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17/03/2015 | FRANCE | N°13-19307

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 mars 2015, 13-19307


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Thales communication et security et la société Thales services, que sur le pourvoi incident relevé par la société Camille-compagnie d'assistance minière et industrielle ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2013) et les productions, que la société Compagnie d'assistance minière et industrielle (la société Camille) spécialisée dans l'ingénierie, le développement et la mise en exploitation de toute technologie concernant le sect

eur des mines, des matières premières, du recyclage et de l'environnement ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Thales communication et security et la société Thales services, que sur le pourvoi incident relevé par la société Camille-compagnie d'assistance minière et industrielle ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2013) et les productions, que la société Compagnie d'assistance minière et industrielle (la société Camille) spécialisée dans l'ingénierie, le développement et la mise en exploitation de toute technologie concernant le secteur des mines, des matières premières, du recyclage et de l'environnement a conclu le 10 mai 2006 un protocole d'accord avec la société Thales Engineering et Consulting (la société THEC), aux droits de laquelle vient la société Thales service (la société TS), portant sur le transfert de la technologie dite « TP3 » en vue de son développement puis de son exploitation commerciale ; que, soutenant que le protocole lui avait confié l'exclusivité du savoir-faire et de la technologie transmise et qu'en transmettant cependant son savoir-faire à sa filiale, la société Thales communications et security (la société TCS), la société THEC avait violé son obligation contractuelle de ne pas exploiter la technologie tandis que la société TCS avait commis une faute délictuelle en l'exploitant, la société Camille a assigné la société TS et la société TCS, respectivement, pour manquement à ses obligations contractuelles de confidentialité et de non-exploitation et pour avoir commis des actes de concurrence déloyale, ainsi qu'aux fins de voir ordonner à la société TCS, sous astreinte, la cessation immédiate et définitive de toute utilisation, exploitation, étude liées à la technologie et au savoir-faire décrits dans le protocole et ses annexes, outre leur condamnation in solidum à réparer son préjudice ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Attendu que les sociétés TS et TCS font grief à l'arrêt d'accueillir la demande en réparation alors, selon le moyen, que les juges du fond doivent préciser le fondement juridique de leurs décisions ; qu'en l'espèce, la société Camille fondait son action sur la responsabilité contractuelle ou la garantie d'éviction de la société TS et la responsabilité délictuelle de la société TCS, tandis que les demanderesses rappelaient notamment que l'article 1165 du code civil s'opposait à ce qu'une société puisse être poursuivie au nom de son appartenance à un groupe ; qu'en condamnant in solidum les sociétés TS et TCS à verser des indemnités à la société Camille, après avoir simplement évoqué la possible mise en oeuvre de la garantie d'éviction et du fait personnel de la société TS et sans préciser sur quel fondement juridique chacune des deux sociétés était redevable d'indemnités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 12 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en retenant que les condamnations à verser des indemnités sont mises à la charge, in solidum, de la société TS pour avoir violé l'exclusivité conférée à la société Camille, et de la société TCS pour avoir poursuivi ses activités après avoir été informée par la société Camille de la teneur du protocole, l'arrêt condamne la première sur le fondement de la responsabilité contractuelle et la seconde sur celui de la responsabilité délictuelle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Camille fait grief à l'arrêt de restreindre la cessation d'activité ordonnée à l'encontre de la société TCS à une application de la technologie TP3 aux seuls mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables, alors, selon le moyen :
