LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 526-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie ;
Attendu que le débiteur peut opposer à son liquidateur la déclaration d'insaisissabilité qu'il a effectuée avant d'être mis en liquidation judiciaire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été mis en liquidation judiciaire le 16 novembre 2011 ; que le liquidateur a saisi le juge-commissaire en vue d'être autorisé à poursuivre la vente par adjudication judiciaire d'un bâtiment agricole, aménagé pour partie en habitation, déclaré insaisissable par M. X... par acte notarié du 27 février 2010 ;
Attendu que pour confirmer l'ordonnance accueillant la demande du liquidateur, l'arrêt, après avoir énoncé que la déclaration d'insaisissabilité n'est opposable qu'aux créanciers dont les droits sont nés postérieurement à la publication de cette déclaration et à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant, constate que M. X... ne conteste pas avoir des dettes personnelles antérieures à la déclaration d'insaisissabilité puis retient que l'existence d'un créancier admis à qui est inopposable la déclaration d'insaisissabilité du bien est suffisante pour que les poursuites puissent s'exercer sur l'immeuble ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le juge-commissaire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs, autoriser le liquidateur à procéder à la vente d'un immeuble dont l'insaisissabilité lui était opposable, la cour d'appel a consacré un excès de pouvoir et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second grief :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom ;
Condamne la société Aurélie Y..., en qualité de liquidateur de M. X..., aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir écarté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité à agir de la Selarl Aurélie Y..., liquidateur judiciaire à la liquidation de M. X..., et de l'avoir autorisée à se pourvoir devant le tribunal de grande instance de Nevers pour y poursuivre la vente de l'immeuble appartenant à M. X... sis lieu-dit Les Marolles en la forme de la saisie immobilière ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la déclaration d'insaisissabilité n'est opposable qu'aux créanciers dont les droits sont nés postérieurement à la publication de cette déclaration et à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant ; qu'en l'espèce, M. X... ne conteste pas avoir des dettes personnelles antérieures à la déclaration d'insaisissabilité, notamment un prêt immobilier étranger à son activité professionnelle ; que dans la mesure où il existe au moins un créancier auquel la déclaration d'insaisissabilité est inopposable, c'est à bon droit que le premier juge a fait droit à la requête de la Selarl Aurélie Y..., le fait de la présence d'un créancier admis à qui est inopposable la déclaration d'insaisissabilité du bien étant suffisant pour que les poursuites puissent s'exercer sur cet élément d'actif ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les deux parties reconnaissent l'existence dans la collectivité des créanciers de M. X... de plusieurs créanciers dont la créance est extraprofessionnelle ; qu'en conséquence, dès lors qu'il existe au moins un créancier auquel cette déclaration est inopposable, l'immeuble tombe dans la saisie collective ; que si les textes sur l'insaisissabilité limitent la liberté de saisir, ils ne prévoient pas un droit de préférence sur le prix de vente de l'immeuble en cause ; qu'il en résulte que le liquidateur a intérêt à agir puisque les fonds de la vente seront partagés entre tous les débiteurs ;
1°) ALORS QU'est irrecevable à agir pour demander la vente d'un bien immobilier frappé d'une déclaration d'insaisissabilité régulière le liquidateur qui agit dans l'intérêt d'un créancier ou d'un groupe de créancier ; qu'en estimant le liquidateur recevable à demander la vente aux enchères publiques du bien litigieux pour la poursuite des seules dettes non-professionnelles de M. X... ou celles antérieures à la déclaration d'insaisissabilité, au motif que la déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable à leurs créanciers, la cour d'appel a violé les articles L. 641-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, L. 526-1 du même code et 31 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le débiteur peut opposer la déclaration d'insaisissabilité qu'il a effectuée conformément aux dispositions de l'article L. 526-1 du code de commerce avant qu'il ne soit mis en liquidation judiciaire ; qu'en confirmant l'ordonnance ayant ordonné la vente aux enchères publiques par le liquidateur d'un immeuble auquel l'insaisissabilité était opposable, la cour d'appel a commis un excès de pouvoir et violé les articles L. 641-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, et L. 526-1 du même code.