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21/01/2014 | FRANCE | N°12-87543

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 janvier 2014, 12-87543


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par
- Le syndicat de l'Edition Vidéo Numérique (SEVN),partie civile- La Fédération nationale des distributeurs de films (FNDF), partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9e chambre, en date du 20 septembre 2012, qui, dans la procédure suivie contre M. Jérôme X... du chef de contrefaçon de droit d'auteur, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 décembre 2013 où étaient présents dans l

a formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par
- Le syndicat de l'Edition Vidéo Numérique (SEVN),partie civile- La Fédération nationale des distributeurs de films (FNDF), partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9e chambre, en date du 20 septembre 2012, qui, dans la procédure suivie contre M. Jérôme X... du chef de contrefaçon de droit d'auteur, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 décembre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Arnould, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOSSIER, les observations de la société civile professionnelle ROGER et SEVAUX, de la société civile professionnelle FABIANI et LUC-THALER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBERGE ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs et le mémoire en défense produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 2132-3 du code du travail L. 132-24, L. 331-1, L. 335-2, L. 335-3 et L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les demandes du Syndicat de l'édition vidéo numérique (SEVN) et de la Fédération nationale des distributeurs de films (FNDF) ;
"aux motifs que, conformément à l'article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle, toute édition de composition musicale, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon ; que, selon l'article L. 335-3 du même code, constitue également une contrefaçon toute reproduction d'une oeuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par une loi ; que l'article L. 335-4 du code précité réprime toute fixation, reproduction, communication ou mise à disposition du public, à titre onéreux ou gratuit, ou toute télédiffusion d'un phonogramme ou d'un vidéogramme réalisée sans l'autorisation du producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes ; que cet article n'est effectivement pas cité dans les préventions dont M. X... a fait l'objet, lesquelles ne visent que l'atteinte aux droits d'auteurs et non les droits voisins attribués au producteur ; que, d'une part, sur citation directe de la SDRM, M. X... a, en effet, été prévenu d'avoir, par l'intermédiaire du site internet www.ebay.com, proposé à la vente et vendu des DVD de karaoké reproduisant des interprétations musicales d'oeuvres protégées, en violation des droits de leurs auteurs ; que, par cette citation de la SDRM M. X... ne s'est donc vu reprocher que la vente de DVD de karaoké ; que, d'autre part, sur convocation par officier de police judiciaire, M. X... a été prévenu d'avoir reproduit, par quelque moyen que ce soit, plusieurs centaines d'oeuvres de l'esprit, en violation des droits de leurs auteurs ; que, si les termes de cette prévention visaient la reproduction des DVD de karaoké et des oeuvres audiovisuelles contrefaites saisies au domicile du prévenu, cette prévention ne visait pas la revente de ces produits à laquelle M. X... s'est livré ; que les parties civiles ne peuvent donc invoquer en l'espèce les dispositions de l'article L.132-24 du code de la propriété intellectuelle, relatives à la cession légale des droits d'auteurs au profit du producteur de vidéogrammes ; que celui-ci prévoit en effet que « le contrat qui lie le producteur aux auteurs d'une oeuvre audiovisuelle emporte ¿ cession au profit du producteur des droits exclusifs d'exploitation de l'oeuvre audiovisuelle ;
"et aux motifs adoptés que la FNDF est une union de syndicats de distributeurs de films qui a notamment pour objet de défendre les intérêts professionnels de ses adhérents et, d'une façon plus générale, de défendre sur les plan national les intérêts moraux, économiques, industriels et commerciaux de l'industrie de la distribution de films cinématographiques ; que le SEVN est un syndicat professionnel formé entre des entreprises qui pratiquent notamment la production, l'édition et la distribution de vidéogrammes, qui a pour objet la promotion et la défense collective des intérêts patrimoniaux et moraux de ses membres ; que la qualification dont est saisie la présente juridiction est celle de contrefaçon par reproduction et diffusion d'oeuvres de l'esprit en violation des droits de leurs auteurs, délit défini par les articles L. 335-2, aliéna 1, et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle et non pas celle d'atteinte aux droits des producteurs, infraction définie par l'article L. 335-4 du même code ; que les syndicats professionnels d'éditeurs et de distributeurs ne se prévalent pas d'un dommage subi en conséquence directe de l'infraction reprochée au prévenu ;
