LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que la perte de revenus locatifs ne saurait être réclamée, que le préjudice invoqué au titre de l'action engagée par les époux X..., la SCI du Grand Morgon et de la société Pharmacie du Grand Morgon était futur et hypothétique et que ni le lien de causalité entre les vues directes et les irrégularités affectant le permis de construire litigieux ni le préjudice au titre des désordres affectant la construction élevée n'étaient établis et que les deux procédures inutilement engagées n'étaient pas de nature à entraîner l'abandon du projet de transfert de la pharmacie mais au mieux de le retarder, la cour d'appel, appréciant l'importance de la chance perdue d'obtenir une décision favorable des juridictions administratives et celle de voir atténués les inconvénients résultant de la présence des immeubles dont la régularité était contestée, a souverainement fixé le préjudice résultant de cette perte de chance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer la somme de 3 000 euros à la société Z...- A... ; rejette la demande de M. Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Le moyen reproche l'arrêt attaqué d'avoir condamné un avocat (la SCP Z...- A...) à payer à son client (M. Y..., l'exposant) la somme de 30. 000 ¿ seulement en indemnisation de la perte de chance qu'il avait de gagner les procès engagés pour retrait de permis de construire ;
AUX MOTIFS QUE la SCP Z...- A... con-cédait avoir commis une irrégularité de forme qui l'avait conduite aux désistements querellés ; qu'elle soutenait avoir toutefois proposé, vainement, à M. Y... une stratégie palliative consistant à mettre en demeure le maire de retirer volontairement l'autorisation qu'il avait pu accorder en présence d'une fraude dans le dossier de permis de construire et en indemnisation, et de contester ensuite devant la juridiction administrative la décision implicite ou explicite de rejet ; que les désistements de la société civile professionnelle étaient donc imputables à une faute caractérisée de la part de celle-ci, qu'il s'agisse de la négligence que la société d'avocats reconnaissait ou de l'erreur de droit que lui reprochait son client ; que la stratégie alternative proposée offrait en revanche peu de chances de succès ; que si les deux procédures engagées par M. Y... avaient, pour leur part, de sérieuses chances d'aboutir, elles n'étaient pas, en toute hypothèse, de nature à entraîner l'abandon par la pharmacie locataire de son projet de transférer son activité, mais au mieux, à le retarder ; qu'il était à relever qu'en lui demandant le doublement du montant des loyers, M. Y... n'avait pu que le renforcer ; que ce bailleur ne pouvait réclamer l'indemnisation d'une perte de revenus locatifs putatifs ; que, surtout, le préjudice invoqué par M. Y... était futur et hypothétique ; qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer en attendant son éventuelle réalisation ; que M. Y... soutenait que les ouvertures pratiquées dans la construction entraînaient une moins-value d'environ 150. 000 ¿ sur la valeur du bien dont il était propriétaire ; que le lien de causalité entre les vues directes alléguées et les irrégularités affectant le permis de construire litigieux qui étaient soumises à la juridiction administrative n'était pas suffisamment établi ; qu'il en allait de même du préjudice que l'intéressé affirmait subir du fait de désordres affectant la construction élevée ; qu'en définitive le tribunal avait justement estimé à la somme de 30. 000 ¿ le montant total du préjudice issu de la perte de chance sérieuse qu'il avait de gagner les procès engagés ; que le jugement serait confirmé par substitution de motifs à ceux du premier juge ;
ALORS QUE l'indemnisation d'une perte de chance est à la mesure de la chance perdue et ne saurait résulter d'une évaluation forfaitaire ; qu'en déclarant que les deux procédures engagées par l'exposant avaient de sérieuses chances d'aboutir, puis, en fixant cette perte de chance à la somme de 30. 000 ¿, procédant ainsi à une évaluation forfaitaire du préjudice subi, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil et le principe de la réparation intégrale.