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12/06/2014 | FRANCE | N°13-10587

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juin 2014, 13-10587


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2012), que Mme X... a été engagée le 1er juillet 1990 par l'association Soins assistance dont l'objet est d'intervenir auprès de personnes faisant l'objet d'une hospitalisation ou d'un suivi médical à domicile, en qualité d'infirmière diplômée d'Etat ; qu'affectée à la permanence de nuit à domicile, elle a été licenciée pour faute grave par lettre du 6 octobre 2008 ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arr

êt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2012), que Mme X... a été engagée le 1er juillet 1990 par l'association Soins assistance dont l'objet est d'intervenir auprès de personnes faisant l'objet d'une hospitalisation ou d'un suivi médical à domicile, en qualité d'infirmière diplômée d'Etat ; qu'affectée à la permanence de nuit à domicile, elle a été licenciée pour faute grave par lettre du 6 octobre 2008 ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ que les retenues répétées sur salaire de sommes indues caractérisent le harcèlement moral ; que pour dire que les réclamations de sommes indues au titre du forfait téléphonique ne participaient pas du harcèlement moral, la cour d'appel a énoncé que les sommes réclamées à l'intéressée étaient modestes et que la salariée avait quand même dépassé son forfait autorisé sur la période du 22 décembre 2006 au 21 janvier 2007 comme elle le faisait fréquemment, y compris en dehors de son temps de travail ; qu'en se déterminant par ces motifs inopérants, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
2°/ que le manquement de l'employeur relatif aux conditions de versement à un salarié en invalidité de ses prestations issues d'un régime de prévoyance constitue un agissement de harcèlement moral dès lors qu'il a pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant que les décisions prises par l'employeur étaient étrangères à tout harcèlement moral, quand il résultait de ses constatations que l'employeur avait laissé s'écouler un délai de six mois, entre l'homologation d'un protocole d'accord par le conseil de prud'hommes, le 13 septembre 2006, et la rédaction d'une attestation, le 15 mars 2007, laquelle permettait à la salariée de percevoir normalement la garantie de son assurance complémentaire, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
3°/ que le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'il appartient dès lors au juge de prendre en considération les certificats médicaux du salarié afin d'apprécier le harcèlement moral subi ; qu'en écartant le certificat médical de la salariée faisant état d'un état anxiodépressif réactionnel à un harcèlement professionnel, aux motifs inopérants que le médecin n'était intervenu que postérieurement à la rupture du contrat de travail, n'avait rien constaté par lui-même à l'intérieur de l'entreprise et n'avait fait que reprendre sans aucune analyse critique les dires de sa patiente, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1152-2 et L. 1154-1 du code du travail ;
4°/ que le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant que le comportement de l'employeur était étranger à tout harcèlement moral, quand elle constatait que l'association avait réclamé à la salariée, au titre du dépassement de son forfait téléphonique professionnel, des sommes indues, que depuis le placement de la salariée en invalidité catégorie 1 au cours de l'année 2002 des incohérences étaient apparues dans les attestations de salaire établies par l'employeur et adressées à l'organisme de prévoyance, et que la salariée était suivie régulièrement par un médecin depuis le mois de décembre 2008 en raison d'un état anxiodépressif sévère réactionnel à un harcèlement professionnel, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'il résulte des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail que dès lors que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Et attendu qu'ayant relevé dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que l'employeur prouvait que les agissements invoqués par la salariée étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel n'encourt pas les griefs du moyen ;
Sur le second moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de la débouter de ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation qui interviendra sur le premier moyen relatif au harcèlement moral entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation du chef de l'arrêt déboutant la salariée de sa demande de requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
2°/ que l'employeur ne peut se prévaloir de la répétition de faits qu'il a tolérés, sans y puiser un motif de sanction, pour établir la faute grave du salarié ; qu'en retenant qu'une note de service de l'association mentionnait que tout appel d'un patient en difficulté devait systématiquement entraîner une intervention à son domicile, pour dire que le fait, pour la salariée, de ne pas s'être déplacée au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie constituait une faute grave, la cour d'appel qui s'est abstenue de rechercher si ce fait n'avait pas été toléré par l'employeur, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail ;
