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25/09/2014 | FRANCE | N°13-19970

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 25 septembre 2014, 13-19970


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 10 avril 2013), que dans le litige opposant la SCI des Trois Croix (la SCI), propriétaire de parcelles cadastrées AC n° 45, 46 et 47, à M. X..., propriétaire de parcelles contiguës cadastrées AC n° 104 et 106, un arrêt irrévocable du 16 avril 2009 a confirmé l'existence d'une servitude de passage au profit des parcelles AC n° 45, 46 et 47, reposant en partie sur les parcelles AC n° 161 et 104, a

constaté que l'assiette de la servitude n'était pas définie avec précisi...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 10 avril 2013), que dans le litige opposant la SCI des Trois Croix (la SCI), propriétaire de parcelles cadastrées AC n° 45, 46 et 47, à M. X..., propriétaire de parcelles contiguës cadastrées AC n° 104 et 106, un arrêt irrévocable du 16 avril 2009 a confirmé l'existence d'une servitude de passage au profit des parcelles AC n° 45, 46 et 47, reposant en partie sur les parcelles AC n° 161 et 104, a constaté que l'assiette de la servitude n'était pas définie avec précision et a condamné M. X... à enlever la clôture installée à l'entrée du chemin sur sa parcelle AC n° 104 ; que par acte du 30 juin 2009 la SCI a fait signifier cet arrêt à M. et Mme Y..., propriétaires des parcelles cadastrées AC n° 101 et 105 qui l'avaient assignée en référé pour lui voir interdire tout droit de passage sur leur parcelle n° 105 ; que sur saisine de la SCI, un jugement du 22 février 2011 a confirmé l'existence d'une servitude de passage par destination de père de famille au bénéfice des parcelles cadastrées AC n° 45, 46 et 47, dit qu'elle devait s'exercer sur les parcelles AC n° 104 et 105 appartenant respectivement à M. X... et M. et Mme Y... et dit que l'assiette de la servitude était d'une largeur de 1, 80 m ; que la SCI a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de dire que l'arrêt de la cour d'appel de Besançon du 16 avril 2009 revêtait l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... et en conséquence que l'existence d'une servitude de passage au profit des parcelles situées commune de Montperreux, bourg-de-Chaon, cadastrées C45, C46 et C47 était acquise, alors, selon le moyen :
1°/ que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'une décision tranchant la même demande entre les mêmes parties ; qu'il ne peut y avoir autorité de chose jugée que si la partie à qui elle est opposée a été à même de débattre de la question précédemment tranchée ; qu'il était constant que les époux Y... n'avaient pas la qualité de parties dans la procédure ayant conduit à l'arrêt de la cour d'appel de Besançon en date du 16 avril 2009 ; que par conséquent cet arrêt ne pouvait leur être opposé ; qu'en énonçant, pour retenir que l'existence de la servitude de passage devait être considérée comme acquise, que l'arrêt du 16 avril 2009 revêtait l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... cependant qu'ils n'avaient jamais été parties à l'instance ayant abouti au prononcé dudit arrêt, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
2°/ que seul l'exercice de la tierce opposition peut rendre la décision opposable au tiers qui n'y était pas partie ; qu'en retenant que l'arrêt du 16 avril 2009 revêtait l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... qui avaient négligé de le remettre en cause comme ils en avaient eu la possibilité, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil, ensemble les articles 582 et 583 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la SCI avait fait signifier l'arrêt du 16 avril 2009 à M. et Mme Y... qui, bien qu'informés par l'acte de signification de la possibilité de former tierce opposition dans un délai de deux mois en vertu des articles 582 et suivants du code de procédure civile, n'avaient pas exercé ce recours dans le délai imparti, alors que, s'ils contestaient l'existence de la servitude de passage, ils auraient eu intérêt à l'exercer, l'assiette de la servitude reconnue par l'arrêt pouvant grever en partie leur parcelle, c'est sans méconnaître l'article 1351 du code civil et les articles 582 et 583 du code de procédure civile que, tirant les conséquences légales de ses constatations, la cour d'appel a décidé que l'existence de la servitude de passage était définitivement consacrée par un arrêt revêtu de l'autorité de la chose jugée qui était opposable à M. et Mme Y... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la SCI Les Trois Croix la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat aux Conseils pour M. et Mme Z...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Besançon le 16 avril 2009 revêtait l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... et d'AVOIR dit en conséquence que l'existence d'une servitude de passage au profit des parcelles situées commune de Montperreux, bourg de Chaon, cadastrées C45, C46 et C47 était acquise ;
