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07/10/2014 | FRANCE | N°13-19538

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 octobre 2014, 13-19538


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 avril 2013), que la société Couach (la société) avait pour dirigeants M. X..., président du directoire, et M. Y..., président du conseil de surveillance ; qu'après ouverture d'une enquête sur l'information financière de la société à compter du 31 décembre 2007, le président de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a notifié des griefs à MM. X... et Y... ; que par décision du 31 mars 2011, la commission des sanctions de l'AMF a retenu que MM. X... et Y

... avaient commis des manquements à l'obligation d'information du public e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 avril 2013), que la société Couach (la société) avait pour dirigeants M. X..., président du directoire, et M. Y..., président du conseil de surveillance ; qu'après ouverture d'une enquête sur l'information financière de la société à compter du 31 décembre 2007, le président de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a notifié des griefs à MM. X... et Y... ; que par décision du 31 mars 2011, la commission des sanctions de l'AMF a retenu que MM. X... et Y... avaient commis des manquements à l'obligation d'information du public et a prononcé à leur encontre une sanction pécuniaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours contre cette décision, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges sont tenus de motiver leur décision en répondant aux moyens des conclusions des parties et en indiquant les éléments de fait et de droit sur lesquels ils fondent leur appréciation ; que dans ses conclusions devant la cour d'appel, M. X... faisait valoir que la méthode de calcul du carnet de commandes, consistant à comptabiliser, dans ce carnet tous les bateaux neufs commandés jusqu'à leur achèvement et livraison au propriétaire, date à laquelle ils étaient sortis du carnet de commandes pour l'intégralité de leur valeur, ne pouvait créer, dans l'esprit du public et des investisseurs aucun risque de confusion, dès lors que cette méthode, parfaitement régulière, était appliquée par la société sans interruption depuis 1999 et qu'elle permettait, par comparaison, de connaître très aisément la variation de ce carnet de commandes ; qu'il indiquait encore que si l'on retranchait du carnet de commandes les bateaux 33-07 et 50-03, dont les commandes avaient été annulées, le chiffre d'affaires correspondait très exactement au nombre d'années de production tel qu'il résultait du carnet de commandes, soit environ deux ans ; qu'en se bornant à affirmer, pour dire que c'est à bon droit que la décision avait retenu que le manquement à la bonne information du public relative au mode de détermination du carnet de commandes était constitué, en ce qui concerne tant les communiqués des 19 mars, 30 mai, 17 septembre et 17 décembre 2008 que le rapport financier annuel publié le 9 juillet 2008 et le rapport semestriel publié le 6 novembre 2008, que « cette façon de procéder peut entraîner des confusions dans l'esprit du public, notamment dans le rapprochement entre le montant du carnet de commandes et le chiffre d'affaires annuel » tel qu'il était effectué tant par les analyses financières retenues par le rapport d'enquête que par M. Y... lors de l'interview donnée au journal « la Bourse et la vie », sans indiquer sur quels éléments elle se fondait pour retenir ainsi l'existence d'un risque de confusion ni répondre au moyen des conclusions de l'exposant faisant valoir, chiffres à l'appui, la correspondance entre le carnet de commandes et le montant du chiffre d'affaires, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que nul ne peut être sanctionné pour une action qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction; que la cour d'appel a constaté que la méthode de détermination du carnet de commandes était parfaitement régulière en l'absence, sur ce point, de norme comptable précise et que les services de l'AMF n'avaient fait, lors de leur enquête en 2004, aucune observation sur la méthode de détermination du carnet de commandes adoptée par la société pas plus que sur le caractère imprécis de l'information donnée au public du fait du défaut d'une mention sur cette méthode de détermination ; qu'à supposer même qu'il puisse être considéré que l'information délivrée relative au carnet de commandes doive, en l'absence de normes en la matière, indiquer la méthode de détermination du carnet de commandes utilisée, l'arrêt ne pouvait, sans faire une application rétroactive de la règle de droit, prononcer une peine sur le fondement d'une interprétation imprévisible à la date de commission de l'action ; qu'en en jugeant autrement, la cour d'appel a violé le principe de légalité des peines et des délits, ensemble l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le principe de la sécurité