La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/2014 | FRANCE | N°13-18477

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 octobre 2014, 13-18477


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant souverainement retenu qu'après l'incendie, les locaux de la cellule 1 et du rez-de-chausée de la cellule 2, étaient, selon l'expertise, inexploitables pour des raisons de solidité et de sécurité, aucun élément de preuve ne permettant de conclure à la possibilité de les conserver en l'état et le reste des bâtiments étant intégralement détruit, la cour d'appel, qui a constaté que les locaux dans leur ensemble étaient impropres à l'e

xploitation prévue au contrat de bail et qui n'était pas tenue de procéder à u...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant souverainement retenu qu'après l'incendie, les locaux de la cellule 1 et du rez-de-chausée de la cellule 2, étaient, selon l'expertise, inexploitables pour des raisons de solidité et de sécurité, aucun élément de preuve ne permettant de conclure à la possibilité de les conserver en l'état et le reste des bâtiments étant intégralement détruit, la cour d'appel, qui a constaté que les locaux dans leur ensemble étaient impropres à l'exploitation prévue au contrat de bail et qui n'était pas tenue de procéder à une recherche sur le coût des travaux de remise en état que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que le bail se trouvait résilié de plein droit ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Territoire Redskins aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Territoire Redskins à payer la somme de 3 000 euros à la société Icade ; rejette la demande de la société Territoire Redskins ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Territoire Redskins
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que, du fait de la destruction totale des locaux donnés à bail commercial par un bailleur (la société ICADE) à un preneur (la société REDSKINS), le bail s'était trouvé résilié de plein droit par application de l'article 1722 du code civil et d'avoir, en conséquence, débouté le preneur de sa demande de dédommagement ;
AUX MOTIFS QUE le rapport de l'expert X... était destiné d'abord à faire la lumière sur les causes de l'incendie, mais l'expert avait été ensuite saisi d'une mission complémentaire, celle de donner son avis quant à la possibilité d'exploiter partiellement les locaux non détruits conformément à leur destination prévue dans le bail dans des conditions de sécurité suffisantes et de respect de la réglementation en vigueur et d'évaluer la remise en état normal d'exploitation des locaux, si celle-ci était possible ; que l'expert rappelait à cet égard que ce point de la mission avait fait l'objet d'une réunion avec M. Y... - expert assistant - au cours de laquelle il avait été constaté, après visite des lieux, que la cellule 1 et le rez-de-chaussée de la cellule 2, situés à l'extrémité du bâtiment opposée au point de départ du feu, pourraient être récupérables, sous réserve de travaux de réfection importants et concluait que le montant des travaux de remise en état avait donc fait l'objet de deux hypothèses : démolition et consolidation de la travée 1 et du rez-de-chaussée de la travée 2 et reconstruction des autres travées, d'une part, démolition complète et reconstruction de l'ensemble du bâtiment, d'autre part, que M. Y... avait « déduit » que la solution consistant à conserver la travée 1 et une partie de la travée 2 était la meilleure sur le plan technique, que cependant ces travées n'étaient pas exploitables sans un renforcement de leur stabilité ; que l'expert assistant Y... qui s'était rendu sur place le 12 décembre 2008, considérait dans la lettre qu'il avait adressée à M. X... à la suite de la visite des lieux, que la cellule 5 point de départ du feu, était entièrement détruite, que les cellules 3 et 4 étaient elles aussi détruites et irrécupérables, que la charpente de la cellule 2 était déformée et irrécupérable, tandis que l'ossature supportant le plancher était apparemment intacte, mais dépourvue de contreventement transversal ; qu'il en concluait que l'ouvrage non détruit était limité à la cellule 1 et au niveau inférieur de la cellule 2, que « cette partie de l'ouvrage » n'était pas exploitable au plan de la solidité et de la sécurité, y compris après de modestes travaux tels le nettoyage, la création d'un accès indépendant sur rue, et la fermeture côté cellule 2, que la cellule 1 était