La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2013 | FRANCE | N°12-19608

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2013, 12-19608


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société CECOP le 10 septembre 2002 suivant contrat à durée indéterminée pour y exercer les fonctions de directeur de clientèle, catégorie cadre ; que par lettre recommandée du 10 septembre 2008 un avertissement lui a été notifié au motif que le chiffre d'affaires qu'il s'était engagé à apporter n'avait jamais été atteint et avait baissé d'année en année de

puis 2005 jusqu'à être réduit à zéro en 2008 ; que convoqué le 7 novembre 2008 à un en...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société CECOP le 10 septembre 2002 suivant contrat à durée indéterminée pour y exercer les fonctions de directeur de clientèle, catégorie cadre ; que par lettre recommandée du 10 septembre 2008 un avertissement lui a été notifié au motif que le chiffre d'affaires qu'il s'était engagé à apporter n'avait jamais été atteint et avait baissé d'année en année depuis 2005 jusqu'à être réduit à zéro en 2008 ; que convoqué le 7 novembre 2008 à un entretien préalable en vue de son licenciement, M. X... a été licencié par lettre recommandée du 24 novembre 2008 au motif qu'il n'avait réalisé aucun chiffre d'affaires pour l'année 2008 à l'exception d'une facturation de 307,00 euros prise en charge par le service ventes par correspondance ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à voir condamner la société CECOP au paiement de diverses sommes au titre notamment de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à ce que la société CECOP soit condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que malgré des mises en garde répétées et un allégement de ses tâches, M. X... n'avait réalisé aucun chiffre d'affaires entre le 10 septembre, date de l'avertissement, et la date de son licenciement, que l'absence totale de chiffre d'affaires qui faisait suite à plusieurs années d'insuffisance de résultats et des mises en garde répétées caractérisait une insuffisance professionnelle, que si, comme l'a relevé le Juge départiteur, une faute qui a motivé un avertissement ne peut plus fonder un licenciement, l'employeur n'en a pas moins le droit de prendre en considération des faits déjà sanctionnés à l'appui d'une nouvelle sanction en cas de persistance du comportement fautif du salarié, que la persistance du salarié dans cette inertie constituait un élément nouveau qui pouvait être pris en compte cumulativement avec les faits de même nature ayant motivé l'avertissement même à supposer que la non atteinte des objectifs puisse être considérée comme une faute passible de sanction disciplinaire et non comme une composante de l'insuffisance professionnelle ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'aucune des parties n'avait évoqué dans ses conclusions le grief d'insuffisance professionnelle , la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande tendant à ce que la société CECOP soit condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 21 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société CECOP aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société CECOP à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... (salarié) de sa demande tendant à ce que la société CECOP (employeur) soit condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 60000 euros ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... est entré au service de la société CECOP le 10 septembre 2002 pour y exercer les fonctions de directeur de clientèle, catégorie cadre ; qu'un avertissement lui était notifié au motif que le chiffre d'affaires qu'il s'était engagé à apporter n'a jamais été atteint et a baissé d'année en année depuis 2005 jusqu'à être réduit à zéro en 2008 ; que ce courrier précisait que les différents entretiens qui avaient eu lieu avec la Direction n'avaient pas permis d'obtenir des éclaircissements sur son manque de motivation et de résultats sans oublier les retards journaliers à son poste de travail ; qu'il a été licencié par lettre du 24 novembre 2008 au motif qu'il n'avait réalisé aucun chiffre d'affaires pour l'année 2008 à l'exception d'une facturation de 307 euros prise en charge par le service Ventes par correspondance ; que Monsieur X... soutient que son poste s'était peu à peu transformé et que, de directeur de clientèle, il était devenu directeur de production et avait d'ailleurs été rattaché au service achats, et non plus