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21/01/2014 | FRANCE | N°12-25443

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 janvier 2014, 12-25443


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mai 2012), que la société Revival, qui est spécialisée dans la récupération de matières métalliques recyclables issues en particulier des véhicules hors d'usage, exploite un broyeur sur son site de Montereau pour l'installation et l'exploitation duquel elle a obtenu les autorisations administratives exigées par les textes en vigueur ; qu'estimant que la société Etablissements L. Marchetto (la société Marchetto) se rendait coupable d'ac

tes de concurrence déloyale, à son encontre, en exploitant, à proximité d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mai 2012), que la société Revival, qui est spécialisée dans la récupération de matières métalliques recyclables issues en particulier des véhicules hors d'usage, exploite un broyeur sur son site de Montereau pour l'installation et l'exploitation duquel elle a obtenu les autorisations administratives exigées par les textes en vigueur ; qu'estimant que la société Etablissements L. Marchetto (la société Marchetto) se rendait coupable d'actes de concurrence déloyale, à son encontre, en exploitant, à proximité de Montereau, un broyeur dans le cadre des mêmes activités, sans être titulaire des autorisations requises, elle l'a fait assigner afin d'obtenir le paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que la société Marchetto fait grief à l'arrêt d'avoir fait droit à cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que l'inobservation d'une réglementation n'est constitutive d'un acte de concurrence déloyale que lorsqu'elle a pour effet de porter atteinte au marché ; que l'existence d'une telle atteinte ne peut être inférée du seul non-respect de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement et doit être caractérisée ; qu'en se bornant à énoncer que par l'exploitation d'une installation de broyage et entreposage de véhicules hors d'usage sans autorisation préfectorale, et ce, en violation de la réglementation en vigueur et pendant une période importante, la société Marchetto a apporté une distorsion dans le jeu de la concurrence afférente au marché considéré , et que le défaut, par la société intimée, du respect de la réglementation administrative relative à l'activité commerciale de broyage constitue, pour la société appelante, un acte de concurrence illicite et déloyale, sans caractériser aucun fait établissant que la période d'exploitation sans autorisation avait procuré à la société Marchetto un avantage concurrentiel injustifié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que les éléments constitutifs d'un acte de concurrence déloyale doivent être prouvés par celui qui s'en prévaut, seul étant présumé le trouble commercial qui en résulte ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il aurait fallu que la société Revival évaluât les coûts de travaux de mise en conformité du site de la société Marchetto, et les autres dépenses, qui auraient été différées durant la période litigieuse d'exercice de son activité sans autorisation et dont l'économie temporaire lui aurait permis de pratiquer des prix plus bas ou d'acheter la ferraille à des prix plus élevés ; qu'il ressort de ces énonciations que ce n'était pas seulement l'étendue des économies injustifiées dont aurait bénéficié la société Marchetto qui étaient incertaines, mais leur existence elle-même, de sorte qu'en jugeant néanmoins que cette société avait commis un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt, après avoir relevé que de septembre 2005 à octobre 2007, la société Marchetto avait exploité une installation de broyage et entreposage de véhicules hors d'usage sans autorisation préfectorale et en violation de la réglementation en vigueur , en déduit qu'un tel agissement avait apporté une distorsion dans le jeu de la concurrence afférente au marché des activités de stockage de véhicules hors d'usage ;
Et attendu, d'autre part, que la qualification de concurrence déloyale ne suppose pas que les faits incriminés aient procuré un profit à leur auteur ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, est mal fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Etablissements L. Marchetto aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Revival la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements L. Marchetto
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué condamné la SA MARCHETTO à verser à la SAS REVIVAL la somme de 50.000 ¿ à titre de dommages-intérêts, en réparation de son dommage matériel ;
AUX MOTIFS QU'il convient, tout d'abord, de rappeler que le défaut de respect de la réglementation administrative dans l'exercice d'une activité commerciale constitue une faute génératrice d'un trouble commercial pour un concurrent ; que plus précisément l'inobservation de la réglementation imposée à une activité commerciale est constitutive d'une faute de concurrence déloyale vis-à-vis du concurrent qui la respecte ; que la liberté du commerce suppose, en effet, que les entreprises exercent une concurrence par les mérites, s'interdisant tout procédé déloyal qui leur conférerait un avantage injustifié, étant observé que la caractérisation de la faute de concurrence déloyale n'exige pas la constatation d'un élément intentionnel ; qu'en l'espèce, il résulte de l'exposé même des faits que par l'arrêté préfectoral n° 74.DAGR.2EC.360 du 13 janvier 1975, la société MARCHETTO a été autorisée à exploiter sur son site un simple « dépôt de ferrailles » ; que si, par la suite, cette dernière a également présenté une demande d'autorisation à l'effet « d'exercer des activités de stockage et de récupération de ferrailles et de travail mécanique des métaux » et si une enquête administrative a été effectivement engagée à cet effet, il est néanmoins constant que l'intéressée a, pendant près de 24 mois, soit au moins du mois de septembre 2005 au mois d'octobre 2007, exploité illégalement un broyeur, installation classée soumise à autorisation et continué à stocker des véhicules hors d'usage, ce qu'elle