LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant relevé que depuis 1916 Mme de X...avait exercé des actes matériels de possession sur la portion de terrain se prolongeant jusqu'à la rivière en donnant à bail l'ensemble de la parcelle, que ses locataires témoignaient en avoir eu la jouissance par la cueillette des fruits et par l'utilisation de l'escalier de pierre et que ces actes s'étaient poursuivis après la vente intervenue en 1978 au profit de Mme Y... qui avait donné à ses voisins l'autorisation de traverser cette parcelle et y avait édifié un appentis, la cour d'appel en a exactement déduit que la possession de Mme Y... et de Mme de X...avait été publique, paisible, continue, non équivoque et à titre de propriétaire pendant plus de trente ans de sorte que la portion de terrain litigieuse avait été acquise par prescription ;
Attendu, d'autre part, que M. Z... n'ayant pas soutenu que la jonction des possessions ne pouvait jouer au motif que cette portion de terrain était demeurée hors de la vente conclue entre Mme de X...et Mme Y..., le moyen est de ce chef, nouveau, mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que les déclarations recueillies dans l'acte de notoriété du 9 décembre 1998 étaient contredites par le titre de propriété de Mme de X...et par les attestations produites par Mmes Y... et que cet acte de notoriété ne comportait aucune précision sur les contours de la parcelle A 311, en particulier sur le point de savoir si elle englobait la portion de terrain litigieuse, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle décidait d'écarter, en a souverainement déduit que cet acte ne permettait pas d'établir le droit de propriété de M. Z... par prescription acquisitive ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. Z....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QUE, infirmant le jugement, il a « constaté la possession de Madame Marie Thérèse Y...sur ce même terrain à titre de propriétaire », ensemble annulé partiellement l'acte de notoriété du 9 décembre 1998 en ce qu'il établit la prescription acquisitive de Monsieur Sylvain Z... sur le morceau de terrain allant de l'habitation de Madame Marie Thérèse Y... jusqu'à la rivière dite GRANDE RIVIERE ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article 2261 du code civil, pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ; que selon les dispositions de l'article 2272 du même code, le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans ; qu'en l'espèce, il ressort du titre de 1916 et des attestations produites que Mme DE X...bénéficiait sur la partie de parcelle litigieuse d'une possession continue et non interrompue, paisible, non équivoque et à titre de propriétaire de cette date jusqu'à la vente de sa parcelle en 1978 ; qu'en effet, il s'avère qu'elle a donné la parcelle à bail et que ses locataires ont pu témoigner de la jouissance du terrain jusqu'à la rivière, par la cueillette des fruits des arbres plantés et par l'utilisation de l'escalier de pierre ; que tous ces éléments démontrent l'intention de Mme DE X...de se conduire en propriétaire sur la parcelle allant jusqu'à la rivière ; que suite à l'achat de la parcelle de cette dernière par Mme Marie-Thérèse Y..., il est établi par l'ensemble des attestations, qu'en dépit de l'acte authentique de vente, lequel ne comporte aucune indication précise quant à la délimitation de la parcelle, mais se réfère au plan cadastral qui indique que le morceau de terrain revendiqué par chacune des parties serait inclus dans la parcelle A 311 de M. Z..., que Mme Y... a continué, à la suite de son auteur, à se comporter comme le propriétaire dudit terrain, en donnant à des voisins l'autorisation de le traverser, en y faisant édifier l'appentis