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04/03/2014 | FRANCE | N°13-10092

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 mars 2014, 13-10092


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 24 septembre 2012), que l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM), qui avait émis des titres de perception de cotisations sociales rendus exécutoires à l'encontre de la société Armement et mareyage de Guyane (société ARMAG), a été autorisé, par ordonnance sur requête du président d'un tribunal mixte de commerce du 12 août 2003, à saisir à titre conservatoire les navires «Cayenne-Géraldine» et «Yutaku-Manu 35» app

artenant à cet armement ; que la signification de l'ordonnance et les saisies on...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 24 septembre 2012), que l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM), qui avait émis des titres de perception de cotisations sociales rendus exécutoires à l'encontre de la société Armement et mareyage de Guyane (société ARMAG), a été autorisé, par ordonnance sur requête du président d'un tribunal mixte de commerce du 12 août 2003, à saisir à titre conservatoire les navires «Cayenne-Géraldine» et «Yutaku-Manu 35» appartenant à cet armement ; que la signification de l'ordonnance et les saisies ont été effectuées le jour même ; que la société ARMAG a contesté la régularité de la procédure de saisie conservatoire en faisant valoir que les titres exécutoires ne lui avaient pas été notifiés au préalable ;
Attendu que la société ARMAG fait grief à l'arrêt d'avoir validé les saisies, alors, selon le moyen :
1°/ que les titres exécutoires émis par une personne morale de droit public ne peuvent donner lieu à une mesure d'exécution forcée dès lors qu'ils n'ont pas été préalablement notifiés au débiteur, la charge de prouver cette notification préalable pesant sur le créancier ; que pour décider que l'ENIM avait « pleinement respecté les dispositions de la loi du 9 juillet 1992 » et que la procédure de saisie conservatoire était, au regard de cette exigence de notification préalable, « parfaitement régulière », la cour d'appel s'est bornée à relever que « les titres justifiant la saisie » avaient « été joints à la requête présentée le 12 août 2003 et notifiée le même jour » à la société ARMAG ; qu'en se fondant sur ces motifs impropres à établir que l'ENIM justifiait avoir notifié ses titres exécutoires antérieurement aux saisies opérées sur les deux navires de la société ARMAG, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des article 98 de la loi du 31 décembre 1992, 25 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 et 215 du décret du 31 juillet 1992 ;
2°/ que seul un commandement de payer, premier acte de la poursuite après la tentative obligatoire de recouvrement amiable, vaut notification du titre exécutoire et fait courir les délais d'opposition ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer régulière la saisie des navires « Cayenne-Géraldine » et « Yutaka-Maru 35 », que les «titres justifiant la saisie » avaient « été joints à la requête présentée le 12 août 2003 et notifiée le même jour » à la société ARMAG et « qu'à défaut de recours amiable ou contentieux » de cette dernière dans le délai de deux mois devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale, la créance et le titre étaient « devenus définitifs », sans rechercher ou vérifier, ainsi qu'elle y était expressément invitée par la société ARMAG, si ce délai d'opposition de deux mois avait pu commencer à courir en l'absence de commandement de payer préalablement adressé au débiteur saisi, la cour d'appel n'a toujours pas donné de base légale à son arrêt au regard des article 98 de la loi du 31 décembre 1992, 25 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 et 215 du décret du 31 juillet 1992 ;
Mais attendu que la notification préalable du titre exécutoire n'est exigée que pour la saisie-exécution d'un navire, non pour sa saisie conservatoire, laquelle n'est pas une mesure d'exécution forcée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Armement et mareyage de Guyane aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à l'Établissement national des invalides de la marine la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Armement et mareyage de Guyane.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que les saisies conservatoires des deux navires « Cayenne-Géraldine » et « Yutaka-Maru 35 » sont légales et justifiées et d'avoir débouté la société ARMAG de toutes ses demandes dirigées contre l'ENIM;
Aux motifs que « sur la légalité de la saisie conservatoire, l'ENIM a présenté sa requête devant le Président du Tribunal mixte de commerce le 12 août 2003, aux fins de saisie conservatoire de navires, pour sûreté et conservation de sa créance provisoirement évaluée à la somme de 381.079,53 euros, en vertu de titres de perception exécutoires. Conformément à l'article 98 de la loi du 31 décembre 1992, l'ENIM, établissement public doté d'un comptable public, gérant le régime spécial de la sécurité sociale des navires, émet des titres de perception de cotisations qui constituent des titres exécutoires. Par ordonnance rendue le 12 août 2003, le Président du tribunal a autorisé la saisie conservatoire sollicitée. Procès-Verbal de saisie a été dressé le 12/08/03 et signification de l'ordonnance a été faite à la société ARMAG le même jour. La saisie de navires est régie par la loi du 9 juillet 1991 et par le décret du 27 octobre 1967, ces dispositions exigent que le créancier invoque, à tout le moins, une créance fondée en son principe ; une saisie conservatoire peut au surplus être pratiquée sur la base d'un titre exécutoire et dans ce cas, conformément