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12/03/2014 | FRANCE | N°13-14403

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 12 mars 2014, 13-14403


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 1751 du code civil, ensemble l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que le droit au bail du local qui sert effectivement à l'habitation de deux époux est réputé appartenir à l'un et à l'autre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 mars 2013), que la société Efidis, propriétaire d'un appartement donné à bail à M. et Mme X..., les a assignés en paiement d'une certaine somme au titre d'u

n arriéré de loyer et de supplément de loyer de solidarité ainsi qu'en résiliat...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 1751 du code civil, ensemble l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que le droit au bail du local qui sert effectivement à l'habitation de deux époux est réputé appartenir à l'un et à l'autre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 mars 2013), que la société Efidis, propriétaire d'un appartement donné à bail à M. et Mme X..., les a assignés en paiement d'une certaine somme au titre d'un arriéré de loyer et de supplément de loyer de solidarité ainsi qu'en résiliation de bail et expulsion ;
Attendu que pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient que les courriers adressés en application de l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation, qui ne visent que le supplément de loyer de solidarité et ne concernent pas l'existence ou la modification du droit au bail, peuvent être adressés à l'un quelconque des deux époux débiteurs solidaires du loyer ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la notification prévue par l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation, qui a une incidence sur le montant du loyer, doit être adressée à chacun des cotitulaires du bail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen :
Attendu que la cassation de l'arrêt du chef du montant du loyer entraîne par voie de conséquence nécessaire la cassation du chef du dispositif ayant prononcé la résiliation du bail et l'expulsion des locataires ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, par dérogation aux dispositions de l'article L. 353-7, les dispositions de la convention s'appliquent de plein droit, à compter de la date d'achèvement des travaux, à tous les locataires et occupants de l'immeuble si les travaux d'amélioration incombant au bailleur, conformément aux dispositions de l'article L. 353-2, sont justifiés par des considérations de salubrité, de sécurité ou de mise aux normes minimales d'habitabilité ;
Attendu que pour fixer le montant des loyers impayés, l'arrêt retient que le conseil des époux X... a longuement développé une argumentation concernant cette dette, qu'ont été repris les termes du premier bail de 1977 puis ceux d'un protocole d'accord du 29 juillet 1999 auquel était annexé un avenant, que compte tenu de l'indexation prévue le montant des loyers doit être fixé à la somme de 7 202,64 euros ;
Qu'en statuant ainsi, sans tenir compte du nouveau loyer applicable à compter de l'achèvement des travaux visés par la convention du 23 février 2003, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 19 mars 2013 par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Efidis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Efidis à payer à M. et Mme X... la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Efidis ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. et Mme X... font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à payer à la société Efidis la somme de 52.531,32 euros et ce avec intérêts de droit à compter de l'assignation introductive d'instance ;
AUX MOTIFS QUE sur la régularité des mises en demeure quant à leur destinataire, les époux X... ne contestent pas que les dispositions du code de la construction et de l'habitation leur soient applicables (article L 353-8) et notamment le paiement d'un surloyer ; qu'ils contestent en revanche la régularité des mises en demeure qui leur ont été adressées ; que les époux X... soutiennent que les courriers adressés dans le cadre des mises en demeure ne sont adressés qu'à M. X... et ne peuvent donc avoir effet à l'encontre du couple ; qu'ils invoquent une jurisprudence concernant l'existence ou la modification du droit au bail ; mais que tel n'est pas le cas des courriers adressés en application de l'article L 441-9 qui ne visent que le supplément de loyer de solidarité ; que ces courriers adressés à l'un quelconque des deux époux débiteurs solidaires du loyer étaient donc valables au regard de leur objectif, à savoir réunir des documents permettant de calculer le montant du surloyer, calcul provisoire puisqu'il est révisable aussitôt reçus les pièces réclamées aux locataires ; que sur la régularité des mises en demeure quant au destinataire des lettres, les époux X... soutiennent que les mises en demeure produites par la société Efidis n'ont pas de valeur probante car elles ne mentionnent aucun destinataire à l'exception de celle de l'année 2008 ; qu'ils notent également que les numéros de contrat qui auraient pu permettre l'identification du destinataire ne sont pas davantage probants car les numéros mentionnés sur les pièces produites ne correspondent pas à celui de leur contrat ; que la société Efidis réplique que les mises en demeure ont toutes été envoyées sous forme de « lettres-enveloppes » à l'ensemble des locataires concernés ; qu'il y a toutefois quelque incohérence à affirmer que le contenu des mises en demeure n'est pas conforme aux exigences légales et à soutenir qu'on ne les a