1°/ qu'elle sollicitait la cessation par les sociétés Thales services et Thales communications et security de « toute utilisation, exploitation, étude liées à la Technologie et au Savoir-faire » ; que cette demande de cessation ne contenait aucune limitation quant aux matériaux concernés ; qu'en retenant cependant, pour limiter l'étendue de la cessation qu'elle a ordonnée aux activités liées à l'application de la technologie TP3 à certains matériaux, que « la demande de la société Camille tenda it à obtenir, sous astreinte, la cessation immédiate par la société Thales communications et Security de toute activité liée à l'application de la technologie du TP3 aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ses conclusions et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que le protocole d'accord du 10 mai 2006 prévoyait que le savoir-faire cédé à titre exclusif à la société Camille portait sur l'utilisation de la technologie TP3 dans « tout domaine d'application » ; que la cour d'appel a en outre constaté que la liste, figurant en annexe 1 du protocole, des documents devant être remis à la société Camille en vue de transmettre ce savoir-faire, citait des techniques de broyage concernant quinze types de matériaux différents ; qu'en énonçant cependant que le savoir-faire cédé à la société Camille concernerait uniquement « la technologie du TP3 appliquée aux domaines des mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du protocole d'accord du 10 mai 2006, en violation de l'article 1134 du code civil et de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
Mais attendu, d'une part, que la société Camille n'ayant pas précisé dans ses conclusions de quel savoir-faire elle demandait la protection, la cour d'appel ne peut se voir reprocher de les avoir dénaturées ;
Et attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé qu'aux termes du protocole d'accord du 10 mai 2006, la technologie contractuelle, objet du savoir-faire cédé à titre exclusif à la société Camille, comporte la technologie TP3 et tous les équipements et matériel qui lui sont liés, y compris les tests et essais déjà réalisés, l'arrêt constate que l'annexe 1 du même protocole décrit quinze techniques de broyage concernant différents matériaux et que les rapports d'essais ou d'analyse produits aux débats concernent le broyage de ces matériaux ; que c'est donc par une interprétation, exclusive de dénaturation, tant des écritures de l'appelant que du protocole précité et de ses annexes, que l'ambiguïté de leurs termes rendait nécessaire, que la cour d'appel a considéré que le savoir-faire cédé concernait uniquement la technologie du TP3 appliquée aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par décision spécialement motivée sur les autres griefs du pourvoi principal qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois, principal et incident ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Thales communication et sécurity et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné à la société TCS de cesser dans le mois suivant la signification de l'arrêt toute activité liée à l'application de la technologie TP3 aux mines, minéraux, minerais et aux matériaux recyclés ou recyclables, sous astreinte de 10. 000 € par jour de retard dans un délai de six mois, et d'AVOIR condamné in solidum les sociétés TS et TCS à payer à la société CAMILLE 200. 000 € d'indemnités et 30. 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU'« il est constant que le contrat porte sur les applications du premier groupe cité (retraitement et dépollution) ; que les intimés soutiennent que le secret est une des composantes de cette notion de savoir-faire au terme du règlement européen du 27 avril 2004, de sorte que la société THEC n'aurait pu transmettre un savoir-faire à CAMILLE d'une technologie qui relève du domaine public ; qu'elle ajoute que l'appelante a reconnu qu'aucun savoir-faire n'avait été cédé et qu'en toute hypothèse, sa transmission à la société TCS n'est pas démontré ni davantage son exploitation par cette dernière ; considérant que l'article 1. 5 du contrat définit le savoir-faire contractuel comme les connaissances techniques de THEC relatives à la technologie contractuelle précisant qu'il comprend l'assistance technique ¿ pour permettre le transfert de technologie ; considérant que cette définition ne s'oppose pas à celle donnée par le règlement communautaire précité ou par l'article 39. 