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27/05/2014 | FRANCE | N°13-10360

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 mai 2014, 13-10360


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2012), que la société de logement et de gestion immobilière pour la région parisienne (la société Logirep) a conclu avec la chambre de commerce et d'industrie d'Elbeuf (la CCI) et la société d'HLM d'Elbeuf (la société d'HLM) en présence de M. X..., président de ces dernières, un protocole d'accord aux termes duquel la CCI s'engageait à céder à la société Logirep ses participations dans le capital de la société d'HLM ; qu'un litige étant survenu,

la société Logirep, se prévalant de la clause attributive de compétence incl...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2012), que la société de logement et de gestion immobilière pour la région parisienne (la société Logirep) a conclu avec la chambre de commerce et d'industrie d'Elbeuf (la CCI) et la société d'HLM d'Elbeuf (la société d'HLM) en présence de M. X..., président de ces dernières, un protocole d'accord aux termes duquel la CCI s'engageait à céder à la société Logirep ses participations dans le capital de la société d'HLM ; qu'un litige étant survenu, la société Logirep, se prévalant de la clause attributive de compétence incluse dans ce protocole d'accord, a saisi le président du tribunal de commerce de Paris, statuant en matière de référés, d'une demande de séquestre ; Sur le premier moyen : Attendu que la CCI et la société d'HLM font grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception d'incompétence soulevée par elles, et d'avoir ordonné le séquestre, jusqu'au prononcé d'une décision irrévocable dans l'instance au fond, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en vertu de l'article 48 du code de procédure civile, la clause qui déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite dès lors qu'elle n'a pas été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant ; que cette sanction est encourue quelle que soit la partie qui s'en prévaut ; qu'en relevant que M. X..., signataire à titre personnel du protocole du 25 mai 2009 contenant la clause attributive de compétence au profit du tribunal de commerce de Paris, n'avait pas contracté en qualité de commerçant, mais que cette circonstance importait peu dans la mesure où l'intéressé n'était pas personnellement partie à l'instance, la cour d'appel, qui a dénié à la CCI et à la société d'HLM, également signataires du protocole, le droit d'invoquer la nullité de la clause à raison de la qualité de non-commerçant de M. X..., a violé l'article 48 du code de procédure civile ; 2°/ que l'accomplissement d'un acte de commerce isolé ne suffit pas à conférer à son auteur la qualité de commerçant ; qu'en se bornant à se référer, pour déclarer valable la clause attributive de compétence stipulée au profit du tribunal de commerce de Paris, à la nature commerciale de l'opération visée au protocole du 25 mai 2009, sans préciser en quoi la CCI, dont elle a elle-même constaté la nature d'établissement public, avait signé ce protocole en qualité de commerçant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 48 du code de procédure civile et L. 121-1 du code de commerce ; Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que M. X... n'est pas partie à l'instance en qualité de personne privée, mais en sa seule qualité de président directeur général de la société d'HLM dont la forme sociale n'est pas discutée ; Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des conclusions, que la CCI a soutenu devant la cour d'appel qu'elle n'avait pas signé le protocole en qualité de commerçant ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ; D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen : Attendu que la CCI et la société d'HLM font grief à l'arrêt d'avoir ordonné le séquestre, jusqu'au prononcé d'une décision irrévocable dans l'instance au fond, alors, selon le moyen, que seul constitue un dommage imminent, au sens de l'article 873 du code de procédure civile, le dommage qui ne s'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation existante doit se perpétuer ; qu'en se bornant en l'espèce à relever, pour ordonner le séquestre des actions litigieuses, que le risque de cession de ces actions à un tiers n'était pas exclu, la cour d'appel, qui n'a pas fait ressortir l'existence d'un dommage imminent, a privé sa décision de base légale au regard dudit article 873 du code de procédure civile ; Mais attendu qu'après avoir constaté que la CCI s'était refusée à exécuter le protocole, l'arrêt relève que le contexte de l'exécution de la convention de cession est particulièrement conflictuel ; qu'ayant ainsi fait ressortir un risque de cession des participations à un tiers, la cour d'appel a pu en déduire l'existence d'un dommage imminent justifiant le séquestre ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne la chambre de commerce et d'industrie d'Elbeuf et la société d'HLM de la région d'Elbeuf aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la chambre de commerce et d'industrie d'Elbeuf