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27/05/2014 | FRANCE | N°13-12319

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 mai 2014, 13-12319


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 6 juin 2007 et 30 juillet 2008, la société Corinter France a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; que le liquidateur a assigné M. X..., gérant de cette société, en responsabilité pour insuffisance d'actif ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche :Vu l'article L. 651-2, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à application de l'article

L. 651-2 du code commerce et rejeter les demandes du liquidateur, l'arrêt ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 6 juin 2007 et 30 juillet 2008, la société Corinter France a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; que le liquidateur a assigné M. X..., gérant de cette société, en responsabilité pour insuffisance d'actif ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche :Vu l'article L. 651-2, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à application de l'article L. 651-2 du code commerce et rejeter les demandes du liquidateur, l'arrêt retient que pour engager la responsabilité du dirigeant de la personne morale, la poursuite de l'activité déficitaire doit être abusive, ce qui implique qu'il ait poursuivi cette activité déficitaire dans un intérêt personnel, non allégué en l'espèce ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif en application de l'article L. 651-2 du code de commerce n'est pas subordonnée à la démonstration de la poursuite par le dirigeant de la satisfaction d'un intérêt personnel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;Et sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 651-2, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 ; Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que le grief tiré de l'emploi de moyens ruineux permettant la poursuite d'une activité déficitaire n'est pas établi, dès lors qu'il n'est pas allégué que M. X... en a tiré un profit personnel ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif en application de l'article L. 651-2 du code de commerce n'est pas subordonnée à la démonstration de la poursuite par le dirigeant de la satisfaction d'un intérêt personnel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a reçu la demande de la société Silvestri-Baujet, ès qualités, l'arrêt rendu le 20 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la société Silvestri-Baujet, ès qualités, la somme de 3 000 euros ;Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Silvestri et BaujetIl est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article L. 651-2 du code de commerce et débouté la SCP Silvestri-Baujet ès qualités de la totalité de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « aux termes de l'article L 651-2 du code de commerce dans sa version en vigueur à la date de l'ouverture de la liquidation judiciaire de la SARL Corinter France, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; M. Fernando X... était effectivement le gérant de droit de la SARL Corinter France ; il ressort de la situation active et passive de la SARL Corinter France dressée par le mandataire liquidateur qu'en fonction de l'issue des procédures de contestations de déclarations de créances à hauteur de 748.190,46 €, l'insuffisance d'actif ressortira entre 487.132,88 € et 1.235.323.34 €, l'actif, constitué des comptes clients à recouvrer et des disponibilités, s'élevant à 82.379,58 €, et le passif déclaré s'élevant à 1.317.702,92 € ; cela étant, il appartient à l'appelant de justifier d'une part, que M. X... en sa qualité de dirigeant de droit de la société en liquidation judiciaire a commis des fautes dans le cadre de la gestion de la société, et d'autre part, de ce que ces fautes de gestion ont participé à l'insuffisance d'actif constatée ; la première faute de gestion invoquée consisterait selon l'appelant en la déclaration tardive de l'état de cessation des paiements ; les documents comptables versés aux débats font apparaître que la SARL Corinter France accusait un résultat déficitaire au 31 décembre 2005 (-298.686 €), puis au 31 décembre 2006 (-352.932 €), la société ayant accusé une baisse conséquente de chiffre d'affaires sur l'exercice 2006 et des dettes sociales et fiscales étant échues et impayées depuis l'exercice 2005 ; néanmoins, à supposer que l'état de cessation des paiements soit acquis au 31 décembre 2006, les comptes de l'exercice clos à cette date n'ont été établis que le 8 octobre 2007, soit postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire prononcé le 6 juin 2007, et, en toute hypothèse, il n'est pas justifié que l'absence de déclaration des paiements au début de l'année 2007 est en relation avec une augmentation de l'insuffisance d'actif entre la date à laquelle le dépôt de bilan aurait dû intervenir selon le mandataire liquidateur et le Jour de l'ouverture de la procédure collective, aucune comparaison chiffrée n'étant produite ; ce grief ne peut donc être retenu ; la deuxième faute de gestion invoquée consisterait en la poursuite d'une activité déficitaire et en l'absence de reconstitution des capitaux propres ; pour être génératrice de responsabilité, la poursuite de l'activité déficitaire doit être abusive, ce qui impose, à l'égard du dirigeant de la personne morale débitrice, qu'il soit établi qu'il a poursuivi cette activité déficitaire dans un intérêt personnel, ce qui n'est pas allégué en l'espèce ; par ailleurs, si les résultats comptables produits aux débats démontrent que pour les exercices 2006 et 2006 les capitaux propres de la société sont devenus inférieurs à la moitié du capital social compte tenu des pertes, la reconstitution des capitaux propres, à défaut de dissolution de la société, devait intervenir, en application des dispositions de l'article L 223-42 du code de commerce, au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation de ces pertes est intervenue, le point de départ de ce délai étant constitué par l'approbation des comptes ayant fait apparaître les pertes ; or, en l'espèce, il n'est pas justifié de la date de l'approbation des comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2005, premier exercice faisant apparaître une insuffisance de capitaux propres, point de départ du délai, de sorte qu'il n'est pas établi qu'à la date du 31 décembre 2006 ou, en toute hypothèse avant l'ouverture du redressement judiciaire, le gérant de la SARL Corinter France était légalement tenu d'avoir fait procéder à la reconstitution des capitaux propres ; les fautes de gestion invoquées tant au titre de la poursuite d'une activité déficitaire que de la non reconstitution des capitaux propres ne sont donc pas établie ; le troisième grief invoqué consiste en l'emploi de moyens ruineux permettant la poursuite d'une activité déficitaire ; pour justifier ce grief l'appelant affirme que l'activité n'a pu être poursuivie que par des apports de trésorerie de la société Corticas Lamosel, société de droit portugais dont le dirigeant est aussi M. X..., soit approximativement 2.562.000

