LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 12 du décret n° 93-852 du 17 juin 1993 et les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 1er octobre 2008 par l'office public de l'habitat de la Seine-Maritime (Habitat 76), en qualité de responsable de secteur confirmé ; qu'une procédure disciplinaire ayant été diligentée à son encontre, le salarié a, par une lettre reçue le 12 mai 2009, informé l'employeur qu'il souhaitait bénéficier de la saisine de la commission disciplinaire ; que convoqué par lettre du 13 mai 2009, il a comparu devant celle-ci le 27 mai 2009 avant d'être licencié pour faute grave le 10 juin 2009 ;
Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à verser certaines sommes à titre de dommages et intérêts, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement et de perte de salaire du mois d'avril 2009, l'arrêt retient que le salarié s'est présenté seul devant cette commission, qu'il résulte de la convocation adressée par l'employeur le 13 mai 2009 que les garanties prévues par l'article 12 n'y sont pas mentionnées et que la commission disciplinaire a rendu un avis alors même qu'elle n'avait pas entendu le salarié dans les conditions prévues par l'article 12 du règlement, le privant ainsi des garanties auxquelles il avait droit ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que le salarié avait été privé de la possibilité d'assurer utilement sa défense et alors que l'article 12 du décret n° 93-852 du 17 juin 1993 n'impose pas d'informer le salarié, dans la lettre de convocation devant la commission disciplinaire, de son droit d'y être assisté d'une personne de son choix, d'y demander l'audition de témoins et d'y produire un mémoire écrit et tous documents lui paraissant présenter un intérêt pour sa défense, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'office public de l'habitat du département de Seine-Maritime - Habitat 76.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... était sans cause réelle et sérieuse, d'avoir condamné Habitat 76 à payer à M. X... les sommes de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts, de 4.132,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, de 2.066,40 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 1.823,33 euros à titre de perte de salaire du mois d'avril 2009 outre les congés payés y afférents et y ajoutant, une somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement pour motif disciplinaire doit être notifiée au salarié dans le délai d'un mois à partir de la date de l'entretien préalable alors même qu'il ne s'est pas présenté à cet entretien ; qu'a défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que ce délai prévu par l'article L.1332-2 du code du travail est interrompu, dans l'hypothèse où l'employeur est conduit en vertu de règles statutaires ou conventionnelles, à recueillir l'avis d'un organisme disciplinaire, à une double condition : que l'employeur ait, dans le délai d'un mois, informé le salarié de la décision de saisir l'organisme, et que l'employeur ait mis en oeuvre la procédure conventionnelle dans ce même délai d'un mois ; qu'en l'espèce, l'article 12 du règlement intérieur (reprenant les dispositions du décret n° 93-852 du 17 juin 1993) prévoit que « dans chaque Opac, une commission disciplinaire est saisie pour avis de tout projet de sanction à l'encontre d'un salarié soumis au présent règlement qui a une incidence immédiate ou non sur la présence du salarié dans l'entreprise ... ; Les représentants de la direction générale de l'Opac sont désignés, avant chaque séance de la commission, par le directeur général dans les conditions suivantes : - un membre désigné parmi l'encadrement supérieur, qui assure la présidence de la commission ; - un responsable hiérarchique appartenant au service dont relève le salarié concerné. Les représentants du personnel sont désignés en son sein par le comité d'entreprise. La commission se réunit à la demande du salarié sur convocation de son président ; ¿ » ; que ce texte prévoit que la Commission se réunit à la demande du salarié, ce qui implique pour l'employeur de consulter le salarié sur son souhait de voir réunir cette commission, et ensuite de saisir celle-ci ; qu'ainsi, la mise en oeuvre de la procédure conventionnelle est satisfaite à partir du moment où l'employeur a, dans le délai d'un mois, interrogé le salarié sur son éventuelle demande de saisine de la commission disciplinaire ; qu'en l'occurrence, l'entretien préalable de licenciement a eu lieu le 10 avril 2009, que l'employeur a demandé au salarié par un courrier du 30 avril 2009 reçu le 5 mai suivant s'il souhaitait bénéficier des voies de recours internes prévues par le décret du 17 juin 1993 et par le règlement intérieur ; que le salarié lui a répondu sur ce point précis par courrier du 11 mai reçu le 12 mai ; qu'ainsi, Habitat 76, après avoir rappelé au salarié que la procédure de licenciement était poursuivie, l'a interrogé dans le mois de l'entretien préalable pour savoir s'il entendait bénéficier de la procédure prévue, à savoir la saisine pour avis de la commission disciplinaire, et a ensuite saisi effectivement cette commission le 13 mai suivant ; qu'Habitat 76 a bien ainsi mis en oeuvre la procédure réglementaire dans le mois de l'entretien même si la saisine de la Commission elle-même a été faite postérieurement ; que toutefois, en ce qui concerne l'absence d'assistance du salarié devant cette commission, l'article 12 précité prévoit que « le salarié doit être mis en mesure d'être entendu par la Commission. II peut être assisté devant la commission d'une personne de son choix, y demander l'audition de témoins et y produire un mémoire écrit et tous les documents lui paraissant présenter un intérêt pour sa défense »; qu'en l'espèce, M. X... s'est présenté seul devant cette commission et il résulte de la convocation adressée par l'employeur le 13 mai 2009 que les garanties prévues par l'article 12 n'y sont pas mentionnées ; qu'ainsi, la Commission disciplinaire a rendu un avis alors même qu'elle n'a pas entendu M. X... dans les conditions prévues par l'article 12 du règlement et l'a ainsi privé des garanties auxquelles il avait droit ; que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