pas reçues ; que sur le total des sommes dues, le tribunal avait retenu que la mise en demeure du 29 janvier 2007 visait l'année 2007 ; que la société Efidis a rappelé quelle était la procédure en la matière ; que la lettre expédiée fin décembre ou début janvier demande communication de l'avis d'imposition adressé par les services fiscaux au mois d'août de l'année écoulée ; qu'il est effectivement évident que la mise en demeure du 29 janvier 2007 ne pouvait concerner que les revenus de l'année en cours ; qu'il y a donc lieu de reformer le jugement sur ce point et condamner les époux X... au paiement du surloyer pour l'année 2006 ; qu'il y a donc lieu de fixer la créance de la société Efidis à la somme de 45.328,68 € au titre des surloyers ; qu'il est demandé une somme de 11.994,41 € au titre des loyers ; que compte tenu de l'indexation prévue le montant des loyers a été estimé à la somme de 7.202,64 € que la cour retiendra ; que le montant des sommes dues par les époux X... s'élève donc à la somme totale de 45.328,68 € + 7.202,64 €, soit 52.531,32 € ; qu'il y a donc lieu de les condamner au paiement de cette somme avec intérêts de droit à compter de l'assignation introductive d'instance ;
1°) ALORS QUE l'objet de la mise en demeure visée à l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation étant de déterminer le montant de supplément de loyer dont les locataires seront redevables en sus du loyer principal et des charges locatives initialement convenus, en cas de dépassement du plafond de ressources, au regard des documents et renseignements devant être fournis par ces derniers conformément à ladite mise en demeure, il appartient au bailleur de la notifier à chacun des époux cotitulaires du bail, et solidaires du paiement de l'éventuel supplément de loyer à échoir, afin qu'ils soient tous deux en mesure d'y répondre ; qu'en relevant néanmoins, pour juger régulières les mises en demeure adressées à M. X... seulement, à l'exclusion de son épouse pourtant cotitulaire du bail, étaient régulières, qu'elles ne visaient que le supplément de loyer de solidarité et qu'adressées à l'un quelconque des deux époux débiteurs solidaires du loyer, elles étaient valables au regard de leur objectif, à savoir réunir les documents permettant de calculer le montant du surloyer, la cour a violé les dispositions des articles 1751 et 220 du code civil, ensemble l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation ;
2°) ALORS, de plus, QUE dans leurs conclusions d'appel, les époux X... faisaient valoir, à titre principal, que la société Efidis ne rapportait pas la preuve qu'elle leur avait adressé des mises en demeure pour les années 2006 à 2011, celles versées aux débats ne leur ayant pas été adressées, et à titre subsidiaire, ils soulignaient que, si les mises en demeure adressées pour les années 2007 et 2009 à 2011 étaient jugées probantes comme leur ayant été adressées, celles versées aux débats pour les années 2009 à 2011 ne répondaient pas en tout état de cause aux exigences légales, dans la mesure où elles ne reproduisaient pas l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation ; que dès lors, en énonçant, pour rejeter le moyen des époux X... tiré du caractère non probant des mises en demeure produites par la société Efidis, qu'il existait quelque incohérence à affirmer que le contenu des mises en demeure n'était pas conforme aux exigences légales et à soutenir qu'ils ne les avaient pas reçues, la cour d'appel a dénaturé les conclusions des époux X..., méconnu les termes du litige et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, en tout état de cause, QUE dans leurs conclusions d'appel (pages 7 et 8), les époux X... soutenaient que la société Efidis ne rapportait pas la preuve qu'elle leur avait adressé des mises en demeure pour les années 2006 à 2011, celles versées aux débats ne leur ayant pas été adressées, de sorte que la procédure en paiement de surloyer était irrégulière ; qu'en se bornant, pour rejeter leur demande, à se fonder sur l'incohérence qu'il y a à affirmer que le contenu des mises en demeure n'est pas conforme aux exigences légales et à soutenir qu'ils ne les ont pas reçues, la cour n'a pas répondu au moyen précité tiré du caractère non probant des mises en demeure produites et de l'irrégularité de la procédure en paiement de surloyer et a ainsi violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS, enfin, QUE l'exigibilité d'un supplément de loyer de solidarité au titre d'une année civile est subordonnée à l'envoi d'une mise en demeure de communiquer les avis d'imposition à l'impôt sur le revenu et les renseignements concernant l'ensemble des personnes vivant au foyer permettant de calculer l'importance du dépassement éventuel du plafond de ressources, déterminé au cours de l'année civile en fonction des ressources de ces dernières afférentes à la pénultième année civile, et de déterminer ainsi si le locataire est redevable du supplément de loyer de solidarité au titre de ladite année civile ; qu'en se bornant, pour condamner les époux X... au paiement d'un surloyer au titre de l'année 2006, à se fonder sur la circonstance inopérante qu'il était évident que la mise en demeure du 29 janvier 2007 ne pouvait concerner les revenus de l'année en cours, soit ceux de 2007, sans vérifier, comme elle y était invitée, si cette mise en demeure n'avait pas pour objet de déterminer si le locataire était redevable d'un supplément de loyer au titre de l'année 2007 et non pas de l'année 2006, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 441-3, L. 441-9 et R. 441-23 du code de la construction et de l'habitation.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

