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11/06/2014 | FRANCE | N°13-13643

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 juin 2014, 13-13643


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 20 novembre 2012), que le 19 avril 2010, M. X...(l'acheteur), qui avait acquis un véhicule de Mme Y... (le vendeur), exerçant à titre individuel une activité commerciale, l'a assignée en résolution de cette vente et lui a dénoncé l'inscription d'une hypothèque provisoire prise sur un immeuble lui appartenant ; que Mme Y... a sollicité du juge de l'exécution la mainlevée de cette inscription, se prévalant de la déclaration d'insaisissabilité

de cet immeuble, faite par acte notarié du 4 décembre 2006 ;
Attendu q...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 20 novembre 2012), que le 19 avril 2010, M. X...(l'acheteur), qui avait acquis un véhicule de Mme Y... (le vendeur), exerçant à titre individuel une activité commerciale, l'a assignée en résolution de cette vente et lui a dénoncé l'inscription d'une hypothèque provisoire prise sur un immeuble lui appartenant ; que Mme Y... a sollicité du juge de l'exécution la mainlevée de cette inscription, se prévalant de la déclaration d'insaisissabilité de cet immeuble, faite par acte notarié du 4 décembre 2006 ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen, qu'une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel peut déclarer insaisissables ses droits sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale ; qu'elle peut céder cet immeuble et en conserver le prix sous la condition du remploi dans le délai d'un an des sommes à l'acquisition par le déclarant d'un immeuble où est fixée sa résidence principale ; que l'inscription d'une hypothèque judiciaire, qui impose, en cas de cession de l'immeuble, de distribuer le prix aux créanciers inscrits et exclut dès lors son remploi intégral par l'entrepreneur, est, en conséquence, impossible ; qu'en estimant néanmoins que l'acheteur pouvait être autorisé à inscrire une hypothèque sur l'immeuble appartenant au vendeur et protégé par une déclaration d'insaisissabilité, la cour d'appel a violé les articles L. 526-1 et L. 526-3 du code de commerce et L. 532-1 et R. 251-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement énoncé, par motifs adoptés, que l'article L. 526-1 du code de commerce, d'interprétation stricte, interdit la saisie du bien objet de la déclaration d'insaisissabilité, mais non l'inscription d'une hypothèque judiciaire à titre conservatoire sur ce bien ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme Y... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X...la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Francisca Y... de sa demande en mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire sur le bien immobilier situé commune d'Agen et cadastré BR 132, 145 et 153 ; AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L 526-1 du Code de commerce, prévoit que, par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil, une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante peut déclarer insaisissables ses droits sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale ainsi que sur tout bien foncier bâti ou non bâti qu'elle n'a pas affecté à son usage professionnel. Cette déclaration, publiée au bureau des hypothèques ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au livre foncier, n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent, postérieurement à la publication, à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant ; l'article 2284 du code civil prévoit que quiconque s'est obligé personnellement est tenu de remplir son engagement sur tous les biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir ; l'article 2285 suivant précise que les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers ; et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence ; ces deux articles, auxquels déroge l'article L. 526-1 du code de commerce précité, ne visent que le droit de gage général des créanciers sans entrer dans la distinction entre les voies d'exécution et les mesures de sûreté, ni prescrire une interdiction pour un créancier de recourir à ces dernières ; l'article 67 de la loi du 9 juillet 1991 dispose que toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement ; la mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire ; il est constant que lorsque le créancier ne dispose pas d'un titre exécutoire, il ne peut solliciter qu'une mesure conservatoire, conformément aux dispositions de ce texte ; une inscription d'hypothèque judiciaire s'analyse en une mesure de sûreté judiciaire et non en une saisie ; ainsi, il est constant qu'une l'inscription d'une hypothèque judiciaire à l'initiative d'un créancier du donataire, tiers à une donation, est valable, cette inscription ne mettant pas en échec une clause d'inaliénabilité, laquelle empêche seulement la saisie de l'immeuble tant que ladite clause est en vigueur ; en l'espèce Monsieur X...n'a pas fait procéder à une saisie, effectivement interdite tant que durent les effets de l'insaisissabilité, mais à une inscription d'hypothèque judiciaire, mesure de sûreté, justifiée par les conclusions du rapport d'expertise judiciaire déposé le 1er février 2010 ayant constaté de nombreux désordres sur le véhicule objet de la vente intervenue entre les parties ; sa créance paraît fondée en son principe et la cessation d'activité de Madame Y...constitue une circonstance susceptible d'en mettre en péril son recouvrement ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE selon l'article L.526-1 du code de commerce, par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil, une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante peut déclarer insaisissables ses droits sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale ainsi que sur tout bien foncier bâti ou non bâti qu'elle n'a pas affecté à son usage professionnel. Cette déclaration au bureau des hypothèques n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent postérieurement à la publication, à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant. En l'occurrence Madame Francisca Y... a effectué le 4 décembre 2006 une déclaration d'insaisissabilité auprès de Maître Danielle Z..., notaire, publiée le 27 décembre 2006 au Bureau des Hypothèques, concernant les parcelles de terrain, situées sur la commune d'Agen, cadastrées B R 132, 145 et 153, lesquelles constituent l'assiette de l'hypothèque inscrite provisoirement par Monsieur X.... Néanmoins, l'article susvisé est d'interprétation stricte. C'est la saisie qui est interdite non pas la mesure conservatoire que constitue l'inscription provisoire d'une hypothèque. Il en résulte simplement que tant que dureront les effets de l'insaisissabilité, l'hypothèque ne pourra pas déboucher sur une saisie. A cet égard, l'impossibilité de procéder à l'inscription provisoire d'une hypothèque judiciaire ne saurait être tirée de l'application de l'article L526-3 du code de commerce, reportant l'insaisissabilité en cas de cession de l'immeuble sur le prix obtenu et sur la nouvelle résidence principale acquise en remplacement, étant observé qu'à tout moment, la déclaration d'insaisissabilité peut faire l'objet d'une renonciation de la part de l'entrepreneur individuel. Par conséquent, il convient de considérer que la déclaration d'insaisissabilité portant la résidence de Madame Y...n'a aucun effet sur l'inscription d'hypothèque pratiquée par Monsieur X...; l'article 67 de la loi du 19 juillet 1991 dispose que toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement. En l'occurrence, la créance invoquée par Monsieur X...présente une apparence de certitude au vu du rapport de l'expert judiciaire déposé le 1er février 2010 qui a constaté de nombreux désordres sur le véhicule vendu par Madame Y...le rendant impropre à la circulation routière. Selon l'expert, la seule remise en état initial du véhicule s'élève à la somme de 12. 986, 44 € ; cette expertise vient elle même confirmer les observations de l'expertise contradictoire diligentée par le cabinet CESARI sollicité dans le cadre de l'assurance juridique protection de Monsieur X..., indiquant notamment que les travaux de transformation facturés par IONIO INNOVATION n'ont pas été réalisés dans les règles de l'art et affectent la sécurité d'origine du véhicule prévue par le constructeur. Au vu de ces documents, l'action en restitution du prix de vente engagée par Monsieur X...devant le Tribunal de grande instance, sur le fondement des articles 1641, 1643 et 1644 du code civil, présente des chances sérieuses de prospérer. En second lieu, il n'est pas contestable que Madame Y...a cessé toute activité commerciale, s'étant fait radier du registre du commerce et des sociétés depuis le 31 décembre 2009 et que son fonds de commerce a disparu. Or la cessation d'activité est une circonstance susceptible de mettre en péril le recouvrement de la créance, en l'absence avérée de biens immobiliers et mobiliers, autres que l'immeuble en question qui semble constituer le seul élément certain de son patrimoine. Par conséquent au regard de ces observations, il y a lieu de débouter Madame Y...de sa demande de mainlevée de l'inscription de l'hypothèque judiciaire provisoire ; ALORS QU'une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel peut déclarer insaisissables ses droits sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale ; qu'elle peut céder cet immeuble et en conserver le prix sous la condition du remploi dans le délai d'un an des sommes à l'acquisition par le déclarant d'un immeuble où est fixée sa résidence principale ; que l'inscription d'une hypothèque judiciaire, qui impose, en cas de cession de l'immeuble, de distribuer le prix aux créanciers inscrits et exclut dès lors son remploi intégral par l'entrepreneur, est, en conséquence, impossible ; qu'en estimant néanmoins que Monsieur Serge X...pouvait être autorisé à inscrire une hypothèque sur l'immeuble appartenant à Madame Francisca Y... et protégé par une déclaration d'insaisissabilité, la Cour d'Appel a violé les articles L 526-1 et L 526-3 du Code de Commerce et L 532-1 et R 251-1 du Code des procédures civiles d'exécution.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-13643
Date de la décision : 11/06/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Règles générales - Biens insaisissables - Bien faisant l'objet d'une déclaration d'insaisissabilité - Portée

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures conservatoires - Sûretés judiciaires - Inscription provisoire d'hypothèque - Déclaration d'insaisissabilité - Portée PROFESSIONS (EN GENERAL) - Professions libérales - Entrepreneur individuel - Protection - Déclaration d'insaisissabilité - Portée

L'article L. 526-1 du code de commerce, d'interprétation stricte, interdit la saisie du bien objet de la déclaration d'insaisissabilité, mais non l'inscription d'une hypothèque judiciaire à titre conservatoire sur ce bien


Références :

article L. 526-1 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 20 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 jui. 2014, pourvoi n°13-13643, Bull. civ.Bull 2014, IV, n° 106
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull 2014, IV, n° 106

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: Mme Vallansan
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.13643
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