juridique ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt constate que la méthode de détermination du carnet de commandes adoptée par la société consistait à laisser figurer dans ce document le chiffre d'affaires relatif à toutes les commandes de bateaux non encore livrées, même si elles étaient en cours d'exécution et partiellement enregistrées dans les comptes ; qu'il relève que le montant intégral de la commande était maintenu dans le carnet de commandes jusqu'à la livraison du bateau, tandis que celui-ci était déjà commencé et avait donné lieu à la comptabilisation d'une partie du chiffre d'affaires correspondant à la fraction déjà réalisée ; qu'il retient que, si la méthode ainsi appliquée était formellement régulière en l'absence, sur ce point, de norme comptable précise, cette façon de procéder pouvait entraîner des confusions dans l'esprit du public, notamment dans le rapprochement entre le montant du carnet de commandes et le chiffre d'affaires annuel tel qu'il avait été effectué en particulier par les analyses financières visées par le rapport d'enquête ; qu'il ajoute que la société étant, à l'époque des faits, devenue destinataire de commandes de bateaux de plus grande taille, l'évolution de son activité entraînait une modification de la durée des engagements et des cycles de production, qui accentuait les risques de confusion inhérents à cette méthode ; qu'ayant ainsi précisé les éléments sur lesquels elle se fondait pour retenir l'existence d'un risque de confusion résultant de la méthode appliquée par la société pour la présentation de son carnet de commandes, c'est sans encourir le grief de la première branche que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre M. X... dans le détail de son argumentation, a statué comme elle a fait ;
Et attendu, d'autre part, que tenue de rechercher si, dans les circonstances de l'espèce, l'information donnée au public par l'émetteur sur la base du carnet de commandes avait été exacte, précise et sincère au sens des dispositions de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF, la cour d'appel, qui a estimé que la méthode de détermination de ce carnet de commandes était susceptible d'entraîner des confusions dans l'esprit du public, a caractérisé en tous ses éléments, conformément aux dispositions applicables à la date à laquelle il a été commis, le manquement de l'émetteur à son obligation d'information ; qu'ainsi, c'est sans méconnaître les principes invoqués par la seconde branche, ni la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'elle s'est prononcée comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que ne répond pas de la communication au public d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse, le dirigeant d'un émetteur qui, en raison de circonstances particulières, n'a pu exercer totalement ou partiellement ses fonctions et a légitimement ignoré le caractère imprécis, inexact ou trompeur de l'information délivrée ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir, dans ses conclusions, que M. Y..., président du conseil de surveillance, ancien dirigeant de la société et actionnaire majoritaire, l'avait systématiquement empêché d'exercer ses fonctions en matière de communication financière, donnant directement et personnellement ses ordres à la société Actus ; qu'à l'appui de ses dires, il rappelait les termes du rapport des enquêteurs de l'AMF ayant relevé le rôle de M. Y... identifié comme le « véritable responsable de la communication financière de la société » ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... du fait de la de la communication au public d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse, à affirmer que le rôle attribué par M. X... à M. Y... dans la gestion de la société ne peut nullement constituer une circonstance particulière ayant privé M. X... de l'exercice total ou partiel de ses fonctions dans des conditions permettant de ne pas lui imputer les griefs et de ne pas prononcer de sanction à son encontre, sans préciser pour quel motif le comportement établi de M. Y... ne pouvait constituer une circonstance particulière ayant empêché M. X... d'exercer ses fonctions relatives à la communication financière de la société, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 221-1, 223-1 et 632-1 du règlement général de l'AMF, ensemble l'article L. 621-15 du code monétaire et financier ;
