LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que l'éventuel défaut de pouvoir d'un agent d'une caisse primaire, souscripteur d'une décision de reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie notifiée à la victime ou à ses ayants droit, ne rend pas cette décision inopposable à l'employeur, qui conserve la possibilité de contester tant le bien-fondé de la décision que ses modalités de mise en oeuvre au regard des obligations d'information et de motivation incombant à l'organisme social ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société LDC Sablé (la société), a procédé, le 2 mars 2010, à la déclaration de deux maladies auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe (la caisse) qui en a reconnu le caractère professionnel par décisions du 12 mai 2010 ; que la société a contesté, devant une juridiction de sécurité sociale, l'opposabilité de ces décisions ;
Attendu que, pour accueillir le recours de la société, l'arrêt retient que la délégation de signature consentie à l'agent de la caisse ne lui permettait pas de prendre la décision de reconnaissance du caractère professionnel des maladies déclarées par le salarié et que, dans les rapports entre l'employeur et la caisse, ce défaut de pouvoir constitue une irrégularité de fond qui justifie de déclarer les décisions litigieuses inopposables à la société ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Condamne la société LDC Sablé aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société LDC Sablé ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Sarthe
IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR déclaré inopposables à la société LDC SABLE les décisions du 12 mai 2010 par lesquelles la CPAM de la Sarthe a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, les maladies déclarées par Monsieur X... le 2 mars 2010
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article R.441-10 du Code de la sécurité sociale, c'était « la caisse » qui statuait sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie qui lui avait été déclarée ; qu'en l'absence de dispositions particulières contraires, la seule mention de la « caisse » dans ce texte avait pour effet de confier le pouvoir de reconnaissance du caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie à son seul directeur, lequel, en vertu de l'article R.122-3 du Code de la sécurité sociale, « assure le fonctionnement de l'organisme sous le contrôle du conseil d'administration» et se trouve ainsi compétent par principe pour prendre l'ensemble des décisions émises au nom de l'organisme de sécurité sociale ; que la CPAM de la Sarthe ne soutenait plus que les décisions de reconnaissance du caractère professionnel des maladies déclarées par Monsieur Inayet X... le 2 mars 2010 auraient été prises avant le 12 mai 2010 et que les notifications établies à cette date en seraient la seule matérialisation ; qu'elle a reconnu expressément à l'audience que ces courriers du 12 mai 2010 constituaient bien les décisions de prise en charge litigieuses ; que ces décisions avaient été établies et signées par Monsieur Patrick Y... « correspondant des risques professionnels » ; qu'en application des dispositions combinées des articles R.122-3 et D.253-6 du Code de la sécurité sociale, le directeur de la CPAM pouvait, d'une part, déléguer, sous sa responsabilité, une partie de ses pouvoirs à certains agents de l'organisme, d'autre part, déléguer à titre permanent, sa signature au directeur adjoint de la caisse ou à un ou plusieurs agents de l'organisme ; qu'aux termes de l'alinéa 3 du second de ces textes, « cette délégation doit préciser, pour chaque délégué, la nature des opérations qu'il peut effectuer et leur montant maximum s'i l y a lieu » ; que cette exigence de précision des délégations de signatures données par un directeur à ses collaborateurs était rappelée par la circulaire CNAMTS du 9 juillet 2001 ; qu'il résultait de ces dispositions claires que la délégation de pouvoir ou de signature devait être expresse quelles que fussent la ou les opérations concernées, précise et interprétée limitativement ; qu'en l'espèce, la CPAM de la Sarthe versait aux débats une délégation de signature établie le 1e r janvier 2006 par son directeur en faveur de Monsieur Patrick Y..., agent, qui portait la mention suivante : « NATURE DES OPERATIONS LIQUIDATION ET CORRESPONDANCE » ; qu'il résultait des énonciations de cette délégation de signature qu'elle était limitée aux opérations de liquidation et de correspondance afférentes aux