tels que déclarés à l'ouverture de la procédure, opérations ayant permis selon lui de soutenir une activité déficitaire sans espoir de redressement ; il ressort de l'état de la situation active et passive ainsi que de l'état des créances déclarées produit par le mandataire liquidateur que la société Corticas Lamosel est censée avoir déclaré le 8 août 2007 une créance à hauteur de 86.108,54 €, proposée à l'admission ; il ressort des pièces produites, et particulièrement du jugement du tribunal de commerce du 30 juillet 2008 ayant prononcé la liquidation judiciaire après rejet de plan, que la créance de la société Corticas Lamosel ressortait à l'origine à 2.469.453 € dans le cadre d'un crédit fournisseur et qu'il était attendu une réduction de cette créance par incorporation au capital, situation qui a finalement été concrétisée puisque le mandataire indique sur l'état de situation que la société Corticas Lamosel a abandonné une grande partie de sa créance, seule subsistant une créance de 86.108,54 € ; or le recours au crédit fournisseur ne caractérise pas en soi un moyen de financement ruineux, causant préjudice à la société qui en bénéficie ; s'il a permis effectivement à la société Corinter France de continuer son activité malgré des difficultés patentes en alimentant sa trésorerie, il n'est pas allégué, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que M. X... en ait tiré un profit personnel ; le grief invoqué à ce titre n'est donc pas établi ; enfin l'appelant reproche le développement d'une activité sans assurance, soutenant qu'il existe de nombreux litiges à propos de la qualité des fournitures sans qu'aucune des assurances sollicitées n'estiment être tenues par les contrats souscrits, de sorte qu'il aurait été pris des risques inconsidérés en développant une activité sur une assurance responsabilité civile inefficace ; or il ne s'agit pas en l'espèce d'une non souscription d'assurance responsabilité civile, puisque l'appelant reconnaît explicitement que des contrats d'assurance ont été souscrits, mais manifestement de contestation des assureurs contractants quant à la portée de leur garantie ; il n'est cependant produit aucun document relatif aux contestations de garantie des "assurances sollicitées", ni quant à leur nature, ni quant à leur portée, permettant d'établir que le dirigeant de la personne morale débitrice a sciemment contracté des assurances qu'il savait inefficaces ; ce grief n'est donc pas établi ; en conséquence, à défaut de justification d'une ou plusieurs fautes de gestion imputable à M. X... ayant participé à l'insuffisance d'actif constatée après l'ouverture de la procédure collective, le jugement entrepris ne peut qu'être confirmé » ; ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « le tribunal : constate que M. X... est gérant de droit de la société Corinter France, constate que la procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 6 juin 2007, que l'état de cessation des paiements est fixé au 31 décembre 20056, le jugement de liquidation judiciaire intervenant le 30 juillet 2008, relève que les créances privilégiés les plus anciennes concernent les années 2005 et 2006, en particulier TVA du 1er janvier 2006 au 30 septembre 2006 pour la somme de 199 520,93 euros, TP 2005 et 2006 pour 22 757 euros IRPVRP, IRREP, INPR pour les cotisations 2005 et 2006, URSSAF de février 2006 à novembre 2006, relève que, lors de la clôture de l'exercice 2006, soit le 31 décembre, l'actif circulant s'élève à 2 727 000 euros pour un passif de 4 793 565 euros, relève que le chiffre d'affaires de l'exercice 2005 s'établir à 4 573 481 euros pour un résultat d'exploitation de - 298 686 euros contrat un chiffre d'affaires de 1 613 632 euros et un RE de ¿ 352 932 euros pour l'exercice 206, que les capitaux propres de la société Corinter France sont au 31 décembre 2005 de ¿ 1 549 621 euros et se dégradent encore au 31 décembre 2006 pour s'établir à 1 914 093 euros, constate que seul un apport en trésorerie de 2 562 000 euros par la société Corticas Lamosel dont le dirigeant est aussi M. X... a permis de maintenir artificiellement une activité déficitaire, relève enfin qu'au 30 juillet 2008, la situation active et passive de la liquidation fait apparaître un actif de 82 379,58 euros et un passif de 1 317 702,92 euros dont 748 190,46 euros de contestations en cours, soit une insuffisance d'actif comprise entre 487 132,88 euros et 1 235 323,34 euros, ne trouve pas dans les pièces produites, d'éléments de preuve permettant d'établir les fautes de gestion de M. X... et la causalité entre ces fautes de gestion et l'insuffisance d'actif » ; 1°) ALORS QUE l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif n'est pas subordonnée à la démonstration de la poursuite par le dirigeant de la satisfaction d'un intérêt personnel ; qu'en retenant, pour en déduire l'absence de faute de gestion consistant en la poursuite d'une activité déficitaire, qu'il n'était pas allégué que le dirigeant de droit de la société Corinter France, M. X..., avait poursuivi l'activité déficitaire dans un intérêt personnel, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable en l'espèce ; 2°) ALORS QUE l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif n'est pas subordonnée à la démonstration de la poursuite par le dirigeant de la satisfaction d'un intérêt personnel ; qu'en retenant, pour écarter la faute de gestion consistant en l'emploi de moyens ruineux ayant permis la poursuite d'une activité déficitaire, qu'il n'était pas allégué que M. X... en ait tiré un profit personnel, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-12319
Date de la décision : 27/05/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 20 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 mai. 2014, pourvoi n°13-12319


Composition du Tribunal
Président : Mme Canivet-Beuzit (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.12319
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