LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les effets du divorce des époux X...-Y...ont été fixés, dans leurs rapports, au 19 février 1991 ; que des difficultés se sont élevées lors des opérations de liquidation de la communauté ayant existé entre eux, notamment, quant à l'indemnité due par M. X...pour l'occupation de l'immeuble qui en dépendait et au remboursement des dépenses qu'il avait exposées pendant l'indivision post-communautaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X...fait grief à l'arrêt de limiter à 70 000 euros l'indemnité qui lui est due au titre du remboursement des emprunts ayant financé l'immeuble commun, alors, selon le moyen, que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, de la plus forte des deux sommes que représentent la dépense qu'il a faite et le profit subsistant ; qu'en l'espèce, il était établi que M. X...avait remboursé seul l'emprunt ayant servi à l'acquisition du bien immobilier commun, pour un montant total de 37 652, 51 euros, soit 55, 62 % du prix d'acquisition du bien ; qu'il sollicitait ainsi une indemnité fondée sur le profit subsistant qui en était résulté, soit la somme de 155 736 euros (55, 62 % rapportée à 280 000 euros, valeur actuelle du bien) ; qu'en fixant l'indemnité à la somme de 70 000 euros, qui ne correspond ni à la dépense faite (37 652, 51 euros), ni au profit subsistant (155 736 euros), la cour d'appel a violé l'article 815-13 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que M. X...avait remboursé seul pendant l'indivision post-communautaire les emprunts contractés pour l'acquisition de l'immeuble, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel, faisant usage du pouvoir que lui confère l'article 815-13 du code civil, a fixé, selon l'équité, l'indemnité due de ce chef par l'indivision à M. X..., à une somme, supérieure à la dépense, mais inférieure au profit subsistant ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt de refuser d'ordonner la compensation judiciaire sollicitée par M. X..., alors, selon le moyen, que les dispositions de l'article 1293, alinéa 3, du code civil ne s'opposent pas à ce que la partie dont la créance est insaisissable puisse demander au juge de compenser les sommes qui lui sont dues avec ce qu'elle doit elle-même à son débiteur ; qu'en refusant d'ordonner la compensation de la créance détenue à l'encontre de Mme Y...au titre de pensions alimentaires impayées avec la dette dont M. X...se trouvera redevable envers elle dans le cadre du partage, la cour d'appel a violé les articles 1291 et 1293, aliéna 3, du code civil ;
Mais attendu que la compensation ne peut avoir lieu qu'entre deux obligations certaines ; qu'ayant constaté par motifs propres et adoptés des premiers juges que M. X...demandait la compensation de la somme que lui devait personnellement Mme Y...au titre d'arriéré sur sa part contributive à l'entretien et l'éducation des enfants, avec la soulte éventuellement due à l'issue des opérations de liquidation de leur communauté, ce dont il résultait que cette dette n'était pas certaine, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu les articles 815-8 et 815-13 du code civil ;
Attendu que, pour limiter à 15 000 euros le montant de l'indemnité due à M. X...au titre des travaux d'amélioration et d'entretien de l'immeuble indivis qu'il avait financés, l'arrêt énonce que l'expert avait conclu que les travaux d'amélioration pouvaient être évalués à la somme de 15 000 euros, le solde ne correspondant qu'à des travaux d'entretien, dont il retient qu'ils ne pouvaient donner lieu à indemnité selon les dispositions de l'article 815-13 du code civil ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si ce solde correspondait à des dépenses nécessaires à la conservation de l'immeuble, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement d'une somme de 3 661, 27 euros au titre de travaux réalisés par M. X...sur l'immeuble indivis, l'arrêt rendu le 26 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne Mme Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité à 70. 000 euros le montant de l'indemnité due à Monsieur X...au titre du remboursement des emprunts contractés pour l'achat de l'immeuble commun ;
Aux motifs que, « M. Louis X...expose qu'il a remboursé seul les échéances des deux prêts contractés pour financer le bien immobilier litigieux, entre le 19 février 1991, date de prise d'effet du divorce, et leur date d'échéance, soit courant mai 1998 pour le prêt d'un montant de 60 000 francs contracté auprès de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel d'Ile de France, et courant avril 2004 pour le prêt d'un montant de 220 000 francs contracté auprès du Crédit foncier de France.
De ce fait, il a déboursé une somme de 37 652, 51 euros, capital restant dû sur les deux prêts à la date de prise d'effet du divorce, soit 55, 62 % du prix d'acquisition du bien, montant non contesté par Mme Marie-Christiane Y....
En conséquence, par application de l'article 815-13 du code civil, il sollicite une indemnité à ce titre d'un montant de 155 736 curas, correspondant au pourcentage du prix d'achat pris en charge par ses soins rapporté à la valeur actuelle du bien telle que proposée par l'expert, soit 280000 euros.
Lorsqu'un indivisaire rembourse seul un prêt contracté pour l'acquisition du bien indivis, empêchant ainsi sa saisie ou sa vente, la dépense effectuée à ce titre doit donner lieu à indemnité calculée par application des dispositions prévues à l'article 815-13 du code civil, c'est à dire selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage.
S'il est certain que l'augmentation de la valeur du bien, telle que retenue par l'expert, relève dans sa plus grande partie de l'évolution du prix de l'immobilier, il doit être considéré que l'effort fourni par M. Louis X...pour poursuivre seul le remboursement des prêts alors même qu'il avait à sa charge les deux enfants communs a également participé à cette valorisation.
