LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé le 19 mars 1992 par la Fédération du crédit mutuel méditerranéen, affecté en qualité de gérant à la caisse locale de Cannes, a été transféré à compter du 1er janvier 2008 à la Caisse régionale du crédit mutuel méditerranéen prenant la qualité de directeur de caisse ; qu'après des négociations entre les parties pour un départ amiable, il a été conclu une convention le 30 décembre 2009 autorisant le salarié à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 15 novembre 2010 tandis que des divergences subsistantes conduisaient à un engagement irrévocable du salarié à faire valoir ses droits de départ à la retraite à compter du 1er janvier 2011 avec entre-temps une passation des consignes à son successeur et un départ de la caisse au 30 juin 2010 ; que par lettre du 4 février 2010, il a été licencié pour faute grave après mise à pied conservatoire ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 83-1 de la convention collective de la fédération du Crédit mutuel méditerranéen ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, l'indemnité versée au salarié qui fait l'objet d'un licenciement est égale à un demi mois de salaire par semestre de service dans l'entreprise, le total ne pouvant dépasser vingt-quatre mois pour les cadres ;
Attendu que pour condamner la caisse à payer au salarié une indemnité conventionnelle de licenciement de vingt-quatre mois de salaire, l'arrêt retient qu'en février 2010 le salaire mensuel brut du salarié était de 6 078,88 euros ; que la convention du 30 décembre 2009 fait mention d'une indemnité de carrière de quatre mois ce qui correspond selon l'accord de groupe précité à une ancienneté supérieure à trente-cinq ans dont il y a lieu de tenir compte, l'ancienneté dans les autres caisses de crédit mutuel ayant manifestement été reprise ; que c'est à raison que le premier juge a alloué la somme de 145 893,12 euros correspondant au maximum (vingt-quatre mois de salaire) de ce qui peut être alloué conventionnellement, le calcul par semestre aboutissant à une somme bien supérieure ;
Qu'en statuant ainsi sans vérifier l'ancienneté acquise par le salarié dans l'entreprise pour l'application des dispositions conventionnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Cannes du 5 novembre 2010 condamnant la Caisse à payer une indemnité de licenciement de 145 893,12 euros au salarié, l'arrêt rendu le 5 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la société Caisse régionale du crédit mutuel méditerranéen
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la CRCMM à lui payer les sommes de 26.837,16 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 2.683,13 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal, de 145.893,12 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, et de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en réparation des préjudices matériels et du préjudice moral subis, et ordonné la remise des documents légaux conformes aux décisions rendues;
AUX MOTIFS QUE la faute grave étant celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis c'est en revanche à raison que Gérard X..., qui admet avoir accordé les 4 prêts dans le cadre de ses délégations personnelles, qu'il n'a pas outrepassées, soutient que les manquements qui lui sont reprochés, dont la matérialité est avérée au vu du rapport ci-dessus, ne peuvent justifier un licenciement pour faute grave, ni même un licenciement pour une cause réelle et sérieuse dès lors que les éléments fournis aux débats font ressortir que les dossiers avaient été montés intégralement par Monsieur Y..., chargé de clientèle expérimenté, que ces dossiers avaient été adressés par l'apporteur CAFPI conformément à un accord de partenariat signé avec la Caisse au niveau régional et national, que le centre administratif de Nice, chargé du contrôle des dossiers et des relations avec le notaire, n'a lui-même rien vu de suspect et a débloqué les fonds, que le service de contrôle permanent n'a rien relevé non plus, que ces dossiers ont été ratifiés par le comité de crédits local, que l'intéressé ne pouvait pas connaître, lors de l'instruction des dossiers de prêt, les ventes et achats successifs dont ont fait l'objet les biens immobiliers en question, ainsi que leur prix réel, dans la mesure où il s'agit d'éléments qui apparaissent uniquement dans le cadre de l'acte de vente définitif et qu'il ne peut lui être reproché d'avoir ignoré l'état général des biens et leur surface réelle, aucune obligation de procéder à une vérification sur place ne pesant sur le directeur d'un établissement bancaire, le licenciement, prononcé à moins d'une année de la retraite, apparaissant, dans ces circonstances, comme une sanction disproportionnée en considération, d'une ancienneté de 18 ans au sein de la Caisse locale de CANNES et de la CRCMM (35 ans au sein des différentes caisses du Crédit Mutuel) et de l'absence de toute sanction antérieure, observation étant faite que Jean-Pierre Y..., qui a monté les dossiers de prêt, n'a été sanctionné, le 2 mars 2010, que par un blâme, sanction de 1er degré se situant au-dessus de l'avertissement, aux termes de la convention collective précitée ; que, par suite, par ces motifs substitués, c'est en définitive à raison que le premier juge a considéré que le licenciement de Gérard X... était sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE la CRCMM avait fait valoir que le notaire, conscient du danger de l'opération de prêt concernant l'un des biens immobiliers situé à Nice, avait attiré l'attention de Monsieur X... par deux fax successifs sur la différence de consistance du bien (un studio et non un deux pièces) et sur l'absence de garantie, et annexé à l'acte la lettre de Monsieur X... lui donnant néanmoins son accord; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il était ainsi soutenu par un moyen clair et déterminant, assorti d'une offre de preuve constituée par l'échange de fax entre le notaire et Monsieur X..., si Monsieur X... n'était pas passé outre la mise en garde du notaire qui l'avait averti, en sa qualité de directeur de caisse, des anomalies de l'opération, et avait ainsi failli à ses obligations, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1235-2, ensemble L.1234-1 du Code du travail ;
QU'à tout le moins, en ne répondant pas à ce moyen précis et déterminant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS encore QU'il était reproché à Monsieur X... de n'avoir pas vérifié l'identité des emprunteurs ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce grief, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1235-2, ensemble L.1234-1 du Code du travail ;
ET ALORS enfin QUE l'existence de contrôles postérieurs ne saurait exonérer le directeur de la Caisse de son obligation de contrôle ; qu'au contraire, les contrôles ultérieurs s'exercent nécessairement au vu des observations du premier contrôleur, le directeur de la Caisse ; qu'en exonérant Monsieur X... de toute faute en raison de l'absence d'observation des contrôleurs ultérieurs, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié au regard des articles L.1232-1, L.1235-2, ensemble L.1234-1 du Code du travail ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Le moyen fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR condamné la CRCMM à payer à Monsieur X... la somme de 145.893,12 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement
AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article 83-1 de l'accord cadre précité, « Tout salarié faisant l'objet d'un licenciement a droit à une indemnité conventionnelle de licenciement dont le montant est fixé ci-dessous./L'indemnité de licenciement est calculée sur le dernier salaire mensuel de base (hors primes) perçu par le salarié licencié et non sur la moyenne des salaires mensuels qu'il a reçu depuis un certain nombre de mois. Elle est calculée sur le traitement hors treizième mois, sauf en cas de licenciement pour motif économique. Seuls les semestres complets de services entrent en compte pour sa détermination./L'indemnité versée au salarié qui fait l'objet d'un licenciement, quel que soit le motif, est égale à un demi mois de salaire par semestre de service dans l'entreprise./Le total de l'indemnité ainsi calculée ne pourra pas dépasser dix huit mois de salaire pour les employés et les gradés et vingt quatre mois pour les cadres. L'indemnité de licenciement ne dispense pas l'employeur du versement du treizième mois pour l'année en cours au prorata des jours écoulés à la date du licenciement. Dans ce calcul, les journées de vacances et de congés payés entrent en compte comme des journées de travail » ; que l'examen du bulletin de salaire du mois de févier 2010 fait ressortir que le salaire mensuel brut de Gérard X... était de 6078,88¿ ; que si Gérard X... fait état, dans ses écritures, d'une ancienneté de ans force est de constater que, selon les pièces qu'il verse lui-même aux débats, ces 42 ans comprennent une ancienneté de 7 ans et 8 mois au Crédit Lyonnais et, en ce qui concerne les contrats de travail avec le Crédit Mutuel, de 7 ans et 2 mois avec le Crédit Mutuel de Bretagne, 7 ans et 1 mois avec le Crédit Mutuel d'Anjou Basse-Normandie, 3 mois avec le Crédit Mutuel Midi Atlantique, 1 an et 1-0 mois avec le Crédit Mutuel de Normandie ; que sa fiche de paie de février 2010 fait mention de 464 point d'ancienneté au moment de la rupture ; que la convention précitée du 30 décembre 2009 fait mention d'une indemnité de carrière de 4 mois ce qui correspond, selon l'accord de groupe susvisé, à une ancienneté supérieure à 35 ans dont il y a donc lieu de tenir compte l'ancienneté dans les autres caisses du Crédit Mutuel ayant manifestement été reprise ; que, par suite, c'est à raison que le premier juge a alloué la somme de 145 893,12 ¿ correspondant au maximum (24 mois de salaire) de ce qui peut être alloué conventionnellement, le calcul par semestre aboutissant à une somme bien supérieure ;
ALORS QUE la Caisse soutenait que Monsieur X... embauché le 19 mars 1992 et licencié le 4 février 2010 ne pouvait prétendre qu'à 35 semestres complets de services dans l'entreprise, et qu'en conséquence son indemnité de licenciement ne pouvait dépasser 35 demi mois de salaire ; qu'en retenant que la seule allocation dans une transaction au demeurant nulle d'une indemnité de fin de carrière calculée sur une ancienneté plus grande valait « manifestement » reprise d'une ancienneté plus importante, sans justifier en quoi cette prise en compte valait reconnaissance d'ancienneté pour toutes ses conséquences, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 83-1 de la convention collective de la fédération du crédit mutuel méditerranéen, ensemble l'article 1134 du Code civil.