que les premiers juges lui ont ordonné, à tort, de démolir, en utilisant elle-même ce terrain ; que de sorte, l'appelante peut elle-même établir une possession continue, non équivoque et paisible jusqu'à la contestation soulevée par M. Z... ; qu'en conséquence, la cour considère que Mme Y... a rapporté la preuve de sa possession à titre de propriétaire sur la parcelle A 309 comprenant le terrain situé devant son habitation et descendant jusqu'à la Grand Rivière sur une période continue de plus de trente ans » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, la jonction des possessions permettant au demandeur à la revendication d'invoquer la possession de son auteur, suppose ¿ lorsqu'il est ayant-droit à titre particulier ¿ que le bien litigieux visé par la possession ait été compris dans l'acte de vente intervenu entre lui-même et son auteur ; qu'en faisant état d'actes de possession qu'aurait accomplis Madame DE X...¿ dont Madame Marie Thérèse Y... est l'ayant-droit à titre particulier ¿ par le truchement des actes effectués par ses locataires, quand l'arrêt constatait que la vente intervenue entre Madame DE X...et Madame Marie Thérèse Y... se référait quant à la désignation du bien vendu au plan cadastral, lequel incluait la bande de terrain litigieuse dans la parcelle A 311 appartenant à Monsieur Z..., ce qui montrait que la vente n'avait pas porté sur cette bande de terrain, les juges du fond ont violé l'article 2265 nouveau du code civil (article 2235 ancien du même code) ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, faute d'avoir constaté que la vente portait bien sur la bande de terrain litigieuse, condition pour que Madame Y... puisse se prévaloir en sa qualité d'ayant droit à titre particulier, des actes de possession accomplis par Madame DE X..., son auteur, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article 2265 nouveau du code civil (article 2235 ancien du même code) ;
ALORS QUE, TROISIEMEMENT, sachant que la vente entre Madame DE X...et Madame Marie Thérèse Y... est intervenue le 14 décembre 1978 et que Monsieur Théophile Z... a saisi le juge des référés, par acte du 25 janvier 2007, l'ordonnance désignant l'expert étant du 9 mars 2007, à l'effet de recueillir les éléments propres à contester tous droits des consorts Y..., il était exclu qu'on puisse constater que Madame Y... avait possédé pendant trente ans ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué doit être censuré pour violation des articles 2261 nouveau (article 2229 ancien du même code) et 2270 nouveau du code civil ;
ALORS QUE, QUATRIEMEMENT, et en tout cas, dès lors qu'à la suite du rapport d'expertise, Monsieur Z... a assigné les consorts Y... par acte du 5 mars 2008 et la vente entre Madame DE X...et Madame Marie Thérèse Y... étant du 14 décembre 1978, moins de trente ans s'étaient en tout état de cause écoulés entre ces deux dates, circonstances excluant que Madame Y... puisse se prévaloir d'une prescription trentenaire ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué doit être regard comme rendu en violation des articles 2261 nouveau (article 2229 ancien du même code) et 2270 du code civil (article 2240 ancien du même code) ;
ALORS QUE, CINQUIEMEMENT, et subsidiairement, faute pour les juges du fond d'avoir mis en évidence la date à laquelle Madame Marie Thérèse Y... a débuté à accomplir les actes de possession et à compter de quelle date la possession a été contredite par Monsieur Z..., l'arrêt attaqué, à supposer par impossible qu'il ne puisse faire l'objet d'une censure pour violation de la loi, doit à tout le moins être censuré pour défaut de base légale au regard des articles 2261 (article 2229 ancien du même code) et 2270 du code civil (article 2240 ancien du même code).
