LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Agence Pascal Mayer (la société APM) et la société Mutuelle des architectes français (la MAF) ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juin 2012), que M. X... a confié la réfection d'une verrière, située sur la terrasse de son appartement et partiellement détruite par un incendie, à la société Aluminium vérandas Plaisir (la société AVP), aujourd'hui en redressement judiciaire, assurée auprès de la société Axa France IARD, sous la maîtrise d'¿uvre de la société APM, assurée auprès de la MAF ; qu'à la suite d'un orage, l'appartement a subi un important dégât des eaux ; que M. X... a, après expertise, assigné les constructeurs et leurs assureurs en indemnisation ;
Attendu que pour débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient qu'en commandant à l'entreprise AVP des travaux a minima pour la réparation de la verrière alors qu'il avait été dûment informé de l'inefficacité dans le temps d'une reprise partielle et de la nécessité de la remplacer en totalité, le maître de l'ouvrage a accepté le risque qui est intervenu exonérant tant l'entreprise que l'architecte de leur responsabilité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les désordres, apparus peu de temps après les travaux, n'étaient pas la conséquence du choix du maître d'ouvrage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes contre les sociétés AVP et Axa France IARD, l'arrêt rendu le 1er juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne les sociétés AVP et Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés AVP et Axa France IARD à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « le 31 juillet 2003, la SARL APV établissait un devis pour la réfection totale de la verrière pour la somme de 71.034,21 ¿ TTC ; que dans un courrier accompagnant le devis, la SARL APV expliquait son choix du remplacement total de la verrière pour les trois raisons suivantes : - les chaleurs élevées dues à l'incendie ont brûlé les colles nécessaires à l'étanchéité de tous les assemblages des profilés aluminium, une reprise superficielle ne sera pas efficace dans le temps, - les produits utilisés aujourd'hui pour la réalisation de verrière ne sont pas toujours compatibles avec ceux utilisés il y a dix ans, - de plus le remplacement total de l'ouvrage vous permettra de bénéficier de notre garantie décennale ; que ce premier devis n'a pas été accepté par Monsieur X... ; que la société DUTEMPLE a établi à la demande de la SARL MAYER un devis en décembre 2003 pour le remplacement total de la verrière qui n'a pas été agréé ; que la nécessité de procéder au remplacement complet de la verrière et non à sa seule réparation est donc confirmée par deux professionnels ; que la SARL AVP à la demande de Monsieur X... établit un second devis le 3 février 2004 qui n'envisageait qu'une réparation partielle de la verrière pour la somme de 28.770,91 ¿ TTC ; que les travaux ont été réalisés sur la base de ce devis et réceptionnés le 24 janvier 2005 avec quelques réserves qui ont été levées le 21 mars ; qu'à la suite d'un important orage en juin 2005, l'appartement était victime de graves infiltrations par la verrière ; que l'expert Y... a relevé que les origines des désordres sont : défauts d'étanchéité des tôleries en périphérie de l'ouvrage et en raccord avec les éléments maçonnés, nonconformité dans l'application de ces joints au regard des spécifications SNJF relatives à la mise en oeuvre des joints souples, défauts d'ajustage ou de raccords de certains joints caoutchouc en pareclosage extérieur des vitrages, bourrage des fonds de feuillures au silicone, etc, par ailleurs, subsistent de sérieuses incertitudes quant à l'efficacité et la tenue des joints en caoutchouc en étanchéité intérieure sous vitrage alors qu'ils constituent des éléments essentiels dans l'étanchéité de la verrière ; que la SARL AVP soutient que Monsieur X... a accepté consciemment les risques en ne faisant réaliser qu'une reprise partielle de la verrière ; que la SARL MAYER, architecte, sollicite sa mise hors de cause puisque le sinistre trouve son origine causale uniquement dans les détails de l'exécution mal réalisée dans le périmètre du marché de AVP ; qu'il résulte de la chronologie rappelée supra que les époux X... ont négocié et obtenu de leur assurance GENERALI en juin 2004 la somme de 81.313 ¿ versée le 20 juin pour la réfection totale de la verrière ; qu'ils disposaient donc des fonds nécessaires pour entreprendre les travaux tels que décrits par la SARL AVP dans son premier devis de juillet 2003, que avertis de la nécessité de procéder au remplacement complet de la verrière et non pas à une simple reprise partielle qui selon le courrier d'accompagnement du devis de juillet 2003 serait inefficace à long terme, ils ont commandés postérieurement au versement de l'indemnité selon devis du 25 juin 2004 des travaux de reprise