LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 26 août 2003 par la société Santons Marcel Carbonel en qualité de livreur, M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 5 mars 2007 ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu à statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu qu'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible, à l'époque du licenciement, dans l'entreprise ou s'il y a lieu dans le groupe auquel elle appartient ;
Attendu que pour dire le licenciement économique du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société à payer des dommages-intérêts, l'arrêt retient que l'entreprise comptait pas moins de soixante seize salariés et que l'employeur, qui n'avait adressé aucune offre écrite et précise de reclassement au salarié, n'avait effectué aucune recherche personnalisée en direction des tâches de coloriste et de montage d'étables compatibles avec ses compétences ;
Qu'en se déterminant comme elle a fait, sans rechercher si, comme il le soutenait, l'employeur ne justifiait pas de l'absence de poste disponible, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a condamné l'employeur à verser au salarié une somme au titre du non-respect de la priorité de réembauche, l'arrêt rendu le 7 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Santons Marcel Carbonel
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société SANTONS MARCEL CARBONEL avait failli à son obligation de reclassement, d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... était sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'employeur à verser à Monsieur X... les sommes de 2 665,78 ¿ au titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 266,57 ¿ de congés payés afférents et de 11.000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR dit que les sommes dues en exécution du contrat de travail (indemnité de préavis, congés payés afférents au préavis) portaient intérêts de droit à compter du 29 août 2007, que les créances indemnitaires ne produisaient intérêts moratoires que du jour de leur fixation judiciaire, que les intérêts sur les sommes allouées seraient capitalisées dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, et que cette capitalisation était réservée pour les intérêts dus au moins pour une année entière, d'AVOIR condamné l'employeur à payer à son salarié la somme de 1.000 ¿ en application de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR condamné l'employeur aux dépens de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE « Sébastien X... a été embauché le 26 août 2003 par la SARL SANTONS MARCEL CARBONEL en qualité de livreur, coefficient 120.
Le contrat, conclu à durée indéterminée était soumis à la convention collective de la céramique d'art.
Le 13 février 2007, la société, qui envisageait la rupture de la relation du travail, a convoqué Sébastien X... pour un entretien préalable et à l'issue de cette rencontre qui s'est tenue le 22 février suivant, l'employeur lui a notifié, par lettre du 5 mars 2007 son licenciement pour motif économique.
Sébastien X... a adhéré à la convention de reclassement personnalisée le 9 mars 2007. ¿
Sur l'obligation de reclassement
Alors même que les éléments constitutifs du motif économique sont réunis, le licenciement n'est justifié que si l'employeur a sérieusement, mais vainement, tenté de reclasser le salarié.
Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise. Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent êtres écrits et précises.
En l'espèce, force est de constater qu'aucune offre écrite et précise de reclassement n'a été faite par l'employeur au salarié.
L'employeur considère avoir respecté son obligation de reclassement. Il fait valoir que cette obligation s'appréciant au regard des postes disponibles et selon la taille de l'entreprise, tous les postes de l'entreprise avaient été touchés par le plan de licenciement et aucun poste n'était pas disponible.
Il ressort des explications de la société qu'elle comptait pas moins de 76 salariés au moment du licenciement.
Si comme l'a relevé le conseil de prud'hommes, l'employeur a imposé aux travailleurs à domicile d'avoir leur propre véhicule afin de pouvoir supprimer le poste de livreur qu'occupait Sébastien, X..., il n'est néanmoins pas contesté, comme en témoigne le certificat de travail remis par l'employeur le 9 mars 2007, que le salarié avait également occupé des postes de coloristes et de montage des étables.
La cour estime que la SARL SANTONS MARCEL CARBONEL ne justifie d'aucune recherche sérieuse de reclassement.
Dès lors le licenciement de Sébastien X... doit être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur les conséquences indemnitaires de la rupture et rappels de salaire
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents
Il ressort des pièces versées aux débats (bulletins de salaire, attestation ASSEDIC) que la rémunération mensuelle brute de l'intéressé s'élevait à la somme de 1 332,89 ¿(moyenne des 12 derniers mois).
En l'état d'un licenciement non causé, le salarié est bien fondé à solliciter une indemnité correspondant à 2 mois de salaire.
