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19/12/2013 | FRANCE | N°12-26988

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 décembre 2013, 12-26988


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2012), que la société Ethicon (la société), après notification de la CRAM du Centre d'une minoration de la tarification en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle (AT/MP) pour les années 1999 à 2008, a déduit sur ses bordereaux de cotisations des mois de décembre 2008 et juillet 2009 des sommes correspondant aux cotisations trop payées pour les exercices précités ; qu'elle a saisi un tribuna

l des affaires de sécurité sociale aux fins de voir annuler les mises en dem...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2012), que la société Ethicon (la société), après notification de la CRAM du Centre d'une minoration de la tarification en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle (AT/MP) pour les années 1999 à 2008, a déduit sur ses bordereaux de cotisations des mois de décembre 2008 et juillet 2009 des sommes correspondant aux cotisations trop payées pour les exercices précités ; qu'elle a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins de voir annuler les mises en demeure des 27 janvier 2009 et 23 février 2010 qui lui ont été notifiées par l'URSSAF d'Eure-et-Loir en paiement de rappel de cotisations en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle (AT/MP) et majorations de retard pour les années 1999 à octobre 2005, l'URSSAF considérant que la prescription triennale ne s'appliquait pas au paiement de ces cotisations ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours et de la condamner au paiement des cotisations augmentées de majorations de retard alors, selon le moyen :

1°/ que, si en principe l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque deux actions, quoique ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de telle sorte que la deuxième est virtuellement comprise dans la première ; que lorsque la reconnaissance du caractère indu des cotisations accidents du travail versées par l'employeur nécessite que ce dernier conteste au préalable une décision d'une caisse de sécurité sociale, le délai de prescription de l'action en remboursement des cotisations indues fixé par l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale est nécessairement interrompu par l'exercice du recours contre la décision de la caisse qui a pour but de faire reconnaître le caractère indu des cotisations versées à la suite de cette décision ; qu'en estimant que le cours de la prescription triennale n'avait été interrompu qu'en octobre 2008 lorsque la caisse régionale d'assurance maladie du Centre a procédé à la rectification des taux de cotisations à la suite des différents recours exercés par la société Ethicon, la cour d'appel a violé les articles 2244 du code civil, dans sa rédaction en vigueur, et L. 243-6 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que la CPAM, la CRAM ¿ aujourd'hui CARSAT - et l'URSSAF sont les composantes d'un même service public de la sécurité sociale dotées au sein de la branche « accidents du travail et maladies professionnelles » d'attributions légales complémentaires ; que l'URSSAF n'est pas un tiers par rapport aux caisses de sécurité sociale et n'en est que le mandataire légal substitué aux caisses pour le recouvrement des cotisations sociales ; qu'il en résulte que l'URSSAF n'est pas fondée à invoquer son ignorance des recours exercés à l'encontre des décisions des caisses ayant conduit au versement de cotisations qu'elle a recouvrées ; qu'en reprochant à la société Ethicon de ne pas avoir informé l'URSSAF de ce qu'elle avait formé des contestations susceptibles d'entraîner une rectification rétroactive de ses taux de cotisations, la cour d'appel a violé les articles L. 213-1 et L. 243-6 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 2244 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

3°/ que, ni la valeur du risque, ni le taux de cotisations ne sont déterminés sinistre par sinistre et que les cotisations afférentes à un exercice ne sont pas versées par référence à un sinistre déterminé ; qu'il en résulte que le recours formé par l'employeur contre la décision de la CARSAT lui notifiant son taux de cotisation pour un exercice donné interrompt nécessairement le cours de la prescription de l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale pour l'intégralité des cotisations versées en application de ce taux et ce, sans qu'il y ait lieu de distinguer les prises en charge ayant occasionné le versement de cotisations indues ; qu'au cas présent, les recours formés à compter de 2003 à l'encontre des décisions de la CRAM du Centre relative à son taux de cotisations avaient interrompu la prescription de l'action en remboursement des cotisations versées au titre des exercices concernés, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, ensemble les articles L. 243-6 et D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'après avoir, d'une part énoncé que, selon l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées, d'autre part relevé que les contestations élevées auprès de la CRAM du Centre à partir de 2003 n'intéressaient pas les salariés visés par le rappel de cotisations, la cour d'appel en a exactement déduit qu'aucun élément ne permettait de fixer le point de départ du délai de prescription à une date autre que celle fixée par l'URSSAF à savoir le 1er octobre 2008 soit à la la date de l'information donnée à cette union sur la nouvelle tarification, les recours formés utilement en octobre 2008 par la société ne pouvant avoir interrompu le délai de prescription de la demande en remboursement de cotisations payées antérieurement au 1er octobre 2005 ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche, est mal fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ethicon aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Ethicon et la condamne à payer à l'URSSAF d'Eure-et-Loir la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Ethicon

