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28/10/2014 | FRANCE | N°13-21830

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 octobre 2014, 13-21830


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 mai 2013), que M. X..., engagé à compter du 28 janvier 2003 par la société Méditerranéenne d'électricité en qualité d'aide électricien, a été licencié pour faute grave le 14 juin 2010 après avoir été mis à pied le 20 mai 2010 et avoir été convoqué le 25 mai suivant à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement motivé par une c

ause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que la mise à pied prononcée par l'employ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 mai 2013), que M. X..., engagé à compter du 28 janvier 2003 par la société Méditerranéenne d'électricité en qualité d'aide électricien, a été licencié pour faute grave le 14 juin 2010 après avoir été mis à pied le 20 mai 2010 et avoir été convoqué le 25 mai suivant à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement motivé par une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que la mise à pied prononcée par l'employeur ne peut avoir un caractère conservatoire que si elle est notifiée dans le même temps qu'est engagée la procédure de licenciement ; qu'après avoir constaté que la notification de la mise à pied en date du 20 mai 2010 n'avait pas été concomitante à celle de l'entretien préalable au licenciement en date du 25 mai suivant, la cour d'appel ne pouvait décider que l'écoulement d'un « bref délai » aurait conféré à la mise à pied un quelconque caractère conservatoire sans se prononcer par un motif inopérant et priver sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1332-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la lettre de mise à pied du 20 mai 2010 était expressément qualifiée de conservatoire et que ne s'était écoulé qu'un bref délai de quelques jours, incluant un week-end, entre la notification de la mesure conservatoire, le vendredi 21 mai 2010, et l'engagement de la procédure de licenciement, le mardi 25 mai 2010, a pu en déduire que la mise à pied avait un caractère conservatoire ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement motivé par une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, reprochant à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la mise à pied litigieuse aurait eu un « caractère disciplinaire », conduira par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, à la cassation de l'arrêt en ce qu'il a retenu que le licenciement de M. X... aurait reposé sur une cause réelle et sérieuse ;
Mais attendu que le rejet à intervenir du premier moyen rend inopérant le second moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement était motivé par une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR infirmé le jugement déféré en ce qu'il a alloué des dommages-intérêts à M. X... à ce titre ;
Aux motifs qu'il n'est pas contesté que l'incident qui a opposé les parties le 20 mai 2010 a été suivi aussitôt d'une mesure de mise à pied ; que par courrier daté du 20 mai 2010 et envoyé le jour même, intitulé « mise à pied conservatoire », l'employeur a notifié cette mise à pied au salarié comme suit : « Recommandé AR MISE A PIED CONSERVATOIRE, Le 20 mai 2010, Monsieur, je constate une fois de plus que mes instructions ne sont pas appliquées et qu'elles sont totalement ignorées par vous. En effet, je vous rappelle que j'ai ordonné que les ateliers soient fermés entre 12 heures et 13 heures 30 et que les véhicules de l'entreprise soient stationnés et fermés à clef sur le parking. Or, ce jour, vous trouvant installé dans un véhicule de l'entreprise et déjeunant à l'intérieur sans nulle autre forme, je vous ai rappelé à l'ordre, chose que vous n'avez pas apprécié. Outre le fait que vous affichiez une attitude hostile, vous vous êtes permis de me traiter d'imbécile devant Monsieur Y... Thierry, employé dans l'entreprise. Cette situation n'est plus acceptable ! D'autant qu'à 13H30 ce même jour, vous avez réitéré vos insultes à mon encontre devant Messieurs Z... Jean-Louis et A... Jean-Marie, tous deux employés dans l'entreprise à savoir : "que j'étais un connard" "que je n'avais pas de couilles pour vous licencier" et vous avez menacé de me "casser la gueule". Compte tenu de la violence de vos propos et de votre attitude avec menace expresse, je me vois obligé de vous signifier une mise à pied conservatoire à compter de ce jour, dans l'attente d'une future sanction » ; que le 21 mai 2010, le salarié qui n'avait pas encore été destinataire du courrier recommandé, se présentait sur son lieu de travail ; que l'employeur faisait intervenir les forces de l'ordre pour lui en empêcher l'accès ; que par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 mai 2010 distribuée le 26 mai, le salarié a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 3 Juin 2010 ; qu'à l'audience du Conseil de Prud'hommes, Monsieur Z..., gérant de la société, interrogé à la barre sur la date de notification de la mise à pied, a répondu : « le 20 mai de manière orale et le 21 mai par lettre recommandée » ; que cette chronologie des faits est rappelée dans le jugement déféré ; que contrairement à ce qu'indique la SARL SME , la lettre de mise à pied conservatoire n'a pas été présentée au salarié en même temps que la convocation à l'entretien préalable ; que la cour constate que la lettre de mise à pied du 20 mai 2010 stipule en son en tête de manière expresse qu'elle est de nature « conservatoire » ; que si elle n'est pas concomitante de l'envoi de la convocation préalable qui marque l'engagement de la procédure de licenciement, il demeure que le bref délai de quelques jours, incluant un week-end, écoulé entre la notification de la mesure conservatoire, le vendredi 21 mai 2010 et l'engagement de la procédure de licenciement, le mardi 25 mai 2010 n'est pas de nature à ôter à la mesure prise son caractère conservatoire ;
Alors que la mise à pied prononcée par l'employeur ne peut avoir un caractère conservatoire que si elle est notifiée dans le même temps qu'est engagée la procédure de licenciement ; qu'après avoir constaté que la notification de la mise à pied en date du 20 mai 2010 n'avait pas été concomitante à celle de l'entretien préalable au licenciement en date du 25 mai suivant, la Cour d'appel ne pouvait décider que l'écoulement d'un « bref délai » aurait conféré à la mise à pied un quelconque caractère conservatoire sans se prononcer par un motif inopérant et priver sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1332-3 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement était motivé par une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR infirmé le jugement déféré en ce qu'il a alloué des dommages-intérêts à M. X... à ce titre ;
Aux motifs que la lettre de licenciement est motivée comme suit : Par courrier du 14 Juin 2006, il était licencié pour faute grave dans les termes suivants : « Pour faire suite à vos différents avertissements, mise à pied à titre conservatoire et entretien préalable du jeudi 3 juin 2010, j'ai le regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave. En effet, votre attitude inqualifiable n'a été en rien justifiée lors de cet entretien. Il ressort que vos absences injustifiées, refus d'obtempérer, agression verbale et menace physique envers le gérant de la société, ne nous permettent pas de vous conserver au sein de l'entreprise » ; que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant ... ; qu'en l'espèce la lettre de licenciement fait donc référence à des faits non datés mais matériellement vérifiables ; qu'il s'agit des précédents avertissements, dont l'employeur précise qu'ils ont été infligés le 20 Septembre 2006, le 3 Octobre 2006, le 12 Février 2007 ainsi que des rappels à l'ordre notifiés le 5 Janvier 2007, le 6 Février 2007 le 26 Février 2007 ; que ces sanctions disciplinaires datent de plus de trois ans et ne peuvent donc être invoquées à l'appui du licenciement, en application des dispositions de l'article L 1332- 5 du Code du Travail ; que l'employeur précise que les absences injustifiées auxquelles il fait référence dans le courrier de rupture sont celles du 5,9,10,11,12 et 22 Mars 2010 intervenues en conséquence plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement laquelle a été déclenchée par l'envoi de la convocation à l'entretien préalable le 25 mai 2010 ; qu'en application des dispositions de l'article L 1332-4 du Code du Travail, ces absences ne pouvaient donc plus être invoquées à l'appui d'un licenciement ; que s'agissant des insultes et du refus d'obtempérer, l'employeur précise que ces faits ont été commis le 20 mai 2010 et produit un courrier de Monsieur Jean Louis Z... par lequel cette personne, associée au sein de la SARL, indique avoir assisté à l'altercation au cours de laquelle Monsieur Z... a reproché au salarié de déjeuner à 12 h15 dans un véhicule de service sur le parking alors que personne ne doit s'y trouver et que ces