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a annulé partiellement l'acte de notoriété du 9 décembre 1998 en ce qu'il établit l'acquisition acquisitive de Monsieur Sylvain Z... sur le morceau de terrain allant de l'habitation de Madame Marie Thérèse Y... jusqu'à la rivière dite GRANDE RIVIERE, puis constaté la possession de Madame Marie Thérèse Y... à titre de propriétaire ;
AUX MOTIFS QUE « à l'appui de leurs demandes, elles exposent que le titre de leur auteur, Mme C...veuve DE X..., désigne la parcelle comme suit : « un terrain sis à Grand Rivière, borné d'un côté par la propriété de M. Edmond Z..., de l'autre par celle de M. Altius Z... et se prolongeant jusqu'à la rivière dite Grand Rivière » ; qu'elles démontrent donc que, sur le terrain, M. Théophile Z... ne peut revendiquer la parcelle de terre se trouvant dans le prolongement de la rivière ; qu'elles considèrent donc que le plan cadastral est en contradiction avec le titre et la possession de leur auteur puisqu'il ampute la parcelle de Mme C...de la partie de terre située en bordure de rivière ; qu'elles rappellent que Mme Marie-Thérèse Y... a acheté l'intégralité de la parcelle de Mme C...; qu'il ressort en l'espèce de ces dispositions que seuls les faits accomplis par l'officier public ou s'étant passés en sa présence font l'objet de cette pleine foi jusqu'à inscription de faux ; que la preuve contraire est donc admise s'agissant des énonciations des parties ou des témoins ; qu'en l'espèce, l'acte de notoriété du 9 décembre 1998 repose sur les déclarations de Mme Micheline F...et de Mme Stanislas Marthe G..., selon lesquelles, pendant plus de trente ans, M. Sylvain Z... a possédé une parcelle de terre sise à Grand Rivière, section A n° 311, à titre de propriétaire ; que la cour constate que l'acte ne comporte aucune précision sur les contours précis de la parcelle en cause, et particulièrement sur le point de savoir si elle englobe la partie de terrain qui fait litige entre les parties ; que néanmoins, il comprend en annexe un extrait de plan et matrice cadastrale qui la désigne comme faisant partie de la parcelle A 311 ; que ces indications sont contredites par le titre de propriété de Mme DE X...de 1916 et les nombreuses attestations produites aux débats par les appelantes et selon lesquelles le morceau de terre situé devant la parcelle A 309 a toujours été occupé par l'auteur de Mmes AL Y, puis par celles-ci ;
qu'en définitive, l'intimé ne fonde sa prétendue propriété que sur ce plan cadastral dont les indications sont contredites tant par le titre de Mme DE X..., laquelle a vendu sa parcelle A 309 à Mme Marie-Thérèse Y..., que par l'ensemble des attestations ; que de plus, le rapport d'expertise judiciaire qui conclut à ce que le terrain est inclus à la parcelle de M. Z... est critiquable en ce qu'il ne se base que sur cet extrait cadastral à l'exclusion de constatations sur le terrain ou d'autres documents produits ; que dans ces circonstances, la cour considère que l'intimé échoue à démontrer, de manière incontestable, sa propriété sur cette partie de terrain sise devant la parcelle A 309 telle que délimitée par le plan cadastral et qui descend jusqu'à la rivière ; que l'acte de notoriété du 9 décembre 1998 doit par conséquent être annulé partiellement en ce qu'il fait porter la prescription acquisitive de M. Théophile Z... sur ce morceau de terrain tel que décrit ci-dessus » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, le plan cadastral inclut, et a toujours inclus, le terrain litigieux dans la parcelle A 311 ; qu'avant de se prononcer sur l'acte de notoriété du 9 décembre 1998 et dès lors qu'il constatait que le plan cadastral était annexé à l'acte de notoriété, les juges du fond devaient rechercher si les déclarations de Madame F...et de Madame G..., visant la parcelle A 311 ne concernaient pas l'emprise de la parcelle telle que figurant au plan cadastral ; que faute de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 2261 du code civil (article 2229 ancien) et 2272 du code civil ;
ALORS QUE, DEUXIEMENENT, et en tout cas, dans la mesure où Monsieur Théophile Z... se prévalait, pour obtenir le rejet de la demande d'annulation partielle de l'acte de notoriété, d'une part, du témoignage de Madame Marie Léandre I..., d'autre part, d'un certificat du maire de la commune de GRAND RIVIERE attestant de l'occupation par les consorts Z... (conclusions du 17 octobre 2011, pp. 7 et 8), les juges du fond ne pouvaient se prononcer sur l'annulation partielle de l'acte de notoriété sans s'expliquer sur ces éléments de preuve et que faute de se faire, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 2261 nouveau (2229 ancien) et 2272 nouveau du code civil.