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21/01/2014 | FRANCE | N°13-10111

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 janvier 2014, 13-10111


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le deuxième moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 novembre 2012), qu'en 1993, la société Novandie a consenti à la société Midex un contrat de concession commerciale exclusive portant sur la distribution de produits laitiers en Grande-Bretagne à des distributeurs locaux, venant à échéance le 31 décembre 2000 ; qu'après dénonciation de ce contrat par la société Novandie, un second contrat de concession commerciale exclusive a é

té conclu le 30 juin 2000 entre les deux sociétés, portant sur la commercialis...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le deuxième moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 novembre 2012), qu'en 1993, la société Novandie a consenti à la société Midex un contrat de concession commerciale exclusive portant sur la distribution de produits laitiers en Grande-Bretagne à des distributeurs locaux, venant à échéance le 31 décembre 2000 ; qu'après dénonciation de ce contrat par la société Novandie, un second contrat de concession commerciale exclusive a été conclu le 30 juin 2000 entre les deux sociétés, portant sur la commercialisation des produits auprès de la seule société Aldi UK ; que ce contrat conclu pour une période de trois ans renouvelable par tacite reconduction comportait une clause de quota global selon laquelle un chiffre d'affaires correspondant à un volume de vente de 2 000 tonnes devait être réalisé annuellement par le concessionnaire ; que, constatant une baisse sensible des tonnages vendus, la société Novandie a résilié le contrat le 4 janvier 2006 et assigné la société Midex en paiement de factures impayées ainsi qu'en réparation de son préjudice ; que la société Midex a reconventionnellement demandé la condamnation de la société Novandie à lui payer des dommages-intérêts ;
Attendu que la société Midex fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à voir condamner la société Novandie à lui payer la somme de 440 611,35 euros en réparation de la rupture fautive du contrat conclu le 30 juin 2000 alors, selon le moyen :
1°/ qu'en ayant retenu que le contrat du 30 juin 2000 permettait à la société Novandie d'interrompre la fabrication de certains produits sans indemnité pour la société Midex et sans incidence sur la clause de quota, la cour d'appel a dénaturé l'article 1er du contrat du 30 juin 2000 qui stipulait seulement que le concessionnaire ne pourrait exiger une indemnité en cas d'interruption de la livraison de certains articles mais n'excluait pas une incidence sur le volume de vente imposé à la société Midex, et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ; qu'après avoir retenu que la clause contractuelle permettant à la société Novandie d'interrompre la fabrication de certains produits était sans incidence sur la clause imposant à la société Midex un volume de vente annuel de 2000 tonnes de produits laitiers, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si cette clause ne revêtait pas un caractère potestatif en faisant dépendre l'exécution des engagements de la société Midex d'un événement au seul pouvoir de la société Novandie, qui pouvait décider de cesser de fournir les produits laitiers selon sa volonté, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1170 et 1174 du code civil ;
3°/ qu'en ayant retenu, pour juger non fautive la résiliation du contrat par la société Novandie, que la société Midex n'avait pas respecté son engagement de vendre 2000 tonnes de produits laitiers annuellement sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si celle-ci n'aurait pas atteint ce quota si la société Novandie n'avait pas interrompu, en cours de contrat, la fabrication de certains produits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine du contrat de concession exclusive du 30 juin 2000, que l'ambiguïté de ses termes rendait nécessaire, qu'il se déduisait de ses dispositions essentielles qu'il était loisible au concédant d'interrompre la fabrication de certains produits sans indemnité pour le concessionnaire et sans incidence sur la clause de quota stipulée à l'article 8, la cour d'appel n'a pas encouru le grief de la première branche ;
Et attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé que la société Midex a négocié en connaissance de cause la clause de quota, qui a été fixée à un montant inférieur au volume de ventes réalisé les années précédentes avec la société Aldi UK, l'arrêt retient que le contrat de distribution litigieux avait pour objet non pas d'assurer la fabrication des produits désirés par le concessionnaire pour lui permettre d'atteindre un volume de vente de 2 000 tonnes, mais de concrétiser l'engagement de ce dernier de vendre auprès de la société Aldi UK la production de la société Novandie à hauteur de ce tonnage ; qu'il relève encore que dès lors qu'il était loisible au concédant d'interrompre la fabrication de certains produits sans indemnité pour le concessionnaire et sans incidence sur la clause de quota, le second ne saurait utilement reprocher au premier de n'avoir pu satisfaire à sa demande de fabrication de tel ou tel produit nouveau, l'aléa industriel, entré dans le champ contractuel, ne pouvant être constitutif d'un grief dont pourrait exciper la société Midex, au demeurant autorisée par l'article 4 de la convention à faire appel à un autre fournisseur pour les produits incriminés ; qu'ayant, par ces constatations souveraines, fait ressortir que la clause litigieuse n'était pas purement potestative, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche inopérante visée à la troisième branche, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Midex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Novandie la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour la société Midex
