LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 juin 2012) que Mme X...engagée le 1er octobre 1983 en qualité de secrétaire comptable par la société Cartonnerie Fipac, a sollicité un rappel de salaires correspondant à la prime d'ancienneté et aux droits à congés payés, en application de la convention collective de commerce de gros des papiers cartons, dont relevait l'entreprise ; que l'employeur lui a adressé le 5 décembre 2007 le règlement du rappel de la prime d'ancienneté sur cinq ans ; que la salariée a saisi le 26 décembre 2007 la juridiction prud'homale ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de résiliation judiciaire, alors selon le moyen, que l'inexécution par l'employeur de l'obligation inhérente au contrat de travail de paiement du salaire caractérise un manquement suffisamment grave pour en justifier la résiliation judiciaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'employeur avait continué sciemment à appliquer, au lieu de la convention de la distribution et du commerce de gros des papiers cartons, la convention collective de l'industrie du cartonnage, comportant des dispositions moins favorables aux salariés, et que la situation de la salariée n'avait été régularisée que plusieurs mois après ses réclamations et ce dans les limites de la prescription ; qu'en retenant néanmoins que ces manquements ne constituaient pas une faute suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et ainsi violé les articles L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, qu'à la date de la demande de résiliation judiciaire, les motifs fondant cette demande n'existaient plus ; qu'elle a ainsi fait ressortir que les manquements imputés à l'employeur n'empêchaient pas la poursuite du contrat de travail ; que le moyen ne peut dès lors être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour Mme X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme X...de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« c'est par des motifs pertinents que la cour adopte et qui ne sont pas utilement critiqués que le premier juge, examinant en premier lieu, comme il se doit, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail antérieure au licenciement et retenant, exactement, sans se fonder sur l'attestation contestée, sans se contredire et en sanctionnant le retard que l'employeur avait mis à régulariser la situation à l'égard de la convention collective applicable, dont la méconnaissance fondait la demande, à partir du moment où il connaissait avec certitude la convention réellement applicable, par l'octroi de dommages et intérêts, pour une période non atteinte par la prescription que la salariée avait laissée courir en ne formulant antérieurement aux réclamations qu'il mentionne, aucune demande, que le premier juge a rejeté la demande de résiliation de Dominique X...; que le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef, observations étant faites, d'une part, que, à l'exception d'une erreur sur la date de la saisine de la juridiction prud'homale, laquelle procède manifestement, eu égard aux énonciations qui suivent son indication, d'une simple erreur de frappe, n'a pas commis d'erreur dans les dates, d'autre part, que la mauvaise foi de l'employeur qui est alléguée n'est pas avérée, la salariée elle-même ayant formulé antérieurement des réclamations qu'elle fondait sur la convention collective dont elle dénie aujourd'hui, exactement, l'applicabilité et, en dernier lieu, que nonpaiement de la prime de bilan ne pouvait fonder la demande de résiliation du contrat de travail, dès lors que, le paiement de pareille prime intervenant chaque année au mois de mars, le manquement invoqué, tenant au non-paiement de la prime exigible en 2008, payable avec le salaire du mois de mars 2008, c'est-à-dire à la fin dudit mois, (les fiches de paie versées aux débats faisant ressortir que le salaire était généralement payé à la fin du mois en cours), à cette date la salariée était licenciée (licenciement du 17 mars 2008) » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail est justifiée ; que c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; que lorsque la demande en résiliation est fondée, la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur et considérée comme un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la date de la rupture du contrat étant celle de l'envoi de la lettre de licenciement ; qu'il est constant qu'un salarié peut obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail lorsque l'employeur ne respecte pas ses obligations contractuelles ; que la résiliation judiciaire ne peut être prononcée qu'à raison d'un manquement de l'employeur à l'égard