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10/12/2013 | FRANCE | N°12-25808;13-14049

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 décembre 2013, 12-25808 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° A 12-25.808 et Q 13-14.049 qui attaquent la même ordonnance ;

Statuant tant sur les pourvois principaux formés par la société JLI que sur le pourvoi incident relevé par l'association des paralysés de France (l'APF) ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° A 12-25.808, contestée par la défense :
Vu les articles 611-1, 979 et 1441-1 du code de procédure civile ;
Attendu que, hors les cas où la notification de la décision susceptible de pourvoi incombe au greffe de la j

uridiction qui l'a rendue, la décision attaquée est signifiée, à peine d'irrecevabi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° A 12-25.808 et Q 13-14.049 qui attaquent la même ordonnance ;

Statuant tant sur les pourvois principaux formés par la société JLI que sur le pourvoi incident relevé par l'association des paralysés de France (l'APF) ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° A 12-25.808, contestée par la défense :
Vu les articles 611-1, 979 et 1441-1 du code de procédure civile ;
Attendu que, hors les cas où la notification de la décision susceptible de pourvoi incombe au greffe de la juridiction qui l'a rendue, la décision attaquée est signifiée, à peine d'irrecevabilité du pourvoi, avant l'expiration du délai prévu à l'article 978 du même code et copie de cette signification est remise au greffe dans le même délai ;
Attendu que la société JLI a formé un pourvoi le 12 septembre 2012 contre une ordonnance rendue dans les conditions de l'article 1441-1 du code de procédure civile le 29 août 2012 ; qu'elle n'a produit aucune signification de l'ordonnance dans le délai du dépôt du mémoire ampliatif ; que ce pourvoi n'est pas recevable ;
Sur la recevabilité du pourvoi principal n° Q 13-14.049, contestée par la défense :
Attendu qu'ayant formé un second pourvoi le 13 mars 2013, après signification de l'ordonnance attaquée le 28 février 2013, sans que ce recours ne se heurte à un arrêt d'irrecevabilité du précédent pourvoi n° A 12-25.808 attaquant la même décision, la société JLI est recevable en son nouveau pourvoi ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue en la forme des référés, que l'APF a, par avis d'appel public à la concurrence, lancé une procédure d'appel d'offres ouvert, pour la conclusion de marchés à bon de commande avec allotissement d'une durée limitée, ayant pour objet la réalisation de prestations de transport d'usagers en situation de handicap sur différents sites ; que n'ayant été désignée attributaire que de certains lots et s'estimant victime d'une rupture d'égalité de traitement, la société JLI a saisi le président du tribunal de grande instance de Paris d'un référé précontractuel aux fins d'annulation de la procédure ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident n° Q 13-14.049, qui est préalable :
Attendu que l'APF fait grief à l'ordonnance d'avoir jugé recevable la demande de la société JLI et d'avoir ainsi admis la compétence du juge du référé précontractuel, alors, selon le moyen, que l'article R. 213-5-1 du code de l'organisation judiciaire dispose que le président du tribunal de grande instance compétent en application de l'article L. 211-14 connaît des contestations relatives aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des contrats de droit privé relevant de la commande publique dans les cas et conditions prévus par les articles 2 à 20 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique ; que l'article 3-I de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 dispose que « I.- Les pouvoirs adjudicateurs soumis à la présente ordonnance sont 1° Les organismes de droit privé ou les organismes de droit public autres que ceux soumis au code des marchés publics dotés de la personnalité juridique et qui ont été créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont : a) - Soit l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance ; b) - Soit la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance ; c) - Soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance » de sorte qu'en considérant que cette ordonnance était applicable à l'APF, qui est un organisme de droit privé doté de la personnalité juridique créé pour satisfaire un besoin d'intérêt général autre qu'industriel et commercial mais qui n'est nullement lié à un pouvoir adjudicateur dès lors que sa gestion n'est pas soumise à un contrôle d'un pouvoir adjudicateur, au sens de ce texte, que son organe de direction n'est nullement composé de représentants de pouvoir adjudicateur et que son financement n'est pas « majoritairement public » au sens de ce texte, l'ordonnance critiquée a violé, par fausse application, l'article R. 213-5-1 du code de l'organisation judiciaire ainsi que l'article 3-I de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relatives aux marchés passés par les personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'ordonnance attaquée ni des productions que l'APF ait contesté que l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 lui fût applicable au regard de la composition de son organe de direction et de son mode de financement ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal n° Q 13-14.049, pris en sa première branche :