au services ventes ; qu'il résulte de l'attestation de Madame Y..., directeur administratif et financier, que « le rattachement de Monsieur X... au service Achats correspondait à une simple contrainte administrative, de comptabilité par secteur, afin d'éviter que M. Z..., responsable des ventes, soit commissionné sur son chiffre d'affaires les coûts afférents à M. X... étant affectés alors à son secteur » ; que Madame A..., responsable du service « Achats » certifie que M. X... n'a jamais exercé d'activité pour son service et que son activité pour l'ouverture du bureau de HONG KONG était accessoire à celle de directeur de clientèle ; qu'il résulte de la note d'organisation du service « achats » du 23 janvier 2006, produite par le salarié, que c'est une prénommée Tina qui assurait l'interface avec les commerciaux, Messieurs B... et X..., ce qui va à l'encontre des allégations de ce dernier selon lesquelles il aurait exercé de fait les fonctions de directeur de production ; qu'il résulte du contrat de travail de M. X..., qui n'a jamais été modifié, que celui-ci avait été recruté en qualité de directeur de clientèle responsable du développement et de la fidélisation d'un portefeuille clients et devait réaliser un chiffre d'affaires annuel dont le montant initial était de 610000 euros réévalué chaque année ; que Monsieur X... ne conteste pas qu'il n'a réalisé aucun chiffre d¿affaires pour l'année 2008 bien que sa hiérarchie l'ait alerté à plusieurs reprises au cours de cet exercice sur cette absence de résultat et lui ait infligé un avertissement le 10 septembre pour sanctionner son manque de motivation et de résultats et l'exhorter à se reprendre ; qu'il résulte de l'attestation de Madame C..., responsable de la comptabilité client, qui l'avait assisté lors de l'entretien préalable, que son supérieur hiérarchique, M. D..., avait déchargé M. X... de toute mission sur le bureau de HONG KONG pour lui permettre de se concentrer sur son emploi de directeur de clientèle ; que malgré ces mises en garde répétées et ce délestage, Monsieur X... n'a réalisé aucun chiffres d'affaires entre le 10 septembre et la date de son licenciement ; que l'absence totale de chiffre d'affaires qui fait suite à plusieurs années d'insuffisance de résultats et des mises en garde répétées caractérise une insuffisance professionnelle ; que la persistance de Monsieur X... dans cette inertie constitue un élément nouveau qui peut être pris en compte cumulativement avec les faits de même nature ayant motivé l'avertissement même à supposer que la non atteinte des objectifs puisse être considérée comme une faute passible de sanction disciplinaire et non comme une composante de l'insuffisance professionnelle ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE la seule insuffisance de résultats ne peut en soi constituer une cause de licenciement ; qu'elle doit résulter, soit d'une insuffisance professionnelle, soit d'un comportement fautif ; que constitue un licenciement pour faute, exclusif d'une insuffisance professionnelle, le licenciement d'un salarié par un employeur qui a motivé sa lettre de licenciement en lui reprochant d'avoir perdu la quasi-totalité de ses clients et de n'en avoir gagné aucun, et qui, en outre, a, antérieurement à cette lettre, en premier lieu, adressé au salarié une lettre d'avertissement pour insuffisance de résultat au titre des mêmes exercices que ceux visés par la lettre de licenciement, lettre dans laquelle il avait indiqué « Le cas échéant, sans ressaisissement très rapide de votre part, dans la mesure où vous ne réalisez pas votre part du contrat nous serons obligés d'envisager des sanctions plus graves », et, en second lieu, envoyé au salarié une lettre de mise à pied conservatoire en indiquant « Nous envisageons de prendre à votre encontre une sanction disciplinaire », ces derniers termes visant le licenciement intervenu par la suite ; qu'en décidant que le licenciement n'était pas de nature disciplinaire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L1232-6 et L1232-1 du Code du travail ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE la seule insuffisance de résultats ne peut en soi constituer une cause de licenciement ; qu'elle doit résulter, soit d'une insuffisance professionnelle, soit d'un comportement fautif ; que le juge qui a retenu l'existence d'une insuffisance professionnelle doit vérifier, par une décision motivée, que celle-ci repose sur des faits matériels, objectifs, précis et vérifiables ; qu'en s'abstenant de constater