2 des accords ADPI qui touchent au commerce encore citée par les intimées, lesquelles reconnaissent l'existence d'un savoir-faire en présence d'informations acquises par l'expérience qui ne sont pas aisément accessibles et n'ont pas été divulguées par leur titulaire ce qui leur confère une valeur commerciale ; considérant que pour en nier l'existence, les intimés soutiennent que la technique des puissances pulsées est connue depuis 1923, date de l'invention breveté du générateur Marx (procédé direct) que la technologie indirecte a été découverte en 1960 ou encore que la diversité des applications notamment médicales fait l'objet de nombreuses publications et même d'un colloque annuel de sorte que le secret qui participe à sa définition ne peut être retenu ; mais considérant que des singularités d'application peuvent dans le domaine technique connu constituer des secrets de fabrique dès lors que leur découverte a nécessité des recherches longues et coûteuses, les distinguant des règles de l'art que tout professionnel peut acquérir rapidement et qu'elles constituent alors un savoir-faire commercialisable ; considérant qu'en l'espèce, la thèse de M. X... permet de constater que si le principe du concassage et de recyclage des matériaux est connu, qui consiste en une restitution dans de l'eau de la charge de condensateurs par un commutateur de puissance, les paramètres permettant de parvenir aux résultats optimaux restent à définir, les essais portant notamment sur les distances inter électrodes ou le volume d'énergie utile pour atteindre la rupture diélectrique de l'eau ; qu'il résulte par ailleurs d'une étude de chercheurs japonais que le principe de libération extraction est fondé sur la différence entre propriétés physiques magnétique et électrique propres à chaque composant rentrant dans la constitution des minéraux ce dont il résulte que des procédés différents doivent être appliqués selon le matériau à détruire ; considérant encore que M. Y... précise dans l'attestation précitée que si des effets de résonance, de dilatation et le déplacement d'ions métalliques dans la structure cristalline des matériaux permettent de fragmenter les roches pour une raison qui reste mal comprise, de tels résultats n'ont pu être obtenus par THALES qu'au travers d'un assemblage très précis de certains composants qu'il qualifie de savoir-faire ; que le témoin précise encore que participent à sa définition : les notes de calcul sur les phénomènes d'oscillation amorties, les spécifications et réglages des condensateurs ; les spécifications techniques et références des câbles LMJ, les études et procédures de calcul sur la brisabilité, les documents techniques d'assemblage, les équipements liés à cette technologie ; considérant que la technologie contractuelle objet du savoir-faire cédé comporte aux termes de l'article 1. 2 du contrat la technologie du TP3 et tous les équipements et matériel qui lui sont liés y compris les tests et essais lorsqu'ils sont la propriété exclusive de THEC ; que la documentation contractuelle qui selon l'article 1. 4 la décrit comprend les pièces nécessaires ou utiles à l'utilisation des équipements permettant sa mise en oeuvre ; qu'elle fait l'objet d'une annexe 1 ; que cette annexe cite 15 techniques de broyage concernant différents matériaux corindon graphites, cartes électroniques, semi-conducteurs, circuits imprimés disques compacts, minéraux, minerais et kimberlite et 1 technique de traitement de verre feuilleté ; considérant encore que la société CAMILLE verse aux débats la première page de rapports d'essais ou d'analyse campagne d'essais ou encore synthèse concernant le broyage de ces différents matériaux outre des documents transmis, dont il précise la teneur en page 11 de ses conclusions ; que sur chaque page des rapports d'essais ou d'analyse figure la mention suivante : « ce document est la propriété de THALES. Il est remis à titre confidentiel. Il ne peut être copié, ni communiqué à des tiers sans autorisation écrite de THALES. Toute infraction donnera lieu à des poursuites judiciaires ; considérant ainsi que leur transmission dans le cadre de la cession démontre que la documentation contractuelle ne se limitait pas aux différents ouvrages traitant de l'état des connaissances en matière de puissances pulsés comme le soutiennent les intimés mais que la société THEC avait procédé à un certain nombre d'expériences lui ayant permis d'avancer pour atteindre l'objectif poursuivi d'une exploitation commerciale ; que la nature confidentielle des résultats obtenus permet ainsi de retenir qu'elle a bien transmis un savoir-faire à son cocontractant ;