3°/ que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; qu'en retenant qu'il résultait notamment de l'avenant au contrat de travail de la salariée du 1er mars 2006 qu'il était de l'essence même de ses fonctions d'effectuer des interventions chez les patients, pour dire que le fait de cette dernière de ne pas s'être déplacée au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie constituait une faute grave, quand elle relevait également que cet avenant mentionnait que la salariée devait prévenir l'association de toute absence chez un patient pour quelque cause que ce soit, ce dont il s'induisait que le déplacement au domicile du patient n'était ni systématique ni impératif, la cour d'appel n'a pas tiré les conclusions qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L. 1234-1 du code du travail ;
4°/ que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; qu'en retenant que constituait un comportement gravement fautif le fait pour une infirmière de ne pas se déplacer au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie, quand la salariée avait plus de dix huit ans d'ancienneté dans l'association et que le comportement fautif qui lui était imputé était exceptionnel, ou à tout le moins isolé, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve et sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, d'une part que l'objet même de l'association employeur était d'assurer un suivi médical au domicile du patient de même qualité que celui exercé à l'hôpital, et d'autre part que l'obligation de se déplacer au domicile du patient sur appel de celui-ci ou de sa famille était l'essence même des fonctions de la salariée et résultait de ses contrat de travail et avenant, de sa fiche de poste actualisée ainsi que d'une note de service applicable au travail de nuit, la cour d'appel a pu décider, nonobstant l'ancienneté de la salariée et l'absence de sanction antérieure, que le fait de ne pas se déplacer au domicile de la patiente qu'elle savait en fin de vie malgré trois appels de la famille pour lui prodiguer les soins nécessaires ou faire appel à un médecin, constituait une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme Augier

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté madame X... de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral ; AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, madame X...- qui ne prouve pas avoir, comme elle soutient, déposé une plainte du chef de harcèlement puisque ses lettres censées avoir été adressées au procureur de la République les 17 décembre 2007 et 15 mars 2010 ne sont accompagnées d'aucun avis de réception et ne sont confortées par aucun élément extérieur à la salariée-reproche à son employeur d'avoir retenu sur sa rémunération les dépassements de son forfait téléphonique professionnel, de lui avoir supprimé 120, 00 euros de frais de déplacement et de ne lui avoir jamais permis de percevoir normalement sa rente complémentaire d'invalidité ; qu'elle verse aux débats un certificat médical d'un médecin psychiatre daté du 24 septembre 2009 ; que l'ensemble de ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que toutefois, sur le forfait téléphonique : madame X..., qui habite Aubagne, s'est vue remettre un téléphone mobile pour les besoins de son activité professionnelle avec bénéfice de 2 heures mensuelles de communications ; que le 11 septembre 2003, l'association l'a informée qu'à compter du 1er juillet 2003, elle ne bénéficierait plus que d'un forfait de 1h30 mensuelle compte tenu du fait qu'elle ne travaillait que 5 nuits par mois ; que par un courrier en date du 11 juillet 2005, l'association a confirmé à la salariée que « dans le cadre de son activité professionnelle, l'association prenait chaque mois en charge un forfait de trois heures de communication, appels externes et internes » et elle lui a précisé que « tout dépassement de ce forfait individuel serait à sa charge au tarif de 0, 12 ¿ hors taxes la minute » ; que par un autre courrier du 7 novembre 2007, l'employeur a décidé de ramener à une heure et trente minutes la durée du forfait professionnel au regard de son activité mensuelle réduite à 3 nuits de 12 heures ; qu'or, il est établi par 3 courriers de l'association des 18 janvier, 16 février et 20 mars 2007, qu'il a été réclamé à madame X..., sur la base d'un forfait autorisé de 1h30- alors qu'à l'époque considérée il était bien de 3 heures-de rembourser respectivement 11, 78 euros pour 2 heures 5 minutes de consommation, 10, 94 euros pour 2 heures 15 minutes et 34, 74 euros pour 4 heures et 23 minutes ; que les sommes réclamées à l'intéressée sont particulièrement modestes et l'employeur soutient, sans être démenti, que madame X... était la seule dans l'entreprise à bénéficier d'un téléphone mobile et qui démontre qu'elle a bien dépassé d'une heure et 23 minutes le forfait autorisé au cours de la période du 22 décembre 2006 au 21 janvier 2007, comme elle allait ultérieurement le dépasser fréquemment même lorsqu'elle ne travaillait pas pour l'association notamment au cours du dernier trimestre de l'année 2007 ; que sur les frais