Vu l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
Attendu que pour rejeter la demande d'annulation, l'ordonnance retient que le manquement au principe d'égalité de traitement des candidats ne peut résulter du fait que l'APF n'a pas rendu publiques les informations relatives à la masse salariale concernée par l'obligation de reprise du personnel prévue par l'accord du 7 juillet 2009, la communication de ces données ne concernant qu'une partie des candidats, des renseignements complémentaires pouvant être sollicités dans le respect de la date fixée dans le dossier de consultation et la société JLI étant déjà informée de ce coût, qu'elle a nécessairement pris en compte dans la présentation de son offre et du prix proposé, compte tenu de ce qu'elle était précédemment titulaire de quinze lots et de ce que chaque circuit quotidien nécessite un chauffeur dont la rémunération est déterminée par la convention collective ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il y était invité, si le coût de cette masse salariale ne constituait pas un élément essentiel du marché permettant aux candidats d'en apprécier les charges et d'élaborer une offre satisfaisante, le président du tribunal de grande instance a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
Déclare irrecevable le pourvoi n° A 12-25.808 ;
Et sur le pourvoi n° Q 13-14.049 :
REJETTE le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle a déclaré l'action de la société JLI recevable, l'ordonnance rendue le 29 août 2012, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Paris ; remet en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance, et pour être fait droit, les renvoie devant le président du tribunal de grande instance de Nanterre ;
Condamne l'association des paralysés de France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal n° Q 13-14.049 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société JLI
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée, rendue en dernier ressort, d'avoir rejeté la demande de la société JLI tendant à voir annuler la procédure engagée par l'association des paralysés de France (APF) ayant pour objet l'attribution des marchés du transport scolaire des enfants handicapés scolarisés au sein des instituts d'éducation motrice (IEM) de Béthune, Villeneuve-d'Ascq, Liévin et Lille pour une durée de trois plus une année optionnelle,
AUX MOTIFS QUE l'article L 1224-1 du code du travail dispose que " lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise" ; que l'article L 1224-2 du même code énonce que "le nouvel employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification sauf dans les cas suivants : 1° procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ; 2° Substitution d'employeurs intervenue sans qu'il y ait eu de convention entre ceux-ci ; «Le premier employeur rembourse les sommes acquittées par le nouvel employeur, dues à la date de la modification sauf s'il a été tenu compte de la charge résultant de ces obligations dans la convention intervenue entre eux» ; que la question se pose de savoir si la perte d'un marché est assimilable à la "modification d'une situation juridique" et si l'accord du 7 juillet 2009 est ou non applicable à tous les opérateurs économiques intéressés par la consultation lancée par l'ANPF ; que l'article 1er de la convention collective du 21 décembre 1950 définit le transport routier de voyageurs «par référence à la nomenclature d'activité NAF adaptée de la nomenclature d'activités européennes NACE» et approuvée par le décret 92 1129 du 2 octobre 1992 ; que l'article 1er de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataires (interurbain) dispose que «les présentes dispositions s'appliquent aux entreprises de transport routier de voyageurs visés à l'article 1el de la convention collective nationale principale des transports routiers et activités auxiliaires de transport» ; que les activités de transport routier de voyageurs sont désignées comme suit par les classes NAF : 60-2- B transports routiers réguliers de voyageurs. Cette classe comprend le transport interurbain de voyageurs par autocar, sur des lignes et selon des horaires déterminés, même à caractère saisonnier ; que cette classe comprend aussi le ramassage scolaire ou le transport de personnel : 60-2-G autres transports routiers de voyageurs. Cette classe comprend l'organisation d'excursion en autocars ; les circuits touristiques urbains par car ; la location d'autocar (avec conducteur) à la demande." ; que la consultation publique lancée par l'APF