1/ ALORS QUE le bénéfice d'une commission disciplinaire, commission de recours interne saisie dans le cadre de la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, constitue une garantie de fond à défaut du respect de laquelle le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que l'article 12 de l'annexe du décret n°93-852 du 17 juin 1993 et l'article 12 du règlement intérieur applicable à Habitat 76 qui en reprend les termes, prévoient que la commission disciplinaire est saisie pour avis de tout projet de sanction, qu'elle se réunit à la demande du salarié et que le salarié doit être mis en mesure d'être entendue ; que l'information communiquée au salarié par l'employeur sur la possibilité de ce recours, la tenue effective de la commission disciplinaire et le prononcé d'un avis par ladite commission, suffisent à caractériser le respect par l'employeur de la garantie offerte au salarié ; que la cour d'appel a constaté qu'Habitat 76 avait demandé au salarié par un courrier du 30 avril 2009 reçu le 5 mai suivant s'il souhaitait bénéficier des voies de recours internes prévues par le décret du 17 juin 1993 et par le règlement intérieur, qu'Habitat 76 a, dans les délais légaux, proposé à M. X... de recourir aux voies de recours internes et que ladite commission s'était tenue, à la demande du salarié et avait rendu un avis ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement prononcé ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article 12 du règlement intérieur applicable, ensemble le décret n°93-852 du 17 juin 1993 portant règlement statutaire des personnels ne relevant pas du statut de la fonction publique territoriale employés par les offices publics d'aménagement et de construction et portant modification du code de la construction et de l'habitation, et les articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail ;
2/ ALORS QUE l'article 12 du règlement intérieur d'Habitat 76, qui reprend que le texte de l'article 12 de l'annexe du décret n°93-852 du 17 juin 1993, prévoit que la commission disciplinaire est saisie pour avis de tout projet de sanction, qu'elle se réunit à la demande du salarié et que le salarié doit être mis en mesure d'être entendu ; qu'il ne prévoit pas que la convocation adressée au salarié doit préciser expressément que le salarié peut être assisté devant la commission par une personne de son choix, y demander l'audition de témoins et y produire un mémoire écrit et tous les documents lui paraissant présenter un intérêt pour sa défense ; qu'à supposer que l'absence de ces précisions puissent caractériser une irrégularité, il ne peut s'agir que d'une simple irrégularité de forme et non d'une irrégularité de fond privant le licenciement de cause réelle et sérieuse, l'absence desdites mentions n'étant pas de nature à priver le salarié de la possibilité de se défendre utilement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que le salarié avait été informé de la possibilité offerte par le recours à la commission disciplinaire, que cette commission s'était tenue et avait rendu un avis, la cour d'appel a violé l'article 12 du règlement intérieur applicable, ensemble le décret n°93-852 du 17 juin 1993, et les articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail ;
3/ ALORS QUE, subsidiairement, à supposer que l'information donnée au salarié sur la possibilité de recourir à une commission disciplinaire impose à l'employeur, sur le fondement de l'article 12 de l'annexe du décret n°93-852 du 17 juin 1993 et du règlement intérieur applicable, de lui communiquer toutes les informations relatives aux conditions dans lesquelles il peut être entendu, le visa par l'employeur dans la lettre proposant le recours à ladite commission, des dispositions règlementaires en cause, suffit pour retenir que l'employeur a satisfait à son obligation, dès lors que le salarié a pu disposer des textes visés par l'employeur ; qu'Habitat 76 a rappelé dans ses conclusions d'appel que M. X... s'était vu remettre le règlement intérieur de l'office lors de son embauche, que ce règlement faisait l'objet d'un affichage sur les panneaux d'information destinés au personnel et que le décret du 17 juin 1993 comme d'ailleurs le règlement intérieur de l'office, étaient en ligne sur le portail informatique de l'entreprise et par conséquent, disponibles pour l'ensemble du personnel (conclusions d'appel, p. 12) ; qu'il en résultait que M. X... avait disposé d'une information régulière relative au contenu des dispositions applicables en cas de recours à la commission disciplinaire et des conditions dans lesquelles il pouvait être entendu ; qu'en retenant que M. X... aurait été privé des garanties auxquelles il avait droit, sans vérifier s'il n'avait pas nécessairement connaissance des dispositions du règlement intérieur et notamment de son article 12, dès lors que ce document avait été annexé à son contrat de travail et demeurait librement consultable par tout salarié , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 12 du règlement intérieur applicable, ensemble le décret n°93-852 du 17 juin 1993, et des articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail ;
4/ ALORS QUE, subsidiairement encore, à supposer que l'information donnée au salarié sur la possibilité de recourir à une commission disciplinaire impose à l'employeur, sur le fondement de l'article 12 de l'annexe du décret n°93-852 du 17 juin 1993 et du règlement intérieur applicable, de lui communiquer toutes les informations relatives aux conditions dans lesquelles il peut être entendu, le visa par l'employeur dans la lettre proposant le recours à ladite commission, des dispositions règlementaires en cause, suffit pour retenir que l'employeur a satisfait à son obligation, dès lors que l'employeur établit que les conditions dans lesquelles le salarié peut être entendu, étaient connues de lui ; qu'Habitat 76 a fait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il résultait du procès-verbal de la commission que M. X... avait bien pris le contact de l'un de ses collègues pour se faire assister (conclusions d'appel, p. 12, § 2) ; qu'en opposant à Habitat 76 la circonstance que M. X... s'était présenté seul devant cette commission, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'Habitat 76 établissant que le salarié était parfaitement informé de ses droits, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.