récupérable, mais nécessitait de lourds travaux de structure (panne sablière, isolement côté cellule 2, contreventement transversal) ; que le bureau Veritas avait conclu, immédiatement après l'incendie en juin 2008, que tous les bâtiments du hall 279 étaient à détruire et qu'il pouvait être envisagé de conserver le bâtiment de rive du hall 279, sous réserve d'en renforcer la stabilité, et que si le bâtiment du hall 280 n'avait pas subi de dégâts apparents, eu égard au mode de construction et à sa liaison avec le mur de rive du bâtiment du hall 279, une incertitude demeurait ; qu'ainsi, deux hypothèses de reconstruction avaient été envisagées par les experts X... et Y..., l'une de la totalité des cinq travées pour un montant de 2.232.223 €, l'autre de quatre travées, accompagnée de travaux de renforcement de la première travée pour un montant de 2.152.154 € ; que ces deux chiffres étaient à rapprocher de la valeur vénale du bien qui était, selon la société ICADE, de 2.390.000 € pour le bâtiment 279 et de 2.000.000 € pour le bâtiment 280 loué à trois locataires, chiffres contestés par la société REDSKINS qui produisait un rapport d'une société d'expertise faisant valoir que le taux de rendement moyen des SCPI était de 5,73 %, ce qui aboutissait à une valeur vénale de 3.490.608 ¿, que le taux de rendement spécifique des locaux de bureaux du parc des Portes de Paris était de 3,04 %, ce qui donnait une valeur vénale de 6.591.591 €, que la moyenne des valeurs, y compris celle énoncée par ICADE, était de 5.819.630 € ; que la société REDSKINS produisait en outre un rapport d'un expert immobilier qui, se fondant sur une hypothèse de loyer de renouvellement de 150 €/m², proposait une valeur vénale de 5.797.000 € ; qu'il devait seulement être fait observer que ce dernier expert ne produisait dans son rapport aucun loyer de référence d'un montant équivalent à l'hypothèse retenue et que la société d'expertise se fondait, pour établir la valeur vénale la plus haute sur l'estimation immobilière des locaux de bureaux du parc des portes de Paris, sans distinguer entre les différentes offres de locaux et les caractéristiques de ceux-ci et que la moyenne des valeurs était impropre à établir la valeur vénale des locaux en cause ; que, quoiqu'il en était, il n'existait aucun élément permettant de conclure à la possibilité de conserver en l'état et après des travaux de modeste envergure, de nettoyage notamment, partie des locaux, soit ceux de la cellule 1 et du rez-de-chaussée de la cellule 2 qui étaient, après l'incendie, inexploitables au plan de la solidité et de la sécurité et nécessitaient, de l'avis même des experts, de lourds travaux de structure, le reste des bâtiments étant intégralement détruit ; que les experts avaient ainsi envisagé, soit une hypothèse de reconstruction totale des cinq travées, soit une hypothèse de construction de quatre travées avec travaux de renforcement de la première et de la seconde travée ; que, cependant, dans cette seconde hypothèse, le coût de remise en état des travées 1 et 2 d'un montant de 980.393,36 € HT, était pratiquement aussi élevé que celui de la reconstruction ¿ ab nihilo ¿ des trois autres travées 3, 4 et 5 d'un montant de 1.562.010,32 € HT, de telle sorte que si M. X... expert soulignait in fine dans son rapport sans parfaitement le démontrer, que la conservation de la cellule 1 et du rez-de-chaussée de la cellule 2 apparaissait techniquement satisfaisante, ce n'était qu'au prix de travaux de structure d'une importance telle qu'elle équivalait à la reconstruction totale des deux cellules ; qu'il s'ensuivait qu'après l'incendie, les locaux étaient impropres à leur destination dans leur ensemble, la cellule 1 et le rez-de-chaussée de la cellule 2 subsistant, ne pouvant être exploités sans des travaux de structure importants qui étaient pratiquement équivalents économiquement à la reconstruction complète des deux cellules ; qu'il convenait d'en déduire que les locaux donnés à bail qui ne pouvaient plus de quelque manière servir à l'usage auquel ils étaient destinés, avaient été entièrement détruits par l'incendie ; que, dans ces conditions, la démolition des cellules 1 et 2 subsistant par la société ICADE, quoique précipitée puisqu'elle était intervenue sans avoir été préconisée par les experts et avant la fin du litige, était cependant sans portée sur son issue ; que, par ailleurs, l'allégation de la société REDSKINS, selon laquelle la tardiveté de la réaction de la société ICADE, via