pouvait concerner des opérateurs économiques ne relevant pas de ces codes ; qu'eu égard aux stipulations du cahier des charges notamment l'article 3 .1, les prestations, objet de la consultation, ne pouvaient être réalisées par autocar mais par l'utilisation de véhicule particulier ou COMBI (véhicule aménagé de capacité inférieure à 9 passagers et se conduisant avec un permis pour véhicule léger) ; que l'accord du 7 juillet 2009 ne s'appliquant qu'aux parties à la convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport, le transfert de personnel prévu par cet accord n'a lieu que dans le cas où l'entreprise entrante et l'entreprise sortante relèvent toutes les deux de son champ d'application ; que la communication des données relatives à la masse salariale de l'entreprise sortante ne concernait donc qu'une partie des candidats ; que par suite, il s'en déduit que le fait de ne pas avoir rendu publiques les informations relatives à la masse salariale pour chacun des lots dès le lancement de la consultation ne peut constituer un manquement au principe d'égalité de traitement des candidats » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le principe d'égalité de traitement des candidats auquel sont soumis les marchés des pouvoirs adjudicateurs qui, comme l'APF, relèvent de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 impose que les candidats soient mis à même de prendre connaissance des éléments essentiels du marché, qui sont nécessaires à l'élaboration de leur offre ; que tel est le cas des informations concernant la masse salariale des personnels dont la reprise est imposée, notamment, par une convention collective ou un accord collectif étendu, dont la connaissance permet aux candidats d'apprécier les charges du cocontractant et d'élaborer utilement une offre ; qu'en écartant le moyen pris du non respect du principe d'égalité de traitement entre les candidats résultant de l'absence de communication aux candidats des informations relatives à la masse salariale des personnels des titulaires sortants susceptibles de devoir être repris en application de l'accord collectif du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire (Interurbain) dans les entreprises de transport routier de voyageurs sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si cette masse salariale ne constituait pas un élément essentiel du marché, le juge du référé précontractuel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le principe d'égalité de traitement des candidats auquel sont soumis les marchés des pouvoirs adjudicateurs qui, comme l'APF, relèvent de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, impose que les candidats soient mis à même de prendre connaissance des éléments essentiels du marché, qui sont nécessaires à l'élaboration de leur offre ; que lorsque l'entreprise attributaire est susceptible de devoir reprendre les salariés du titulaire du précédent marché sur le fondement d'obligations résultant d'un accord collectif ou d'une convention collective étendue, la masse salariale correspondante, qui constitue un élément essentiel du marché, doit être communiquée à tous les candidats, quand bien même certains ne seraient pas soumis à cette obligation conventionnelle de reprise, afin qu'ils puissent présenter une offre dans des conditions d'une égale concurrence ; qu'en estimant « que l'accord du 7 juillet 2009 ne s'appliquant qu'aux parties à la convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport, le transfert de personnel prévu par cet accord n'a lieu que dans le cas où l'entreprise entrante et l'entreprise sortante relèvent toutes les deux de son champ d'application ; que la communication des données relatives à la masse salariale de l'entreprise sortante ne concernait donc qu'une partie des candidats ; que par suite, il s'en déduit que le fait de ne pas avoir rendu publiques les informations relatives à la masse salariale pour chacun des lots dès le lancement de la consultation ne peut constituer un manquement au principe d'égalité de traitement des candidats », le juge du référé précontractuel a violé l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
ET ALORS, ENFIN, QUE le principe d'égalité de traitement des candidats auquel sont soumis les marchés des pouvoirs adjudicateurs qui, comme l'APF, relèvent de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, impose que les candidats soient mis à même de prendre connaissance des éléments essentiels du marché, qui sont nécessaires à l'élaboration de leur offre ; que lorsque l'entreprise attributaire est susceptible de devoir reprendre les salariés du titulaire du précédent marché sur le fondement d'obligations résultant d'un accord collectif ou d'une convention collective étendu, la masse salariale correspondante, qui constitue un élément essentiel du marché, doit être communiquée aux candidats ; qu'en estimant « que l'accord du 7 juillet 2009 ne s'appliquant qu'aux parties à la convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport, le