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11/12/2013 | FRANCE | N°12-23133

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 décembre 2013, 12-23133


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Groupe Sofemo du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à compter du mois d'août 2008, M. et Mme Y..., M. et Mme Z..., M. et Mme A..., M. et Mme B... et M. C... ont chacun souscrit auprès de la société Groupe Sofemo un prêt destiné à financer la vente et la pose par la société BSP groupe VPF d'équipements de production d'électricité par panneaux photovoltaïques sur leurs immeubles respectifs ; q

u'en juin 2010, ces emprunteurs ont assigné à jour fixe la société Groupe Sofem...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Groupe Sofemo du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à compter du mois d'août 2008, M. et Mme Y..., M. et Mme Z..., M. et Mme A..., M. et Mme B... et M. C... ont chacun souscrit auprès de la société Groupe Sofemo un prêt destiné à financer la vente et la pose par la société BSP groupe VPF d'équipements de production d'électricité par panneaux photovoltaïques sur leurs immeubles respectifs ; qu'en juin 2010, ces emprunteurs ont assigné à jour fixe la société Groupe Sofemo et M. D..., pris en qualité de mandataire liquidateur de la société BSP groupe VPF, afin d'obtenir, sur le fondement de l'article L. 312-19 du code de la consommation, la suspension de l'exécution des prêts contractés ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société Groupe Sofemo reproche à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, que ne relèvent pas des opérations limitativement énumérées à l'article L. 312-2 du code de la consommation l'acquisition et l'installation d'un équipement de production d'électricité destinée à être revendue, à titre habituel, à un distributeur d'électricité, activité constitutive d'un acte de commerce dont les revenus sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, étrangères à la notion d'amélioration d'un immeuble, quand bien même celui-ci constituerait le support d'une telle installation, de sorte qu'en décidant le contraire par le motif inopérant qu'une telle installation permettrait aux propriétaires la production de leur propre électricité, la cour d'appel a violé par fausse application les dispositions de l'article L. 312-2 du code de la consommation, ensemble, celles de l'article L. 312-19 du même code ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que les prêts contractés étaient d'un montant supérieur à 21 500 euros et qu'ils étaient destinés à financer la vente et l'installation en toiture de panneaux photovoltaïques permettant aux propriétaires d'un immeuble à usage d'habitation d'améliorer leur bien par la production de leur propre électricité, même si tout ou partie de celle-ci pouvait être vendue à un fournisseur d'énergie, la cour d'appel en a exactement déduit que ces prêts relevaient des opérations énumérées à l'article L. 312-2 du code de la consommation dans sa rédaction applicable en la cause ; que le grief n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches, qui est recevable :
Vu l'article L. 312-19 du code de la consommation ;
Attendu que pour ordonner la suspension de l'exécution des contrats de prêt litigieux, l'arrêt retient le caractère sérieux des griefs formulés par les emprunteurs tant sur la validité que sur l'exécution des contrats principaux et accessoires, et considère que participent de l'inexécution des contrats principaux l'existence de malfaçons dans l'installation des panneaux photovoltaïques, l'absence de livraison et de pose d'un onduleur et le défaut de raccordement au réseau électrique ;
Qu'en se déterminant ainsi, quand seule l'inexécution des contrats principaux pouvait justifier la suspension de l'exécution des contrats de prêt, et qu'aucun des manquements relevés, hormis l'absence de livraison et de pose de l'onduleur destiné aux consorts A..., n'affectait l'exécution des contrats principaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour fonder la suspension de l'exécution des contrats de prêt, l'arrêt évoque l'inexécution des contrats principaux ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Groupe Sofemo qui faisait valoir que chacun des emprunteurs lui avait délivré une « attestation de livraison-demande de financement » certifiant l'exécution du contrat principal, en sorte qu'aucun d'eux ne pouvait plus soutenir le contraire afin d'obtenir la suspension de l'exécution du contrat de prêt, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné la suspension de l'exécution des contrats de prêt souscrits auprès de la société Groupe Sofemo par M. et Mme Y..., M. et Mme Z..., M. et Mme B... et M. C..., les consorts A... n'étant pas concernés, l'arrêt rendu le 22 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour la société Groupe Sofemo