sa société filiale de sécurité MANUTRA devenue ICADE SURETIS, serait en réalité à l'origine de l'importance des dégâts, de sorte que cette dernière ne pourrait se prévaloir du cas fortuit constitué par l'incendie pour demander la résiliation du bail, était infondée ; que s'il était établi par le rapport d'expertise que les agents de sécurité qui ne disposaient pas des clés des locaux, avaient perdu un temps précieux avant l'arrivée des secours, il n'était nullement établi, d'une part que les dégâts auraient été moindres s'ils avaient pu pénétrer dans les lieux ni, d'autre part, que la société ICADE était à l'origine de ce dysfonctionnement, la société REDSKINS ayant elle-même à veiller sur la sécurité des locaux dont elle avait la jouissance, en prenant éventuellement l'initiative de délivrer les clés aux agents de la société chargée de la sécurité du site ; que la destruction en totalité des locaux entraînait donc, en application de l'article 1722 du Code civil, la résiliation de plein droit du bail des locaux dans lesquels la société REDSKINS disposait de son siège social et de son principal établissement et pour la perte desquels elle ne pouvait prétendre à aucune indemnisation par la société bailleresse,
1°) ALORS QUE les juges du fond doivent, pour apprécier si les lieux loués ont été partiellement ou totalement détruits par un incendie, prendre en considération des éléments postérieurs au sinistre dont les conclusions de l'expert judiciaire ; qu'il ressort des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que l'expert judiciaire avait lui-même constaté, après visite des lieux, que la cellule 1 et le rez-de-chaussée de la cellule 2, situés dans la partie du bâtiment opposée au point de départ du feu, étaient récupérables après travaux ; qu'en décidant que les lieux loués avaient été complètement détruits du fait que les cellules 1 et 2 subsistantes ne pouvaient plus être utilisées en l'état après le sinistre et nécessitaient des réparations, la cour d'appel, qui a refusé de tenir compte des conclusions de l'expert postérieures au sinistre établissant le contraire, a violé l'article 1722 du Code civil ;
2°) ALORS QUE la perte partielle des lieux loués peut être assimilée à une destruction totale à la condition que le coût de réparation excède la valeur vénale de l'immeuble ; qu'en assimilant la perte partielle des lieux loués, objet du bail consenti à la société REDSKINS, à une perte totale pour la raison que le coût de réparation des travées subsistantes, soit les travées n° 1 et 2, était pratiquement équivalent à celui de leur reconstruction, au lieu de comparer le prix de réparation des travées qui était de 980.393,36 € à la valeur vénale de l'immeuble qui était, selon l'estimation basse - contestée par l'exposante - opérée par la société ICADE elle-même, de 2.390.000 € pour le bâtiment 279 dans lequel se trouvaient les cellules 1 à 4 et de 2.000.000 € pour le bâtiment 280 dont dépendait la cellule 5, la cour d'appel a violé l'article 1722 du Code civil ;
3°) ALORS QUE les juges du fond doivent, avant de décider qu'une perte partielle équivaut à une perte totale des lieux loués, évaluer la valeur vénale de l'immeuble pour la comparer au montant des travaux de reconstruction nécessaires ; qu'en l'espèce, la cour, qui a purement et simplement omis de procéder à une telle évaluation, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1722 du code civil ;
4°) ALORS QU'en l'état de constructions subsistantes après l'incendie, l'impropriété totale à leur destination ne peut se déduire que de travaux de réparation d'une telle ampleur qu'ils excèdent la valeur vénale de l'immeuble ; qu'il s'ensuit qu'il appartient à la juridiction du fond de rapporter le coût de réparation à la valeur vénale de l'immeuble, à l'exclusion du coût de reconstruction des immeubles subsistants ; qu'en déduisant l'impropriété totale des lieux loués à leur destination du coût de réparation des cellules 1 et 2 dès lors que ces travaux de réparation étant d'une telle ampleur qu'ils étaient « pratiquement équivalents économiquement à la reconstruction complète des deux cellules », la cour d'appel qui a déduit un motif inopérant, a violé l'article 1722 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-18477
Date de la décision : 14/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 oct. 2014, pourvoi n°13-18477


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18477
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award