La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/2014 | FRANCE | N°12-16938

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 février 2014, 12-16938


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 février 2012), que la société Marine Geosystem (société Marine) a remis en garantie du paiement d'un matériel livré par la société CMC industries (société CMC) deux lettres de change qu'elle a acceptées et qui ont été escomptées par la Société générale ( la banque) ; qu'une saisie conservatoire a été ordonnée le 12 octobre 2006, puis cantonnée au montant des traites par ordonnance du 27 octobre 2006 ; que les traites ayant été rejetées, la soci

été Marine a été condamnée à paiement par ordonnance du 5 décembre 2006 ; que ces ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 février 2012), que la société Marine Geosystem (société Marine) a remis en garantie du paiement d'un matériel livré par la société CMC industries (société CMC) deux lettres de change qu'elle a acceptées et qui ont été escomptées par la Société générale ( la banque) ; qu'une saisie conservatoire a été ordonnée le 12 octobre 2006, puis cantonnée au montant des traites par ordonnance du 27 octobre 2006 ; que les traites ayant été rejetées, la société Marine a été condamnée à paiement par ordonnance du 5 décembre 2006 ; que ces deux dernières décisions ont été rétractées par une ordonnance du 21 décembre 2006 laquelle a ordonné en outre la consignation du montant des traites entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats des Hauts-de-Seine (le bâtonnier) en qualité de séquestre ; que la consignation a été effectuée le 19 janvier 2007 ; que la société Marine ayant été mise en liquidation judiciaire le 9 octobre 2007, la date de cessation des paiements a été reportée au 8 décembre 2006 par jugement du 3 décembre 2008 ; que le liquidateur a assigné la banque et le bâtonnier en nullité de la consignation et subsidiairement, a demandé qu'elle soit qualifiée de mesure conservatoire et déclarée sans effet ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en annulation de la consignation, fondée sur l'article L. 632-1, I, 5° et 7°, du code de commerce, et d'avoir ordonné au bâtonnier de se libérer des sommes de 134 884,88 et 90 277,67 euros entre les mains de la banque, alors, selon le moyen, que la consignation effectuée en période suspecte est nulle, à défaut d'une décision de justice ayant acquis force de chose jugée avant la cessation des paiements ; qu'en décidant, au contraire, que la consignation effectuée en période suspecte le 19 janvier 2007, en exécution de l'ordonnance de référé du 21 décembre 2006 ayant acquis force de chose jugée postérieurement à la date de la cessation des paiements fixée au 8 décembre 2006, était valable, la cour d'appel a violé l'article L. 632-1, 5°, du code de commerce ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 632-1, I, 5°, du code de commerce, qu'il est fait exception à la nullité de la consignation effectuée en période suspecte si elle a été ordonnée judiciairement par une décision ayant acquis force de chose jugée antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ; qu'ayant constaté que la consignation litigieuse avait été effectuée le 19 janvier 2007 en exécution d'une ordonnance de référé signifiée le 3 janvier 2007, passée en force de chose jugée antérieurement au jugement de liquidation judiciaire du 9 octobre 2007, la cour d'appel en a déduit à bon droit que cette consignation ne pouvait être annulée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le liquidateur fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que toute mesure conservatoire est nulle lorsqu'elle est intervenue depuis la date de cessation des paiements, à moins que l'inscription ou l'acte de saisie ne soit antérieur à cette date ; qu'une mesure conservatoire est une mesure prise pour la sauvegarde d'un droit ou d'une chose ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la consignation de la somme de 225 162,25 euros avait été ordonnée « pour préserver les droits éventuels de la Société générale », ce dont il résultait que la consignation constituait une mesure conservatoire ; qu'en décidant néanmoins que la consignation ne pouvait être annulée sur le fondement de l'article L. 632-1, I ,7°, du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que les ordonnances rendues les 12 et 27 octobre 2006 avaient été rétractées, ce dont il résultait que la saisie conservatoire avait perdu tout fondement et n'avait pu être remplacée par une autre mesure, puis énoncé que la consignation des sommes avait été ordonnée judiciairement à titre de garantie par application des dispositions de l'article 2350 du code civil, la cour d'appel en a exactement déduit que la nullité de la consignation effectuée pendant la période suspecte était nécessairement régie par le 5° du I de l'article L. 632-1 du code de commerce, et que le 7° de ce même article, qui régit la nullité de la saisie conservatoire, ne lui était pas applicable; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bécheret-Thierry-Senechal-Gorrias, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Marine Geosystem, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour la société Bécheret - Thierry - Senechal - Gorrias