la réalité de tels faits, la Cour d'appel, qui s'est bornée à constater l'insuffisance professionnelle par la voie d'une simple affirmation, a privé sa décision de base légale au regard des articles L1232-6 et L1232-1 du Code du travail ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige; qu'il résulte des conclusions d'appel de Monsieur X... et de la société CECOP et du récapitulatif des prétentions des parties figurant dans l'arrêt attaqué, qu'aucune des parties n'avait invoqué une quelconque insuffisance professionnelle, ni n'avait contesté le caractère disciplinaire du licenciement ; qu'en relevant que la rupture était fondée, non sur une faute du salarié mais sur une insuffisance professionnelle, la Cour d'appel a modifié l'objet du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE le juge doit faire respecter, et respecter lui-même la contradiction des débats ; qu'il ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à en débattre contradictoirement, au besoin en prononçant la réouverture des débats ; qu'en relevant d'office le moyen tiré d'une insuffisance professionnelle sans avoir invité les parties à en débattre contradictoirement, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE CINQUIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE les mêmes faits ne peuvent être sanctionnés deux fois ; qu'en relevant que la lettre de licenciement ne sanctionnait pas les mêmes faits que la lettre d'avertissement quand les deux courriers visaient de façon identique une diminution progressive du chiffre d'affaires à partir de 2005 jusqu'à devenir nul en 2008, la lettre de licenciement ajoutant seulement, sans que cela ne soit de nature à aggraver les griefs de l'avertissement, que le faible chiffre d'affaire réalisé en 2008 n'était pas comptabilisé comme tel dès lors qu'il était inférieur à 800 euros, ce dont il se déduisait que les mêmes faits avaient été sanctionnés deux fois, la Cour d'appel a violé la règle Non bis in idem, ensemble l'article L.1235-1 du Code du Travail ;
ALORS, DE SIXIEME PART, QUE les juges ne peuvent débouter les parties de leurs prétentions sans examiner les éléments produits au soutien de celles-ci ; qu'en se bornant à relever que l'exposant n'était pas devenu, comme il le soutenait, directeur de production au service Achats, mais était demeuré directeur de clientèle au service Ventes, en s'abstenant d'examiner les bulletins de salaire versés aux débats par Monsieur X... et invoqués dans ses conclusions d'appel, desquels il ressortait que, si le bulletin de salaire du mois de décembre 2007 mentionnait encore, au titre de l'emploi du salarié, la mention de sa qualification de « directeur de clientèle » au sein du département « VENTES », en revanche, ceux des douze mois de l'année 2008 et des deux premiers mois de l'année 2009 comportaient la mention du département « ACHATS » à la place du département « VENTES », la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE SEPTIEME PART, QU'il appartient à l'employeur qui conteste la mention relative à l'emploi portée sur le bulletin de paie, de rapporter la preuve de son inexactitude au regard des fonctions exercées par le salarié ; qu'en s'abstenant d'exiger de la société CECOP qu'elle démontre que Monsieur X... exerçait encore une fonction de responsable de clientèle au sein du département « Ventes » à partir du 1er janvier 2008, contrairement aux mentions des bulletins de salaire qui, pour cette période, portent l'indication du département « Achats », la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article R 3243-1, 4° du Code du travail ;
ET ALORS ENFIN QUE Monsieur X... avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, que la société CECOP avait, après plusieurs demandes de sa part, mis en adéquation ses bulletins de salaire avec les fonctions réellement exercées en remplacement de la mention du département « Ventes » par celle du département « Achats » à partir du 1er janvier 2008, ce dont il se déduisait que cette nouvelle mention correspondait aux fonctions réellement exercées en l'absence de preuve contraire ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-19608
Date de la décision : 06/11/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Versailles, 21 mars 2012, 11/00596

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 21 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2013, pourvoi n°12-19608


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.19608
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award