considérant que les intimés ne sauraient encore soutenir que la société CAMILLE a elle-même dénié l'existence d'un savoir-faire en se référant à un courrier de son dirigeant rédigé en décembre 2007 ; que si ce dernier se plaint de l'absence de transmission du savoir-faire contractuel à cette date précisant que celui-ci ne saurait se résumer à la livraison d'un générateur de Marx et de son mode d'emploi qui relèvent du domaine public, il ajoute que le savoir-faire attendu est lié à l'utilisation de ces procédés et évoque les capitalisations faites par THALES durant ces dernières années dont il livre une liste sur laquelle figurent le bilan énergétique en fonction d'essai à qui il reproche de ne pas toujours indiquer les paramètres réglables et de ne pas expliquer le choix de ces valeurs en relation avec les résultats de la fragmentation voulue ; qu'il termine son courrier en indiquant qu'il serait contraire à l'esprit et à la lettre du contrat d'obliger la société CAMILLE à refaire le chemin technologique parcouru par THALES depuis une dizaine d'années ; et considérant que le PV de réception est signé par la société CAMILLE le 18 décembre 2008 prouve qu'elle a obtenu les réponses attendues et a effectivement bénéficiée du savoir-faire dégagé par la société THEC aux termes de ses années d'expérimentation ; qu'il apparaît ainsi que cette dernière lui a donné le 23 juin 2008 un certain nombre de calculs sur les distances maximales de plasma froid dont les intimés ne sauraient soutenir sans étayer leurs propos du moindre avis technique qu'il s'agirait de données connues ; considérant que les annexes du contrat et le contexte entourant sa signature permettent de constater que ce savoir-faire concerne la technologie du TP3 appliquée aux domaines des mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ; qu'en ayant cédé à la société CAMILLE l'exclusivité, la société TS venue aux droits de THEC aux termes d'un avenant n° 1 au protocole signé par les trois parties le 13 novembre 2007 ne pouvait en faire bénéficier la société TCS ; et considérant que les intimés ne sauraient conclure à la nullité du contrat pour imprécision de l'objet alors que la convention permet de le déterminer ou en application des règles du droit de la concurrence, alors que l'interdiction sollicitée ne concerne que les activités civiles de retraitement et dépollution laissant aux sociétés du groupe THALES l'opportunité de développer toute autre application de la technologie TP3 ; considérant que la société TCS qui n'avait pas contesté devant les premiers juges avoir bénéficié des informations détenues par sa société soeur soutient en cause d'appel que la société CAMILLE n'en rapporte pas la preuve ; mais considérant que l'état d'avancement de ses travaux que révèlent les documents produits comme il sera précisé ci-dessous ne permet pas de retenir cette nouvelle version des faits ; considérant qu'il résulte d'une « fiche projet » rédigée par l'Agence nationale de la recherche que cette société a développé une technologie innovante pour fragmenter des panneaux ; que cette technologie s'est montrée efficace sur la fragmentation de divers matériaux mais qu'aucun test ou étude n'ont été réalisés à ce jour sur des panneaux complexes ; que l'article précise encore que TCS utilisera deux prototypes, arc électriques direct et indirect dans l'eau, que ses travaux de recherche visent à comprendre les phénomènes physiques amenant à la fragmentation et de définir les matières recyclables suite à la fragmentation ; considérant que cette note d'information suffit à démontrer que contrairement à ce que soutiennent les intimées la société TCS travaille effectivement sur l'application de la technique de puissance pulsée à la dépollution par fragmentation de matériaux et recyclage ; et considérant que pour être parvenue à fragmenter rapidement divers matériaux, elle a nécessairement bénéficié du savoir-faire de sa société soeur qui n'a obtenu de tels résultats comme démontré ci-dessus qu'au terme de plusieurs années de recherches ; considérant au surplus que le ministère de l'industrie lui a accordé une subvention pour le traitement par fragmentation des cartes électroniques et des petits appareils en mélange dont le savoir-faire a été cédé à la société CAMILLE d'après les pièces produites » ;