et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la CCI d'Elbeuf et la société HLM de la région d'Elbeuf, et d'avoir, en cet état, ordonné le séquestre entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris des 523 actions faisant l'objet du protocole d'intention signé le 25 mai 2009 entre M. X..., la société Logirep, la CCI d'Elbeuf et la société HLM de la région d'Elbeuf, jusqu'au prononcé d'une décision irrévocable dans l'instance au fond ; Aux motifs propres que « selon les dispositions de l'article 48 du code de procédure civile " toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de la compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée " ; qu'en l'espèce, que la circonstance que M. Dominique X... ne soit pas commerçant est sans intérêt pour le présent litige dans la mesure où d'une part il n'est pas présent à l'instance en qualité de personne privée, sa seule qualité dans le litige étant celle de président directeur général de la société d'HLM de la REGION D'ELBEUF, dont la forme sociale n'est pas discutée ; qu'il importe donc peu qu'il apparaisse comme signataire de la convention objet du litige sous la double qualité personnelle et de PDG de la SA d'HLM ; que la CCI d'ELBEUF qui se mentionne elle-même en tête de ses conclusions de " forme inconnue " apparaît au vu de la même convention être un établissement public ; qu'il est expressément mentionné en préambule de cette convention (page 3 point E) qu'il s'agit des " termes et conditions de l'acquisition par LOGIREP du contrôle de SA HLM d'ELBEUF " cela dans le cadre (page 3 point D) d'un " rapprochement notamment en matière de synergies des parcs de logements sociaux ", alors que l'article 2 de ladite convention est intitulé " Cession par la CCI du contrôle de la société LOGIREP " et porte sur 523 actions représentant 50, 04 % du capital social et des droits de vote de la société ; qu'il ne saurait être contesté qu'il s'agit d'une cession d'actions ayant pour effet le contrôle d'une société commerciale, ce qui constitue un acte de commerce justifiant la compétence commerciale désignée dans ladite convention, les parties ayant ainsi pu valablement désigner (Article 10. 14) le tribunal de commerce de Paris pour connaître de tout litige la concernant ; que l'ordonnance entreprise sera confirmée sur ce point » (arrêt attaqué, p. 4, pénult. § à p. 5, § 2) ; Et aux motifs éventuellement adoptés du premier juge que « par jugement du 22/ 12/ 11, le tribunal de céans a retenu sa compétence ; que les moyens soulevés étant identiques, en conséquence nous nous dirons compétent » (ordonnance entreprise, p. 3, § 3) ; Alors d'une part qu'en vertu de l'article 48 du code de procédure civile, la clause qui déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite dès lors qu'elle n'a pas été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant ; que cette sanction est encourue quelle que soit la partie qui s'en prévaut ; qu'en relevant que M. X..., signataire à titre personnel du protocole du 25 mai 2009 contenant la clause attributive de compétence au profit du tribunal de commerce de Paris, n'avait pas contracté en qualité de commerçant, mais que cette circonstance importait peu dans la mesure où l'intéressé n'était pas personnellement partie à l'instance, la cour d'appel, qui a dénié à la CCI d'Elbeuf et à la société HLM de la région d'Elbeuf, également signataires du protocole, le droit d'invoquer la nullité de la clause à raison de la qualité de non-commerçant de M. X..., a violé l'article 48 précité du code de procédure civile ; Alors d'autre part que l'accomplissement d'un acte de commerce isolé ne suffit pas à conférer à son auteur la qualité de commerçant ; qu'en se bornant à se référer, pour déclarer valable la clause attributive de compétence stipulée au profit du tribunal de commerce de Paris, à la nature commerciale de l'opération visée au protocole du 25 mai 2009, sans préciser en quoi la CCI d'Elbeuf, dont elle a elle-même constaté la nature d'établissement public, avait signé ce protocole en qualité de commerçant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 48 du code de procédure civile et L. 121-1 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir ordonné le séquestre entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris des 523 actions faisant l'objet du protocole d'intention signé le 25 mai 2009 entre M. X..., la société Logirep, la CCI d'Elbeuf et la société HLM de la région d'Elbeuf, jusqu'au prononcé d'une décision irrévocable dans l'instance au fond ; Aux motifs que « par jugement rendu le 22 décembre 2011 le tribunal de commerce de Paris a :- constaté que la propriété des 523 actions (représentant 50, 04 % du capital) et droits de vote détenus par la CCI d'ELBEUF dans le capital des HLM d'ELBEUF a été transférée,- ordonné à la CCI de compléter, signer et adresser par lettre recommandée avec avis de réception les originaux des ordres de mouvement correspondant à ce transfert et, sous jours à compter de la signification du présent jugement,- constaté que LOGIREP s'engage à payer à la CCI la somme de 20 432, 76 ¿ correspondant aux prix desdites actions,