En conséquence, il lui sera attribué à ce titre une indemnité fixée à la somme de 70 000 euros. Le jugement sera infirmé en ce sens » ;
Alors que, lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, de la plus forte des deux sommes que représentent la dépense qu'il a faite et le profit subsistant ; qu'en l'espèce, il était établi que Monsieur X...avait remboursé seul l'emprunt ayant servi à l'acquisition du bien immobilier commun, pour un montant total de 37. 652, 51 euros, soit 55, 62 % du prix d'acquisition du bien ; qu'il sollicitait ainsi une indemnité fondée sur le profit subsistant qui en était résulté, soit la somme de 155. 736 euros (55, 62 % rapportée à 280. 000 euros, valeur actuelle du bien) ; qu'en fixant l'indemnité à la somme de 70. 000 euros, qui ne correspond ni à la dépense faite (37. 652, 51 euros), ni au profit subsistant (155. 736 euros), la Cour d'appel a violé l'article 815-13 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité à 15. 000 euros le montant de l'indemnité due à Monsieur X...au titre du remboursement des travaux d'amélioration et d'entretien qu'il avait financés sur l'immeuble commun ;
Aux motifs que, « M. Louis X...rappelle que selon l'article 815-13 du code civil, lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation et eu égard aux impenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation des biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.
Dans le cadre de l'expertise, il a justifié de travaux d'amélioration et d'entretien effectués et financés par lui seul postérieurement à la date de prise d'effet du divorce à hauteur de la somme de 18 661, 27 euros.
Or, l'expert a retenu que, sur ce montant, seule la somme de 15 000 euros correspondait à des travaux d'amélioration et donc qu'à contrario, celle de 3 661, 27 euros correspondait à des travaux d'entretien, sans chiffrer la plus-value apportée à l'immeuble du fait des améliorations, comme ceci lui avait été demandé par le juge de la mise en état dans une ordonnance en date du 23 octobre 2008, complétant sa mission, En conséquence, il sollicite que soit fixé à la somme de 44 000 euros le montant de l'indemnité due à ce titre, eu égard aux factures d'achat de matériaux et à l'économie de main d'oeuvre procurée à l'indivision du fait des travaux effectués par lui-même, ou à titre subsidiaire, de désigner à nouveau Monsieur Z... pour un complément d'expertise.
Il sera objecté que, contrairement à ce qui est soutenu par M. Louis X..., l'expert a complètement mené à bien sa mission en procédant à l'examen de toutes les factures produites par ce dernier pour conclure que les travaux d'amélioration du bien pouvaient être évalués à la somme de 15 000 euros, le solde ne correspondant qu'à des travaux d'entretien, dont il convient de rappeler qu'ils ne peuvent donner lieu à indemnité selon les dispositions de l'article 815-13 du code civil (cf. p 42 du rapport).
Cette estimation est en totale adéquation avec ses constatations plus générales puisqu'il a noté en page 27 de son rapport « un manque de prestations et de confort » de l'immeuble ce qui démontre l'absence de valorisation qui y a été apportée du fait des travaux réalisés par M. Louis X....
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé à la somme de 15 000 euros l'indemnité due à ce dernier par l'indivision post-communautaire, sans qu'il apparaisse nécessaire de procéder à une nouvelle désignation de l'expert » ;
Alors que quiconque expose des frais d'entretien pour le compte de l'indivision est créancier de l'indivision ; qu'en l'espèce, Monsieur X...sollicitait l'inscription à son profit d'une créance sur l'indivision pour les travaux de conservation et d'entretien qu'il avait réalisés pour un montant de 3. 661, 27 euros ; qu'en se bornant à dire que les travaux d'entretien ne peuvent donner lieu à indemnités selon les dispositions de l'article 815-13 du code civil, la Cour d'appel, qui a refusé d'appliquer la loi, a violé l'article 815-8 du code civil, ensemble l'article 12 du code de procédure civile
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir refusé d'ordonner la compensation judiciaire sollicitée par Monsieur X...;
Aux motifs que, « Il est constant que Mme Marie-Christiane Y...reste débitrice, au moins pour partie, de sa part contributive à l'entretien et l'éducation des enfants communs. M. Louis X...bénéficie d'ores et déjà d'un titre exécutoire à ce titre et, en tout état de cause, les dispositions de l'article 1293 alinéa 3 du code civil s'opposent à ce qu'il soit ordonné une compensation judiciaire avec cette dette et celle dont M. Louis X...se trouvera redevable envers Mme Marie-Christiane Y...dans le cadre du partage.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande à ce titre » ;
Alors que, les dispositions de l'article 1293, alinéa 3, du code civil ne s'opposent pas à ce que la partie dont la créance est insaisissable puisse demander au juge de compenser les sommes qui lui sont dues avec ce qu'elle doit elle-même à son débiteur ; qu'en refusant d'ordonner la compensation de la créance détenue à l'encontre de Madame Y...au titre de pensions alimentaires impayées avec la dette dont Monsieur X...se trouvera redevable envers elle dans le cadre du partage, la Cour d'appel a violé les articles 1291 et 1293, aliéna 3, du code civil.