2°/ que ne répond pas de la communication au public d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse, le dirigeant d'un émetteur qui, en raison de circonstances particulières, n'a pu exercer totalement ou partiellement ses fonctions et a légitimement ignoré le caractère imprécis, inexact ou trompeur de l'information délivrée ; qu'en l'espèce, M. X... faisait encore valoir, dans ses conclusions, que le communiqué du 17 décembre 2008, indiquant une « bonne orientation du quatrième trimestre de l'exercice » et présentant comme ferme une commande d'un bateau, non encore signée, avait été modifié et validé la veille à 21 heures 48 par M. Y... et son conseiller personnel M. Z..., à une heure où lui-même ne pouvait en prendre connaissance, pour être sur la route de Bordeaux en direction de Saint Mandrier (Var), afin de voir des clients ; qu'il produisait, à l'appui de ses dires, les courriels échangés le 16 décembre 2008, avec Mme A..., chargée de la diffusion des communiqués, dont celui, dont il était l'auteur à 17 heures 39, indiquant qu'il voulait attendre l'assurance de signature du contrat du bateau pour l'annoncer et celui émanant de M. Z..., daté du même jour à 21 heures 48, adressé à Mme A..., indiquant : « Veuillez trouver la version du communiqué T3 validée par Didier (Y...) et moi-même. Cecommuniqué sera diffusé mercredi 17 décembre 2008 avant ouverture de bourse » ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... du fait de la diffusion, par le communiqué du 17 décembre 2008, à relever que ce dernier était le représentant légal de la société, sans répondre au moyen des conclusions, ensemble l'offre de preuve soumise, faisant valoir que le déplacement de M. X..., injoignable, constituait une circonstance particulière l'ayant effectivement empêché de connaître et, partant, de s'opposer aux modifications des informations devant être communiquées au public le 17 décembre 2008, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé que M. X..., en sa qualité de président du directoire, était le représentant légal de la société et était, à ce titre, débiteur au premier chef de l'obligation de donner au marché une information exacte, précise et sincère, l'arrêt retient que le rôle attribué par M. X... à M. Y... dans la gestion de la société ne pouvait constituer une circonstance l'ayant privé de l'exercice total ou partiel de ses fonctions de président du directoire ; qu'en l'état de ces appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre M. X... dans le détail de son argumentation, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à l'Autorité des marchés financiers ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par M. X... contre la décision de la Commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers le condamnant à une sanction pécuniaire de 60 000 euros ;
AUX MOTIFS, d'une part, QUE l'article 223-1 du règlement général de l'AMF énonce que « l'information donnée au public par l'émetteur doit être exacte, précise et sincère » et que selon l'article 221-1 du même règlement général « les dispositions de la présente section sont également applicables aux dirigeants de l'émetteur, de l'entité ou de la personne morale concernés » ; que l'article 632-1 du règlement général de l'AMF prévoyait, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'arrêté du 2 avril 2009 et applicable à la date des faits que « toute personne doit s'abstenir de communiquer ou de diffuser sciemment des informations, quel que soit le support utilisé, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications inexactes, imprécises ou trompeuses sur des instruments financiers émis par voie d'appel public à l'épargne au sens de l'article L 411-1 du code monétaire et financier, y compris en répandant des rumeurs ou en diffusant des informations inexactes ou trompeuses, alors que cette personne savait ou aurait dû savoir que les informations étaient inexactes ou trompeuses (¿) » ;
ET AUX MOTIFS, d'autre part, QU'en ce qui concerne les griefs tirés de l'information au public concernant le carnet de commandes, il est rappelé que les griefs notifiés à ce sujet à MM. X... et Y... visent le carnet de commandes en ce qu'il ne précise pas, d'une part, qu'il était égal au montant total des commandes non encore livrées, sans que soit soustrait le chiffre d'affaires réalisé et constaté sur les commandes en cours et, d'autre part, qu'il prenait en compte, à tort, des ventes insuffisamment fiabilisées pour y être incluses, notamment les commandes 50-03 et 33-07, étant précisé que la Commission des sanctions, dont la décision est définitive sur ce point, n'a finalement pas retenu le grief au titre de la commande 50-01 ; que, sur le défaut de précision du carnet de commandes, il est rappelé que la méthode de détermination du carnet de commande adoptée par la société Couach consistait à laisser figurer dans ce document le chiffre d'affaires relatif à toutes les commandes de bateaux non encore livrées, même si elles étaient en cours d'exécution et partiellement enregistrées dans les comptes ; qu'ainsi le montant intégral de la commande était maintenu dans le carnet de commandes jusqu'à la livraison du bateau même si celui-ci était déjà commencé et avait donné lieu à la comptabilisation d'une partie du chiffre d'affaires correspondant à la fraction déjà réalisée ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il n'appartenait pas à la Commission des sanctions et il ne revient pas à la cour, dans le cadre des recours dont elle est saisie, ni d'analyser les conditions