partielle ; qu'il ne saurait être fait grief à la SARL AVP de n'avoir pas réitéré son avertissement quant aux conséquences du choix effectué par le maître d'ouvrage dès lors qu'elle l'avait déjà formulé pour justifier la reprise totale en juillet 2003 ; qu'en outre Monsieur X... a négocié avec son assureur afin d'obtenir une indemnisation lui permettant de financer la reprise totale et non une réparation partielle ; que les travaux réceptionnés le 24 janvier 2005 pour la somme de 28.125,68 ¿ TTC ont ainsi permis aux époux X... d'économiser sur le montant de l'indemnité versée préalablement à la réalisation des travaux la somme de 53.188 ¿ ; que les travaux réalisés par AVP achevés en janvier 2005 ont donné satisfaction jusqu'au mois de juin 2005 ; qu'en commandant à l'entreprise AVP des travaux a minima pour la réparation de sa verrière alors qu'il avait été dûment informé de la nécessité de la remplacer en totalité et qu'en outre il disposait des fonds versés par son assureur, le maître d'ouvrage a accepté le risque qui est intervenu exonérant tant l'entreprise que l'architecte de leur responsabilité » (arrêt pp. 3 et 4) ;
1/ ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que la cour d'appel a constaté que les dommages avaient ici pour origine des défauts d'étanchéité, des non-conformité dans l'application des joints au regard des spécifications techniques, des défauts d'ajustage ou de raccords de certains joints, et des bourrage des fonds de feuillures au silicone, ce dont il résultait que les dommages avaient pour cause exclusive une exécution défectueuse de son marché par l'entrepreneur, et non le choix du maître d'ouvrage de procéder à une réfection partielle de la verrière ; qu'en affirmant néanmoins que s'était réalisé le risque qu'une reprise partielle de la verrière ne soit pas efficace dans le temps, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître de l'ouvrage, des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère ; que la cour d'appel a constaté que les dommages avaient pour cause des défauts d'étanchéité, des non-conformité dans l'application des joints au regard des spécifications techniques, des défauts d'ajustage ou de raccords de certains joints, et des bourrage des fonds de feuillures au silicone, ce dont il résultait qu'ils avaient pour cause exclusive une exécution défectueuse de son marché par l'entrepreneur ; qu'en exonérant néanmoins ce dernier de sa responsabilité, au prétexte que le maître d'ouvrage avait accepté un devis correspondant à une reprise partielle de la verrière, et non une reprise totale préconisée par le constructeur, quand il résultait de ses constatations que les dommages n'étaient pas la conséquence du choix technique du maître d'ouvrage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1792 du code civil ;
3/ ALORS QUE la circonstance que le maître d'ouvrage n'ait utilisé, pour la réalisation des travaux de réparation, qu'une partie de l'indemnité d'assurance, qui lui avait été versée en réparation du préjudice subi lors d'un sinistre, ne constitue pas une cause étrangère de nature à exonérer le constructeur de sa responsabilité décennale à son égard ; qu'en relevant, pour débouter Monsieur X... de son action en responsabilité décennale contre la société ALUMINIUM VERANDA PLAISIR, que le maître d'ouvrage n'avait pas utilisé l'intégralité de l'indemnité d'assurance qui lui avait été versée en réparation de son sinistre, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et n'a pas caractérisé une cause étrangère susceptible d'exonérer l'entrepreneur ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article 1792 du code civil ;
4/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE si le fait que le maître de l'ouvrage prenne le risque de réaliser les travaux, au sujet desquels le constructeur aurait émis des réserves, peut exonérer cet entrepreneur de tout ou partie de sa responsabilité décennale, ce n'est qu'à la condition que le maître d'ouvrage ait été dûment averti par des réserves précises, explicites et non équivoques des conséquences prévisibles de son choix ; qu'en se bornant à relever, pour décider que Monsieur X... avait accepté le risque de réaliser une réfection partielle de la verrière et exonérer l'entrepreneur de toute responsabilité, que le courrier de la société ALUMINIUM VERANDA PLAISIR accompagnant son devis de juillet 2003 avait averti le maître d'ouvrage de la seule « nécessité de procéder au remplacement complet de la verrière », et non une simple reprise partielle « qui aurait été inefficace à long terme », sans rechercher si le maître d'ouvrage avait, par ces seules indications générales et dénuées de toute précision, notamment sur la nature des désordres encourus, et la probabilité de leur survenance, été dûment averti par des réserves circonstanciées des conséquences de son choix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.