de déplacement : l'avenant n° 4 au contrat de travail du 1er mars 2006 prévoit, d'une part, que sont pris en charge par l'association les frais de déplacement d'un malade à l'autre mais pas les trajets du domicile au premier malade et du dernier malade au domicile et, d'autre part, que les remboursements se font sur justificatifs signés qui doivent impérativement être remis au bureau de la planification au plus tard le 5 du mois suivant, le remboursement ne pouvant intervenir à défaut qu'à la fin du mois de la remise des justificatifs ; que l'ancienne salariée prétend que son employeur ne lui aurait pas remboursé 120, 00 euros de frais de déplacement mais, hormis la production de ses feuilles de tournée et de déplacement au titre de l'année 2006, elle ne produit aucun décompte permettant de vérifier le montant de la somme réclamée ; qu'or, de son côté, l'employeur démontre par un courrier recommandé du 25 septembre 2006, faisant suite à une précédente lettre du 14 février 2006 demeurée sans réponse, que madame X... ne lui avait pas adressé au 25 septembre 2006 ses justificatifs de frais réalisés depuis novembre 2005 et il prouve, par la production de la fiche de paie du mois de novembre 2006, qu'à cette date il avait bien réglé, au vu des justificatifs produits par la salariée, ses frais de déplacement engagés entre les 1er novembre 2005 et 30 septembre 2006, le décompte de l'employeur n'étant pas utilement critiqué ; que madame X... soutient que l'association ne lui aurait jamais permis de percevoir normalement la garantie de son assurance complémentaire alors qu'elle était placée depuis 2002 en invalidité catégorie 1 ; qu'or, s'il est établi par des courriers de l'organisme de prévoyance Prémalliance des 24 janvier 2007 et 16 octobre 2009 que des « incohérences » sont apparues dans les « attestations détaillées des salaires d'activités réelles » établies par l'employeur, il résulte de ces mêmes missives que l'association a « pris le soin » avec l'aide de Prémalliance « de répartir équitablement » un rappel de salaire intervenu en juin 2005 « depuis l'année 2002 pour éviter une diminution importante » de la rente versée à la salariée ; qu'il est par ailleurs démontré qu'il existait un différend entre les parties portant sur des rappels de salaire et d'ancienneté qui s'est conclu par la signature d'un protocole d'accord le 29 mars 2006, homologué par le conseil de prud'hommes le 13 septembre suivant, ce qui a permis à l'employeur de rédiger une attestation le 15 mars 2007 permettant de régler les difficultés avec l'organisme de prévoyance ; qu'il est enfin prouvé par l'employeur que madame X..., de son côté, a fait de la rétention d'information en ne transmettant pas à son employeur ses arrêts maladie (lettre de rappel du 15 janvier 2008) ni les justificatifs de ses indemnités journalières (lettre de rappel du 5 mars 2009 pour la période d'arrêt du 30 janvier au 1er avril 2008) ; que sur le certificat médical : si un certificat médical du 24 septembre 2009 démontre que madame X... est suivie régulièrement depuis décembre 2008, selon le médecin « pour un état anxiodépressif sévère réactionnel à un harcèlement professionnel et un licenciement (injustifié) pour faute grave de la part de son employeur », force est de constater que le praticien, qui n'est intervenu que postérieurement à la rupture du contrat de travail, n'a rien constaté par lui-même à l'intérieur de l'entreprise et n'a fait que reprendre-sans aucune analyse critique-les dires de sa patiente ; qu'il résulte de ces éléments objectifs que les décisions prises par l'employeur sont étrangères à tout harcèlement moral ; 1°) ALORS QUE les retenues répétées sur salaire de sommes indues caractérisent le harcèlement moral ; que pour dire que les réclamations de sommes indues au titre du forfait téléphonique ne participaient pas du harcèlement moral, la cour d'appel a énoncé que les sommes réclamées à l'intéressée étaient modestes et que la salariée avait quand même dépassé son forfait autorisé sur la période du 22 décembre 2006 au 21 janvier 2007 comme elle le faisait fréquemment, y compris en dehors de son temps de travail ; qu'en se déterminant par ces motifs inopérants, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ; 2°) ALORS QUE le manquement de l'employeur relatif aux conditions de versement à un salarié en invalidité de ses prestations issues d'un régime de prévoyance constitue un agissement de harcèlement moral dès lors qu'il a pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant que les décisions prises par l'employeur étaient étrangères à tout harcèlement moral, quand il résultait de ses constatations que l'employeur avait laissé s'écouler un délai de six mois, entre l'homologation d'un protocole d'accord par le conseil de prud'hommes, le 13 septembre 2006, et la rédaction d'une attestation, le 15 mars 2007, laquelle permettait à la salariée de percevoir normalement la garantie de son assurance complémentaire, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;