transfert de personnel prévu par cet accord n'a lieu que dans le cas où l'entreprise entrante et l'entreprise sortante relèvent toutes les deux de son champ d'application ; que la communication des données relatives à la masse salariale de l'entreprise sortante ne concernait donc qu'une partie des candidats ; que par suite, il s'en déduit que le fait de ne pas avoir rendu publiques les informations relatives à la masse salariale pour chacun des lots dès le lancement de la consultation ne peut constituer un manquement au principe d'égalité de traitement des candidats », motifs dont il résulte qu'une partie des candidats était susceptible d'être concernée par la reprise du personnel des titulaires sortants, le juge du référé précontractuel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, qu'il a ainsi violé ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée, rendue en dernier ressort, d'avoir rejeté la demande de la société JLI tendant à voir annuler la procédure engagée par l'association des paralysés de France (APF) ayant pour objet l'attribution des marchés du transport scolaire des enfants handicapés scolarisés au sein des instituts d'éducation motrice (IEM) de Béthune, Villeneuve-d'Ascq, Liévin et Lille pour une durée de trois plus une année optionnelle,
AUX MOTIFS QUE « par ailleurs, les dispositions de l'article 4 du dossier de consultation intitulé « compléments d'information » prévoient : « les demandes de renseignements complémentaires devront être posées par mail avant le 2 avril à 17 :00. Elles doivent impérativement rappeler les références de la consultation (numéro et intitulé exact). Les renseignements nécessaires seront alors envoyés dans les meilleurs délais et en tout état de cause trois jours calendaires avant la date limite fixée pour la réception des offres. Les réponses aux demandes de renseignements complémentaires seront envoyés uniquement par courrier électronique ¿ » ; qu'ainsi, les candidats concernés par la reprise du personnel au titre de l'accord du 7 juillet 2009 pouvaient obtenir toutes les informations nécessaires à leur établissement » ;
ALORS QUE le principe d'égalité de traitement des candidats auquel sont soumis les marchés des pouvoirs adjudicateurs qui, comme l'APF, relèvent de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, impose que les candidats soient mis à même de prendre connaissance des éléments essentiels du marché, qui sont nécessaires à l'élaboration de leur offre ; que lorsque l'entreprise attributaire est susceptible de devoir reprendre les salariés du titulaire du précédent marché sur le fondement d'obligations résultant d'un accord collectif ou d'une convention collective étendu, la masse salariale correspondante, qui constitue un élément essentiel du marché, dont la connaissance permet aux candidats d'apprécier les charges du cocontractant et d'élaborer utilement une offre, doit être communiquée à tous les candidats ; que la circonstance que les candidats puissent, s'ils le demandent, obtenir des « renseignements complémentaires », qui n'est de nature ni à établir que ceux qui n'étaient pas antérieurement titulaires du marché en cause ont effectivement bénéficié de ces informations propres à les placer dans des conditions d'égalité avec les soumissionnaires sortants ni à exclure que le défaut d'information de l'attributaire qui n'aurait pas sollicité ces informations ait pu exercer une influence sur la présentation de son offre, ne tenant pas compte de cet élément, est inopérante ; qu'en se déterminant de la sorte, le juge du référé précontractuel a violé l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée, rendue en dernier ressort, d'avoir rejeté la demande de la société JLI tendant à voir annuler la procédure engagée par l'association des paralysés de France (APF) ayant pour objet l'attribution des marchés du transport scolaire des enfants handicapés scolarisés au sein des instituts d'éducation motrice (IEM) de Béthune, Villeneuve-d'Ascq, Liévin et Lille pour une durée de trois plus une année optionnelle,
AUX MOTIFS QUE enfin les personnes habilitées à agir pour mettre fin à un manquement du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles susceptibles d'être lésées par de tels manquements ; qu'il appartient au juge du référé précontractuel de rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquement qui eu égard à leur portée au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésé ou risquent de la léser ; que la société JLI soutient à ce égard que l'Association des Paralysés de France par le manquement aux règles de publicité et de mise en concurrence qu'elle a commis l'a lésée directement en la privant d'une information nécessaire à l'établissement de son offre et indirectement, l'absence de cette information ayant pu avantager ses concurrents en les conduisant à sous-estimer le montant de leur offre ; la société JLI titulaire de quinze lots avant la remise en concurrence était déjà