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15/01/2014 | FRANCE | N°12-25017;12-25197

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-25017 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° R 12-25.017 et M 12.25.197 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 5 mars 2007 en qualité de conducteur poids-lourds par la société Sud Groupage, M. X... a démissionné le 23 juin 2008 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à dire que la rupture était imputable à son employeur et à obtenir la condamnation de celui-ci au paiement de diverses sommes à titre salarial et indemnitaire notamment pour travail dissimulé ;
Sur le secon

d moyen du pourvoi du salarié et sur le moyen unique du pourvoi de l'employe...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° R 12-25.017 et M 12.25.197 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 5 mars 2007 en qualité de conducteur poids-lourds par la société Sud Groupage, M. X... a démissionné le 23 juin 2008 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à dire que la rupture était imputable à son employeur et à obtenir la condamnation de celui-ci au paiement de diverses sommes à titre salarial et indemnitaire notamment pour travail dissimulé ;
Sur le second moyen du pourvoi du salarié et sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi du salarié :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, l'arrêt retient, par motifs propres, qu'il n'est pas établi d'intention de recourir à un travail dissimulé et, par motifs adoptés, que la société Sud Groupage n'a pas délibérément manqué à ses obligations, qu'en effet elle a bien effectué une déclaration unique d'embauche, que la journée de pré-essai du 26 février 2007 pour une durée de 10 heures de travail a été réglée au salarié ;
Qu'en statuant ainsi, d'une part sans répondre aux conclusions soutenues oralement par le salarié qui faisait valoir que l'employeur avait mis en oeuvre des procédés frauduleux de décompte de ses heures et journées de travail pour se soustraire volontairement au paiement des heures supplémentaires, d'autre part sans se prononcer sur le défaut, invoqué par le salarié, de déclaration préalable à l'embauche pour la journée du 26 février 2007, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 3 juillet 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Sud Groupage aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sud Groupage à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi n° R 12-25.017 par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Francis X... de sa demande tendant à la condamnation de la société Sud Groupage à lui payer la somme de 20.107,27 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' il n'est pas établi d'intention de recourir à un travail dissimulé et que la demande de ce chef sera rejetée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES que la société Sud Groupage n'a pas délibérément manqué à ses obligations ; qu'en effet, elle a bien effectué une déclaration unique d'embauche ; que la journée de pré-essai du 26 février 2007 pour une durée de 10 heures a été réglée au salarié tel qu'il apparait sur le bulletin de paie de mai 2007 sous la mention « régularisation essai du 26/2/07 » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures inférieur à celui réellement effectué constitue une dissimulation d'emploi salarié qui, lorsqu'elle est intentionnelle, expose l'employeur à régler au salarié une indemnité forfaitaire de six mois de salaire ; que dans ses conclusions d'appel (p. 10 à 14), M. X... exposait les méthodes frauduleuses mises en oeuvre par la société Sud Groupage pour se soustraire au paiement des heures supplémentaires (augmentation artificielle du temps de repos journalier, changement de camion pour se soustraire aux constatations du chronotachygraphe) ; qu'en affirmant que l'intention de l'employeur de recours à un travail dissimulé n'était pas établie, sans répondre aux conclusions du salarié qui établissaient cette intention, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' est notamment réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour l'employeur de se soustraire