LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Cécile X..., épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-9, en date du 13 septembre 2012, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. Yousry A... du chef d'agression sexuelle ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 septembre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Moignard conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller MOIGNARD, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BOCCON-GIBOD ;
Vu les mémoires en demande et en défense produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 222-22, 222-27 du code pénal, 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Mme Y...de sa demande en réparation des préjudices subis du fait de l'agression sexuelle reprochée à M. A... ;
" aux motifs que la sincérité des propos de Mme Y...n'est ici pas en cause mais que la cour constate qu'il n'existe au dossier aucun élément permettant d'établir que des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale soient imputables à M. A... ; que les faits dénoncés n'ont pas eu de témoin, aucune trace quelconque de violence n'a pu être mise en évidence, que le drap décrit par Mme Y...n'a pas été retrouvé et que la réponse de M. A... rapportée par une personne des pages jaunes : " C'est pas moi, c'est pas moi ", sans que la phrase d'introduction soit connue, est trop ambiguë pour que l'on puisse en déduire la preuve d'un aveu de M. A... de faits commis sur la personne de Mme Y...;
1°) " alors que, s'il appartient aux tribunaux d'apprécier les circonstances qui peuvent dépouiller les faits de leur caractère délictueux, leurs appréciations à cet égard ne sont souveraines qu'autant qu'elles ne sont pas en contradiction avec les faits constatés et avec le caractère légal qui appartient à ces faits ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la sincérité de Mme Y..., qui dénonçait des actes d'agression sexuelle commis sur elle par M. A..., n'était pas mise en cause ; qu'en retenant néanmoins, pour déclarer que les faits reprochés à ce dernier n'étaient pas prouvés, qu'il n'existait au dossier aucun élément permettant d'établir ces faits, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
2°) " alors que Mme Y...a fait valoir qu'elle avait été mise en arrêt maladie après les faits dénoncés, puis licenciée pour inaptitude ; qu'elle a versé aux débats des ordonnances médicales et attestations établissant la dégradation de son état de santé après l'agression sexuelle qu'elle avait subie dans l'exercice de son activité professionnelle ; qu'elle se prévalait aussi de ce que la psychiatre ayant examiné M. A... faisait état de " pulsions sexuelles mal contrôlées " ; qu'en se bornant à retenir que les faits n'avaient pas été commis en présence d'un témoin et que le prévenu n'avait pas avoué les avoir commis, sans s'expliquer sur les éléments susvisés produits par la partie civile, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour débouter la partie civile de ses prétentions l'arrêt attaqué énonce que la sincérité des propos de Mme Y...n'est pas en cause mais que la cour constate qu'il n'existe au dossier aucun élément permettant d'établir que des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale soient imputables à M. A... ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions qui faisaient état des conséquences médicales sur la plaignante et du constat de l'expert psychiatre ayant examiné M. A..., la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 13 septembre 2012, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-trois octobre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;