M. et Mme X... font grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du bail, d'avoir dit qu'ils devraient quitter les lieux et les rendre libres de toute occupation et de les avoir condamnés à payer à la société Efidis une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en cas de non-résiliation du bail ;
AUX MOTIFS QU' il n'est pas contesté que les loyers n'ont pas été payés sur une très longue période puisqu'ils ont même été recalculés par les époux X... ; que la dette étant très importante, le tribunal en avait déduit à juste titre un manquement grave des locataires à leur obligation et avait prononcé la résiliation du bail, que la société Efidis avait demandé l'expulsion des époux X... et le versement d'une indemnité d'occupation ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande, dès lors que la résiliation judiciaire a été prononcée et que la dette des époux X... est très importante ;
ALORS QUE la cassation d'un chef de dispositif entraîne par voie de conséquence l'annulation de toute autre disposition qui entretient avec lui un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen concernant la condamnation au paiement des sommes réclamées par le bailleur au titre de loyers et surloyers entraînera donc l'annulation par voie de conséquence du chef de dispositif ayant prononcé la résiliation judiciaire du bail pour défaut de paiement des loyers au regard de l'importance de la dette en résultant, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

Moyen produit au pourvoi incident, par la SCP Levis, avocat aux Conseils pour la société Efidis
Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR réformé le jugement et condamné les époux X... à payer à la société Efidis la somme de 52.531,32 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation introductive d'instance ;
AUX MOTIFS QUE « il est demandé une somme de 11.994,41 € au titre des loyers. Le conseil des époux X... a longuement développé une argumentation concernant cette dette de loyer. Ont été repris les termes du premier bail de 1977, puis ceux d'un protocole d'accord du 29 juillet 1999 auquel était annexé un avenant. Compte tenu de l'indexation prévue pour le montant des loyers a été estimé à la somme de 7.202,64 € que la cour reteindra » ; que « le montant des sommes dues par les époux X... s'élève donc à la somme totale de 45.328,68 € + 7.202,64 €, soit 52.531,32 €. Il y a donc lieu de les condamner au paiement de cette somme avec intérêts de droit à compter de l'assignation introductive d'instance » ;
1/ALORS QUE lorsque les travaux de remise en état d'un immeuble sont entrepris et sont justifiés par des considérations de salubrité, de sécurité ou de mise aux normes minimales d'habitabilité et qu'une convention est conclue entre l'Etat et le propriétaire de l'immeuble, les dispositions de cette convention s'appliquent de plein droit à compter de l'achèvement des travaux à tous les locataires ; que cette convention qui touche à l'ordre public fait obstacle au maintien, une fois les travaux réalisés, des conventions antérieurement conclues entre le bailleur et les locataires ; qu'en se référant aux baux antérieurement conclus entre les époux X... et la société Bailleresse pour calculer le montant du loyer proprement dit dû à compter de mai 2006, alors qu'elle avait pourtant constaté qu'une convention avait été conclue entre l'Etat et la société bailleresse, la cour d'appel a violé l'article L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation ;
2/ ALORS QUE la société Efidis, dans ses conclusions, faisait valoir qu'en raison du conventionnement de l'immeuble intervenu en février 2003, le calcul des loyers simples dûs à compter de 2006 devait se faire en prenant en compte d'office la nouvelle grille de calcul résultant de la convention conclue entre l'Etat et la société bailleresse, à l'exclusion des baux antérieurs, et que par conséquent le montant des loyers dûs à compter de mai 2006 s'élevait à la somme de 11.994,41 euros ; qu'en délaissant de telles conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-14403
Date de la décision : 12/03/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

HABITATION A LOYER MODERE - Bail - Prix - Aide personnalisée au logement - Convention entre l'Etat et les sociétés d'HLM - Fixation du montant des loyers impayés - Date d'application du nouveau loyer résultant de l'accord de conventionnement - Détermination

HABITATION A LOYER MODERE - Bail - Prix - Aide personnalisée au logement - Convention entre l'Etat et les sociétés d'HLM - Fixation du montant des loyers impayés - Prise en compte du nouveau loyer résultant de l'accord de conventionnement - Point de départ - Achèvement des travaux

Viole l'article L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation une cour d'appel qui, pour fixer le montant des loyers impayés, ne tient pas compte du nouveau loyer résultant de l'accord de conventionnement applicable dès l'achèvement des travaux d'amélioration


Références :

Sur le numéro 1 : article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation

article 1751 du code civil
Sur le numéro 2 : articles L. 353-2, L. 353-7 et L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 19 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 12 mar. 2014, pourvoi n°13-14403, Bull. civ. 2014, III, n° 36
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, III, n° 36

Composition du Tribunal
Président : M. Terrier
Avocat général : Mme Guilguet-Pauthe
Rapporteur ?: M. Parneix
Avocat(s) : SCP Marc Lévis, SCP Potier de la Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.14403
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