à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.1221-10 du code du travail, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; qu'en excluant, par motifs adoptés du jugement entrepris, toute dissimulation au titre de la journée de « préessai » du 26 février 2007, au seul motif que cette journée avait été réglée au salarié, sans constater que la déclaration préalable à l'embauche avait concerné cette journée, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.8221-5 du code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE selon les dispositions de l'article L.1221-23 du code du travail, la période d'essai doit être expressément stipulée dans la lettre d'engagement ou dans le contrat de travail ; qu'en estimant que la période d'essai effectuée par M. X... le 26 février 2007 ne caractérisait pas l'existence d'un travail dissimulé intentionnel de la part de l'employeur, sans constater que cette période avait été stipulée dans un quelconque document contractuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-23 et L.8221-5 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Francis X... de sa demande tendant à la condamnation de la société Sud Groupage à lui payer la somme de 1.227,18 € brut, outre la somme de 122,71 € correspondant aux congés payés afférents, au titre du rappel de salaire sur la prime horaire de nuit pour la période du 1er juillet 2007 au 30 juin 2008 ;
AUX MOTIFS QUE selon la convention collective, le travail de nuit recouvre la période comprise entre 21h et 6h et est compensé par une prime horaire égale à 20 % du taux horaire conventionnel à l'embauche applicable au coefficient 150 M ; qu'en cas d'heures supplémentaires, cette prime horaire doit être prise en compte dans l'assiette de calcul des majorations pour heures supplémentaires ; qu'au-delà de 50 heures de travail de nuit par mois, il est dû un repos compensateur de 5 % du temps de travail de nuit pris en repos ou en compensation pécuniaire ; que les mentions des décomptes doivent figurer sur le bulletin de salaire ; que l'analyse des bulletins de salaire établit qu'il a été payé une majoration pour les heures de travail de nuit au taux de 25 % entre mars 2007 et juin 2007 inclus et qu'ensuite il a été appliqué une majoration de 20 % pour les heures travaillées de nuit qui ont toutes été supérieures à 50 heures par mois ; que les heures supplémentaires ont été calculées sur le taux de base du salaire sans inclure la majoration de 20 % de prime horaire de nuit ; que la réclamation du salarié est fondée en son principe mais excessive pour intégrer les 5 % de repos compensateur dans le tarif des heures supplémentaires ce qui ne ressort pas de la convention collective et se baser sur des taux horaires supérieurs à ceux figurant sur les bulletins de salaire ; que dans ces conditions, il est dû un rappel de salaire de 5 % du tarif horaire figurant sur les bulletins de salaire pour le repos compensateur pour les heures de nuit accomplies de juillet 2007 à juin 2008 pour la somme de 958,68 ¿ outre congés payés afférents, un rappel de salaire sur les heures supplémentaires figurant sur les bulletins de salaire pour la période travaillée, de 156,20 ¿ pour les heures supplémentaires à 25 % et de 234,44 ¿ pour les heures supplémentaires à 50 % outre congés payés afférents ;
ALORS QUE le mode de rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément essentiel du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord ; que dans ses conclusions d'appel (p. 5), M. X... faisait valoir que l'employeur lui avait réglé la prime « horaire de nuit » au taux de 25 % pour la période du mois de mars 2007 au mois de juin 2007, puis qu'il avait unilatéralement ramené ce taux à 20 % pour la période du mois de juillet 2007 au mois de juin 2008, ce qui justifiait sa demande de rappel de salaire correspondant à la différence entre les deux taux pour cette dernière période ; qu'en rejetant cette demande du salarié, tout en constatant que le taux de la prime litigieuse avait été unilatéralement ramené par l'employeur, pour la période du 1er juillet 2007 au 30 juin 2008, de 25 % à 20 % (arrêt attaqué, p. 3, alinéa 9), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil.