du salarié qui demande cette résiliation, présentant une certaine gravité et empêchant la continuation des relations de travail ; qu'en l'espèce, Mme Dominique X...fait état du courrier de l'INSEE en date du 15/ 04/ 1993, informant la SARL CARTONNERIE FIPAC de son nouveau code APE 515 N correspondant à la classe d'activité : commerce de gros d'autres produits intermédiaires comprenant le commerce de gros de papiers et cartons ; qu'il est constant que bien que les bulletins de salaire mentionnent le code APE 515 N la SARL CARTONNERIE FIPAC a continué à appliquer la convention collective de l'industrie du cartonnage ; que toutefois, Mme Dominique X...ne justifie d'aucune réclamation concernant l'application de la convention collective avant son courrier du 06/ 09/ 2007, faisant référence au code APE 515 N, et celui plus explicite du 22/ 10/ 2007 ; que bien au contraire, par lettre du 21/ 02/ 2005, elle demandait une augmentation de son salaire en revendiquant la qualification au niveau 3 échelon 2, coefficient 315 sur le fondement de la convention collective de la cartonnerie ; que la SARL CARTONNERIE FIPAC doit être considérée comme de bonne foi jusqu'en juin 2006, date à laquelle un litige est survenu avec son chef d'atelier Joseph Z..., qui demandait le paiement de ses salaires sur le fondement de la CCN du commerce de gros correspondant au code APE 515 N ; qu'en effet, Mme Dominique X...produit la copie du courrier de l'assistante de Direction, Alexandrine A..., en date du 25/ 06/ 2006, demandant un rendez-vous au gérant : « en ce qui concerne le problème de Jo, après l'analyse que j'ai faite, je tiens à te confirmer que la convention collective du cartonnage n'est pas la bonne. Il faudrait te le faire confirmer par B.... Nous ne serions plus dans une convention de commerce de gros d'après le code APE et le chiffre d'affaires fait en négoce » ; qu'il s'ensuit que la SARL CARTONNERIE FIPAC a continué sciemment à compter de cette date à appliquer la convention collective de l'industrie du cartonnage, comportant des dispositions moins favorables aux salariés ; que toutefois, il y a lieu de constater qu'à la date de la saisine du conseil de prud'hommes, soit le 26/ 11/ 2007, la SARL CARTONNERIE FIPAC avait réglé à Mme Dominique X...:
- Le 05/ 12/ 2007 : sur le bulletin de salaire de novembre 2007, la somme de 9. 617, 40 ¿ représentant l'intégralité de la régularisation de la prime d'ancienneté sur cinq ans, calculée par Mme X...dans son courrier du 22/ 10/ 2007, ainsi que le paiement de deux jours de congés d'ancienneté sur les 4 demandés ;
- Le 21/ 12/ 2007 : à titre rectificatif du bulletin de salaire de novembre 2007, le complément de 1. 060, 85 ¿ tenant compte de toutes les observations de la salariée (indemnité de congés payés sur le rappel de prime d'ancienneté sur 5 ans, prime d'ancienneté d'octobre 2007, paiement de 2 jours supplémentaires de congés payés d'ancienneté) ;
Qu'il s'ensuit qu'à la date de la demande en résiliation judiciaire, les motifs fondant cette résiliation n'existaient plus ; qu'à supposer que Mme X...n'ait reçu le dernier versement que le 08/ 01/ 2008 comme elle le prétend, le retard du paiement de complément de salaire ne constitue pas un manquement d'un gravité suffisante pour justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail, dès lors que la situation de la salariée était quasiment régularisée, et que ce dernier règlement faisait suite aux dernières observations de Mme X...par lettre recommandée du 14/ 12/ 2007 (que la requérante s'abstient de produire) mais réceptionnée le 12/ 12/ 2008 ainsi qu'il ressort de l'accusé de réception versé aux débats ; qu'il convient en conséquence, de dire la demande de résiliation non fondée et de débouter Mme Dominique X...de ses demandes pécuniaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;
ALORS QUE l'inexécution par l'employeur de l'obligation inhérente au contrat de travail de paiement du salaire caractérise un manquement suffisamment grave pour en justifier la résiliation judiciaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'employeur avait continué sciemment à appliquer, au lieu de la convention de la distribution et du commerce de gros des papiers cartons, la convention collective de l'industrie du cartonnage, comportant des dispositions moins favorables aux salariés, et que la situation de la salariée n'avait été régularisée que plusieurs mois après ses réclamations et ce dans les limites de la prescription ; qu'en retenant néanmoins que ces manquements ne constituaient pas une faute suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et ainsi violé les articles L. 1231-1 et L. 1235-1 du Code du travail.