1°) ALORS QUE les juges du fond doivent préciser le fondement juridique de leurs décisions ; qu'en l'espèce, la société CAMILLE fondait son action sur la responsabilité contractuelle ou la garantie d'éviction de la société TS et la responsabilité délictuelle de la société TCS, tandis que les exposantes rappelaient notamment que l'article 1165 du Code civil s'opposait à ce qu'une société puisse être poursuivie au nom de son appartenance à un groupe ; qu'en condamnant in solidum les sociétés TS et TCS à verser des indemnités à la société CAMILLE, après avoir simplement évoqué la possible mise en oeuvre de la garantie d'éviction et du fait personnel de la société TS et sans préciser sur quel fondement juridique chacune des deux sociétés était redevable d'indemnités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 12 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE même en l'absence de cause légale d'inadmissibilité d'une preuve, le juge doit s'interroger sur sa valeur probante et sur l'impartialité de son auteur, lorsque celle-ci est contestée par des motifs sérieux ; qu'en l'espèce, les sociétés TS et TCS faisaient valoir que l'attestation technique de Monsieur Y... n'était ni probante, ni crédible, dès lors qu'il avait des liens très étroits avec la société CAMILLE, pour avoir été son expert scientifique et être coinventeur de deux brevets avec elle (V. concl., p. 31, in fine et p. 32, § 1 à 3) ; que la cour d'appel, qui a fondé sa conviction que la société TS disposait d'un véritable savoir-faire sur la seule attestation de Monsieur Y..., a simplement affirmé qu'aucun « motif légalement admissible » ne permettait de l'écarter des débats ; qu'en se déterminant par ce motif inopérant, et en s'abstenant de répondre au moyen titré de ce que l'attestation de Monsieur Y..., compte tenu de ses liens étroits avec la société CAMILLE, ne présentait pas les garanties d'objectivité et d'impartialité requises, la Cour d'Appel a violé l'article 455 CPC, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
3°) ALORS QUE le savoir-faire consiste en un ensemble d'informations pratiques non brevetées, résultant de l'expérience, testées et qui sont secrètes ; que ces informations doivent être utiles pour la production de produits contractuels et identifiés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société TS avait bien cédé un savoir-faire à la société CAMILLE par la signature du protocole du 10 mai 2006, au seul motif qu'elle lui avait transmis le 23 juin 2008 « un certain nombres de calculs sur les distances maximales de plasma froid » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à démontrer la transmission d'un savoir-faire, sans faire ressortir en quoi ces calculs étaient importants et utiles dans le processus d'exploitation de la TP3 en matière de recyclage, ni constater que l'ensemble des éléments relevés par Monsieur Y... comme constituant un savoir-faire avaient effectivement été transmis, la cour d'appel, qui n'a pas identifié ledit savoir-faire, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1626 et 1628 du Code civil, ensemble l'article 1382 du Code civil et l'article 1er du règlement CE n° 772/ 2004 du 7 avril 2004 ;
4°) ALORS QUE le savoir-faire est secret, de sorte qu'il appartient à celui qui prétend à l'existence d'un savoir-faire de prouver le caractère secret des informations qu'il recouvre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que la communication d'« un certain nombres de calculs sur les distances maximales de plasma froid » caractérisait une transmission de savoir-faire, aux motifs que « les intimés ne sauraient soutenir, sans étayer leurs propos du moindre avis technique, qu'il s'agirait de données connues » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à la société CAMILLE de prouver que ce qu'elle entendait voir qualifier de savoir-faire n'était pas généralement connu, ce qui était d'autant plus nécessaire que les exposantes avaient démontré que cette technologie se trouvait dans le domaine public, la cour d'appel, qui a présumé le caractère secret desdites informations, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article 9 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE les juges du fond doivent motiver leurs décisions en fait et en droit, sans pouvoir se contenter de simples affirmations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société TCS travaillait sur l'application de la technologie TP3 à la dépollution par fragmentation de matériaux et recyclage ; que pour condamner les sociétés TS et TCS à payer des indemnités à la société CAMILLE, la cour d'appel s'est contentée d'affirmer que la société TS « a nécessairement bénéficié du savoir-faire de sa société soeur », la société TCS, au motif que celle-ci n'avait obtenu de tels résultats qu'au terme de plusieurs années de recherches (V. p. 8, § 5) ; qu'en statuant ainsi par un motif inopérant, sans justifier cette simple affirmation par le moindre élément permettant d'indiquer que des informations avaient été transmises par la société TS à la société TCS et que celle-ci n'avait pas mené ses propres recherches ou obtenu des informations d'un tiers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1626 et 1628 du Code civil, ensemble l'article 1382 du Code civil ;