dans lesquelles cette méthode de détermination du carnet de commandes, que les requérants qualifient de constante, avait été adoptée puis appliquée au regard des prescriptions du droit comptable avant et pendant la période visée par les griefs, ni d'apprécier les conditions dans lesquelles les analystes financiers qui suivaient cette valeur ont pu s'accoutumer à cette méthode, mais seulement de vérifier si, dans les circonstances de l'espèce, l'information donnée au public par l'émetteur sur la base du carnet de commandes avait été exacte, précise et sincère au sens des dispositions précitées de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF ; qu'il peut tout au plus être observé qu'il n'est ni contesté, ni contestable que même si elle ne correspondait pas à la pratique habituelle, la méthode de détermination du carnet de commandes n'en était pas moins formellement régulière en l'absence, sur ce point, de norme comptable précise ; que, cependant, ainsi que le mentionne à juste titre la Décision, il n'en demeure pas moins que cette façon de procéder peut entraîner des confusions dans l'esprit du public, notamment dans le rapprochement entre le montant du carnet de commandes et le chiffre d'affaires annuel tel qu'il était effectué tant pas les analyses financières que par m. Didier Y... lui-même qui, lors de l'interview au journal « La Bourse et la vie » des journées analystes des 8 ou 9 janvier 2009, déclarait « malgré une augmentation du chiffre d'affaires de 30 à 40 % annuel, Couach maintient un carnet de commandes de deux ans de production de bateaux » ; qu'en outre, la société Couach étant, à l'époque des faits, devenue destinataire de commandes de bateaux de plus grande taille, l'évolution de son activité entraînait une modification de la durée des engagements et des cycles de production qui accentuait les risques de confusion inhérents à cette méthode ; qu'en effet l'augmentation de la taille des bateaux à réaliser engendrait une plus grande durée de fabrication et un coût plus élevé, de sorte que les commandes de gros bateaux restaient plus longtemps dans le carnet de commandes avant la livraison, ce qui accentuait les risques de méprise sur l'importance de celui-ci ; que la Commission des sanctions a ainsi exactement décidé qu'à défaut d'une mention sur la méthode de détermination du carnet de commandes, le public n'a pas été mis en mesure d'apprécier la portée de la définition particulière de ce carnet de commandes retenue par la société à l'occasion des communiqués incriminés ; qu'enfin, l'absence d'observation des services de l'AMF que la méthode en cause en 2004, plus de cinq ans avant l'engagement de la présente procédure, n'est pas de nature à exonérer l'émetteur et ses dirigeants de l'obligation de donner au public, dans le cas précis, une information exacte, précise et sincère ; que c'est ainsi, à bon droit, que la Décision a retenu que le manquement à la bonne information du public relative au mode de détermination du carnet de commandes est constitué en ce qui concerne tant les communiqués des 19 mars, 30 mai, 17 septembre et 17 décembre 2008 que le rapport financier annuel sur les comptes consolidés au 31 janvier 2008, publié le 9 juillet 2008 et le rapport semestriel sur les comptes consolidés au 31 juillet 2008, publié le 6 novembre 2008 ;
1 ¿ ALORS QUE les juges sont tenus de motiver leur décision en répondant aux moyens des conclusions des parties et en indiquant les éléments de fait et de droit sur lesquels ils fondent leur appréciation ; que dans ses conclusions devant la cour d'appel, M. X... faisait valoir que la méthode de calcul du carnet de commande, consistant à comptabiliser, dans ce carnet tous les bateaux neufs commandés jusqu'à leur achèvement et livraison au propriétaire, date à laquelle ils étaient sortis du carnet de commandes pour l'intégralité de leur valeur, ne pouvait créer, dans l'esprit du public et des investisseurs aucun risque de confusion, dès lors que cette méthode, parfaitement régulière, était appliquée par la société sans interruption depuis 1999 et qu'elle permettait, par comparaison, de connaître très aisément la variation de ce carnet de commandes ; qu'il indiquait encore que si l'on retranchait du carnet de commandes les bateaux 33-07 et 50-03, dont les commandes avaient été annulées, le chiffre d'affaires correspondait très exactement au nombre d'années de production tel qu'il résultait du carnet de commandes, soit environ deux ans ; qu'en se bornant à affirmer, pour dire que c'est à bon droit que la Décision avait retenu que le manquement à la bonne information du public relative au mode de détermination du carnet de commande était constitué, en ce qui concerne tant les communiqués des 19 mars, 30 mai, 17 septembre et 17 décembre 2008 que le rapport financier annuel publié le 9 juillet 2008 et le rapport semestriel publié le 6 novembre 2008, que « cette façon de procéder peut entrainer des confusions dans l'esprit du