voitures doivent être fermés à clef entre 12 H et 13H30 ; que Monsieur X... aurait alors insulté Monsieur Z... en le traitant de « connard » et lui aurait dit qu'il n avait pas de couilles pour le licencier . Suite à cela Monsieur X... aurait menacé Monsieur Z... de lui « casser la gueule » ; que l'employeur produit également une lettre par laquelle Monsieur Thierry G. atteste le 20 mai 2010 que le jour même, Monsieur X... a refusé de sortir du véhicule et a traité Monsieur Z... « d'imbécile » ; qu'il convient d'observer que Monsieur Y..., qui n'est plus salarié de la société, a établi ensuite une deuxième attestation, le 26 Janvier 2011, dans laquelle il indique « je n'ai pas rédigé l'attestation moi même et après signature et relecture de l'attestation j'ai fait remarquer à Monsieur Z... que tous les faits n'étaient pas relatés sur l'attestation, et que devant faire une attestation pour Monsieur X..., je lui ai fait simplement remarquer que je me devais de dire la vérité et rien d'autre afin de ne léser aucun parti. Sur ce l'attestation faite à Monsieur X... explique les faits tels qu'ils se sont déroulés » ; que Monsieur X... produit une attestation de Monsieur Jean Marie A... qui n'est plus salarié de la société et déclare que lors de l'altercation, il n'a à aucun moment entendu Monsieur X... traiter Monsieur Z... de « connard », lui dire « qu'il n'avait pas les couilles pour le licencier », le menacer de lui « casser la gueule ». Il ajoute que d'une façon générale, Monsieur X... faisait l'objet constamment de brimades ; que la Cour observe que Monsieur A... atteste ici de manière surprenante de ce qu'il n'a pas entendu et ne décrit rien de la scène à laquelle il a assisté.'.. Cette attestation est en conséquence totalement inopérante ; que les attestations de Monsieur Z... et de Monsieur Y... sont des lettres et ne sont pas rédigées dans les formes requises par l'article 202 du Code de Procédure Civile, règles qui ne sont cependant pas prescrites à peine de nullité. Il appartient à la juridiction de rechercher si leur contenu, malgré les irrégularités de forme qui l'entachent, fournit des éléments de nature à l'éclairer ; que Monsieur Z... et Monsieur Y... étaient tous deux au service de la société SME lorsque l'incident entre Monsieur Z... et Monsieur X... s'est produit. Ce seul lien ne peut suffire à écarter leur attestation dès lors que les employés de l'entreprise ont été les seuls témoins de la scène ; que Monsieur Y..., explique très clairement les circonstances dans lesquelles la première attestation lui avait été soumise par l'employeur pour signature, après relecture. Il convient d'observer qu'alors qu'il n'est plus dans un lien de subordination avec l'employeur puisque selon les écritures de Monsieur X... il aurait quitté la société, il réitère et confirme ce qu'il s'était contenté de lire et d'approuver la première fois ; qu'il résulte de ces témoignages de Messieurs Y... et Z... que Monsieur X... a, a minima, traité son employeur d' « imbécile » et a refusé de sortir du véhicule de l'entreprise ; que cette attitude provocatrice qui remet en cause le pouvoir de direction de l'employeur et bafoue son autorité constitue assurément un comportement fautif justifiant la rupture de la relation de travail ; que cependant, la gravité de la faute commise doit s'apprécier au regard du contexte très conflictuel et ancien qui opposait les parties, et qui ressort notamment des dépôts de plaintes de l'employeur, des avertissements donnés, mais aussi des plaintes du salarié auprès du médecin du travail, auprès du syndicat, de ses absences justifiées mais fréquentes, de sorte que le grief doit être relativisé et ne constitue dans cette ambiance délétère à laquelle les deux parties ont nécessairement contribué, qu'une faute simple constituant un motif réel et sérieux de licenciement ;
Alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, reprochant à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la mise à pied litigieuse aurait eu un caractère disciplinaire, conduira par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile, à la cassation de l'arrêt en ce qu'il a retenu que le licenciement de M. X... aurait reposé sur une cause réelle et sérieuse.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-21830
Date de la décision : 28/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 oct. 2014, pourvoi n°13-21830


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.21830
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