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Midex de sa demande tendant à voir condamner la société Novandie à réparer le préjudice résultant pour elle de la résiliation du contrat du 13 avril 1993 ;
Aux motifs qu'« une véritable transaction est intervenue entre les parties lors de la rupture du contrat du 13 avril 1993 et de la signature de celui du 30 juin 2000 ; qu'en effet l'avenant de résiliation susmentionné et le contrat du 30 juin 2000 procèdent d'une économie globale et ont fait l'objet d'une véritable négociation ainsi que le révèlent les modifications affectant les clauses financières ; qu'ainsi et sauf à méconnaître les dispositions de l'article 2052 du code civil, la société Midex n'est pas recevable à solliciter le versement de dommages et intérêts du fait de la résiliation dont s'agit » ;
Alors que 1°) l'existence de concessions réciproques entre les parties conditionne la validité d'une transaction ; qu'après avoir relevé que la société Novandie avait mis en demeure la société Midex d'accepter une résiliation immédiate du contrat du 13 avril 1993 moyennant le paiement de l'indemnité de rupture prévue par celui-ci, afin de lui imposer un second contrat à des conditions moins favorables, la cour d'appel, qui a jugé que l'avenant portant résiliation du contrat du 13 avril 1993 valait transaction quand celui-ci ne comportait aucune concession de la part de la société Novandie, qui n'avait fait que payer l'indemnité contractuellement due, a violé l'article 2044 du code civil ;
Alors que 2°) en n'ayant pas répondu aux conclusions de la société Midex qui soutenaient que la société Novandie avait rompu brutalement leurs relations commerciales en limitant l'objet du nouveau contrat de concession à la vente des produits laitiers à la seule société Aldi UK, sans respecter le préavis imposé par l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société Midex de sa demande tendant à voir condamner la société Novandie à lui payer la somme de 440 611,35 euros en réparation de la rupture fautive du contrat conclu le 30 juin 2000 ;
Aux motifs que « l'article 8 dudit contrat stipule "le concessionnaire s'engage à réaliser avec Novandie un chiffre d'affaires correspondant à un volume de vente de 2000 tonnes au titre de chaque année d'exécution du contrat" ; que l'article 12.1 ajoute que "le présent contrat peut être résilié à tout moment, sans préavis ni indemnité dans les hypothèses suivantes : (¿) dans le cas où le concessionnaire manquerait à l'une quelconque de ses obligations après une mise en demeure restée sans effet" ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que la société Midex a cessé de respecter la clause de quota à partir de l'année 2003 avec de surcroît une baisse constante de volume des ventes ; que dès lors, en procédant à la résiliation du contrat après avoir vainement adressé deux mises en demeure à la société Midex, la société Novandie n'a fait qu'appliquer la loi des parties en cas de méconnaissance du quota conventionnellement convenu ; qu'il sera précisé sur ce point que le contrat litigieux avait pour objet non pas d'assurer la fabrication des produits désirés par la société Midex pour lui permettre d'atteindre un volume de vente de 2000 tonnes mais de concrétiser l'engagement de cette dernière de vendre auprès de la société Aldi UK la production de la société Novandie à hauteur de ce tonnage ; qu'en effet l'article 8 du contrat rappelle que le concessionnaire s'engage à mettre en oeuvre tous ses efforts pour lui permettre d'assurer auprès de la société Aldi UK l'implantation et la promotion commerciale des produits mentionnés à l'article premier, lequel précise que la société Novandie accorde au concessionnaire l'exclusivité de la vente à la société Aldi UK des produits fabriqués ou distribués par ses soins avec au demeurant la faculté d'interrompre la livraison ou la distribution de certains articles sans que le concessionnaire puisse exiger une quelconque indemnité de ce chef ; que par ailleurs, c'est en toute connaissance de cause que la société Midex a négocié la fixation de la clause de quota à 2000 tonnes, montant inférieur au tonnage réalisé les années précédentes avec la société Aldi UK ; que dès lors (¿) il était loisible à la société Novandie d'interrompre la fabrication de certains produits sans indemnité pour la société Midex et sans incident sur la clause de quota, cette dernière ne saurait utilement reprocher à la société Novandie de n'avoir pu satisfaire sa demande de fabrication