre avoir d'ores et déjà payé à Mme X...la somme de 4 122, 99 ¿ alors qu'ils contestent la rétention par celle-ci des provisions versées incluant cette somme, contestation qui est à l'origine de la présente procédure de taxe ; Attendu qu'il résulte des pièces produites que Mme X...a accompli toutes les diligences nécessaires à la liquidation et au partage de la succession ; qu'en dépit des efforts du notaire, le partage n'a pu aboutir malgré l'approbation du projet par le juge des tutelles qui écrivait à Mme X...le 27 mai 2008 : « J'ai eu un entretien avec Mme Z...et M. A...
Y...le 21 mai. Je les avais convoqués en espérant qu'ils s'accorderaient sur ce projet. J'ai malheureusement dû déchanter devant l'intransigeance de Mme Z.... Elle estime son fils mineur B... lésé par son frère aîné sans la moindre explication sérieuse. De surcroît elle présente d'autres revendications excessives (...). J'ai eu l'impression qu'elle cherchait à faire durer cette affaire et ainsi pénaliser A...(...). Je suis hélas sans nouvelles d'elle depuis 6 jours, ce que j'interprète comme une persistance dans sa position rigide et à mon avis sans issue, donc contraire à l'intérêt de B... » ; Attendu qu'il ressort de cette lettre que l'échec du partage n'est pas imputable à Mme X...et que cette dernière, qui a oeuvré dans l'intérêt des deux héritiers, ainsi qu'il se déduit de l'avis impartial du juge des tutelles, ne peut se voir reprocher d'avoir pris parti pour l'un au détriment de l'autre ; Attendu que Mme X...a entretenu une correspondance fournie avec M. Y...et Mme Z...; qu'elle a dressé plusieurs projets de déclaration de succession, deux projets de partage, une attestation immobilière ; qu'elle a géré les biens indivis jusqu'à son dessaisissement par Mme Z...en 2010, percevant les loyers, réglant les charges, les impôts et les taxes, réglant les factures des avocats et des huissiers ; Attendu que l'ensemble de ces diligences, accomplis dans un contexte conflictuel compliquant sa tâche, justifie que les honoraires soient fixés à la somme de 5 980 € » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE même dans le cas où la demande de taxation concerne des honoraires libres fixés sur le fondement de l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978, il appartient à la partie demanderesse de faire vérifier les droits contestés par le secrétariat de la juridiction avant toute saisine du magistrat taxateur ; que la cour d'appel, qui a jugé l'inverse, a violé les articles 704, 719 et 721 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'aux termes de l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978, si le notaire peut facturer des honoraires libres pour tous les actes qui ne relèvent pas du tarif, il doit, d'une part, informer le client au préalable et par écrit du caractère onéreux de la prestation de services et du montant estimé ou du mode de calcul de la rémunération à prévoir et, d'autre part, recevoir l'accord de celui-ci ; que la cour d'appel, qui a taxé les honoraires de Me X..., sans avoir vérifié si ces deux conditions avaient été respectées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978.