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03/03/2015 | FRANCE | N°13-25094

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 mars 2015, 13-25094


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident relevé par la société Cahema ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 27 juin 2007, la société Cahema, en cours d'immatriculation, a conclu avec M. X..., agissant sous la dénomination « bonnet consultants », une convention par laquelle ce dernier s'est engagé à l'assister et à la conseiller dans les domaines du management, de la stratégie de développement, de l'organisation, de la comptabilité et d

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident relevé par la société Cahema ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 27 juin 2007, la société Cahema, en cours d'immatriculation, a conclu avec M. X..., agissant sous la dénomination « bonnet consultants », une convention par laquelle ce dernier s'est engagé à l'assister et à la conseiller dans les domaines du management, de la stratégie de développement, de l'organisation, de la comptabilité et de la gestion financière ; qu'aux termes des statuts signés le 29 juin 2007, M. X... a été nommé directeur général de la société Cahema ; que l'assemblée générale de cette société qui s'est tenue le 24 juin 2009 l'a révoqué de ces fonctions ; que la convention signée le 27 juin 2007 ayant été ultérieurement résiliée sans préavis ni indemnité, M. X... a assigné la société Cahema en paiement de dommages-intérêts pour résiliation irrégulière et injustifiée ; que devant la cour d'appel, la société Cahema a soulevé la nullité de cette convention pour absence de cause ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 1108 du code civil ;
Attendu que pour accueillir la demande de nullité, l'arrêt retient que la société Cahema, qui devait bénéficier de l'expertise et des prestations de M. X... en qualité de directeur général, n'en bénéficiait que par le biais de la convention d'assistance dont elle rémunérait parallèlement les prestations ; qu'il retient encore que la charge de cette convention, laquelle faisait double emploi avec les missions sociales dévolues à M. X..., était pour la société Cahema dépourvue de contrepartie réelle ; qu'il ajoute que M. X... étant nommé directeur général et devant assurer à ce titre les mêmes prestations que celles pour lesquelles il était rémunéré, la cause de la convention était inexistante ; qu'il en déduit qu'il convient de prononcer l'annulation de la convention à la date du mois d'octobre 2007 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la validité d'une convention s'apprécie au jour de sa formation, la cour d'appel, qui a prononcé la nullité de la convention conclue le 27 juin 2007 à compter du mois d'octobre 2007, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation ainsi prononcée entraîne la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif qui a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par M. X... pour rupture brutale de la convention ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ni sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Cahema aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la nullité de la convention conclue entre la société Cahema et M. X... exerçant au titre de l'entreprise Bonnet Consultants le 27 juin 2007 à compter du mois d'octobre 2007 ;
AUX MOTIFS QUE la société Cahema soutient que la convention qui avait pour objet de confier à M. X... une mission d'assistance « dans les domaines du management, de stratégie de développement et de croissance externe, d'organisation, de comptabilité, de gestion financière, de management des opérations de système d'information » est nulle pour défaut de cause, puisque cette mission faisait double emploi avec le mandat de directeur général de M. X... ; que la convention d'assistance ainsi conclue prévoyait que les conseils de l'entreprise Bonnet Consultants devaient porter sur les domaines du management, de la stratégie de développement et de croissance externe, de la comptabilité et de la gestion financière, du management des opérations, du système d'information, ceci « afin de permettre à Cahema de réaliser son objet social dans les meilleures conditions » ; que dans le détail, il était prévu des prestations d'analyse de marché, de management et de gestion, notamment de « favoriser l'atteinte des objectifs stratégiques de Cahema tout en réduisant les risques susceptibles d'y faire obstacle », d'« analyser les données financières et commerciales en y apportant une vision stratégique », de détecter les sources de profit et de dérapage », de gestion de la trésorerie et du financement, de travaux de contrôle de gestion ; que les tâches prévues concernant le système d'information étaient de « participer à l'intégration des nouvelles acquisitions de Cahema et/ ou de ses filiales (...) et d'assurer les relations avec les prestataires de service externe, de négocier les contrats et en suivre les coûts (...) » ; qu'enfin, dans le cadre des missions juridiques, il était notamment prévu que l'entreprise Bonnet Consultant devrait « élaborer des montages juridiques et financiers » ; que cette description permet de constater que l'ensemble de ces missions constitue une délégation d'une partie des fonctions de décisions, de définition des stratégies, de gestion et de représentation qui incombent au directeur général d'une société ; que la convention faisait donc, comme le soutient la société Cahema, double emploi avec les missions sociales dévolues à M. X... ; qu'ainsi, cette société qui devait bénéficier de l'expertise et des prestations de M. X... en qualité de directeur général, n'en bénéficiait que par le biais de la convention d'assistance dont elle rémunérait parallèlement les prestations et, dès lors, la charge de cette convention était pour elle dépourvue de contrepartie réelle ; que la cause de la convention, faire bénéficier la société des prestations de M. Bonnet, était donc inexistante, puisque dans le même temps celui-ci était nommé directeur général et devait assurer à ce titre les mêmes prestations pour lesquelles il était rémunéré ; qu'il convient en conséquence de constater la nullité de la convention en application de l'article 1131 du code civil ; que dans ce contexte, il est inopérant pour ce qui concerne la cause de la convention, que celle-ci ait été conclue à la suite d'une précédente, qu'elle soit visée dans les statuts de la société Cahema, que l'entreprise ait effectué des prestations qui lui ont été payées et que les associés aient été parfaitement informés de son existence et de sa réalisation ; qu'il ne peut non plus être soutenu que les missions données par la convention étaient spécifiques par rapport aux missions de directeur général, dès lors que les missions étaient celles que doit assumer un directeur général de société et que M. X... reconnaît lui-même, dans ses conclusions qu'il a été nommé à ce poste afin qu'il puisse satisfaire au même titre que les autres actionnaires MM Y... et Z... à ses obligations au titre du pacte d'associé, vis-a-vis des investisseurs de la société ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient M. X..., le détail des factures adressées met en évidence l'accomplissement de tâches qui pour être d'une certaine technicité, n'en relèvent pas moins de la fonction de directeur général ; qu'il est par ailleurs sans effet que l'article 6. 2 du pacte d'actionnaires n'ait pas obligé M. X... à consacrer tout son temps, mais seulement tous ses efforts, à la société Cahema ; qu'enfin, le fait que l'assemblée générale mixte du 30 septembre 2008 ait précisé que la rémunération de M. X... serait de 67 562 euros « au (x) quel (s), il conviendra d'ajouter le rémunération des missions supplémentaires dans le cadre du contrat de management signé le 27 juin 2007 » reflète bien que ce contrat n'avait pour objectif que de verser à M. X... un complément à la rémunération des fonctions qu'il assurait au sein de la société Cahema ; qu'au surplus, l'article 16 des statuts de la société prévoyait que la rémunération de chaque directeur général devait être déterminée par les associés ; que c'est donc en violation des statuts que cette convention, qui faisait dépendre la rémunération de M. X... de l'exécution d'un contrat dans le cadre duquel il devenait le seul décideur du montant de sa rémunération, a été maintenue après sa désignation en qualité de directeur général ; qu'il importe peu sur ce point que ce maintien ait été décidé par l'assemblée générale ; qu'en conséquence de ce qui précède, il convient de prononcer l'annulation de la convention à la date du mois d'octobre 2007 et de condamner M. X... à restituer les sommes reçues en exécution de celle-ci ;
1°) ALORS QUE la validité du contrat est déterminée au jour de sa conclusion ; qu'un contrat ne peut devenir nul ; que la Cour d'appel ne pouvait dès lors prononcer la nullité de la convention conclue le 27 juin 2007 à compter du mois d'octobre 2007 sans violer l'article 1108 du Code civil ;
2°) ALORS QUE l'existence de la cause d'une obligation s'apprécie à la date à laquelle elle est souscrite ; que la convention entre la société Cahema et Monsieur X... exerçant au titre de l'entreprise Bonnet Consultants a été conclue le 27 juin 2007 avec effet rétroactif au 1er avril 2007 ; qu'à cette date Monsieur X... n'était pas directeur général de la société Cahema, ce que la Cour d'appel a constaté en retenant que la convention avait été maintenue après la désignation de Monsieur X... en qualité de directeur général ; que la Cour d'appel, pour déclarer la convention nulle faute de cause, n'a pas apprécié l'existence de la cause de l'obligation de la société Cahema au jour de sa conclusion mais à la date postérieure de la nomination de Monsieur X... comme directeur général de la société Cahema ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les articles 1108 et 1131 du Code civil ;