6°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la responsabilité contractuelle, la garantie du fait personnel et la garantie d'éviction du cédant ne portent que sur ce qui fait l'objet du contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat ne visait que l'utilisation de l'énergie pulsée dans les matériaux pour les fragmenter, en séparer les composants ou les pulvériser dans le cadre d'application en retraitement et dépollution, de sorte que la cession n'empêchait pas la société TS de disposer de son savoir-faire dans d'autres domaines, ni de le transmettre ; qu'en considérant dès lors qu'elle avait manqué à ses obligations, sans constater ni que la société TS avait transmis des informations qui n'étaient utilisables que pour l'application à laquelle la cession était liée, ni que cette divulgation avait eu lieu après la cession des droits au profit de la société CAMILLE, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1626 et 1628 du Code civil ;
7°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la responsabilité délictuelle du tiers qui utilise un savoir-faire cédé suppose la preuve d'une faute ; qu'en l'espèce, en considérant que la société TCS était débitrice d'indemnités envers la société CAMILLE, sans constater ni qu'elle avait eu connaissance de la cession opérée au profit de cette dernière, ni qu'elle avait fait usage des calculs sur les distances maximales de plasma à froid, seul élément secret dont la cour a constaté la transmission à la société CAMILLE, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné in solidum les sociétés TS et TCS à payer à la société CAMILLE 200. 000 € d'indemnités et 30. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU'« il convient d'accueillir la demande de la société CAMILLE tendant à obtenir sous astreinte la cessation immédiate par la société TCS de toute activité liée à l'application de la technologie du TP3 aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ; considérant que la société CAMILLE sollicite encore paiement de 1. 369. 277 € au titre du préjudice subi ; que cette somme correspond au montant des dépenses engagées depuis sa création principalement en recherche et développement ; considérant que l'exploitation démontrée au sein du groupe THALES du savoir-faire qui lui avait été transmis l'a, comme elle le soutient, privée d'une partie de ses actifs ; considérant toutefois que le préjudice se trouve limité par l'interdiction faite à la société TCS de poursuivre ses travaux dans le secteur concerné et qu'il convient de l'évaluer à la somme de 200. 000 € » ;
1°/ ALORS QUE l'interdiction faite à celui qui a cédé un savoir-faire de continuer son activité de recherche et de développement de la technologie qu'il a transmise met nécessairement fin au préjudice dont pouvait se plaindre le cessionnaire, dès lors qu'il est acquis que ce savoir-faire n'a fait l'objet, au jour de cette interdiction, d'aucune exploitation commerciale ; qu'en l'espèce, ainsi que l'exposante le faisait valoir la société Camille ne contestait pas que la technologie TP3 n'en était qu'à ses balbutiements et n'avait pas encore fait l'objet d'exploitation commerciale ; que la société Camille soutenait néanmoins que, nonobstant ce défaut d'exploitation commerciale du savoir-faire par elle ou l'une des sociétés du groupe Thalès, la seule détention par les sociétés du groupe Thalès d'un savoir-faire et d'une technologie que THEC lui avait cédés « constitu ait en soi un préjudice pour la société Camille qui se voyait ainsi privée de son actif principal », lequel actif consistait dans la « possibilité future » d'une exploitation de la technologie en cause, soit par elle-même, soit par l'intermédiaire d'un licencié (Conclusions de la société Camille, p. 30) ; que la Cour d'appel qui indemnise cette « privation d'actif » à hauteur de 200. 