AUX MOTIFS QUE ¿ sur l'autorité de la chose jugée, l'appel formé par la SCI des Trois croix le 19 décembre 2011 étant un appel général, il ne peut être considéré que l'appelante aurait acquiescé au jugement en ce qu'il a écarté l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... ; que l'arrêt du 16 avril 2009 a confirmé le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Besançon le 4 juillet 2006, en ce qu'il avait reconnu l'existence d'une servitude de passage au profit des parcelles situées commune de Montperreux, bourg de Chaon, cadastrées C45, C46 et C47, entre la barrière située à l'arrière de cet ensemble immobilier et jusqu'à la route de Montperreux, dite rue des Prés Maillot, reposant en partie sur les parcelles cadastrées AC 161 et AC 104, et dont l'assiette est le chemin matérialisé par des talus ; que cet arrêt constate également que l'assiette de la servitude n'est pas définie avec précision, mais qu'elle semble reposer en partie sur la parcelle 105 de François Y... ; que la SCI des Trois Croix a fait signifier à François Y... et Chantal Z..., épouse Y..., l'arrêt rendu par la Cour d'appel le 16 avril 2009, par actes d'huissier du 30 juin 2009 ; que les actes de signification mentionnaient la possibilité de former tierce opposition dans un délai de deux mois, en vertu des articles 582 et suivants du code de procédure civile ; que les époux Y... n'ont pas fait tierce opposition dans le délai qui leur était imparti, alors que, s'ils contestaient l'existence de la servitude de passage, ils auraient eu intérêt à exercer un tel recours, l'assiette de la servitude reconnue par la cour pouvant grever en partie leur parcelle ; que la cour ne peut aujourd'hui réexaminer la question de l'existence de servitude sans risquer une contrariété de décisions qui se résoudrait nécessairement au profit du premier arrêt, en vertu de l'article 617 du code de procédure civile ; qu'au vu de ces éléments, il convient de constater que l'arrêt du 16 avril 2009 revêt l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y..., qui ont négligé de le remettre en cause comme ils en ont eu la possibilité ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point ;
- sur la servitude de passage, que l'existence de la servitude doit donc être considérée comme acquise ; qu'il reste cependant à définir son assiette ; que la création de la servitude remonte à l'acte de partage du 2 avril 1964 ; que cet acte précise que le droit de passage s'exerce sur le chemin existant reliant la maison A...à la route de Montperreux, sur son assiette actuelle entre les deux pâtures n° 163 et 154 ; qu'aucun plan n'est annexé aux copies de l'acte de 1964 versés aux débats par les parties ; que les plans cadastraux produits, qui font apparaître le chemin, sont plus récents, de même que le plan de bornage de 1981 entre B...et X..., le procès-verbal dressé par Maître C... le 13 septembre 2004, ou les photographies des lieux ; que pour déterminer l'assiette de la servitude, il convient de se référer non pas à l'état des lieux actuel, mais au chemin tel qu'il existait en 1964 ; qu'en l'état, la cour ne dispose pas des éléments suffisants pour statuer ; qu'il convient d'infirmer le jugement déféré, d'ordonner, avant dire droit, une mesure d'expertise, et de surseoir à statuer sur la définition de l'assiette de la servitude les travaux qui pourraient être nécessaires, et les demandes annexes des parties ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'une décision tranchant la même demande entre les mêmes parties ; qu'il ne peut y avoir autorité de chose jugée que si la partie à qui elle est opposée a été à même de débattre de la question précédemment tranchée ; qu'il était constant que les époux Y... n'avaient pas la qualité de parties dans la procédure ayant conduit à l'arrêt de la Cour d'appel de Besançon en date du 16 avril 2009 ; que par conséquent cet arrêt ne pouvait leur être opposé ; qu'en énonçant, pour retenir que l'existence de la servitude de passage devait être considérée comme acquise, que l'arrêt du 16 avril 2009 revêtait l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... cependant qu'ils n'avaient jamais été parties à l'instance ayant abouti au prononcé dudit arrêt, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE seul