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la demande de régularisation portant sur les cotisations antérieures à octobre 2005 est frappée par la prescription triennale, confirmé les décisions rendues par la Commission de recours amiable en date des 22 février 2010 et 25 octobre 2010, condamné la société ETHICON au paiement de la somme de 258.935 ¿ représentant les cotisations à hauteur de 244.944 ¿ et 13.991 ¿ à titre de majoration de retard et condamné la société ETHICON au paiement des majorations de retard complémentaires ;

AUX MOTIFS QU'« qu'il convient tout d'abord, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner, sous le seul numéro 11/02019, la jonction des instances enregistrées en cause d'appel sous les numéros 11/02019 et 11/02020 ; que selon l'article L.243-6 du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ; que la prescription court à compter du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu valablement agir ; qu'au cas présent que la société Ethicon a, pour la première fois en janvier 2009 (lettre du 8 janvier 2009) puis ultérieurement en juillet 2009, fait ellemême application sur les cotisations afférentes au mois de décembre 2008 puis au mois de juillet 2009 de rectifications des taux AT/MP au titre de la période de 1999 à 2008 en faisant référence aux recours formés auprès de la CRAM du Centre relativement à la tarification appliquée après la prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie d'Eure et Loir des maladies professionnelles déclarées par plusieurs de ses salariés en 1997, 1998 et 1999 (s'agissant de Mmes X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E... et F... et de MM. G... et H...) ; que pour obtenir une modification de la tarification, la société Ethicon avait tout d'abord saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie d'Eure et Loir les 19 et 20 juin 2008 puis la CRAM du Centre, seule compétente en matière de tarification des risques professionnels, ce qui a été confirmé selon un courrier en date du 28 octobre 2008 émanant de ce dernier organisme ; que l'Urssaf d'Eure et Loir n'a été avisée de la modification de la tarification par la CRAM du Centre que par courriers en date des 7 octobre et 19 novembre 2008 ; que si la société Ethicon a fait état d'autres contestations élevées auprès de la CRAM du Centre dès le 1er avril 2003, ces contestations intéressaient d'autres salariés (Mmes I..., J..., K... et L...) pour lesquels il n'est pas justifié de l'application par la société Ethicon d'une régularisation opérée sur les bordereaux transmis à l'Urssaf d'Eure et Loir au titre des mois de décembre 2008 et juillet 2009 ; que les actions engagées par la société Ethicon devant la caisse primaire d'assurance maladie d'Eure et Loir, la commission de recours amiable de cette caisse primaire d'assurance maladie et la CRAM du Centre qui ont eu pour effet de réduire les taux initialement appliqués en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles sont totalement distinctes de l'action en remboursement des cotisations indues mise en oeuvre auprès de l'Urssaf d'Eure et Loir en janvier 2009 puis en juillet 2009 dès lors que ces deux catégories d'actions ne tendaient pas au même but même si l'introduction des premières (contestation de la tarification) étaient indispensables pour permettre la mise en oeuvre de la seconde (application effective des réductions des cotisations sur les bordereaux des cotisations échues) ; que par ailleurs rien n'interdisait à la société Ethicon, tenue de verser les cotisations majorées au titre des années 1999 à 2008 par suite des maladies professionnelles déclarées par certains de ses salariés, de contester auprès de la caisse régionale d'assurance maladie du Centre le montant des cotisations dès la notification de ces taux majorés (notifications portant en outre mention des délais de recours) en informant l'Urssaf d'Eure et Loir qu'elle avait saisi ce service de tarification de cette contestation susceptible d'entraîner une rectification rétroactive des taux de cotisations ; qu'en conséquence qu'aucun élément ne permet de fixer le point de départ du délai de prescription à une date autre que celle fixée par l'Urssaf d'Eure et Loir conformément à l'article L.243-6 du code de la sécurité sociale ; qu'ainsi les jugements rendus par le tribunal des affaires de sécurité sociale doivent être réformés, l'Urssaf d'Eure et Loir étant en droit d'exiger le versement par la société Ethicon des cotisations après avoir fait application de la prescription pour toute la période antérieure au mois d'octobre 2005 en se fondant sur la seule information donnée sur la rectification des taux de cotisations par la CRAM du Centre en octobre 2008 puis en novembre 2008 ; que les mises en demeure notifiées à la société les 27 janvier 2009 et 23 février 2010 portaient les mentions suffisantes pour lui permettre de connaître la cause, la nature et l'étendue de sa dette ; qu'ainsi de ce chef également les jugements déférés doivent être réformés en ce qu'ils ont sans fondement procédé à l'annulation de ces mises en demeure ; qu'enfin que si l'Urssaf se substitue aux organismes de sécurité sociale pour assurer le recouvrement des cotisations AT/MP, cette union de recouvrement est dotée d'une personnalité juridique autonome ; que de ce fait les organismes de sécurité sociale ne disposent d'aucun pouvoir d'injonction à l'égard de l'Urssaf en matière de recouvrement des cotisations ; qu'ainsi il est inopérant pour la société Ethicon de prétendre que les recours exercés par elle auprès de l'un quelconque des organismes de sécurité sociale avaient les mêmes effets que s'ils avaient été adressés à l'Urssaf d'Eure et Loir ;