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société BTSG, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Marine Géosystem, de sa demande en annulation de la consignation de la somme de 225.162,25 euros entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats des Hauts de Seine, fondée sur l'article L. 632-1, 5° et 7°du code de commerce, et d'avoir ordonné au bâtonnier de se libérer des sommes de 134.884,88 et 90.277,67 euros entre les mains de la Société Générale ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 632-1, 5° du code de commerce dispose que « sont nuls, lorsqu'ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements, les actes suivants : ¿ 5° tout dépôt et toute consignation de sommes effectués en application de l'article 2350 du code civil, à défaut d'une décision de justice ayant acquis force de chose jugée » ; que la société BTSG ès qualités soutient qu'il faut que la décision de justice ait acquis force de chose jugée avant la date de cessation des paiements et non avant la date du jugement d'ouverture ; que la consignation opérée avant la date de cessation des paiements ne peut être annulée ; que seule la consignation opérée en période suspecte est nulle par application de l'article L. 632-1, 5° ; qu'il est fait exception à cette nullité si la consignation a été ordonnée judiciairement par une décision passée en force de chose jugée ; que cette exception perdrait l'essentiel de sa portée si la décision de justice ordonnant la consignation devait avoir acquis force de chose jugée avant la date de cessation des paiements ; que la consignation ne peut être annulée lorsqu'elle a été ordonnée par une décision de justice ayant acquis force de chose jugée avant le jugement d'ouverture ; qu'en l'espèce, la consignation, le 19 janvier 2007, par la société Marine Géosystem de la somme de 225.162,55 euros entre les mains du bâtonnier a été ordonnée par ordonnance de référé du 21 décembre 2006, signifiée le janvier 2007, ayant acquis force de chose jugée antérieurement au jugement de liquidation judiciaire rendu le 9 octobre 2007 ; qu'il convient en conséquence de débouter la société BTSG de sa demande en annulation de cette consignation ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'ordonnance de référé a force de chose jugée dès son prononcé et en tout cas à l'expiration du délai d'appel de 15 jours ; l'ordonnance ayant ordonnée le séquestre a été rendue le 21 décembre 2006 et a été exécutée le 19 janvier 2007 sans qu¿appel ait été interjeté, ladite ordonnance a donc acquis force de chose jugée ; qu'en conséquence, l'article L. 632-1, 5° du code de commerce n'est pas applicable ;
ALORS QUE la consignation effectuée en période suspecte est nulle, à défaut d'une décision de justice ayant acquis force de chose jugée avant la cessation des paiements ; qu'en décidant, au contraire, que la consignation effectuée en période suspecte le 19 janvier 2007, en exécution de l'ordonnance de référé du 21 décembre 2006 ayant acquis force de chose jugée postérieurement à la date de la cessation des paiements fixée au 8 décembre 2006, était valable, la cour d'appel a violé l'article L. 632-1, 5° du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire) :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société BTSG ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Marine Géosystem de sa demande en annulation de la consignation de la somme de 225.162,25 euros entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats des Hauts de Seine, fondée sur l'article L. 632-1, 5° et 7° du code de commerce, et d'avoir ordonné au bâtonnier de se libérer des sommes de 134.884,88 et 90.277,67 euros entre les mains de la Société Générale ;
AUX MOTIFS QUE la saisie conservatoire a été demandée par la société CMC Industries ; que la Société Générale est étrangère aux ordonnances rendues les 12 octobre, 27 octobre et 5 décembre 2006, concernant cette saisie conservatoire ; que la société Marine Géosystem ayant appris que les lettres de change fondant l'autorisation de procéder à la saisie conservatoire en faveur de la société CMC Industries avaient été escomptées par la Société Générale, a demandé la rétractation de ces ordonnances ; que dans l'ordonnance du 21 décembre 2006, le juge des référés a rétracté les ordonnances au motif que la société CMC Industries n'était plus créancière de la société Marine Géosystem au titre des lettres de change ; que la saisie conservatoire a perdu tout fondement et n'a pu être remplacée par une autre mesure ; que la consignation entre les mains du bâtonnier désigné comme séquestre ne s'est donc pas substituée à la saisie conservatoire ; que la consignation a été ordonnée à titre de garantie, « pour préserver les droits éventuels de la Société Générale », par application des dispositions de l'article 2350 du code civil ; que la nullité de la consignation effectuée pendant la période suspecte est régie par le cas n°5 de l'article L. 632-1 ; que le cas n°7 qui régit la nullité de la saisie conservatoire ne lui est pas applicable ; que la demande en annulation de la consignation sur le fondement de l'article L. 632-1, 7° doit être rejetée ;
ALORS QUE toute mesure conservatoire est nulle lorsqu'elle est intervenue depuis la date de cessation des paiements, à moins que l'inscription ou l'acte de saisie ne soit antérieur à cette date ; qu'une mesure conservatoire est une mesure prise pour la sauvegarde d'un droit ou d'une chose ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la consignation de la somme de 225.162,25 euros avait été ordonnée « pour préserver les droits éventuels de la Société Générale », ce dont il résultait que la consignation constituait une mesure conservatoire ; qu'en décidant néanmoins que la consignation ne pouvait être annulée sur le fondement de l'article L. 632-1, 7° du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Nullité des actes de la période suspecte - Nullité de droit - Dépôt et consignation - Exclusion de nullité - Décision judiciaire ordonnant la consignation - Force de chose jugée - Acquisition avant le jugement d'ouverture

La consignation effectuée en période suspecte n'est pas nulle si elle a été ordonnée judiciairement par une décision ayant acquis force de chose jugée avant le jugement d'ouverture de la procédure collective


Références :

article L. 632-1, I, 5°, du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 février 2012


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 11 fév. 2014, pourvoi n°12-16938, Bull. civ. 2014, IV, n° 36
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, IV, n° 36
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Vallansan
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 11/02/2014
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12-16938
Numéro NOR : JURITEXT000028604333 ?
Numéro d'affaire : 12-16938
Numéro de décision : 41400196
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2014-02-11;12.16938 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award