3°) ALORS QUE le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'il appartient dès lors au juge de prendre en considération les certificats médicaux du salarié afin d'apprécier le harcèlement moral subi ; qu'en écartant le certificat médical de madame X... faisant état d'un état anxiodépressif réactionnel à un harcèlement professionnel, aux motifs inopérants que le médecin n'était intervenu que postérieurement à la rupture du contrat de travail, n'avait rien constaté par lui-même à l'intérieur de l'entreprise et n'avait fait que reprendre sans aucune analyse critique les dires de sa patiente, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1152-2 et L. 1154-1 du code du travail ; 4°) ET ALORS QUE le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant que le comportement de l'employeur était étranger à tout harcèlement moral, quand elle constatait que l'association Soins Assistance avait réclamé à madame X..., au titre du dépassement de son forfait téléphonique professionnel, des sommes indues, que depuis le placement de la salariée en invalidité catégorie 1 au cours de l'année 2002 des incohérences étaient apparues dans les attestations de salaire établies par l'employeur et adressées à l'organisme de prévoyance, et que madame X... était suivie régulièrement par un médecin depuis le mois de décembre 2008 en raison d'un état anxiodépressif sévère réactionnel à un harcèlement professionnel, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté madame X... de sa demande de requalification de son licenciement prononcé pour faute grave en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et de l'AVOIR en conséquence déboutée de ses diverses demandes à l'encontre de l'association Soins Assistance ; AUX MOTIFS PROPRES QUE la lettre de licenciement est ainsi libellée : « nous avons eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute grave. Nous n'avons pas pu avoir un échange sur ces faits car vous ne vous êtes pas présentée à la convocation à l'entretien préalable du mardi 30 septembre à 10 h au siège de l'association. Cette convocation a fait l'objet d'un envoi en recommandé avec accusé de réception et en courrier simple. En effet, la nuit du 15 au 16 septembre 2008, entre 2 et 3 heures du matin vous avez été appelée par la fille de madame A... pour une intervention d'urgence. L'état de la patiente s'aggravait, la famille était angoissée et souhaitait l'intervention de notre structure par votre intermédiaire. Le premier appel téléphonique n'a pas abouti, sans réponse ni rappel de votre part. Un deuxième appel téléphonique a été fait par la famille à 2h30, vous avez répondu que « vous ne vous déplaciez pas s'il n'y avait pas de prescription médicale et, si c'était grave, il fallait appeler les pompiers ». Lors d'un nouvel appel téléphonique de la famille à 3h, vous avez fait la même réponse. Devant vos refus de vous déplacer au domicile de la patiente, la famille n'a alors eu d'autre alternative que d'appeler les pompiers qui sont intervenus d'urgence. Le refus d'intervention remet en cause la mission qui vous a été confiée dans le cadre de votre contrat de travail. En effet, le contrat de travail que vous avez signé en date du 1er mars 2006, précise en son article 2 l'importance du soutien et de l'aide psychologique que souhaite apporter aux patients l'association. Cet article est ainsi stipulé : « Il est rappelé toutefois que l'association attache un intérêt tout particulier au contact avec les patients et qu'à l'occasion de leurs interventions, les auxiliaires médicaux ne doivent pas perdre de vue l'importance du temps de communication nécessaire avec les patients dans le cadre psychologique voulu par l'association ». Les trois appels téléphoniques de la famille et le désarroi dans lequel elle se trouvait, attendant de la part de Soins Assistance le soutien que notre mission nous oblige d'apporter. Je voudrais vous préciser que cette patiente est décédée quelques jours après. Cette conduite met en cause la bonne marche du service ainsi que la qualité de nos interventions auprès d'un public d'une très grande vulnérabilité et fragilité. Aussi, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de l'importance des faits et aux manquements de la mission qui vous était assignée, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible » ; que madame X..., bien que discutant l'heure réelle à laquelle elle a été appelée par la famille du patient, reconnaît toutefois avoir été appelée à son chevet au cours de la nuit considérée et ne pas s'y être déplacée mais elle affirme qu'elle n'avait pas à le faire et que cette abstention ne pouvait en conséquence justifier la rupture de son contrat de travail ; que cependant, madame X..., embauchée en qualité d'infirmière et affectée à la permanence de nuit à domicile à hauteur, comme il faut le souligner, de seulement 3 nuits sur 4 semaines, savait, depuis la signature de son contrat de travail le 7 juillet 1990, qu'il était de l'essence même de sa fonction d'effectuer des interventions chez les patients de l'association (article 3) cet élément essentiel ressortant par ailleurs des documents suivants : la fiche de poste mise à jour le 16 janvier 2006 selon laquelle l'infirmier :- prévoit, organise et dispense des soins de sa propre initiative ou sur prescription,- doit faire face à des situations d'urgence dans lesquelles la vie des personnes peut se trouver menacée,- joue un rôle déterminant