3°) ALORS QUE, subsidiairement, la Cour d'appel a affirmé que la société Cahema ne bénéficiait de l'expertise et des prestations de Monsieur X... que par le biais de la convention d'assistance dont elle rémunérait la prestation, tout en relevant que la charge de cette convention était pour elle dépourvue de contrepartie réelle ; qu'en relevant ainsi que Monsieur X... exécutait la convention tout en décidant que l'obligation de paiement contrepartie de cette exécution n'avait pas de contrepartie réelle, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
4°) ALORS QUE, subsidiairement, en relevant à la fois que la convention était exécutée par Monsieur X... et que la charge de la convention n'avait pas de contrepartie réelle pour la société Cahema, ce qui exclut de pouvoir constater l'exécution par l'autre partie de son obligation, la Cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et violé l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de dommages-intérêts de Monsieur X... pour rupture brutale de la convention ;
AUX MOTIFS QUE la convention du 27 juin 2007 étant nulle, elle ne peut plus servir de fondement à une demande de dommages-intérêts au titre de sa rupture, par conséquent la demande en ce sens de Monsieur X... doit être rejetée ;
ALORS QUE la Cour d'appel a lié le rejet de la demande de dommages-intérêts de Monsieur X... pour rupture brutale de la convention à la nullité de la convention ; que la cassation du chef de dispositif relatif à la nullité de la convention entraînera par conséquent celui du chef de dispositif statuant sur les dommages-intérêts en application de l'article 624 du Code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célise, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils pour la société Cahema
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de la société CAHEMA en restitution des sommes versées à Monsieur X... en exécution de la convention du 27 juin 2007,
AUX MOTIFS QUE « sur le montant des restitutions : la société Cahema ne produit à l'appui de sa demande qu'un document interne intitulé « Honoraires de Thierry X... », qui n'est assorti d'aucun justificatif. Ainsi que le soutient M. X..., ce document qui émane de l'intimée ne peut être retenu par la Cour comme justifiant l'étendue des restitutions à ordonner et faute d'éléments probants sur le montant des sommes versées qu'il incombait à la société Cahema de produire, la demande de restitution ne peut qu'être rejetée » ;
1°/ ALORS QUE l'annulation d'un contrat synallagmatique entraîne l'obligation pour les parties de restituer les sommes perçues en exécution de celui-ci ; qu'en l'espèce, Monsieur X... ne prétendait pas ne pas avoir reçu paiement de la part de la société CAHEMA des prestations qu'il lui avait facturées en application de la convention du 27 juin 2007, mais soutenait que la Cour d'appel ne pourrait fixer le montant des sommes à restituer qu'« au vu de pièces comptables non contestables » et limiter ces remboursements aux prestations concernant la société CAHEMA tout en en excluant les débours (ses conclusions d'appel, page 13) ; que Monsieur X... reconnaissait ainsi expressément que la société CAHEMA lui avait versé des sommes en exécution de la convention du 27 juin 2007 et se contentait de contester la valeur probante des éléments de preuve versés aux débats par la société CAHEMA pour en établir le montant ; qu'en rejetant en son entier la demande de restitution formée par la société CAHEMA, motif pris de ce que le document produit par cette dernière était dépourvu de valeur probante, la Cour d'appel a méconnu l'objet du litige qui lui était soumis, violant ainsi les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE l'annulation d'un contrat synallagmatique entraîne l'obligation pour les parties de restituer les sommes perçues en exécution de celui-ci ; qu'ayant constaté que Monsieur X... avait effectué des prestations qui lui avaient été payées en exécution de la convention du 27 juin 2007 (page 7, deuxième et troisième paragraphes), ce dont il résultait que la société CAHEMA disposait sur Monsieur X... d'une créance de restitution dont il lui appartenait d'évaluer le montant, la Cour d'appel a violé l'article 1131 du code civil en rejetant en son entier la demande de restitution formée par la société CAHEMA, motif pris de ce que le document produit par cette dernière était dépourvu de valeur probante.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-25094
Date de la décision : 03/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 mar. 2015, pourvoi n°13-25094


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.25094
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