informée du montant de la masse salariale transférable et a nécessairement pris en compte dans la présentation de son offre et du prix proposé ; que, par ailleurs, s'agissant de prestations de transport organisées en circuit quotidien, le nombre de personnel nécessaire à la réalisation de la prestation est connu et ne varie (47 circuits quotidiens 47 chauffeurs dont la rémunération est déterminée par la convention collective) » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la société JLI a soutenu avoir été directement lésée par l'absence de communication des informations concernant la masse salariale des personnels affectés aux marchés dont elle n'était pas antérieurement titulaire, à défaut de laquelle elle n'avait pu apprécier les charges du cocontractant et élaborer utilement une offre ; qu'en se bornant à énoncer que « la société JLI titulaire de quinze lots avant la remise en concurrence était déjà informée du montant de la masse salariale transférable et a nécessairement pris en compte dans la présentation de son offre et du prix proposé », motifs dont il ne résulte pas qu'elle aurait été informée de la masse salariale afférente aux trente-quatre lots dont elle n'était pas antérieurement titulaire, le juge du référé précontractuel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la société JLI a soutenu avoir été directement et indirectement lésée par l'absence de communication aux candidats des informations concernant la masse salariale des personnels affectés aux marchés dont elle n'était pas antérieurement titulaire, à défaut de laquelle elle n'avait pu apprécier les charges du cocontractant et élaborer utilement une offre, ses concurrents, n'ayant pas davantage bénéficié de ces informations, ayant pour leur part pu présenter une offre, ne tenant pas compte de cette masse salariale, inférieure à la sienne, qui en tenait compte, pour les marchés dont elle était antérieurement titulaire ; qu'en se bornant à énoncer que « s'agissant de prestations de transport organisées en circuit quotidien, le nombre de personnel nécessaire à la réalisation de la prestation est connu et ne varie (47 circuits quotidiens 47 chauffeurs dont la rémunération est déterminée par la convention collective) », motif, dont il ne résulte pas que les candidats non sortants auraient effectivement connu la masse salariale des personnels affectés aux marchés dont ils n'étaient pas antérieurement titulaires, qui sont impropres à écarter les préjudices direct et indirect ainsi allégués, le juge du référé précontractuel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE la société JLI a soutenu avoir été directement et indirectement lésée par l'absence de communication aux candidats des informations concernant la masse salariale des personnels affectés aux marchés dont elle n'était pas antérieurement titulaire, à défaut de laquelle elle n'avait pu apprécier les charges du cocontractant et élaborer utilement une offre, ses concurrents, n'ayant pas davantage bénéficié de ces informations, ayant pour leur part pu présenter une offre, ne tenant pas compte de cette masse salariale, inférieure à la sienne, qui en tenait compte, pour les marchés dont elle était antérieurement titulaire ; qu'en se bornant à énoncer que « s'agissant de prestations de transport organisées en circuit quotidien, le nombre de personnel nécessaire à la réalisation de la prestation est connu et ne varie (47 circuits quotidiens 47 chauffeurs dont la rémunération est déterminée par la convention collective) », cependant que l'article 2 paragraphe 2.4, point B, de l'accord collectif du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire (Interurbain) dans les entreprises de transport routier de voyageurs, étendu par l'arrêté du 22 juillet 2010, dispose que le salarié affecté à un marché de transport routier de voyageurs bénéficie, dans le cadre du maintien de son emploi par le nouveau prestataire, « du maintien de sa rémunération mensuelle brute de base (...) » et que « cette rémunération comprend, outre le salaire et le 13e mois, toutes les primes à caractère fixe existant depuis au moins 12 mois dans l'entreprise (...) », ce qui interdit de pouvoir admettre, contrairement à ce que suggère l'ordonnance attaquée, que la connaissance du nombre de salariés affectés aux quarante-sept lots de la consultation et de la rémunération déterminée par la convention collective, qui porte sur un salaire minimum qui ne correspond pas nécessairement à celui effectivement versé, lequel dépend en outre de l'ancienneté des salariés et inclut de surcroît les éventuelles primes perçues par ceux-ci, permettait de déterminer le montant de la masse salariale y afférente, le juge du référé précontractuel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, ensemble l'accord collectif précité ;