En ce que l'arrêt attaqué, par confirmation du jugement dont appel, a ordonné la suspension de l'exécution des « contrats de prêts destinés à financer des travaux d'amélioration de l'habitation », souscrits par Monsieur et Madame Franck et Sandrine Y..., Monsieur et Madame Jocelyn et Françoise Z..., Monsieur et Madame Anthony et Marjorie A..., Monsieur et Madame Bertrand B... et Monsieur Bruno C... auprès de la société Groupe Sofemo, « jusqu'à la solution du litige portant la demande d'annulation et à tout le moins de la résolution du contrat principal souscrit avec la société BSP Groupe VPF et l'annulation ou du moins la résolution consécutive des contrats de crédits, introduite devant le tribunal de grande instance de Draguignan enregistrée sous le numéro 10/ 05680 » ;
Aux motifs propres que concernant les contrats de prêt souscrits par les époux Y..., Z..., A..., B... et Monsieur C..., le tribunal a exactement relevé qu'ils ne relevaient pas de l'article L. 311-3 du code de la consommation en ce que leur montant respectif dépasse le seuil de 21 500 ¿ fixé par décret ; mais, par des motifs pertinents que la Cour adopte, le tribunal a exactement considéré que ces cinq contrats relevaient, quelle que soit leur qualification dans l'acte, des dispositions d'ordre public de protection des articles L312-2 c et L312-19 du code de la consommation relatives à la protection des consommateurs dans le cadre de prêts immobiliers ; qu'il s'agit en effet de prêts, supérieurs à 21 500 ¿ destinés à financer l'installation en toiture de panneaux photovoltaïques permettant aux propriétaires d'un immeuble à usage d'habitation, non professionnels, au sens de I'article L. 312-3, d'améliorer leur bien par la production de leur propre électricité même si tout ou partie de celle-ci peut être revendue à ERDF, l'installation sur voligeage aéré de ces panneaux intégrés à la toiture, constituant un véritable contrat d'entreprise et même de construction, au sens du dernier de ces articles et de l'article 1792 du code civil, en ce que ces panneaux sont spécialement dimensionnés et configurés par rapport à chaque toiture, qu'ils se substituent aux tuiles, assurant ainsi le clos et le couvert de la maison, et nécessitent enfin un raccordement au réseau et une mise à la terre des capteurs ; qu'en constatant le caractère sérieux des griefs formulés au fond par les emprunteurs tant sur la validité des contrats principaux et accessoires, au regard des dispositions d'ordre public applicables, que sur leur exécution en termes de malfaçons ou inexécution pour le premier et de manquements aux obligations contractuelles pour le second, le tribunal, au vu des justificatifs produits, a fait une exacte application à la cause des dispositions de l'article L312-19 du code de la consommation, en faisant droit aux demandes de suspension d'exécution du prêt jusqu'à la solution du litige qui les oppose à leur locateur d'ouvrage, représenté par son liquidateur, et à l'organisme de prêt (arrêt, page 6, § 3 et 4) ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges que l'article L. 312-2 du code de la consommation définit les prêts qui relèvent de ces dispositions. Il s'agit des « prêts qui, quelle que soit leur qualification ou leur technique, sont consentis de manière habituelle par toute personne physique ou morale en vue de financer les opérations suivantes : Pour les immeubles à usage d'habitation ou à usage professionnel d'habitation (...) c) Les dépenses relatives à leur construction, leur réparation, leur amélioration ou leur entretien lorsque le montant de ces dépenses est supérieur à celui fixé en exécution du dernier alinéa de l'article L. 311-3 du même, code (...) », soit la somme de 21500 euros ; que la pose de panneaux photovoltaïques permettant au propriétaire d'une habitation de produire lui-même son électricité et de valoriser son bien constitue une amélioration de cette habitation. En conséquence, les prêts consentis aux demandeurs d'un montant supérieur à la somme de 21 500 euros souscrits pour la l'achat mais aussi la pose de panneaux photovoltaïques intégrés à la toiture doivent être soumis à la réglementation, protectrice des consommateurs, des prêts immobiliers ; qu'en outre, la pose de panneaux impliquant le retrait de tuiles et l'intégration des panneaux solaires dans la toiture de telle façon qu'ils assurent l'étanchéité de cet ouvrage de couverture, le bon de commande faisait état d'une garantie « décennale » au sens des articles 1792 et suivants du code civil et la société BSP a produit une attestation d'assurance décennale concernant une autre entreprise qui lui était liée. La pose des panneaux commandée constitue donc la réalisation d'un contrat d'entreprise au sens de l'article L. 312-19 du code de la consommation ; que Monsieur et Madame Y... invoquent une absence de raccordement au réseau ERDF, bien qu'ils aient réglé les frais y afférents et des malfaçons affectant la pose des panneaux au regard des normes en matière d'installations de ce type, relevées par Monsieur G... ; que Monsieur et Madame Z... produisent divers courriers échangés avec la société BSP et un constat d'un maître d'oeuvre, madame H..., qui énumère les malfaçons affectant la toiture de leur habitation au mois de janvier 2010 ; que Monsieur et Madame A... invoquent l'absence de livraison et de pose de l'onduleur et l'absence de versement de la participation du Conseil Régional promise ; que Monsieur et Madame B... et Monsieur et Madame C... invoquent l'absence de