"1) alors que la reproduction d'oeuvres de l'esprit en violation des droits de leurs auteurs porte nécessairement, par elle-même, préjudice aux producteurs et aux éditeurs titulaires des droits d'exploitation de ces oeuvres ainsi qu'aux intérêts collectifs des professions exercées par les intéressés ; qu'en retenant que les syndicats professionnels représentant les professions exercées par les éditeurs et les producteurs des oeuvres reproduites par le prévenu n'avaient pu subir de préjudice dans la mesure où la revente de ces oeuvres reproduites n'était pas visée par la prévention, la cour d'appel a violé les textes précités ;
"2) alors que l'action civile est recevable pour tous les chefs de dommage qui découlent des faits objets de la poursuite ; qu'en se déterminant en considération de la qualification des faits visés par la prévention, en l'occurrence la contrefaçon en violation des droits de l'auteur et non des faits de reproduction d'oeuvres protégées, objets de la poursuite, et du préjudice qui en résultait nécessairement pour les titulaires des droits d'exploitation de ces oeuvres ainsi que pour les intérêts collectifs des professions exercées par ces derniers, la cour d'appel a violé les articles 2 et 3 du code de procédure pénale, ensemble les articles L. 2132-3 du code du travail et L. 331-3 du code de la propriété intellectuelle ;
"3) alors qu'enfin, les syndicats et organismes de défense professionnelle peuvent obtenir réparation du préjudice porté directement ou indirectement aux intérêts collectifs de la profession qu'ils représentent ; qu'en rejetant les demandes de la Fédération nationale des distributeurs de films et du Syndicat de l'édition vidéo numérique en raison du caractère prétendument indirect du préjudice porté aux intérêts collectifs des professions qu'ils représentaient, la cour d'appel a violé les articles L. 2132-3 du code du travail et L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle" ;
Vu les articles L. 2132-3 du code du travail, L. 331-3 du code de la propriété intellectuelle et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes, auquel le deuxième ne déroge pas sur ce point, que les syndicats professionnels peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour déclarer irrecevables les constitutions de partie civile de la Fédération nationale des distributeurs de films et du Syndicat de l'édition vidéo numérique, la cour d'appel énonce, par motifs propres, que l'article L. 335-4 du code précité réprime toute fixation, reproduction, communication ou mise à disposition du public, à titre onéreux ou gratuit, ou toute télédiffusion d'un phonogramme ou d'un vidéogramme réalisée sans l'autorisation du producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes ; que les juges ajoutent que cet article n'est effectivement pas cité dans les préventions dont M. X... a fait l'objet, lesquelles ne visent que l'atteinte aux droits d'auteurs et non les droits voisins attribués au producteur ; qu'enfin, par motifs adoptés, la cour d'appel affirme que la qualification dont est saisie la présente juridiction est celle de contrefaçon par reproduction et diffusion d'oeuvres de l'esprit en violation des droits de leurs auteurs, délit défini par les articles L. 335-2, aliéna 1, et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle et non pas celle d'atteinte aux droits des producteurs, infraction définie par l'article L. 335-4 du même code et qu'ainsi, les syndicats professionnels d'éditeurs et de distributeurs ne se prévalent pas d'un dommage subi en conséquence directe de l'infraction reprochée au prévenu ;
Mais attendu qu'en se déterminant en considération de la seule qualification retenue par la prévention, en l'occurrence la contrefaçon en violation des droits de l'auteur, la cour d'appel, qui n'a pas mis les parties civiles en mesure de s'expliquer sur le préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des professions que les syndicats représentent, pouvant découler directement des faits, a violé les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 20 septembre 2012, mais en ses seules dispositions ayant dit que le SEVN et la FNDF étaient irrecevables en leur constitution de partie civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un janvier deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-87543
Date de la décision : 21/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 20 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 jan. 2014, pourvoi n°12-87543


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.87543
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