ALORS, D'UNE PART, QUE si, en principe l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque deux actions, quoique ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de telle sorte que la deuxième est virtuellement comprise dans la première ; que lorsque la reconnaissance du caractère indu des cotisations accidents du travail versées par l'employeur nécessite que ce dernier conteste au préalable une décision d'une caisse de sécurité sociale, le délai de prescription de l'action en remboursement des cotisations indues fixé par l'article L. 243-6 du Code de la sécurité sociale est nécessairement interrompu par l'exercice du recours contre la décision de la caisse qui a pour but de faire reconnaître le caractère indu des cotisations versées à la suite de cette décision ; qu'en estimant que le cours de la prescription triennale n'avait été interrompu qu'en octobre 2008 lorsque la Caisse Régionale d'Assurance Maladie du CENTRE a procédé à la rectification des taux de cotisations à la suite des différents recours exercés par la société ETHICON, la cour d'appel a violé les articles 2244 du Code civil, dans sa rédaction en vigueur, et L. 243-6 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la CPAM, la CRAM ¿ aujourd'hui CARSAT - et l'URSSAF sont les composantes d'un même service public de la sécurité sociale dotées au sein de la branche « accidents du travail et maladies professionnelles » d'attributions légales complémentaires ; que l'URSSAF n'est pas un tiers par rapport aux caisses de sécurité sociale et n'en est que le mandataire légal substitué aux caisses pour le recouvrement des cotisations sociales ; qu'il en résulte que l'URSSAF n'est pas fondée à invoquer son ignorance des recours exercés à l'encontre des décisions des caisses ayant conduit au versement de cotisations qu'elle a recouvrées ; qu'en reprochant à la société ETHICON de ne pas avoir informé l'URSSAF de ce qu'elle avait formé des contestations susceptibles d'entraîner une rectification rétroactive de ses taux de cotisations, la Cour d'appel a violé les articles L. 213-1 et L. 243-6 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 2244 du Code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

ALORS, DE TROISIEME PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE ni la valeur du risque, ni le taux de cotisations ne sont déterminés sinistre par sinistre et que les cotisations afférentes à un exercice ne sont pas versées par référence à un sinistre déterminé ; qu'il en résulte que le recours formé par l'employeur contre la décision de la CARSAT lui notifiant son taux de cotisation pour un exercice donné interrompt nécessairement le cours de la prescription de l'article L. 243-6 du Code de la sécurité sociale pour l'intégralité des cotisations versées en application de ce taux et ce, sans qu'il y ait lieu de distinguer les prises en charge ayant occasionné le versement de cotisations indues ; qu'au cas présent, les recours formés à compter de 2003 à l'encontre des décisions de la CRAM du CENTRE relative à son taux de cotisations avaient interrompu la prescription de l'action en remboursement des cotisations versées au titre des exercices concernés, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 2244 du Code civil, dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, ensemble les article L. 243-6 et D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-26988
Date de la décision : 19/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 13 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 déc. 2013, pourvoi n°12-26988


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.26988
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