de tel ou tel produit nouveau, l'article 4 l'autorisant en tout état de cause à faire appel à un autre fournisseur pour les produits considérés ; que l'aléa industriel est ainsi entré dans le champ contractuel et ne saurait être constitutif d'un grief dont l'intéressée pourrait exciper ; que plus généralement (¿), la société Midex ne rapporte la preuve d'aucun manquement à la bonne foi contractuelle de la part de la société Novandie (¿) ; qu'enfin, alors que celle-ci aurait pu n'adresser la mise en demeure conventionnellement prévue que le 30 novembre 2005, elle l'a fait dès le 30 juin 2005 à l'effet de permettre à la société Midex de respecter ses engagements et de lui accorder un préavis de fait de 6 mois, exclusif de toute allégation de brutalité qui affecterait la résiliation prononcée, laquelle est intervenue en strict respect des stipulations contractuelles et ne présente de ce fait aucun caractère abusif ; que la résiliation du contrat susvisé du 30 juin 2000 ayant été jugée régulière et non abusive, la société Midex n'est pas fondée à solliciter une quelconque indemnité de ce chef » ;
Alors 1°) qu'en ayant retenu que le contrat du 30 juin 2000 permettait à la société Novandie d'interrompre la fabrication de certains produits sans indemnité pour la société Midex et sans incidence sur la clause de quota, la cour d'appel a dénaturé l'article 1er du contrat du 30 juin 2000 qui stipulait seulement que le concessionnaire ne pourrait exiger une indemnité en cas d'interruption de la livraison de certains articles mais n'excluait pas une incidence sur le volume de vente imposé à la société Midex, et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
Alors 2°) et subsidiairement que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ; qu'après avoir retenu que la clause contractuelle permettant à la société Novandie d'interrompre la fabrication de certains produits était sans incidence sur la clause imposant à la société Midex un volume de vente annuel de 2000 tonnes de produits laitiers, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si cette clause ne revêtait pas un caractère potestatif en faisant dépendre l'exécution des engagements de la société Midex d'un événement au seul pouvoir de la société Novandie, qui pouvait décider de cesser de fournir les produits laitiers selon sa volonté, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1170 et 1174 du code civil ;
Alors 3°) qu'en ayant retenu, pour juger non fautive la résiliation du contrat par la société Novandie, que la société Midex n'avait pas respecté son engagement de vendre 2000 tonnes de produits laitiers annuellement sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si celle-ci n'aurait pas atteint ce quota si la société Novandie n'avait pas interrompu, en cours de contrat, la fabrication de certains produits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Alors 4°) qu'en n'ayant pas répondu aux conclusions de la société Midex qui soutenaient que la société Novandie avait rompu brutalement leurs relations commerciales en ne respectant pas le préavis imposé par l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Midex à payer à la société Novandie la somme de 500 000 euros en réparation du manquement de celle-ci à son obligation de loyauté contractuelle ;
Aux motifs que « la société Midex s'est abstenue de prévenir la société Novandie de l'appel d'offres de la société Aldi UK et des résultats de celui-ci ; qu'en n'informant pas la société Novandie de son non-référencement pour 2006 et en la mettant de la sorte dans l'impossibilité d'assurer un quelconque chiffre d'affaires avec ladite société Aldi UK pour l'année 2006, la société Midex a méconnu son obligation de loyauté contractuelle et engagé de ce fait sa responsabilité à l'endroit de la société Novandie ; que cette dernière est fondée à évaluer son préjudice de ce chef à la somme de 500 000 euros, correspondant à un an de perte de marge sur le coût variable direct rapporté à un volume de 2000 tonnes et prenant en compte l'aléa inhérent à toute activité économique » ;
Alors 1°) que la privation de la possibilité de remporter un appel d'offres, qui n'est qu'une éventualité favorable, doit être réparée à hauteur de la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; qu'en ayant alloué à la société Novandie la totalité de la somme qu'elle aurait perçu si elle avait remporté l'appel d'offres de la société Aldi UK, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Alors 2°) et subsidiairement que la réparation d'un dommage, qui doit être intégrale, ne peut excéder le montant du préjudice ; qu'après avoir constaté que la société Aldi UK avait acheté, chaque année depuis 2003, moins de 2000 tonnes de produits laitiers fabriqués par la société Novandie, la cour d'appel ne pouvait indemniser cette dernière, au titre de l'année 2006, du bénéfice correspondant à la vente d'un volume de 2000 tonnes à la société Aldi UK, sans violer l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-10111
Date de la décision : 21/01/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 jan. 2014, pourvoi n°13-10111


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10111
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