l'exercice de la tierce opposition peut rendre la décision opposable au tiers qui n'y était pas partie ; qu'en retenant que l'arrêt du 16 avril 2009 revêtait l'autorité de la chose jugée à l'égard des époux Y... qui avaient négligé de le remettre en cause comme ils en avaient eu la possibilité, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil, ensemble les articles 582 et 583 du code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIÈME PART, QUE le préjudice, qui sous-tend l'intérêt à exercer la tierce opposition, doit naître du dispositif et non pas des motifs ; qu'en l'espèce, le dispositif du jugement du Tribunal de grande instance de Besançon en date du 4 juillet 2006, adopté par la Cour d'appel de Besançon dans son arrêt du 16 avril 2009, confirmait « l'existence d'une servitude de passage au profit des parcelles situées commune de Montperreux (Doubs), bourg de Chaon, cadastrée AC 45, 46 et 47, entre la barrière située à l'arrière de cet ensemble immobilier et jusqu'à la route de Montperreux, dite rue des Prés Maillot reposant en partie sur les parcelles cadastrées AC n° 161 et 104 et dont l'assiette était le chemin matérialisé par des talus », sans nullement viser la parcelle n° 105 appartenant aux époux Y... ; que ceux-ci n'avaient donc pas d'intérêt à former tierce opposition à l'encontre de l'arrêt du 16 avril 2009 qui ne visait pas leur terrain ; qu'en affirmant que les époux Y... auraient eu intérêt à exercer un tel recours, l'assiette de la servitude reconnue par la cour pouvant grever en partie leur parcelle, la cour d'appel, qui s'est référée aux motifs de l'arrêt de la cour d'appel en date du 16 avril 2009 et non à son dispositif, a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIÈME PART, QUE les époux Y... faisaient valoir que leur argumentation en ce qu'elle contestait l'existence d'une servitude de passage n'aboutirait pas à rendre une décision en contrariété avec l'arrêt du 16 avril 2009 dès lors qu'il n'y avait ni identité d'objet de la demande ni identité de parties et que ledit arrêt n'avait pas statué sur l'existence d'une servitude s'appliquant sur la parcelle 105 leur appartenant ; qu'en se bornant à affirmer qu'elle ne pouvait réexaminer la question de l'existence d'une servitude sans risquer une contrariété de décisions qui se résoudrait nécessairement au profit du premier arrêt, en vertu de l'article 617 du code de procédure civile, sans expliquer sur quoi portait le risque de contrariété, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 617 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE lorsque deux décisions sont inconciliables elles peuvent être frappées d'un pourvoi unique, la Cour de cassation, si la contrariété est constatée, annulant l'une des décisions ou, s'il y a lieu, les deux ; qu'en affirmant qu'elle ne pouvait réexaminer la question de l'existence de servitude sans risquer une contrariété de décisions qui se résoudrait nécessairement au profit du premier arrêt, la cour d'appel a violé l'article 618 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-19970
Date de la décision : 25/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

TIERCE OPPOSITION - Recevabilité - Matière contentieuse - Tiers auquel le jugement a été notifié - Conditions - Détermination - Portée

TIERCE OPPOSITION - Recevabilité - Exclusion - Cas - Tiers auquel le jugement été notifié - Tierce opposition formée plus de deux mois suivant sa signification

En application de l'article 586, alinéa 3, du code de procédure civile, la tierce opposition n'est, en matière contentieuse, recevable de la part du tiers auquel le jugement a été notifié que dans les deux mois de cette notification, sous réserve que celle-ci ait indiqué de manière très apparente le délai dont il dispose ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé. Doit en conséquence être approuvé l'arrêt qui déclare irrecevable comme tardive la tierce opposition formée par un tiers contre un jugement de plus de deux mois suivant la signification qui lui en avait été faite, avec l'indication de la possibilité de former tierce opposition dans un délai de deux mois, en vertu des articles 582 et suivants du code de procédure civile


Références :

articles 582 et suivants du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 10 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 25 sep. 2014, pourvoi n°13-19970, Bull. civ. 2014, II, n° 200
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, II, n° 200

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: Mme Nicolle
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19970
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