d'intermédiaire à l'extérieur (« malade, entourage, services, ... »),- exerce son emploi le plus souvent seul « au domicile du patient », son activité impliquant « un contact direct avec les malades » ; que « l'avenant du 1er mars 2006 qui prévoit :- en son article I qu'elle exerce ses fonctions « chez les patients » qui lui sont désignés par l'association,- en son article II bis qu'elle devait prévenir l'association de toute absence chez un patient pour quelque cause que ce soit, l'employeur considérant, par cette même disposition contractuelle, que le manquement à cette obligation était considéré comme une faute professionnelle ; qu'en outre, elle a été destinataire d'une note concernant le service de nuit, applicable au 1er avril 2004, rappelant, dans un encadré, que « tout appel d'un patient en difficulté entraîne systématiquement une intervention à domicile » ; qu'ainsi, le fait pour madame X..., salariée d'une association qui s'engage à assurer un suivi médical à domicile de même qualité que celui exercé à l'hôpital, de ne pas se déplacer au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie soit pour lui pratiquer les soins qui entraient dans ses compétences, soit pour faire appel à un médecin dans le cas contraire voire pour simplement la réconforter par sa seule présence et pour rassurer sa famille en détresse, constitue une faute grave qui rendait impossible son maintien dans l'entreprise ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'après avoir été convoquée à un entretien préalable en date du 18 Septembre 2008 pour le 30 Septembre 2008, madame X... a fait l'objet d'un licenciement intervenu par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 Octobre 2008, motif : la famille d'une patiente a appelé à trois reprises, madame X..., laquelle avait refusé de se déplacer en conseillant à la famille d'appeler les pompiers ; qu'attendu la fiche de poste définissant les conditions d'intervention du service de nuit ; que ce document indique que « tout appel d'un patient en difficulté entraîne systématiquement une intervention au domicile », il comporte également le nom de madame X... ; qu'attendu le rapport des conseillers rapporteurs en audience du 25 Janvier 2011 où en l'espèce madame B... a fait remarquer qu'il est nécessaire « d'avoir le patient sous les yeux » pour appeler le médecin ou les services d'urgence et pouvoir donner des informations sur l'état du patient ; que dans ce cas précis, madame X... aurait dû se rendre au domicile du malade ; qu'en conséquence : madame X... a failli à ses obligations déontologiques et contractuelles en ne se rendant pas au domicile de la patiente ; que le licenciement pour faute grave est justifié ; 1°) ALORS QUE la cassation qui interviendra sur le premier moyen relatif au harcèlement moral entraînera par voie de conséquence et en application de l'article 625 du code de procédure civile la cassation du chef de l'arrêt déboutant madame X... de sa demande de requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; 2°) ALORS QUE l'employeur ne peut se prévaloir de la répétition de faits qu'il a tolérés, sans y puiser un motif de sanction, pour établir la faute grave du salarié ; qu'en retenant qu'une note de service de l'association Soins Assistance mentionnait que tout appel d'un patient en difficulté devait systématiquement entraîner une intervention à son domicile, pour dire que le fait, pour madame X..., de ne pas s'être déplacée au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie constituait une faute grave, la cour d'appel qui s'est abstenue de rechercher si ce fait n'avait pas été toléré par l'employeur, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail ; 3°) ALORS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; qu'en retenant qu'il résultait notamment de l'avenant au contrat de travail de madame X... du 1er mars 2006 qu'il était de l'essence même des fonctions de madame X... d'effectuer des interventions chez les patients, pour dire que le fait de cette dernière de ne pas s'être déplacée au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie constituait une faute grave, quand elle relevait également que cet avenant mentionnait que la salariée devait prévenir l'association de toute absence chez un patient pour quelque cause que ce soit, ce dont il s'induisait que le déplacement au domicile du patient n'était ni systématique ni impératif, la cour d'appel n'a pas tiré les conclusions qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L. 1234-1 du code du travail ; 4°) ET ALORS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; qu'en retenant que constituait un comportement gravement fautif le fait pour une infirmière de ne pas se déplacer au domicile d'une malade qu'elle savait en fin de vie, quand madame X... avait plus de dix huit ans d'ancienneté dans l'association Soins Assistance et que le comportement fautif qui lui était imputé était exceptionnel, ou à tout le moins isolé, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-10587
Date de la décision : 12/06/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2014, pourvoi n°13-10587


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10587
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