Moyen produit au pourvoi n° M 12-25.197 par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour la société Sud Groupage.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit la rupture du contrat de travail imputable à la Société SUD GROUPAGE et emportant les effets d'un licenciement abusif et, en conséquence, d'AVOIR condamné ladite société à payer à Monsieur X... différentes sommes ;
AUX MOTIFS QUE, sur la rupture du contrat de travail, Monsieur X... invoque le non-respect des visites médicales obligatoires, l'amplitude excessive du temps de travail en relation avec la circulation sur la route nationale, le non-respect du repos compensateur, la dissimulation d'heures supplémentaires, le non-paiement de salaire dû, la présence d'odeur de chien dans le camion ; que la lettre de démission, même faite sans grief, est cependant équivoque dans la mesure où elle a été immédiatement précédée et suivie de demandes en rappels de salaire ; que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur qui n'a pas procédé aux visites médicales obligatoires, qui est condamné à divers rappels de salaires pour non-respect de la convention collective et non-prise en compte du travail réel effectué et qui n'a pas usé de son autorité pour empêcher le collègue salarié de faire monter son chien, ainsi que le prescrit le contrat de travail, dans le camion utilisé par Monsieur X... ; que le salarié ayant plus d'un an d'ancienneté, il a droit à un mois de préavis selon sa demande ; que le salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté, il s'agit d'un licenciement abusif visé à l'article 1235-5 du Code du travail donnant lieu à des dommages-intérêts en relation avec le préjudice subi ; que Monsieur X... ayant retrouvé immédiatement un travail, il lui sera alloué la somme de 3.000 ¿ de dommages-intérêts de ce chef ; que les créances salariales, qui sont contractuelles, portent intérêt légal à dater de l'accusé de réception de la convocation devant le bureau de conciliation valant mise en demeure et les dommages-intérêts, qui sont estimés par la Cour, portent intérêt légal à dater du présent arrêt qui en fixe les montants (arrêt, p. 5) ;
1°) ALORS QUE la lettre de démission qui ne contient aucune motivation ou allégation à l'encontre de l'employeur, de nature à lui rendre imputable la rupture du contrat de travail, constitue l'expression de la volonté claire et non équivoque de démissionner du salarié ; qu'en décidant néanmoins que la lettre de démission de Monsieur X... était équivoque après avoir constaté que cette lettre avait été faite sans grief, la Cour d'appel a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2°) ALORS QUE lorsqu'une lettre de démission n'est pas équivoque, la rétractation, même dans un court délai, n'implique pas que la volonté du salarié n'ait pas été clairement manifestée ; qu'en décidant que la lettre de démission de Monsieur X... était équivoque dès lors qu'elle avait été immédiatement précédée et suivie de demandes en rappels de salaire, après avoir pourtant constaté que cette lettre ne comportait aucun grief à l'encontre de la Société SUD GROUPAGE, la Cour d'appel a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-1du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
3°) ALORS QUE le salarié, qui démissionne pour s'engager au service d'un autre employeur, manifeste une volonté claire et non équivoque de démissionner ; qu'en retenant le caractère équivoque de la lettre de démission de Monsieur X..., tout en constatant que celuici avait immédiatement retrouvé du travail, sans rechercher si la démission de Monsieur X..., adressée le 23 juin 2008 à son employeur avec effet au 30 juin suivant, n'avait pas eu pour objet de permettre au salarié d'occuper immédiatement un nouvel emploi, débuté dès le 1er juillet 2008, de sorte que la démission litigieuse ne pouvait qu'être univoque et la rupture du contrat de travail non imputable à l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1 et L. 1237-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
4°) ALORS QUE lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail pour des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit, dans le cas contraire, d'une démission, seuls des manquements suffisamment graves pouvant toutefois faire produire à cette rupture les effets d'un tel licenciement abusif ; qu'en se contentant, pour dire que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... était imputable à son employeur et emportait les effets d'un licenciement abusif, de retenir l'absence des visites médicales obligatoires, la condamnation de l'employeur à divers rappels de salaire pour non-respect de la convention collective et non-prise en compte du travail réel effectué, ainsi que l'absence de mise en oeuvre par l'employeur de son pouvoir de direction pour empêcher un collègue de faire monter son chien dans le camion comme prescrit par le contrat de travail, sans rechercher si ces manquements étaient suffisamment graves pour faire produire à la rupture du contrat de travail litigieux les effets d'un tel licenciement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1231-1, L. 1237-1 et L. 1237-2 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-25017;12-25197
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 juillet 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jan. 2014, pourvoi n°12-25017;12-25197


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Laugier et Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.25017
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