LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :Vu les articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par contrat à durée déterminée du 23 mai 2005 par la société MTH en qualité de directeur du développement avec un statut de cadre ; que le 1er mars 2006, le contrat de travail de M. X... a été transféré à la société Eurotrade services ; que le 7 avril 2008, le salarié a adressé à son employeur une lettre prenant acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de celui-ci ; qu'un reçu pour solde de tout compte a été établi le 14 avril 2008, portant sur une somme de 5 662,82 euros incluant une indemnité compensatrice de congés payés ; que l'employeur a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour brusque rupture ; Attendu que pour faire droit à la demande de la société et lui allouer une indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt retient que la prise d'acte qui rompt immédiatement le contrat dès sa présentation à l'employeur, n'est soumise à aucun formalisme, mais oblige le salarié à saisir le conseil de prud'hommes afin qu'en soient fixés les effets (licenciement ou démission), que le salarié n'a pas saisi la juridiction prud'homale afin de voir requalifier sa prise d'acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, malgré les termes de la réponse de l'employeur, contestant les manquements allégués et qu'il n'a pas dénoncé le reçu pour solde de tout compte daté du 14 avril 2008 ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait d'examiner les manquements invoqués par le salarié au soutien de la prise d'acte de la rupture et d'apprécier s'ils étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Eurotrade services aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. X.... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. X... devait produire les effets d'une démission, d'avoir en conséquence débouté celui-ci de ses demandes en paiement de diverses sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, ainsi qu'à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné le salarié à payer à l'employeur la somme de 13.245 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ; AUX MOTIFS QUE (¿) par courrier en date du 7 avril 2008 expédié le 8 avril, réceptionné le 10 avril par l'employeur, le salarié informait la société de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur en faisant valoir certains éléments (¿) ; que M. X... n'a pas saisi la juridiction prud'homale suite à sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail, afin de voir requalifier celle-ci en licenciement sans cause réelle et sérieuse et n'a pas dénoncé son solde de tout compte daté du 14 avril 2008 de telle sorte qu'il ne peut légitimement aujourd'hui formuler des demandes relatives à la rupture de son contrat de travail, même à titre reconventionnel ; qu'en effet, la prise d'acte rompt immédiatement le contrat dès sa présentation à l'employeur, qu'elle n'est soumise à aucun formalisme, mais oblige le salarié à saisir le conseil de prud'hommes afin qu'en soient fixés les effets (licenciement ou démission) ; que faute de saisine de la juridiction prud'homale, malgré les termes employés par M. X... dans son courrier du 7 avril 2008 et en dépit du courrier en réponse de l'employeur du 16 avril 2008 contestant les manquements allégués et avisant l'ancien salarié qu'elle engagerait une procédure pour obtenir le paiement de l'indemnité de préavis et un dédommagement pour préjudice subi (¿), la société Eurotrade Services était en droit de considérer que la rupture du contrat de travail de M. X... était intervenue à l'initiative du salarié le 7 avril 2008 et d'analyser la prise d'acte comme une démission conformément aux documents sociaux remis au salarié le 14 avril 2008 ; ALORS QUE, D'UNE PART, lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'une démission si les faits invoqués ne la justifiaient pas ; que la cour d'appel, après avoir relevé que M. X... avait pris acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reprochait à l'employeur, a jugé que la rupture du contrat devait produire les effets d'une démission, sans avoir recherché si les faits que le salarié avait reprochés à l'employeur étaient de nature à justifier son initiative, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ; ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, seule une transaction signée après le licenciement et comportant des concessions réciproques peut empêcher le salarié d'agir ; que ni la signature d'un solde de tout compte, ni le fait que l'employeur ait pris l'initiative de saisir le juge, ne peuvent valoir renonciation, par le salarié, au droit de contester le bien fondé de son licenciement, non plus que de demander qu'il soit statué sur les effets d'une prise d'acte de la rupture, serait-ce reconventionnellement ; qu'en se fondant, pour faire produire les effets d'une démission à la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié, sur la circonstance qu'il n'avait pas pris l'initiative de saisir le juge prud'homal, mais qu'il avait formé ses demandes indemnitaires par voie reconventionnelle, et sur le fait qu'il n'avait pas dénoncé son solde de tout compte, la cour d'appel s'est prononcée par un double motif inopérant et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1232-1 et L. 1234-20 du code du travail.