raccordement au réseau ERDF, malgré l'avance de la somme due à cet opérateur ; que ces éléments sont suffisamment précis pour faire apparaître une difficulté sérieuse relative à l'exécution du contrat principal. En effet, le contrat portait sur la fourniture et la pose d'un équipement complet permettant de produire de l'électricité et les installations litigieuses ne permettent pas cette production en l'état ; qu'au terme de l'article L. 312-19 du code de la consommation, « le tribunal peut, en cas de contestation ou d'accidents affectant l'exécution des contrats et jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de prêt sans préjudice du droit éventuel du prêteur à l'indemnisation » ; que les consorts Y..., Z..., A..., B... et C... ont intenté une action en justice tendant à l'annulation du contrat principal ou du moins sa résolution pour manquement à l'obligation d'exécution complète et mauvaise exécution ; que la société Sofemo a été appelée à cette instance ; qu'il convient donc de suspendre l'exécution du contrat de prêt, soit le paiement des échéances de remboursement, jusqu'à la solution de ce litige (jugement dont appel, page 15, pénultième et dernier §, et page 16, § 1 à 8) ;
1°/ Alors que ne relèvent pas des opérations limitativement énumérées à l'article L. 312-2 du code de la consommation l'acquisition et l'installation d'un équipement de production d'électricité destinée à être revendue, à titre habituel, à un distributeur d'électricité, activité constitutive d'un acte de commerce dont les revenus sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, étrangères à la notion d'amélioration d'un immeuble, quand bien même celui-ci constituerait le support d'une telle installation, de sorte qu'en décidant le contraire par le motif inopérant qu'une telle installation permettrait aux propriétaires la production de leur propre électricité, la cour d'appel a violé par fausse application les dispositions de l'article L. 312-2 du code de la consommation, ensemble, celles de l'article L. 312-19 du même code ;
2°/ Alors, en toute hypothèse, que selon l'article L. 312-19 du code de la consommation, lorsqu'il est déclaré dans l'acte constatant le prêt que celui-ci est destiné à financer des ouvrages ou des travaux immobiliers au moyen d'un contrat de promotion, de construction, de maîtrise d'oeuvre ou d'entreprise, le tribunal peut, en cas de contestation ou d'accidents affectant l'exécution des contrats et jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de prêt sans préjudice du droit éventuel du prêteur à l'indemnisation ; qu'en se fondant, pour faire droit à la demande de suspension des contrats de prêt, sur le caractère sérieux des griefs formulés au fond par les emprunteurs sur la validité des contrats principaux et accessoires, ou encore de « de manquements aux obligations contractuelles » concernant les contrats de prêts, griefs étrangers à l'exécution des contrats principaux, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a violé par fausse application l'article L. 312-19 du code de la consommation ;
3°/ Alors par ailleurs que selon l'article L. 312-19 du code de la consommation, lorsqu'il est déclaré dans l'acte constatant le prêt que celui-ci est destiné à financer des ouvrages ou des travaux immobiliers au moyen d'un contrat de promotion, de construction, de maîtrise d'oeuvre ou d'entreprise, le tribunal peut, en cas de contestation ou d'accidents affectant l'exécution des contrats et jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de prêt sans préjudice du droit éventuel du prêteur à l'indemnisation ; qu'il se déduit de ce texte que la contestation élevée par l'emprunteur doit intervenir pendant la durée de l'exécution du contrat principal de sorte qu'en faisant droit à la demande de suspension des contrats de prêts sur le fondement de griefs prétendument formulés sur l'exécution des contrats « en termes de malfaçons », cependant qu'il ressort des motifs du jugement confirmé qu'à l'exception des époux A..., les contestations élevées par les emprunteurs étaient postérieures à l'achèvement des travaux financés, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 312-19 du code de la consommation ;
4°/ Et alors, enfin et en tout état de cause, que la société Sofemo faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p. 17 et 18) que les emprunteurs avaient tous délivré une attestation certifiant que le contrat financé avait été exécuté pour demander le déblocage du prêt de sorte qu'ils n'étaient pas recevables à se prévaloir à son égard d'une prétendue inexécution de ce contrat à l'appui d'une demande de suspension du contrat de prêt ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des écritures de la société Sofemo, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences des articles 455 et 458 du code de procédure civile qu'elle a violés.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-23133
Date de la décision : 11/12/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 22 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 déc. 2013, pourvoi n°12-23133


Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23133
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