n'était plus autorisée à faire depuis le changement de législation du 24 mai 2006 ; que cette situation a été soulignée par le commissaire-enquêteur dans son avis du 18 novembre 2006 ; que, par suite, par l'exploitation d'une installation de broyage et entreposage de véhicules hors d'usage sans autorisation préfectorale, et ce, en violation de la réglementation en vigueur et pendant une période importante, la société MARCHETTO a apporté une distorsion dans le jeu de la concurrence afférente au marché considéré ; qu'il sera également observé que la société REVIVAL n'a pas attendu pour faire constater les agissements délictueux de la société MARCHETTO ; qu'elle a en effet, dès l'origine, tenté, mais sans succès, de faire cesser ces actes de concurrence déloyale par des démarches auprès des autorités administratives concernées ; qu'il ne peut lui être imputé, en l'absence de preuves, l'utilisation de ces démarches à des fins dilatoires ; que, par ailleurs, la délivrance à la société MARCHETTO d'une autorisation préfectorale d'exploiter une installation classée de broyage de véhicules hors d'usage à compter du 7 novembre 2007 ne saurait avoir eu pour effet d'exempter rétroactivement la société MARCHETTO de toute responsabilité au titre de ses actes de concurrence déloyale passés ; que la circonstance, alléguée par la société MARCHETTO, que l'administration ne lui ait pas dressé procès-verbal pour avoir exercé son activité sans autorisation, n'est pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité, ni d'ailleurs, l'absence de recours contre l'autorisation administrative obtenue par elle, par la société REVIVAL ; que, dès lors, le défaut, par la société intimée, du respect de la réglementation administrative relative à l'activité commerciale de broyage constitue, pour la société appelante, un acte de concurrence illicite et déloyale, générateur, en luimême, d'un trouble commercial impliquant l'existence d'un préjudice ; (¿) que l'activité de broyage de la société MARCHETTO illégalement exercée a nécessairement et irrégulièrement détourné une partie de la clientèle existante ou potentielle de la société REVIVAL et n'a pu que réduire son attractivité sur sa zone de chalandise ; que la somme de 1.655.268 euros, sollicitée par la société REVIVAL en réparation de son préjudice matériel, évaluée par l'expert-comptable désigné par cette société, équivaut à la perte de marge de la société REVIVAL durant les deux années ayant suivi le début de l'activité de la société MARCHETTO ; que la part imputable à la pratique de la concurrence déloyale, dans la perte globale de marge, n'en constitue qu'une proportion sans doute minime, la perte de marge étant surtout due à l'exercice d'une concurrence par les mérites entre deux concurrents dans la même zone de chalandise ; que, pour évaluer cette part, exclusivement due à la pratique litigieuse, il aurait fallu que la société REVIVAL évaluât les coûts des travaux de mise en conformité du site de la société MARCHETTO, et les autres dépenses, qui auraient été différées durant la période litigieuse d'exercice de son activité sans autorisation et dont l'économie temporaire lui aurait permis de pratiquer des prix plus bas ou d'acheter de la ferraille à des prix plus élevés ; qu'en l'absence de ces éléments, et au regard tant de la nature du marché considéré, que de la marge brute habituellement générée par l'activité concernée ainsi que de la durée de l'exploitation irrégulièrement exercée par la société MARCHETTO, la Cour dispose des éléments suffisants d'appréciation pour évaluer le préjudice subi à la somme de 50.000 euros ; que la société MARCHETTO sera donc condamnée à payer cette somme à la société REVIVAL ; qu'enfin, les prétentions de l'appelante, relatives à la prétendue atteinte à son image, ne sont étayées par aucun élément prouvant leur effectivité ; qu'elle sera donc déboutée de cette demande »,
1°) ALORS QUE l'inobservation d'une réglementation n'est constitutive d'un acte de concurrence déloyale que lorsqu'elle a pour effet de porter atteinte au marché ; que l'existence d'une telle atteinte ne peut être inférée du seul nonrespect de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement et doit être caractérisée ; qu'en se bornant à énoncer que « par l'exploitation d'une installation de broyage et entreposage de véhicules hors d'usage sans autorisation préfectorale, et ce, en violation de la réglementation en vigueur et pendant une période importante, la société MARCHETTO a apporté une distorsion dans le jeu de la concurrence afférente au marché considéré », et que « le défaut, par la société intimée, du respect de la réglementation administrative relative à l'activité commerciale de broyage constitue, pour la société appelante, un acte de concurrence illicite et déloyale », sans caractériser aucun fait établissant que la période d'exploitation sans autorisation avait procuré à la société MARCHETTO un avantage concurrentiel injustifié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°) ALORS QUE les éléments constitutifs d'un acte de concurrence déloyale doivent être prouvés par celui qui s'en prévaut, seul étant présumé le trouble commercial qui en résulte ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il « aurait fallu que la société Revival évaluât les coûts de travaux de mise en conformité du site de la société MARCHETTO, et les autres dépenses, qui auraient été différées durant la période litigieuse d'exercice de son activité sans autorisation et dont l'économie temporaire lui aurait permis de pratiquer des prix plus bas ou d'acheter la ferraille à des prix plus élevés » ; qu'il ressort de ces énonciations que ce n'était pas seulement l'étendue des économies injustifiées dont aurait bénéficié la société MARCHETTO qui étaient incertaines, mais leur existence elle-même, de sorte qu'en jugeant néanmoins que cette société avait commis un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-25443
Date de la décision : 21/01/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 jan. 2014, pourvoi n°12-25443


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.25443
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