à l'article 215 du décret du 31 juillet 1992, le créancier est dispensé d'introduire une procédure à l'effet d'obtenir un tel titre exécutoire. La saisine du juge pour autorisation préalable n'est certes pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut de l'article 68 de la loi du 9 juillet 1991 mais tout créancier dans ce cas peut recourir à une telle autorisation et aucune irrégularité ne peut être utilement invoquée. Du fait de la possession d'un titre exécutoire le créancier est bien évidemment dispensé de l'exigence d'engager une procédure à fin d'obtenir un tel titre, comme le précise l'article 215 du décret du 31 juillet 1992. En considération de ces éléments il y a lieu de constater que l'ENIM a pleinement respecté les dispositions de la loi du 9 juillet 1992 et que la procédure de saisie conservatoire des navires est parfaitement régulière ; que sur les droits de créance invoqués, comme exposé ci en avant, la saisie conservatoire a été pratiquée en vertu des titres exécutoires de plein droit, conformément à l'article 98 de la loi du 21 décembre 1992. Les titres justifiant la saisie ont été joints à la requête présentée le 12 août 2003 et notifiée le même jour, et la société ARMAG dans son bordereau de communication de pièces du 13 mars 2009 produit copie de l'acte du 12 août 2003 ; elle ne peut donc invoquer utilement la méconnaissance desdits titres. Malgré la notification des titres exécutoires par procès-verbal du 12 août 2003, la société ARMAG n'a pas contesté, dans le délai de 2 mois, la créance de l'ENIM devant le Tribunal des Affaires de Sécurité sociale comme les titres rappellent expressément ce droit. A défaut de recours amiable ou contentieux, force est de relever que la créance et le titre sont devenus définitifs. La contestation portant sur les droits de créance de l'ENIM apparaît donc infondée et sera rejetée. Par la même, les observations de la SA ARMAG qui invoque le bénéfice de la loi d'orientation pour l'Outre-Mer et les avantages et abattements pouvant lui être accordés sont désormais inopérantes, ladite société n'ayant pas contesté le quantum ou le bien fondé des titres dans les formes et les délais légaux » ;
Alors, d'une part, que les titres exécutoires émis par une personne morale de droit public ne peuvent donner lieu à une mesure d'exécution forcée dès lors qu'ils n'ont pas été préalablement notifiés au débiteur, la charge de prouver cette notification préalable pesant sur le créancier ; qu'en l'espèce, pour décider que l'ENIM avait « pleinement respecté les dispositions de la loi du 9 juillet 1992 » et que la procédure de saisie conservatoire était, au regard de cette exigence de notification préalable, « parfaitement régulière », la Cour d'appel s'est bornée à relever que « les titres justifiant la saisie » avaient « été joints à la requête présentée le 12 août 2003 et notifiée le même jour » à la société ARMAG ; qu'en se fondant sur ces motifs impropres à établir que l'ENIM justifiait avoir notifié ses titres exécutoires antérieurement aux saisies opérées sur les deux navires de la société ARMAG, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des article 98 de la loi du 31 décembre 1992, 25 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 et 215 du décret du 31 juillet 1992 ;
Alors, d'autre part, et en toute hypothèse, que seul un commandement de payer, premier acte de la poursuite après la tentative obligatoire de recouvrement amiable, vaut notification du titre exécutoire et fait courir les délais d'opposition ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer régulière la saisie des navires « Cayenne-Géraldine » et « Yutaka-Maru 35 », que les « titres justifiant la saisie » avaient « été joints à la requête présentée le 12 août 2003 et notifiée le même jour » à la société ARMAG et « qu'à défaut de recours amiable ou contentieux » de cette dernière dans le délai de deux mois devant le Tribunal des affaires de la sécurité sociale, la créance et le titre étaient « devenus définitifs », sans rechercher ou vérifier, ainsi qu'elle y était expressément invitée par la société ARMAG, si ce délai d'opposition de deux mois avait pu commencer à courir en l'absence de commandement de payer préalablement adressé au débiteur saisi, la Cour d'appel n'a toujours pas donné de base légale à son arrêt au regard des article 98 de la loi du 31 décembre 1992 , 25 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 et 215 du décret du 31 juillet 1992.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-10092
Date de la décision : 04/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

DROIT MARITIME - Navire - Saisie - Saisie-exécution - Conditions - Notification préalable du titre exécutoire - Nécessité

DROIT MARITIME - Navire - Saisie - Saisie conservatoire - Conditions - Notification préalable du titre exécutoire (non) DROIT MARITIME - Navire - Saisie - Saisie conservatoire - Nature - Mesure d'exécution forcée (non)

La notification préalable du titre exécutoire n'est exigée que pour la saisie-exécution d'un navire, non pour sa saisie conservatoire, laquelle n'est pas une mesure d'exécution forcée


Références :

article 98 de la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 de finances rectificative pour 1992

article 25 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique

Décision attaquée : Cour d'appel de Cayenne, 24 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 mar. 2014, pourvoi n°13-10092, Bull. civ. 2014, IV, n° 42
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, IV, n° 42

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Rémery
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10092
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