- condamné M. X... à payer à LOGIREP la somme de 10 000 ¿ au titre de la clause pénale-condamné la CCI de la Région d'ELBEUF à payer à LOGIREP la somme de 10 000 ¿ au titre de la clause pénale-condamné les HLM de la Région d'ELBEUF à payer à LOGIREP la somme de 10 000 ¿ au titre de la clause pénale,
- ordonné la compensation entre les créances réciproques de la CCI et de LOGIREP,- condamné in solidum M. X..., la CCI et les HLM à payer à LOGIREP 5 000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté LOGIREP de sa demande d'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs autres demandes et condamné in solidum M. X..., la CCI et les HLM aux dépens ; qu'il est indifférent que LOGIREP vise le caractère inadapté des dispositions des articles 67 de la loi du 9 juillet 1991 selon lesquelles " toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement " et (68) " une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire ou d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire... " ces dispositions ayant été abrogées par la loi n° 92-644 du 13 juillet 2012 (JO du 14 juillet 2012) ; que LOGIREP demeure fondée à solliciter le bénéfice d'une mesure conservatoire si elle justifie d'un dommage imminent ; qu'en effet selon les dispositions de l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que LOGIREP se fonde sur le risque de voir céder les actions à un tiers ; que si pour prétendre à l'absence de risque, la CCI produit une attestation de son commissaire aux comptes, KPMG, pour prétendre à l'absence de risque de cession, cette pièce n'est cependant pas de nature, dans le contexte particulièrement conflictuel de l'exécution de la Convention de cession, et au regard des contraintes générées par le projet de mise en oeuvre de l'opération de gestion de l'important patrimoine d'habitat social concerné (3500 logements) à voir écarter ce risque dès lors que :- d'une part cette pièce, qui a été rédigée le 22 juin 2012, sur la base des informations établies sous la responsabilité du directeur général de la CCI, partie à l'instance, n'a eu pour objet que de vérifier la conformité des informations contenues dans les procès-verbaux de l'assemblée générale plénière de la CCI des 12 janvier 2012, 15 mars 2012, 12 avril 2012 et 10 mai 2012, avec l'attestation de M. Christian Y..., directeur général de la CCI, datée du 22 juin 2012, laquelle énonce " qu'en dehors du suivi régulier de la procédure judiciaire avec LOGIREP, les actions de la société anonyme des HLM de la Région d'ELBEUF, détenues par notre compagnie consulaire, n'ont fait l'objet d'aucune délibération, discussion ou même mise à l'ordre du jour de l'assemblée plénière, en vue de leur cession, transfert, ou toute autre forme d'aliénation ", ce qui ne vaut que sur une période limitée,- et d'autre part cette pièce contient en elle-même les limites de sa portée, le signataire de KPMG précisant n'avoir " pas mis en oeuvre de procédures pour identifier, le cas échéant, les événements survenus postérieurement à l'émission de son rapport " lequel est clos par une clause d'exclusion de toute responsabilité ; qu'il n'y a pas lieu de retenir la pièce de LOGIREP cotée n° 7 qui ne figure sur la liste des pièces communiquées mentionnée en pied des dernières conclusions, aucun bordereau de communication complémentaire n'étant produit ; qu'en conséquence, alors que cette mesure ne porte en rien atteinte aux droits de la CCI et de la SA d'HLM, il convient de faire droit à la mesure de séquestre dont la durée sera prévue jusqu'à l'obtention d'une décision judiciaire irrévocable » (arrêt attaqué, p. 5, § 3 à p. 6, § 6) ;

Alors que seul constitue un dommage imminent, au sens de l'article 873 du code de procédure civile, le dommage qui ne s'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation existante doit se perpétuer ; qu'en se bornant en l'espèce à relever, pour ordonner le séquestre des actions litigieuses, que le risque de cession de ces actions à un tiers n'était pas exclu, la cour d'appel, qui n'a pas fait ressortir l'existence d'un dommage imminent, a privé sa décision de base légale au regard dudit article 873 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-10360
Date de la décision : 27/05/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 mai. 2014, pourvoi n°13-10360


Composition du Tribunal
Président : Mme Canivet-Beuzit (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10360
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