AT/MP, aux dossiers personnels du centre 400, à la notification des indus d'un montant inférieur ou égal à 1 000 ¿ aux tiers et d'un montant inférieur ou égal à 500 ¿ aux assurés, aux migrants et soins à l'étranger ; que s'agissant du montant des opérations il était précisé qu'il était sans limite pour les paiements informatiques, tandis que les paiements traditionnels étaient limités à 5 000 ¿ au plus à l'égard des tiers et à 2 500 ¿ au plus à l'égard des assurés ; qu'il résultait ainsi des termes de la délégation de signature consentie à Monsieur Y... qu'à la date du 12 mai 2010, en matière d'accident du travail ou de maladie professionnelle, il ne pouvait procéder qu'à des opérations de liquidation des prestations et à la rédaction de correspondances ; qu'au regard de l'exigence de précision posées par l'article D.253-6 du Code de la sécurité sociale quant à la nature des opérations pouvant être effectuées par le délégataire, la délégation de la décisions intellectuelle de prise en charge ne s'induisait implicitement et nécessairement ni du terme correspondance lequel renvoyait au simple établissement de courriers au titre des matières objet de la délégation, ni du terme opération de liquidation dans la mesure où cette opération réalisée an aval, procédait de l'exécution de la décision de prise en charge, sans comporter l'ordonnancement de la dépense, c'est-à-dire l'ordre de la payer ; qu'au regard des limites dans lesquelles elle était enfermée, la délégation de signature consentie à Monsieur Y... ne lui permettait donc pas, à la date du 12 mars 2010, de prendre la décision de reconnaissance du caractère professionnel des maladies déclarées par Monsieur X... le 2 mars 2010 ; que dans les rapports employeur/caisse, ce défaut de pouvoir, sans rapport avec l'hypothèse de la simple absence de signature citée par la caisse, constituait une irrégularité de fond qui justifiait de déclarer les décisions litigieuses inopposables à cette dernière.
ALORS D'UNE PART QUE il résulte de l'article R.441-14 du Code de la sécurité sociale que la décision de la caisse de reconnaître le caractère professionnel de la maladie déclarée par la victime est notifiée à l'employeur ; que la cour d'appel qui a constaté que les courriers du 12 mai 2010 notifiant à la société LDC SABLE les décisions de prise en charge au titre de la législation professionnelle des affections déclarées par Monsieur X... le 2 mars 2010, étaient signés par Monsieur Y... qui avait reçu du directeur de la CPAM de la Sarthe, le 1e r janvier 2006, délégation de signature pour les « opérations de liquidation et de correspondance afférentes aux AT/MP », ce dont il s'évince que Monsieur Y... avait qualité pour procéder à la notification prévue par l'article R.441-14, qui rend la décision de la caisse opposable à l'employeur, a, en déclarant les décisions de prise en charge inopposables à l'employeur, violé ce texte et les articles R.122-3 et D.253-6 du Code de la sécurité sociale
ALORS QUE D'AUTRE PART QUE l'inopposabilité à l'employeur d'une décision de prise en charge d'une maladie professionnelle dont est atteint le salarié assuré social ne sanctionne que la méconnaissance par la CPAM de son obligation d'information et du caractère contradictoire de la procédure d'instruction en application des articles R.441-11 et suivants du Code de la sécurité sociale ; que l'éventuel défaut de pouvoir du signataire de la décision de prise en charge ne la rend pas inopposable à l'employeur, dès lors qu'elle a été prise conformément aux dispositions légales et réglementaires, dans le respect du caractère contradictoire de la procédure et des droits de l'employeur à être tenu informé, et qu'ainsi la cour d'appel a violé les articles R.441-11 et suivants du Code de la sécurité sociale
ALORS QU'ENFIN le défaut de pouvoir du signataire de la décision de prise en charge constitue une irrégularité qui peut être couverte, en l'absence de forclusion, si sa cause a disparu lorsque le juge statue ; et que la cour d'appel qui a constaté que les 9 septembre 2010 et 20 janvier 2011 la commission de recours amiable de CPAM de la Sarthe, émanation du conseil d'administration de la caisse, avait confirmé les décisions de prise en charge des affections déclarées par Monsieur X..., ce dont il résultait que les décisions amiables s'étaient substituées aux décisions initiales que la commission avaient faite siennes, a en déclarant inopposables à la société LDC SABLE, les décisions de prises en charge, violé l'article 121 du Code de procédure civile.