Il lui sera alloué la somme de 2 665,78 ¿ de ce chef outre celle de 266,57 ¿ de congés payés afférents.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Au visa de l'article L.122-14-4 ancien du code du travail applicable en l'espèce (L 1235-3 nouveau), et tenant à l'ancienneté de 4 ans du salarié, à son âge (32 ans), sa qualification, et sa rémunération, ainsi qu'aux circonstances de la rupture, et de tous éléments de préjudice soumis à appréciation, notamment en terme d'emploi et de chômage il convient de fixer l'indemnité à la somme de 11 000 ¿ » ;
1°) ALORS QUE le reclassement d'un salarié dont le licenciement économique est envisagé ne peut être tenté que s'il existe des postes disponibles ; qu'en l'espèce, l'employeur soulignait qu'il n'existait aucune possibilité de reclassement au sein de la société SANTONS MARCEL CARBONEL (conclusions d'appel p.9), ce qui avait été confirmé par les premiers juges qui avaient relevé que seuls deux postes de décorateurs à domicile étaient disponibles, postes pour lesquels le salarié ne disposait d'aucune compétence (jugement p.8 § 3) ; qu'en l'espèce, pour dire que l'employeur n'avait pas effectué une recherche sérieuse de reclassement, la Cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'outre le poste de livreur, le salarié avait également occupé des postes de coloriste et de montage des étables ; qu'en statuant ainsi, sans constater que des postes de même catégorie ou de catégorie inférieure à ceux occupés par le salarié étaient disponibles au sein de l'entreprise, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE tenu de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l'origine de leurs constatations ; qu'en affirmant péremptoirement, ce que l'employeur contestait expressément (conclusions d'appel p.3 § 4 et 5), que le salarié avait adhéré à une convention de reclassement personnalisé le 9 mars 2007 (arrêt p.3 § 4), pour dire qu'en raison de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, ce dernier avait droit à une indemnité compensatrice de préavis de deux mois et aux congés payés afférents, sans indiquer les éléments lui permettant de procéder à une telle « constatation », la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que compte tenu de l'attitude du salarié qui avait conduit à prolonger les délais de la procédure prud'homale, l'employeur ne devait pas subir les délais excessifs de la procédure et sollicitait en conséquence le rejet des demandes au titre des intérêts et à l'anatocisme de ses derniers (conclusions d'appel de l'exposante p.14 in fine et p.15) ; qu'à ce titre, étaient dument versés aux débats la décision du bureau de conciliation du 29 octobre 2007, la décision de radiation du 11 septembre 2008, la sommation de communication de pièces du 21 octobre 2008 et le bordereau de communication de pièces et de conclusions du défendeur du 21 novembre 2007 ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen soulevé par l'employeur tiré de ce que le comportement du salarié ayant engendré un allongement de la procédure devait entrainer le rejet des demandes relatives au titre des intérêts et à l'anatocisme de ses derniers, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'employeur à verser à Monsieur X... les sommes de 2.665,78 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la priorité de réembauche, cette somme produisant intérêts moratoires du jour de sa fixation judiciaire, et les intérêts sur cette somme étant capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, et de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR condamné l'employeur aux dépens de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE « Sur les dommages et intérêts pour violation de la priorité de réembauche
Pour la première fois en cause d'appel, Sébastien X... sollicite l'indemnité prévue à l'article L.122-14-4 du code du travail (L1235-3 nouveau).
En application de l'article L.321-14 ancien du code du travail (L.1233-45 nouveau) le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauche durant le délai d'un an à compter de la date de la rupture de son contrat de travail s'il en fait la demande au cours du même délai. Dans ce cas, l'employeur informe le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification.
En l'espèce, Sébastien X... justifie avoir demandé à son employeur, par courrier recommandé du 12 mars 2007, de bénéficier de cette priorité dan les délais impartis par la loi.
Il verse en outre aux débats le livre du personnel de la société qui révèle que depuis la rupture de son contrat de travail en mars 2007, la société a, et au moins à 2 reprises, embauché des salariés à des postes compatibles avec ses qualifications (postes d'emballeurs).
La SARL SANTONS MARCEL CARBONEL qui est taisante à ce sujet n'apporte pas la preuve qu'elle a satisfait à son obligation soit parce qu'elle a proposé les postes disponibles, soit en justifiant de l'absence de tels postes.
En casa de non-respect de la priorité de réembauche, le juge accorde au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à 2 mois de salaire.
Au regard de la moyenne des 12 mois de salaire de l'intéressé, il lui sera alloué la somme de 2 665,78 ¿ de ce chef » ;
ALORS QUE la priorité de réembauchage ne s'exerce que sur un emploi compatible avec la qualification du salarié ; qu'en se contentant d'affirmer que l'employeur avait méconnu son obligation de réembauchage en recrutant à deux reprises des salariés à des postes d'emballeurs (arrêt p.6 in fine), sans préciser en quoi ces postes étaient compatibles avec la qualification du salarié qui avait été embauché en qualité de livreur et avait également occupé des postes de coloriste et de montage des étables, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1233-45 du Code du travail.