ET ALORS, ENFIN, QUE la société JLI a soutenu avoir été indirectement lésée par l'absence de communication aux candidats des informations concernant la masse salariale des personnels affectés aux marchés dont elle était antérieurement titulaire, ses concurrents ayant pour leur part pu présenter une offre, ne tenant pas compte de cette masse salariale, inférieure à la sienne, qui en tenait compte ; qu'en ne répondant pas au moyen qui lui était ainsi soumis, le juge du référé précontractuel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident n° Q 13-14.049 par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils pour l'associaton des paralysés de France
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir jugé recevable la demande de la société JLI et d'avoir ainsi admis la compétence du juge du référé précontractuel,
AUX MOTIFS QUE
"le présent litige n'est pas soumis au code des marchés publics mais aux dispositions de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relatives aux marchés passés par les personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics"
ALORS QUE l'article R 213-5-1 du Code de l'organisation judiciaire dispose que le président du tribunal de grande instance compétent en application de l'article L. 211-14 connaît des contestations relatives aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des contrats de droit privé relevant de la commande publique dans les cas et conditions prévus par les articles 2 à 20 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique ; que l'article 3-I de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 dispose que "I. - Les pouvoirs adjudicateurs soumis à la présente ordonnance sont 1° Les organismes de droit privé ou les organismes de droit public autres que ceux soumis au code des marchés publics dotés de la personnalité juridique et qui ont été créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont : a) - Soit l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance ; b) - Soit la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance ; c) - Soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance" de sorte qu'en considérant que cette ordonnance était applicable à l'APF, qui est un organisme de droit privé doté de la personnalité juridique créé pour 130328/MPM satisfaire un besoin d'intérêt général autre qu'industriel et commercial mais qui n'est nullement lié à un pouvoir adjudicateur dès lors que sa gestion n'est pas soumise à un contrôle d'un pouvoir adjudicateur, au sens de ce texte, que son organe de direction n'est nullement composé de représentants de pouvoir adjudicateur et que son financement n'est pas "majoritairement public" au sens de ce texte, l'ordonnance critiquée a violé, par fausse application, l'article R 213-5-1 du Code de l'organisation judiciaire ainsi que l'article 3-I de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relatives aux marchés passés par les personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-25808;13-14049
Date de la décision : 10/12/2013
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REFERE - Applications diverses - Contrats de la commande publique - Référé précontractuel - Moyens invocables - Ordonnance du 6 juin 2005 - Article 6 - Egalité de traitement des candidats - Masse salariale du personnel à reprendre - Défaut de communication à tous les candidats

Prive sa décision de base légale au regard de l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, le président d'un tribunal de grande instance qui rejette la demande d'annulation de la procédure de passation d'un marché de la commande publique, en retenant que le manquement au principe d'égalité de traitement des candidats ne peut résulter du fait que le pouvoir adjudicateur n'a pas rendu publiques les informations relatives à la masse salariale concernée par l'obligation de reprise du personnel prévue par l'accord du 7 juillet 2009 aux motifs que la communication de ces données ne concernerait qu'une partie des candidats et que le requérant était déjà informé de ce coût compte tenu de ce qu'il était précédemment titulaire d'un certain nombre de lots, sans rechercher, comme il y était invité, si le coût de cette masse salariale ne constituait pas un élément essentiel du marché permettant aux candidats d'en apprécier les charges et d'élaborer une offre satisfaisante, devant être communiqué à tous les candidats


Références :

Sur le numéro 1 : articles 611-1, 979 et 1441-1 du code de procédure civile
Sur le numéro 2 : articles 621 et 1441-1 du code de procédure civile
Sur le numéro 3 : article 6 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 29 août 2012

Sur le n° 1 : Dans le même sens que :Com., 10 décembre 2013, pourvois n° 13-10.441 et 13-10.709, Bull. 2013, IV, n° 180 (1) (irrecevabilité et cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 déc. 2013, pourvoi n°12-25808;13-14049, Bull. civ. 2013, IV, n° 181
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 181

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Batut
Rapporteur ?: Mme Tréard
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.25808
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