public, notamment dans le rapprochement entre le montant du carnet de commandes et le chiffre d'affaires annuel » tel qu'il était effectué tant par les analyses financières retenues par le rapport d'enquête que par M. Y... lors de l'interview donnée au journal « la bourse et la vie », sans indiquer sur quels éléments, elle se fondait pour retenir ainsi l'existence d'un risque de confusion ni répondre au moyen des conclusions de l'exposant faisant valoir, chiffres à l'appui, la correspondance entre le carnet de commandes et le montant du chiffre d'affaires, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2 ¿ ALORS, en tout état de cause, QUE nul ne peut être sanctionné pour une action qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction; que la cour d'appel a constaté que la méthode de détermination du carnet de commandes était parfaitement régulière en l'absence, sur ce point de norme comptable précise et que les services de l'AMF n'avaient fait, lors de leur enquête en 2004, aucune observation sur la méthode de détermination du carnet de commandes adoptée par la société Couach pas plus que sur le caractère imprécis de l'information donnée au public du fait du défaut d'une mention sur cette méthode de détermination ; qu'à supposer même qu'il puisse être considéré que l'information délivrée relative au carnet de commandes doive, en l'absence de normes en la matière, indiquer la méthode de détermination du carnet de commandes utilisée, l'arrêt ne pouvait, sans faire une application rétroactive de la règle de droit, prononcer une peine sur le fondement d'une interprétation imprévisible à la date de commission de l'action ; qu'en en jugeant autrement, la cour d'appel a violé le principe de légalité des peines et des délits, ensemble l'article 7 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le principe de la sécurité juridique.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par M. X... contre la décision de la Commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers le condamnant à une sanction pécuniaire de 60 000 euros ;
AUX MOTIFS, d'une part, QUE concernant le navire « 50-03 », le communiqué du 17 décembre 2008 annonçait « la commande d'un 3ème méga yacht de 50 mètres intervenue en décembre » et présentait le montant du carnet de commandes de 165 millions d'euros comme arrêté à « fin octobre 2008 » ; que, cependant, c'est par de justes motifs, que la cour adopte, que la Commission a décidé que le manquement, consistant à ne pas avoir donné au public une information exacte, précise et sincère au sens de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF, était caractérisé, dès lors que cette commande d'un montant de 18,5 millions ¿ qui, au surplus a été subordonnée à une condition suspensive et à l'obligation pour Couach de fournir une garantie bancaire ¿ n'avait, à la date du communiqué, donné lieu à aucune formalisation, fût-ce par lettre d'intention ; que la Décision relève par surcroît à juste titre que le communiqué du 17 décembre 2008 est d'autant plus inexact qu'il laisse entendre à tort que la commande de ce nouveau bateau pour un montant de 18,5 millions d'euros n'était pas incluse dans le montant du carnet de commandes arrêté à fin octobre 2008 et s'ajouterait à celui-ci ; que ce n'est qu'au surplus que la cour observe, d'une part, qu'il ressort d'un courrier électronique adressé par M. X... à M. Y... la veille du communiqué qu'il aurait « préféré avoir l'assurance de signature du contrat 50 m » et, d'autre part, qu'il a même déclaré lors de son audition devant le rapporteur avoir conseillé à M. Y... d'attendre d'obtenir le bon de commande pour communiquer au public sur ce point, ce qu'il confirme dans ses écritures lorsqu'il affirme que « l'intégration du 50-03 dans le montant du carnet de commandes communiqué le 17 décembre au matin ne correspond pas à la réalité au moment de ce communiqué » (arrêt, p. 9, al.2 à al.5) ;
ET AUX MOTIFS, d'autre part, QU' à moins que des circonstances particulière les aient privés de l'exercice total ou partiel de leurs fonctions, les dirigeants de l'émetteur doivent répondre de la communication au public d'informations qui ne sont pas exactes, précises ni sincères et qui, à ce titre, sont de nature à porter atteinte à la protection des investisseurs ou au bon fonctionnement du marché au sens de l'article L 621-4 du code monétaire et financier ; qu'en application de ces principes, c'est à bon droit que la Décision a retenu qu'en sa qualité de président du directoire, M. Jérôme X... était le représentant légal de la société et, à ce titre, était débiteur au premier chef de l'obligation de donner au marché une information exacte, précise et sincère ; que le rôle attribué par M. X... à M. Y... dans la gestion de la société Couach ne peut nullement constituer une circonstance particulière ayant privé M. X... de l'exercice total ou partiel de ses fonctions dans des conditions permettant de ne pas lui imputer les griefs et de ne pas