000 euros, cependant que l'interdiction faite aux sociétés Thalès de poursuivre tout travail ou activité liée à l'exploitation de la technologie en cause avait nécessairement épuisé le droit de la société Camille à obtenir réparation d'un préjudice qu'elle qualifiait elle-même de futur et d'éventuel, a violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ ALORS QUE la Cour d'appel qui, tout en ordonnant aux sociétés du groupe Thalès de cesser de poursuivre tout travail ou activité liés à l'exploitation de la technologie en cause et qui alloue dans le même temps à la société Camille la somme de 200. 000 euros de dommages-intérêts sans préciser quelle perte ou préjudice commercial actuel était ainsi réparé, et ce alors que la société Camille ne contestait pas que le savoir-faire qui lui avait été cédé n'était pas encore exploitable commercialement, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale ;
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Bénabent et Héhannin, avocat aux Conseils pour la société Camille-compagnie d'assistance ménière et industrielle
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir restreint la cessation d'activité qu'il a ordonnée à l'encontre de la société Thales Communications et Security à une application de la technologie TP3 aux seuls mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ;
AUX MOTIFS QUE « la technologie contractuelle, objet du savoirfaire cédé, comporte, aux termes de l'article 1. 2 du contrat, la technologie du TP3 et tous les équipements et matériel qui lui sont liés, y compris les tests et essais déjà réalisés lorsqu'ils sont la propriété exclusive de THEC ; que la documentation contractuelle qui, selon l'article 1. 4, la décrit, comprend les pièces nécessaires ou utiles à l'utilisation des équipements permettant sa mise en oeuvre ; qu'elle fait l'objet d'une annexe 1 ; que cette annexe cite 15 techniques de broyage concernant différents matériaux, corindon, graphites, carte électroniques, semi-conducteurs, circuits imprimés, disques compacts, minéraux, minerais et kimberlites et 1 technique de traitement de verre feuilleté (...) ; que les annexes du contrat et le contexte entourant sa signature permettent de constater que ce savoir-faire concerne la technologie du TP3 appliquée aux domaines des mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables (...) ; qu'il qu'il convient d'accueillir la demande de la société Camille tendant à obtenir, sous astreinte, la cessation immédiate par la société Thales Communications et Security de toute activité liée à l'application de la technologie du TP3 aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables » ;
1°/ ALORS QUE la société Camille sollicitait la cessation par les sociétés Thales Services et Thales Communications et Security de « toute utilisation, exploitation, étude liées à la Technologie et au Savoir-faire » ; que cette demande de cessation ne contenait aucune limitation quant aux matériaux concernés ; qu'en retenant cependant, pour limiter l'étendue de la cessation qu'elle a ordonnée aux activités liées à l'application de la technologie TP3 à certains matériaux, que « la demande de la société Camille tenda it à obtenir, sous astreinte, la cessation immédiate par la société Thales Communications et Security de toute activité liée à l'application de la technologie du TP3 aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables », la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions de l'exposante et ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE le protocole d'accord du 10 mai 2006 prévoyait que le savoir-faire cédé à titre exclusif à la société Camille portait sur l'utilisation de la technologie TP3 dans « tout domaine d'application » ; que la Cour d'appel a en outre constaté que la liste, figurant en annexe 1 du protocole, des documents devant être remis à la société Camille en vue de transmettre ce savoir-faire, citait des techniques de broyage concernant quinze types de matériaux différents ; qu'en énonçant cependant que le savoir-faire cédé à la société Camille concernerait uniquement « la technologie du TP3 appliquée aux domaines des mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables », la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du protocole d'accord du 10 mai 2006, en violation de l'article 1134 du Code civil et de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-19307
Date de la décision : 17/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 mar. 2015, pourvoi n°13-19307


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.19307
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