LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Bernard X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 3-5, en date du 22 juin 2012, qui l'a déclaré coupable d'abandon de famille, a ajourné le prononcé de la peine et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 septembre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Castel conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
Sur le rapport de M. le conseiller CASTEL, les observations de Me BERTRAND, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LACAN ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 227-3 du code pénal, 2, 3, 388, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d'abandon de famille ;
" aux motifs que M. X...ne conteste pas avoir eu connaissance de son obligation alimentaire telle que fixée par l'ordonnance du juge aux affaires familiales de Paris du 9 novembre 2000, en exécution de laquelle il a procédé à des paiements ; que la période de la prévention est comprise entre le 1er mars et le 31 mai 2010 ; que malgré les dénégations du prévenu, il ressort des déclarations de Mme ...
Z..., telles que confortées par les pièces qu'elle fournit et notamment par les extraits du compte bancaire dont elle est titulaire dans les livres de la banque BBVA, qu'entre le mois de janvier et le mois d'avril 2010 inclus, elle n'a remis en banque que deux chèques correspondant aux pensions alimentaires : le 27 janvier 2010, un chèque n° 0130193 d'un montant de 2 797, 44 euros, le 25 mars 2010, un chèque n° 0130190 d'un montant de 2 808, 62 euros ; que les délais apportés à la remise en banque des deux chèques ne peuvent être imputés au prévenu mais qu'il n'en demeure pas mois que celui-ci n'établit pas avoir payé chaque mois d'avance la contribution mise à sa charge dans l'intérêt de ses enfants par une décision civile exécutoire ; qu'en effet, il ne justifie qu'avoir fait signifier le 20 janvier 2010 à Mme ...
Z...le chèque de 2 797, 44 euros et qu'avoir émis le 15 février 2010 le chèque de 2 808, 62 euros ; qu'il sera donc retenu que les pensions des mois de décembre 2009, janvier et février 2010 ont été payées avec retard le 20 janvier 2010 pour les deux premières et le 15 février 2010 pour la troisième ; que, pour les mois de mars, avril et mai 2010, les constatations de l'huissier mandaté par Mme ...
Z...font clairement apparaître que les plis qui lui ont été envoyés par M. X...ne contenaient pas de chèque mais une feuille blanche repliée ; qu'il n'y a pas d'élément objectif permettant de remettre en cause les constatations de cet huissier ; qu'en outre, les constatations opérées sur les envois ultérieurs révèlent un certain montage puisque : le pli de mai 2010 contient d'une manière inexplicable une souche de chèque collée et non remploie, alors que le prévenu est expert comptable ; le pli de juillet 2010 contient une feuille de papier à un format proche de celui d'un chèque avec une souche cette fois remplie et agrafée ; qu'enfin, M. X...affirme ne pas s'être rendu compte de l'absence d'encaissement des chèques qu'il prétend avoir émis parce qu'il ne disposait que de relevés de compte mensuels ; qu'il convient toutefois de relever ; qu'il ne s'est pas manifesté auprès de Mme ...
Z...avant le 1er juin 2010 pour régulariser la situation du premier trimestre 2010 et ce alors même qu'il y avait eu des précédents ; que suivant ses propres déclarations, la lecture de ses relevés de compte bancaire pour les mois de mars et d'avril 2010 aurait dû attirer son attention sur l'absence de prélèvement de toute contribution ; que l'émission du chèque de 5 617, 24 euros pour régler les pensions des mois de mars, avril, mai et juin 2010 est daté du 1er juin 2010 ; qu'il suit son audition par les enquêteurs de police du 20 mai 2010 ; que la preuve d'un complot ourdi par Mme ...
Z...n'est pas rapportée ; que bien au contraire, elle a accepté de renoncer à l'encaissement des chèques qu'elle disait ne pas avoir reçus mais que le prévenu affirmait lui avoir envoyés ; qu'en conséquence, M. X...n'établit pas avoir payé à la date fixée les pensions alimentaires des mois de mars, avril et mai 2010 dont il était débiteur ; que son abstention a suivi une période de carence de plus de deux mois consécutifs puisque les pensions des mois de décembre 2009, janvier et février 2010 ont également été payées avec retard ; que dès lors le jugement déféré sera confirmé sur la déclaration de culpabilité ;
" 1°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'aux termes de la citation du 11 juin 2010, qui seule fixait les limites de la prévention, il était reproché à M. X...d'avoir omis volontairement, pendant plus de deux mois, d'acquitter le montant intégral de la pension due à Mme ...
Z...pour la période du 1er mars au 31 mai 2010 ; qu'en imputant à M. X...d'avoir réglé en retard les pensions des mois de décembre 2009, janvier et février 2010, quand ces faits n'étaient pas visés par la citation du 11 juin 2010 et alors qu'il ne résulte pas des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu ait accepté d'être jugé sur ces faits, la cour d'appel a violé l'article 388 du code de procédure pénale, ensemble les textes visés au moyen ;
" 2°) alors que c'est la date de la poursuite qui doit être prise en considération pour savoir si, au sens de l'article 227-3 du code pénal, le prévenu est demeuré plus de deux mois consécutifs sans s'acquitter intégralement du montant de la pension mise à sa charge ; qu'en relevant que l'abstention du prévenu avait « suivi une période de carence de plus de deux mois consécutifs puisque les pensions des mois de décembre 2009, janvier et février 2010 ont également été payées avec retard », pour en déduire que M. X...devait être déclaré coupable du délit de l'article 227-3 du code pénal, tout en constatant que les pensions des mois de décembre 2009 et janvier 2010 avaient été payées le 20 janvier 2010, et celle du mois de février 2010 le 15 février 2010, soit antérieurement à la date de la citation délivrée le 11 juin 2010, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé le texte susvisé, ensemble les textes visés au moyen ;
" 3°) alors que c'est la date de la poursuite qui doit être prise en considération pour savoir si le prévenu est demeuré plus de deux mois consécutifs sans s'acquitter intégralement du montant de la pension mise à sa charge ; qu'en déclarant M. X...coupable de n'avoir pas réglé à la date fixée par l'ordonnance du 9 novembre 2000 les pensions alimentaires des mois de mars, avril et mai 2010, seule période visée à la prévention, tout en relevant que ces sommes avaient été réglées par un chèque de 5 617, 24 euros daté du 1er juin 2000 et signifié par huissier le 4 juin suivant, d'où il résultait qu'à la date de la citation, délivrée le 11 juin 2010, la carence reprochée au prévenu n'était pas caractérisée, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 227-3 du code pénal, ensemble les textes visés au moyen ;
" 4°) alors, enfin, que le caractère volontaire du défaut de paiement d'une pension alimentaire, élément constitutif du délit de l'article 227-3 du code pénal, ne se présume pas et doit être constaté par les juges du fond ; qu'en se bornant à relever que M. X...n'établissait pas avoir payé à la date fixée les pensions alimentaires des mois de mars, avril et mai 2010 dont il était débiteur et que son abstention avait suivi une période de carence de plus de deux mois consécutifs puisque les pensions des mois de décembre 2009, janvier et février 2010 avaient également été payées avec retard, pour en déduire que le délit de l'article 227-3 du code pénal était constitué sans caractériser l'élément intentionnel de l'infraction, qui ne peut être déduit du seul défaut de paiement, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 227-3 du code pénal et violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué, et du jugement qu'il confirme, mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel, le délit d'abandon de famille dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six novembre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;