prononcer de sanction à son encontre ; qu'à tout le moins, ainsi que le rappelle l'Autorité dans ses observations, il est établi par le dossier que M. X... n'ignorait pas le mode de détermination du carnet de commandes de la société Couach et qu'il connaissait le lancement d'une procédure d'alerte par les commissaires aux comptes ; qu'il est également constant qu'il avait évoqué le 24 novembre 2008 une situation de trésorerie « très tendue » de sorte qu'il ne pouvait ignorer le caractère très optimiste du communiqué sus-évoqué du 17 décembre 2008 qui confirmait « la bonne orientation du 4ème trimestre de l'exercice » ; qu'il avait aussi précisé qu'il préférait « avoir l'assurance de signature du contrat 50 m » avant la publication du communiqué du 17 décembre qui, comme il a été dit, présentait comme ferme une commande d'un troisième bateau de 50 mètres alors qu'aucun bon de commande n'avait encore été signé (arrêt, p.13, al.6 à p.14, al.2) ;
1 ¿ ALORS QUE ne répond pas de la communication au public d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse, le dirigeant d'un émetteur qui, en raison de circonstances particulières n'a pu exercer totalement ou partiellement ses fonctions et a légitimement ignoré le caractère imprécis, inexact ou trompeur de l'information délivrée ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir, dans ses conclusions, que M. Y..., président du conseil de surveillance, ancien dirigeant de la société et actionnaire majoritaire, l'avait systématiquement empêché d'exercer ses fonctions en matière de communication financière, donnant directement et personnellement ses ordres à la société Actus ; qu'à l'appui de ses dires, il rappelait les termes du rapport des enquêteurs de l'AMF ayant relevé le rôle de M. Y... identifié comme le « véritable responsable de la communication financière de la société » ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... du fait de la de la communication au public d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse, à affirmer que le rôle attribué par M. X... à M. Y... dans la gestion de la société Couach ne peut nullement constituer une circonstance particulière ayant privé M. X... de l'exercice total ou partiel de ses fonctions dans des conditions permettant de ne pas lui imputer les griefs et de ne pas prononcer de sanction à son encontre, sans préciser pour quel motif le comportement établi de M. Y... ne pouvait constituer une circonstance particulière ayant empêché M. X... d'exercer ses fonctions relatives à la communication financière de la société, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 221-1, 223-1 et 632-1 du règlement général de l'AMF, ensemble l'article L 621-15 du code monétaire et financier ;
2 ¿ ALORS, en tout état de cause, QUE ne répond pas de la communication au public d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse, le dirigeant d'un émetteur qui, en raison de circonstances particulières n'a pu exercer totalement ou partiellement ses fonctions et a légitimement ignoré le caractère imprécis, inexact ou trompeur de l'information délivrée ; qu'en l'espèce, M. X... faisait encore valoir, dans ses conclusions, que le communiqué du 17 décembre 2008, indiquant une « bonne orientation du 4ème trimestre de l'exercice » et présentant comme ferme une commande d'un bateau, non encore signée, avait été modifié et validé la veille à 21 h 48 par M. Y... et son conseiller personnel M. Z..., à une heure où lui-même ne pouvait en prendre connaissance, pour être sur la route de Bordeaux en direction de Saint Mandrier, (Var), afin de voir des clients ; qu'il produisait, à l'appui de ses dires, les courriels échangés le 16 décembre 2008, avec Mme A..., chargée de la diffusion des communiqués, dont celui, dont il était l'auteur à 17h39, indiquant qu'il voulait attendre l'assurance de signature du contrat du bateau pour l'annoncer et celui émanant de M. Z..., daté du même jour à 21h48, adressé à Mme A..., indiquant : « Veuillez trouver la version du communiqué T3 validée par Didier (Y...) et moi-même. Ce communiqué sera diffusé mercredi 17 décembre 2008 avant ouverture de bourse », (Cf. conclusions, p 30 à 4) ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... du fait de la diffusion, par le communiqué du 17 décembre 2008, à relever que ce dernier était le représentant légal de la société, sans répondre au moyen des conclusions, ensemble l'offre de preuve soumise, faisant valoir que le déplacement de M. X..., injoignable, constituait une circonstance particulière l'ayant effectivement empêché de connaître et, partant, de s'opposer aux modifications des informations devant être communiquées au public le 17 décembre 2008, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-19538
Date de la décision : 07/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 oct. 2014, pourvoi n°13-19538


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19538
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